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symbolique constitueraient un pare excitation au psychotraumatisme La socialisation et la construction symbolique permettrait à l’officier de supporter des situations périlleuses.

Les traditions, chants, décorations, les saluts, les hiérarchies, les uniformes…, le fait de vivre au sein des autres, manger ensemble, dormir ensemble, vivre ensemble, sortir ensemble formateraient le sujet à l’institution par la déformation de l’identité civile et intègreraient le sujet au collectif en lui offrant une identité et une appartenance. S’élabore une forme de dépendance à l’autre…, le rapport au manque. En effet, selon Freud, le besoin d’appartenance à une communauté se génère des conditions d’éducation et de manque de sécurisation du

Moi

primaire. L’armée comblerait en partie le manque individuel par la stratégie, le pouvoir, les idéaux, voire les fantasmes. Ainsi, peut- on dire que l’armée se nourrirait du manque à

l’objet du sujet. L’armée ferait donc croire à la complétude du manque.

Le lien social historique militaire est crée sur une identification à un idéal groupal, commun, celui de sauver et protéger. Il se nourrit de l’idéal du COMMUN, c'est-à-dire du COMME UN, soit que tous ensemble il y a une unité, une cohésion, une similitude et identification entre les tous. C’est ce qu’on appelle en psychanalyse le

pousse au manque

, et la recherche de la complétude, qui vient donner ici l’illusion que cette complétude est rencontrée dans ce groupe militaire.

L’idée que l’autre sera là pour aider, secourir, promulgue la cohésion. Ainsi, un déménagement ne sera pas suivi d’un isolement, car il y aura toujours un maillage militaire de soutien… Des repas, des sorties sont proposés. D’ailleurs, traditionnellement, une part du

devoir de socialisation est attribuée à la femme de l’officier : recevoir, organiser des réunions… soutenir les familles dont les maris et les pères sont en déplacement… Il existe aussi les centres de vacances spécialisés comme l’IGESA35…, les stages « globule rouge » des pilotes pour améliorer leur sang en vol (sorties au ski)… Mme Léon parle de création de

sous mondes

, au sein de l’armée. Ces

sous mondes

sont répartis en différents types d’activités officielles ou officieuses, mais participent de la construction du militaire, grâce à la

désindividuation, la pseudospéciation…

Donc lorsque le militaire est soumis au psychotraumatisme, son monde et ses

sous mondes

auraient fonction de soutien. Ceci n’est pas toujours élaboré de manière consciente. Pourtant ce soutien à la fois concret et symbolique se révèle toujours efficace.

Mais, ce soutien aurait un prix, le militaire se sentirait redevable. L’individu pourrait être en dette toute sa vie, et en dette36 pour sa communauté, pour laquelle il vit, dans laquelle il vit. Une des façons de rembourser cette dette serait de nourrir l’endogamie.

Une dé-identification et une ré identification

Intégrer l’armée colle l’individu à une systémique absorbant l’identité civile. Sont destitués ses vêtements, ses références civiles tant qu’il est dans l’institution. Sont attribués uniforme, grade, fonction, pour offrir une identité militaire. Se met en place dès l’engagement une dichotomie des identités, rôles, tâches, allures extérieures. Petit à petit, cette nouvelle identité gagnée pour et procurée par ce nouveau groupe d’incorporation (le corps incorpore un élément qui lui semble sain) s’amplifiera et débordera sur la vie civile. Les collègues attribuent rapidement un surnom au sujet qui peut aussi être nommé « fistot » d’un parrain d’une promotion n+1. Ainsi, le système militaire introduit une nouvelle dynamique familiale.

L’identité militaire va prédominer sur l’identité civile, le groupe militaire va être priorisé sur le groupe famille. En quelques temps, l’individu est passé d’un groupe civil à l’appartenance à un groupe militaire auquel il doit solidarité, cohésion. Se joue là une métamorphose de la culpabilité primaire de l’individu vers une référence au parent (institution) auquel il doit obéir, et pour lequel il se sacrifierait (position sacrificielle pour sauver l’autre, le grand Autre, la mère).

