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C. La personne cherchant protection

III. Structure de l’étude

13. Dans le premier chapitre, nous exposerons le thème de la preuve, c’est-à-dire le fait qui doit être prouvé pour entraîner l’application du principe de non-refoulement. Nous commencerons par clarifier le cadre légal concernant le principe de non-refoulement, puis nous examinerons la notion de preuve et ses particularités dans ce contexte. Dans le deuxième chapitre, nous traiterons de l’évaluation du risque à travers les différents tests établis pour évaluer celui-ci, des facteurs de risque et des éléments permettant d’écarter le risque. Puis dans le troisième chapitre, nous analyserons les règles de preuve applicables dans le cadre du principe de non-refoulement.

Nous évoquerons ainsi les règles applicables concernant l’établissement des faits, le fardeau de la preuve et le niveau de la preuve. Dans le quatrième chapitre, nous approfondirons les moyens de preuve. Nous verrons quels

18 CRÉPEAU (1995), p. 29.

19 BELORGEY (2016), p. 23; POSSE-OUSMANE/PROGIN-THEUERKAUF (2015), N 2 ad art. 2 LAsi.

20 GIL-BAZO (2015), p. 4.

21 WOUTERS (2009), p. 24.

22 Voir dans le même sens WOUTERS (2009), p. 47.

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moyens sont admissibles, à quel moment ils doivent être présentés et plusieurs d’entre eux seront étudiés en détail. Enfin, nous proposerons en guise de conclusion générale un résumé des conclusions des quatre chapitres de la thèse.

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persécution, de torture ou de mauvais traitement

Introduction

14. Dans ce premier chapitre, il s’agira de déterminer le thème de la preuve dans le contexte du principe de non-refoulement, c’est-à-dire le fait qui doit être prouvé afin de déclencher l’application de ce principe. La question centrale concernant l’interdiction de refoulement consiste à déterminer si la personne encourra, en cas de renvoi, un risque de persécution, de torture ou de mauvais traitement.23 Avant de définir le thème de la preuve, il apparaît toutefois opportun de clarifier le cadre légal applicable. Nous aborderons ainsi le principe de non-refoulement, tel qu’il est garanti en droit international des réfugiés ainsi qu’en droit international des droits de l’homme. Ceci nous permettra également d’examiner comment le droit constitutionnel suisse et le droit suisse des migrations consacrent ce principe. Dans un deuxième temps, nous analyserons la notion de preuve et ses différentes composantes, à savoir les règles de preuve, soit le fardeau de la preuve et le niveau de la preuve, de même que les modes de preuve. La notion de présomption sera également envisagée, étant donné son importance dans le contexte du principe de non-refoulement. La troisième section de ce chapitre sera dédiée à la particularité de la notion de preuve dans le contexte du principe de non-refoulement, puisqu’il ne s’agit pas de prouver un fait mais d’établir un risque. Dans les quatrième et cinquième sections, nous distinguerons le risque de persécution du risque de torture, ou de traitement ou peine cruel inhumain ou dégradant. Après avoir ainsi identifié le thème de la preuve dans le cadre du principe de non-refoulement, nous traiterons dans le deuxième chapitre de l’évaluation du risque.

I. Cadre légal : le principe de non-refoulement

15. Le principe de non-refoulement interdit, en termes généraux, le renvoi forcé direct ou indirect d’une personne vers un Etat où elle encourt le risque d’être soumise à des persécutions, des actes de torture ou des mauvais

23 Voir dans ce sens THOMAS (2007), p. 51.

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traitements, qu’il s’agisse de son Etat d’origine, de résidence ou de tout autre Etat.24 Ce principe met en présence des enjeux importants : une décision incorrecte, refusant son application à une personne qui devrait y avoir droit, peut mener celle-ci à la détention, la torture, des violations graves des droits fondamentaux, voire la mort.25 L’objet et le but du principe de non-refoulement consistent ainsi dans la prévention de violations des droits humains.26 Cette interdiction est de nature prospective et ne vise pas à réparer de telles violations qui ont eu lieu par le passé.27 L’Etat en cause est responsable de ne pas mettre la personne concernée dans une situation de risque de violation de ses droits humains dans un autre Etat ; il s’agit d’une responsabilité propre, indépendante de la responsabilité de l’Etat de destination pour d’éventuelles violations de ces droits.28

16. Etant donné sa nature prospective, le principe de non-refoulement est indépendant de la matérialisation du risque ; le risque n’a pas besoin de se réaliser pour que la protection entre en jeu.29 Il s’agit donc d’évaluer un fait futur qui est par définition hypothétique. La personne qui invoque le principe de non-refoulement doit démontrer un risque et non un fait qui a déjà eu lieu dans le passé, comme c’est généralement le cas dans une procédure juridique. Dans le cadre de l’interdiction de refoulement, le thème de la preuve concerne ainsi un risque, soit un fait futur.

