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maillon d’une chaîne Chaque maillon est nécessaire La résistance de la chaîne est celle du maillon le plus faible Voilà la triple réalité dont chaque jeune honnête, et à fortiori, chaque

chrétien, doit être convaincu. »

Général de corps d’armée Delaunay(1993 : 39)

Mourir pour la patrie

: le sacrifice du militaire

« Lorsque le Christ a libéré les hommes du poids du péché originel, en sacrifiant sa propre

vie, nous sommes en droit de conclure que ce péché avait consisté dans un meurtre. (…) Un

meurtre ne peut être expié que par le sacrifice d’une autre vie ; le sacrifice de soi même

signifie l’expiation pour un acte meurtrier. (…) Et lorsque ce sacrifice de sa propre vie doit

amener à la réconciliation avec Dieu le Père, le crime à expier ne peut être autre que le

meurtre du père».

(Freud, 1932 : 216)

Les origines du sacrifice et de la position sacrificielle s’étudient tant d’un point de vue historique que subjectif. Loin de réaliser un inventaire historique de la notion de sacrifice, ce sont plutôt les références symboliques qui intéressent cette recherche. C’est pourquoi la

courte illustration qui suit sera considérée à titre d’exemples extraits de l’histoire, et non comme démonstration scientifique.

L’attachement de la patrie à la religion est historique et persiste dans de nombreux systèmes politiques. Ernst Kantorowicz (1895 – 1963)25 étudia les origines médiévales du sacrifice et de la culture à la lumière de la législation : L’avènement de la société occidentale, basée sur le juridique médiéval issue du droit et de la pensée justinienne éclaire l’influence de la religion catholique sur la pensée militaire européenne (Kantorowicz26).

Pendant des siècles, le combattant fut glorifié. Selon Kantorowicz et d’autres tels Périclès, Cicéron, Horace… les guerriers morts pour la patrie étaient des héros, vertueux, méritants, puissants, érigés au rang d’immortels, de mythes… :

quasi-déification du héros

guerrier

par les grecs et les romains cinq siècles avant Jésus Christ (Kantorowicz, 2004 : 131). La patrie signifiait cité :

mourir pour la patrie

, c’était protéger les citoyens polythéistes lesquels, en échange, les honoraient, admiraient, vénéraient. Ces morts s’intégraient dans les récits populaires et devenaient intemporels tels Achille, Spartacus, Jules César…

A l’époque féodale, les esprits se modifièrent avec l’avènement d’une culture religieuse monothéiste et omnipotente. Le Christianisme stoppa la glorification des guerriers qui se sacrifiaient au nom de Dieux qui n’existaient pas. Pourquoi déifier un combattant qui se dévouait à une cause fausse ? Cette religion positiva à son tour le sacrifice humain27 : « Gloire

à toi notre seigneur au plus haut des cieux ». Ainsi, sacrifier le

bétail

(en référence à Legendre) pour Dieu et la patrie s’aliéna aux besoins idéologiques, dogmatiques devenus prioritaires. Saint Augustin28 valorisa le sacrifice pour un Dieu unique. A l’instar de la guerre

25Ernst Kantorowicz est un historien allemand, émigré aux Etats Unis en 1938, naturalisé américain, il enseigne en Université et fait de la recherche sur la théologie politique notamment du moyen-âge

26.(Kantorowicz, 2004 : 130, 131)

« Noël 1914, la Belgique est occupée par les armées allemandes. Le cardinal Mercier, primat ultra patriote de Belgique, est alors (…) le champion de la résistance intellectuelle de son pays à l’occupant. Pour conforter ses ouailles et encourager ses compatriotes, le cardinal distribue le jour de Noël 1914, sa célèbre lettre pastorale intitulée Patriotisme et endurance. Il y développe quelques idées provocantes sur les rapports entre patriotisme et religion, et aussi sur les conséquences de la mort au champ de bataille pour la vie dans l’au-delà. « Qui ne ressent pas que le patriotisme est « béni » et qu’une agression contre la dignité nationale est une sorte de profanation sacrilège ? ». On avait demandé au cardinal si le soldat tombé au service de la juste cause (…) était un martyr. Le prince de l’Eglise se vit dans l’obligation de répondre que, d’un point de vue strictement théologique, le soldat n’était pas un martyr, puisqu’il mourait les armes à la main, alors que le martyr se livrait sans résistance à ses bourreaux. « Mais si vous me demandez ce que je pense du salut éternel d’un homme courageux, qui donne volontairement sa vie pour défendre l’honneur de son pays et pour venger la Justice bafouée, je n’hésite pas à répondre qu’il ne fait aucun doute que le Christ couronne la valeur militaire, et que la mort chrétiennement acceptée assure au soldat le salut de son âme… le soldat qui meurt pour sauver ses frères, pour protéger les foyers et les autels de son pays, réalise la plus haute forme d’amour… nous sommes en droit d’espérer pour eux la couronne immortelle qui ceint le front des élus. Car la vertu d’un acte d’amour parfait est telle que, d’elle-même, elle efface une vie entière de pêché. D’un pêcheur, elle fait instantanément un saint »

27 ( Kantorowicz, 2004 : 131)

« Le 25 mars 1915, le cardinal Billot, français et patriote, critiqua sévèrement les paroles de son confrère du Sacré Collège. « Dire que le seul fait de mourir volontairement pour la juste cause de la patrie suffit pour assurer le salut signifie que l’on substitue la Patrie à Dieu… » »

sainte, les chefs religieux valorisèrent le Mort pour une cause Juste29. La patrie devint, d’une part une terre religieuse à développer, et d’autre part une cité politique soumettant le sujet à une loyauté de service (devoir).

« Le sacrifice politique d’un chevalier eût été plutôt

personnel et individuel que public ; il s’agissait d’un sacrifice personnel découlant de la

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