L’individu concède désormais à deux systèmes généalogiques, transmis par sa famille d’origine et assigné par l’armée.

35 Institut de Gestion Sociale des Armées, Opérateur social du Ministère de la Défense 36 (Paturet, 2009 : 93).

« Roberto Esposito développe ensuite l’idée que si les sujets de la communauté sont unis par une dette, un devoir, cela signifie qu’ils ne « sont pas entièrement leurs propres maîtres », car un devoir les exproprie de leur propriété la plus propre, c'est-à-dire de leur subjectivité même »

L’anonymat, la désindividuation

Celui qui se bat le fait rarement en son nom mais au profit ou sous le nom d’un groupe et de ses intérêts. L’individu perd son identité individuelle et favorise l’identification collective.

L’anonymat favoriserait la liberté d’être violent. Ne pas être reconnu, identifié en tant que

personne, sujet, désengagerait à respecter l’autre et libèrerait les pulsions agressives, primitives37. Alors le groupe entier pourrait passer à l’acte : dans

Lord of the flies

(

Monseigneur des mouches

, 1962), de William Golding, les enfants ne peuvent se mettre à chasser et tuer le cochon s’ils ne se sont pas grimés. Ils se recouvrent pour oublier un peu leur identité, et se stimuler. Cet anonymat conduit petit à petit la personne à se fondre dans le groupe : cette désindividuation amène l’individu à être membre du collectif et oublier son individualité.

L’individu ressent devoir et culpabilité vis-à-vis du collectif. Se dissocier, c’est se séparer et mettre en danger le collectif donc le tuer et se tuer avec. Persiste donc une notion d’impossible séparation et se crée un enchevêtrement de multi identifications, maillant le sujet dans un filet à la fois contenant et enfermant. L’armée ferait primer le collectif, sur

l’individuel, le groupe sur le sujet. Elle organiserait l’identification au groupe par les processus d’anonymat, de désindividuation, de pseudospéciation. Elle créerait un système d’emprise afin de le protéger et le préparer à l’impact de l’évènement psychotraumatisant.

De la pseudospéciation

Ensuite, intervient le processus de pseudospéciation, qui conduit les individus d’une communauté à considérer les autres comme « non », ou « faux », ou « pas vrai » ou « pas tout à fait » militaire. En effet, on constate une différenciation et un rejet de ceux qui ne sont pas considérés à la hauteur de l’idéal du groupe, et en tout cas de l’en commun du groupe. Les individus du collectif peuvent tout à fait considérer celui qu’ils trouvent différent comme individu à persécuter, à détruire, à exclure : position sacrificielle de l’Un commun. Il a pour mission tacite de lier et liguer le groupe : à travers l’agressivité dirigée sur une mono-victime sacrificielle, se régénère la cohésion groupale. C'est-à-dire qu’il n’y a plus de filtre, de distance posée, de temps de réflexion, pour la médiation. On passe de la suspicion à l’attaque. Tout autre est différent, donc dangereux.

37 (Paturet, 2009 : 80).

Triste exemple, à propos des camps de concentration, M. Paturet rappelle que « L’Etat nazi ne recherchait pas seulement l’efficacité

matérielle et financière mais surtout à protéger les tueurs de la culpabilité œdipienne en les éloignant de leurs victimes et en répartissant le meurtre en une infinité de tâches modestes où tous participaient à la mise à mort sans jamais la donner réellement et personnellement. »

On retrouve ce phénomène dans tous les groupes, et dans tous les milieux professionnels, mais aussi entre les différents sous mondes des militaires : l’autre n’est pas un bon militaire38, seul ceux du groupe le sont (idéal du militaire,

Idéal du Moi

)… : Il y a donc

toujours UN différent, et un processus de pseudospéciation en cours afin de maintenir une

tension vitale, une énergie créatrice, ou destructrice, un lien social.

Il y a forcément également dans le groupe un modérateur des tensions. Ce modérateur est officiellement l’officier.

Principes, rites et symboliques militaires

Les rites et traditions militaires sont entretenus et font

« converger en un point l’attention des

troupes. Lorsque les troupes peuvent être unies de cette façon, le brave ne peut avancer seul,

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