17. Le principe de non-refoulement est garanti par de nombreuses dispositions de droit international et de droit suisse. Traditionnellement, ce principe fait référence à l’obligation des Etats prévue par l’art. 33 para. 1 CG de ne pas refouler un réfugié vers un Etat où sa vie ou sa liberté serait menacée. Un second aspect de l’interdiction de refoulement a été consacré par l’art. 3 CCT, selon laquelle une personne ne peut pas être renvoyée vers un Etat où il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être soumise à la torture. Cette seconde interdiction de refoulement a également été développée par la Cour européenne des droits de l’homme ainsi que par le Comité des droits de l’homme. En droit suisse, ces deux aspects du principe de non-refoulement sont garantis par l’art. 25 de la Constitution fédérale, qui est précisé au niveau législatif par les art. 83 LEtr et 5 LAsi.

24 GOODWIN-GILL/MCADAM (2007), p. 201. Voir égalementWOUTERS (2009), p. 25.

25 THOMAS (2006), p. 80; KAGAN (2003), p. 377.

26 WOUTERS (2009), p. 25. Voir dans le même sens SUNTINGER (1995), p. 204.

27 WOUTERS (2009), p. 25; HERTIG RANDALL (2008), p. 3.

28 WOUTERS (2009), p. 25. Voir également INGELSE (2001), p. 290.

29 WOUTERS (2009), p. 25.

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A. Droit international des réfugiés

1. L’interdiction de refoulement garantie par l’art. 33 para. 1 CG

18. La Convention de Genève de 1951 pose à son article 33 la pierre angulaire30 de la protection internationale des réfugiés, le principe de non-refoulement, selon lequel :

« 1. Aucun des Etats Contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques.

2. Le bénéfice de la présente disposition ne pourra toutefois être invoqué par un réfugié qu'il y aura des raisons sérieuses de considérer comme un danger pour la sécurité du pays où il se trouve ou qui, ayant été l'objet d'une condamnation définitive pour un crime ou délit particulièrement grave, constitue une menace pour la communauté dudit pays. »

Le principe de non-refoulement représente « l’essence humanitaire de la Convention ».31 L’on constate qu’il est cependant soumis à des exceptions.32 Etant donné son caractère fondamental, la Convention de Genève prévoit néanmoins que ce principe ne peut pas faire l’objet de réserves de la part des Etats.33

19. De plus, le principe de non-refoulement garanti par l’art. 33 CG protège contre le renvoi direct vers l’Etat persécuteur, de même que contre le renvoi indirect, appelé également « refoulement en chaîne » ou « refoulement en cascade ».34 Dans cette seconde hypothèse, tant l’Etat qui a déclenché le refoulement en cascade que celui qui contribue à celui-ci sont considérés comme responsables en droit international des réfugiés.35

20. L’interdiction de refoulement ne s’accompagne pas d’un droit à l’asile.36 La Convention de Genève ne comprend aucune disposition mentionnant expressément le droit d’asile, ce terme figurant uniquement dans son préambule. Par définition, le principe de non-refoulement est une obligation négative interdisant le renvoi du réfugié vers le pays dans lequel il est persécuté ; il n’inclut cependant pas l’obligation positive d’accorder un droit

30 L’expression de « pierre angulaire » de la protection internationale des réfugiés est consacrée tant dans les textes internationaux que dans la doctrine. Voir par exemple Déclaration de Carthagène sur les réfugiés, 22 novembre 1984, § 5; CHETAIL (2001), p. 2.

