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Les techniques de l’ingénierie génétique

A. DE LA RÉVOLUTION GÉNÉTIQUE À LA MODIFICATION DU GÉNOME

I. De la révolution génétique

2. Les techniques de l’ingénierie génétique

Si les théories de l’hérédité tentent d’expliquer les lois de celle-ci, l’ingénierie génétique communément, appelée génie génétique est un agrégat de techniques, ayant pour objet l’utilisation des connaissances acquises sur les lois de la génétique pour reproduire, ou modifier le génome des êtres vivants. L’ingénierie génétique est un champ hyperactif de la recherche avec des applications possibles et multiples, notamment en santé humaine, pour corriger les gènes défectueux, produire des protéines thérapeutiques, pour produire des plantes génétiquement modifiées en agriculture et surtout pour prospecter le rôle d’un gène après l’avoir localisé.

2.1. La localisation des gènes

Déterminer la localisation des gènes est une phase très importante si on doit changer ou réparer un gène défaillant par hérédité. Le projet de la localisation a été mis en place par une équipe de généticiens, de biochimistes et de biologistes cellulaires à l’Université Yale dirigée par le géant Frank Ruddle. L’équipe de Ruddle parvint à découvrir le premier gène humain en 1970. Cependant, la localisation du gène n’était pas leur priorité. Il leur

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importait avant tout de repérer le rôle de ce dernier. En 1997, après avoir localisé plus de deux cents gènes, l’équipe conclut que le rôle d’un gène est de porter l’information nécessaire à la production d’une enzyme. Le gène serait un segment d’ADN transmis héréditairement et participant donc à la synthèse d’une protéine correspondant à un caractère bien déterminé. Ils sont arrivés à déterminer approximativement en de nombreux cas l’emplacement des gènes sur le chromosome. Le repérage des gènes n’était pas dû à l’étude spécifique de ceux-ci, qui était jusque-là irréalisable voire impossible, mais à l’étude ou à l’analyse des produits enzymatiques créés par chaque gène.

L’équipe de Ruddle avait estimé qu’elle parviendrait à la localisation d’un millier de gènes humains vers 1980. Mais, ce qui nous paraît aussi important à souligner chez Ruddle et son équipe est le rôle joué par quelques gènes repérés dans certains troubles génétiques tels que la maladie de Tay-Sachs et le syndrome de Lesch-Nyhan parmi ceux qui ont été jusque-là repérés58. Toutefois, il importe de noter au passage que la technique de localisation de Ruddle n’aurait pas été possible sans celle de la fusion des gènes mise en place par George Baski de l’Institut Gustave Roussy de Paris. La technique de fusion des gènes consiste à manipuler les gènes en fusionnant deux cellules différentes après la découverte du virus « Sendai » qui permet de réunir des cellules. Outre la technique de la fusion cellulaire en 1960, Mary Weiss et Howard Green ont réussi à fondre en un tout des cellules de souris et d’homme en 1967. Cette fusion cellulaire séduisit l’équipe de Frank Ruddle. Ainsi, de la modélisation à la localisation des gènes, les généticiens parvinrent à des adjonctions cellulaires et à la production de gènes en série. Nous savons que l’isolement systématique des divers chromosomes humains avait facilité la localisation des gènes spécifiques par l’équipe de Howard Green à New York. Mais, il est à noter qu’en 1971, l’équipe de Henry Harris à Oxford avait émerveillé les milieux scientifiques en faisant disparaître une tare génétique dans une cellule de souris. Cette tare consistait à l’impossibilité de fabriquer une enzyme déterminée. On retrouve la même tare chez les hommes dans le syndrome de Lesch-Nyhan. Sans s’attarder sur la description de ce processus de fusion cellulaire, la

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revue Nature New Biology conclut qu’au moins en principe, on pouvait envisager de soigner à partir de cette technique les cellules humaines présentant des défauts génétiques59.

2.2. La technique de l’hybridation cellulaire

L’hybridation cellulaire ou la fusion cellulaire est la formation in vitro d’une cellule hybride par l’union de deux cellules de types différents. La cellule hybride renferme ainsi le contenu des deux cellules initiales au sein d’une seule membrane. En 1974, la fusion cellulaire découverte par une équipe du Colorado, séduisit les scientifiques et fut un autre exploit60. Les résultats du groupe du Colorado révélèrent la possibilité d’introduire des noyaux jeunes au sein de vieilles cellules, des noyaux sains à l’intérieur de cellules malades. Cette technique avait pour résultat une méthode de l’infiltration ou de la transduction qui consiste à transporter des gènes dans les cellules au moyen de virus inoffensifs. Cette technique de transduction aura pour corollaire le remplacement des gènes responsables des tares génétiques par l’introduction des gènes adéquats. En guise d’exemple, les cellules des diabétiques sont défectueuses parce qu’elles ne contiennent pas la forme correcte du gène qui fabrique l’insuline. Il est possible que la transduction puisse être un remède et par conséquent guérisse le diabète61.

2.3. La couture génétique

Outre la technique de la fusion ou de l’adjonction cellulaire pour produire des gènes en série, la couture génétique a suscité plus d’espoir et a connu un succès considérable. Celle-ci consiste à enrouler en cercle les gènes et à les réunir à nouveau après avoir tenté de les séparer en ajoutant des fragments d’organismes nouveaux. La couture génétique n’a d’autre objectif que de faire la preuve de la possibilité de transplanter l’information génétique en vue de faire apparaître des organismes entièrement nouveaux. C’est dans cette perspective qu’une équipe de chercheurs des Universités Stanford et de Californie ont réussi à transplanter des gènes de crapaud dans la bactérie Escherichia coli abondante dans l’intestin humain et souvent utilisée dans les laboratoires. L’autre procédé

59A.G. Schwartz, P.R. Cook, Henry Harris, «Correction of a Genetic Defect in a Mammalian Cell», in Nature new biology, N° 230, March 1971.

60 Harold M. Schemeck Jr., « The Promise of Gene Therapy», New York Times, 10 November 1985. 61 James J. Nagle, «Genetic engineering», Bulletin of the atomic scientists, December 1971, p.43-44.

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de création des gènes chimères est l’ingénierie des plasmides. Les plasmides sont définis comme « des molécules circulaires d’ADN extra-chromosomiques naturellement présentes

dans de nombreuses espèces bactériennes »62. Par exemple, les souches naturelles de la bactérie intestinale, Escherichia coli contiennent plusieurs plasmides. Les plasmides portent souvent des gènes qui codent des activités métaboliques avantageuses pour l’hôte bactérien. Les scientifiques ont découvert ainsi une enzyme qui parvient à faire fendre l’anneau d’ADN pour introduire des gènes étrangers. Cet anneau d’ADN est ainsi modifié pour être introduit dans une nouvelle forme de vie. La nouvelle forme est porteuse du programme héréditaire contenu dans les plasmides modifiés63. L’une des perspectives de la couture génétique est de fabriquer des bactéries susceptibles de stimuler la croissance des céréales. Cependant, les plasmides sont connus pour être des vecteurs de clonage des gènes64. Le vecteur est entendu ici dans le sens de transporteur.