31 LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 139.

32 DELAS (2011), p. 35.

33 Art. 42 CG.

34 GORDZIELIK (2016), p. 234.

35 GORDZIELIK (2016), pp. 234-235.

36 Voir dans ce sens GOODWIN-GILL/MCADAM (2007), p. 204; CHETAIL (2001), p. 5.

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de séjour dans le pays de refuge.37 La Convention de 1951 tente ainsi de ménager un équilibre entre la souveraineté des Etats parties et la protection des réfugiés.38 En outre, le principe de non-refoulement, tel qu’il est consacré par le droit international des réfugiés, est fondamental, il est cependant soumis à des exceptions.39 Comme nous le verrons ci-après, plusieurs instruments de protection des droits humains lui ont par la suite conféré un caractère absolu.

2. La notion de réfugié selon l’art. 33 para. 1 CG

21. Selon les termes de l’art. 33 para. 1 CG, la protection contre le refoulement s’applique au « réfugié ».40 La définition du terme de réfugié se trouve à l’art. 1 A ch. 2 CG, tel qu’amendé par l’art. 1 para. 2 du Protocole de 1967, lequel inclut toute personne qui :

« craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner. »

Le réfugié, tel qu’il est défini dans la Convention de Genève, présente ainsi quatre caractéristiques : 1) il se trouve en dehors de son pays d’origine ; 2) il ne peut ou ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; 3) cette incapacité ou ce refus est attribuable à une crainte fondée de persécution ; 4) la persécution se fonde sur les critères de race, religion, nationalité, appartenance à un certain groupe social ou opinions politiques.41

22. Bien que les termes des art. 1 A ch. 2 CG et 33 para. 1 CG diffèrent légèrement, une majorité de la doctrine admet que la notion de réfugié qui est utilisée à l’art. 33 para. 1 CG doit correspondre à la définition de l’art. 1 A ch. 2 CG.42 Les travaux préparatoires de la Convention confirment cette

37 WEIS (1995), p. 92. Voir également POSSE-OUSMANE/PROGIN-THEUERKAUF (2015), N 20 ad art. 1 LAsi. Selon l’art.

42 LAsi, « [q]uiconque dépose une demande d’asile en Suisse peut y séjourner jusqu’à la clôture de la procédure. » La personne cherchant protection doit pouvoir séjourner dans ce pays jusqu’à l’issue de la procédure d’asile, l’autorité cantonale lui délivre par conséquent un livret N (art. 30 OA 1). Voir ANTONIONI LUFTENSTEINER (2015), N 2-5 ad art. 42 LAsi. Voir égalementROMER (2016), pp. 361-362.

Sur les droits que la Convention de Genève accorde aux réfugiés, voir HATHAWAY/FOSTER (2014), pp. 39-49.

38 CHETAIL (2001), p. 6.

39 DELAS (2011), p. 35.

40 DE WECK (2016), p. 45; WOUTERS (2009), p. 46; LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 147.

41 GOODWIN-GILL/MCADAM (2007), p. 37. Voir également WEISSBRODT/HÖRTREITER (1999), p. 19.

42 MESSINEO (2013), p. 134; WOUTERS (2009), p. 47; GOODWIN-GILL/MCADAM (2007), p. 234; LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 147; KÄLIN (1982), p. 111.

11 interprétation.43 De plus, la protection contre le refoulement n’est pas limitée aux personnes qui ont été reconnues comme réfugiées mais s’applique également aux demandeurs du statut de réfugié, également appelés requérants d’asile.44 En effet, aux fins de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967, la personne remplissant les conditions de l’art. 1 A ch. 2 CG doit être considérée comme réfugiée, qu’elle ait été reconnue officiellement comme telle ou pas au terme de la procédure nationale.45 Ainsi, dès que l’individu satisfait aux critères mentionnés dans cette définition, il est un réfugié, la reconnaissance de ce statut étant déclarative et non constitutive.46 Cette interprétation a été confirmée par le Comité exécutif du HCR dans plusieurs conclusions47 ainsi que par l’Assemblée générale des Nations Unies48. Le Guide du HCR indique ainsi :

« Une personne est un réfugié, au sens de la Convention de 1951, dès qu'elle satisfait aux critères énoncés dans la définition. Cette situation est nécessairement réalisée avant que le statut de réfugié ne soit formellement reconnu à l'intéressé.

Par conséquent, la détermination du statut de réfugié n'a pas pour effet de conférer la qualité de réfugié ; elle constate l'existence de cette qualité. Une personne ne devient pas réfugié parce qu'elle est reconnue comme telle, mais elle est reconnue comme telle parce qu'elle est réfugié. »49

23. Par ailleurs, la protection contre le refoulement garantie par l’art. 33 para.

1 CG s’applique indépendamment du statut juridique de la personne demandant protection dans l’Etat d’accueil.50 En effet, l’art. 33 CG ne mentionne aucune condition quant à la légalité de la présence de cette personne sur le territoire de l’Etat partie à la Convention ; l’entrée ou le séjour irrégulier n’ont donc pas d’effet sur la protection garantie par cette disposition.51 Une telle interprétation est corroborée par l’art. 31 CG qui prévoit que les Etats contractants n’appliqueront pas de sanctions pénales aux réfugiés du fait de leur entrée ou de leur séjour irréguliers.52 Cependant, la protection contre le refoulement de l’art. 33 para. 1 CG ne s’applique pas

43 WEIS (1995), p. 334. Voir également MESSINEO (2013), p. 134.

44 KÄLIN/CARONI/HEIM (2011), N 83 ad art. 33 para. 1 CG; WOUTERS (2009), p. 47; GOODWIN-GILL/MCADAM (2007), p. 232; CHETAIL (2001), p. 9. Dans cette étude, nous utiliserons généralement l’expression de « personne cherchant protection » plutôt que celle de « requérant d’asile ». En effet, la Convention de 1951 ne comprend pas de droit à l’asile mais vise la reconnaissance du statut de réfugié pour la personne cherchant protection.

Voir dans le même sens WOUTERS (2009), p. 47.

45 LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 148.

46 WOUTERS (2009), p. 47.

47 COMEX, Conclusion N° 6 (XXVIII), 1977, para. c; Conclusion N° 79 (XLVII), 1996, para. j; Conclusion N° 81 (XLVIII), 1997, para. i.

48 AGNU, Résolution 52/103, 9 février 1998, A/RES/52/103, para. 5; Résolution 53/125, 12 février 1999, A/RES/53/125, para. 5.

49 HCR, Guide (1992), § 28.

50 CHETAIL (2001), p. 12.

51 LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), pp. 148-149; CHETAIL (2001), p. 12.

52 CHETAIL (2001), p. 12.

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aux réfugiés qui tombent sous le coup d’une clause d’exclusion de l’art. 1D, E et F CG ou une clause de cessation au sens de l’art. 1 C CG.53 La question de savoir si une personne a le droit d’être protégée contre le refoulement est donc déterminée par le fait qu’elle remplisse la qualité de réfugié mais non par la reconnaissance de ce statut.54

3. Le caractère relatif de la protection

24. Le principe de non refoulement garanti à l’art. 33 CG n’est pas absolu, il est soumis à des exceptions. Le second paragraphe prévoit ainsi que le bénéfice de cette disposition ne peut pas être invoqué par un réfugié lorsqu’il y a des raisons sérieuses de considérer qu’il représente un danger pour la sécurité du pays d’accueil ou une menace pour la communauté dudit pays.55 L’art. 33 para. 2 CG s’applique de manière prospective : le réfugié doit représenter une menace présente ou future pour son pays d’accueil.56 De plus, les deux dérogations doivent être interprétées restrictivement et appliquées avec une prudence particulière.57 L’art. 33 par. 2 CG ne précise pas quels types d’actes commis par le réfugié constituent un danger pour la sécurité ou une menace pour la communauté, ni quel niveau de preuve est nécessaire, laissant ainsi une marge d’appréciation aux Etats.58 La doctrine a toutefois tenté de préciser les contours de ces notions. Par danger pour la sécurité du pays d’accueil, on entend un « danger très grave »59 menaçant directement ou indirectement le gouvernement, l’intégrité ou l’indépendance de l’Etat dans lequel le réfugié se trouve.60 A titre d’exemple, on peut penser à des actes visant à renverser le gouvernement par la force ou par des moyens illégaux, à des actes de terrorisme ou d’espionnage, etc.61 Par ailleurs, pour être considéré comme une menace pour la communauté,

53 KÄLIN/CARONI/HEIM (2011), N 112 ad art. 33 para. 1 CG.

54 WOUTERS (2009), p. 90. Les exceptions mentionnées à l’art. 33 para. 2 CG seront traitées dans la suite de ce chapitre à la section A.1.3.

55 Il existe un lien évident entre l’art. 33 para. 2 CG et l’art. 1 F CG qui prévoit les clauses d’exclusion de la qualité de réfugié. L’art. 1 F CG dispose comme suit: « Les dispositions de cette Convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser: a) qu'elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l'humanité, au sens des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes; b) qu'elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d'accueil avant d'y être admises comme réfugiés; c)qu'elles se sont rendues coupables d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies. » Toutefois, le seuil d’application des exceptions au principe de non-refoulement s’avère plus élevé. Voir LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 161; CHETAIL (2001), p. 13.

56 WOUTERS (2009), p. 113. Voir également GOODWIN-GILL/MCADAM (2007), p. 236; LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 161.

57 LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 166.

58 GOODWIN-GILL/MCADAM (2007), p. 235; LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 168.

59 LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 168.

60 WOUTERS (2009), p. 115.

61 WOUTERS (2009), p. 115; KÄLIN (1982), p. 131.

13 la personne doit faire l’objet d’une condamnation définitive pour un crime ou un délit particulièrement grave.62

25. Il ressort de ce qui précède que le champ d’application personnel du principe de non-refoulement garanti par l’art. 33 CG est limité aux personnes réfugiées, que leur statut ait été reconnu ou non, incluant ainsi les personnes ayant déposé une demande d’asile. Concernant le champ d’application ratione loci, l’art. 33 CG ne contient pas de limite territoriale. La protection s’applique quelle que soit la qualification de l’acte de refoulement. Toutefois, cette protection n’est pas absolue, l’art. 33 para. 2 CG prévoyant des exceptions.

4. La notion de persécution

26. L’art. 33 para. 1 CG protège la personne cherchant protection contre le refoulement vers un territoire « où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ». Il a déjà été mentionné que bien que les termes des art. 33 para. 1 et 1 A para. 2 diffèrent légèrement, ces dispositions doivent être interprétées ensemble.63 Il faut donc considérer qu’il y a une assimilation entre la menace contre la vie ou la liberté qui empêche le refoulement et la crainte fondée de persécution.64 A la lumière des travaux préparatoires, il apparaît que les termes « vie » et « liberté » doivent être compris largement et que tout risque de persécution doit être considéré comme une menace contre la vie ou la liberté.65 Cependant, la notion de menace contre la vie ou la liberté ne peut pas être utilisée pour délimiter la notion de persécution.66 En effet, l’interprétation de ces notions doit se faire dans le sens inverse ; la notion de persécution de l’art. 1 A para.

2 CG permet de déterminer la portée de la notion de menace pour la vie ou la liberté mentionnée à l’art. 33 para. 1 CG.67 Dans leur commentaire de l’art.

33 CG, Walter KÄLIN, Martina CARONI et Lukas HEIM suggèrent donc d’interpréter la menace contre la vie ou la liberté de manière à inclure toutes

62 WOUTERS (2009), p. 116; LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 172.

63 WEIS (1995) pp. 303 et 341.

64 LAUTERPACHT/BETHLEHEM (2003), p. 155. Voir également WOUTERS (2009), p. 57.

65 “It was apparently the intention of the Ad Hoc Committee that the words ‘life and freedom’ should be given a very broad interpretation, and that any kind of ‘persecution’ which may entitle a person the status of Convention ‘refugee’ shall be considered a ‘threat to life or freedom’ in the sense of Articles 31 and 33.” GRAHL -MADSEN (1966), p. 196. Voir également KÄLIN/CARONI/HEIM (2011), N 157 ad art. 33 para. 1 CG.

66 WOUTERS (2009), p. 57.

67 “In other word, we may look to Article 1 in order to determine the scope of Articles 31 and 33, but not vice versa.” GRAHL-MADSEN (1966), p. 196. Voir également WOUTERS (2009), p. 58.

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les formes de traitement équivalant à une persécution au sens de l’art. 1 A para. 2 CG.68

27. La notion de persécution n’est définie ni dans la Convention de 1951, ni dans aucun autre traité international.69 Les rédacteurs de la Convention de Genève ont en effet renoncé à définir la persécution, car ils considéraient qu’il était impossible d’énumérer à l’avance toutes les formes de mauvais traitements qui peuvent fonder la qualité de réfugié.70 Le Guide du HCR précise à ce titre :

« Il n'y a pas de définition universellement acceptée de la « persécution » et les diverses tentatives de définition ont rencontré peu de succès. De l'article 33 de la

« Il n'y a pas de définition universellement acceptée de la « persécution » et les diverses tentatives de définition ont rencontré peu de succès. De l'article 33 de la