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Chapitre 2. Différends relatifs à l'investissement : l’arbitrage investisseur-Etat (CIRDI)

A) Les restrictions substantielles

La plupart des accords d'investissement disposent de clauses de règlement des différends larges qui permettent d'apporter à l'arbitrage, essentiellement, toutes les questions couvertes par l'accord. Le TBI entre la Finlande et le Nicaragua, par exemple, fournit un exemple de consentement général exprès à l'arbitrage : chaque partie contractante donne ici son consentement

298LEBEN Charles, « Arbitrage (CIRDI) », Encyclopédie juridique Dalloz : Répertoire de droit international, mars 2010, para. 13.

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inconditionnel à la soumission d'un différend entre elle et un investisseur de l'autre partie contractante à l'arbitrage.

La portée du consentement à l'arbitrage, offert dans les traités, prend des formes variées. Outre ces clauses restreignant de manière automatique la portée du consentement de l’État en ce qu’elles encadrent la procédure d’arbitrage, l’État peut lui-même apporter ses propres restrictions. Toutefois, un certain nombre d'accords d'investissement limite la portée du consentement à l'arbitrage, sur certaines questions ou à certaines conditions.

Avant tout, de nombreux TBI dans leur clause de consentement contiennent une phrase comme « tous les différends en matière d'investissement » ou « tout litige relatif à un investissement ». Ces dispositions ne limitent pas la compétence d'un tribunal à la revendication découlant des normes de fond des TBI. Les clauses de consentement, peuvent également inclure, les différends qui surgissent d'un contrat dans le cadre de l'investissement300.

L'article 8 du TBI, entre l'Italie et le Maroc, offre une option de compétence du CIRDI relativement à « Tous les différends ou divergences...concernant un investissement ».

Le tribunal de Salini c. Le Maroc a noté que les termes de cette disposition sont très généraux et comprennent non seulement une réclamation pour violation du TBI mais également une demande fondée sur le contrat : « l'article 8 oblige l'État à respecter l'offre de compétence à raison des violations de l'accord bilatéral et de tout manquement à un contrat qui le lierait directement301 ». En revanche, L'article 9 de TBI, applicable entre la Suisse et le Pakistan, vise « les différends relatifs à des investissements ». Le tribunal de SGS c. Pakistan a estimé que la phrase était décrivait simplement la matière des différends, sans lien au fondement juridique ou à la base légale de ces réclamations. Le tribunal a précisé que : « en d'autres termes, de cette seule description, sans plus, il nous semble qu'il ne peut être nécessairement déduit que les parties contractantes ont voulu que l'article 9 du TBI couvre à la fois les réclamations fondées sur le TBI et les réclamations purement contractuelles302 ».

300DOLZER Rudolf and SCHREUER Christoph, “Principles of international investment law”, Oxford; NewYork: Oxford University Press, first edition, 2008, p. 260.

301Salini c/ Maroc,( affaire CIRDI n°ARB/00/4) décision sur la compétence du 23 juillet 2001, para. 61. 302SGS c. Pakistan, (affaire CIRDI n° ARB/01/13) décision sur la compétence du 6 aout 2003, para. 161.

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L'objet de certaines expressions de consentement à l'arbitrage est très restreint. L’exemple typique de la clause en question porte sur les expressions de consentements qui sont limités à des litiges relatifs à des expropriations303 ou au montant de l'indemnité d’expropriation304.

Le consentement peut être offert au regard de certaines questions importantes de l'accord. Tel est le cas, par exemple, des accords d'investissement conclus par la Chine jusqu'à l'an 2000, ce qui a limité le consentement à l'arbitrage des questions d'évaluation de l'expropriation seulement305. De même, le TBI entre la Bulgarie et le Danemark, en 1993, ne donne son consentement à l'arbitrage que pour les litiges découlant de ses dispositions relatives à l'expropriation, à l'indemnisation et au transfert de fonds306.

En vertu de ces dispositions, un investisseur étranger peut engager une procédure d'arbitrage concernant, uniquement les questions, qui ont été consenties par l'État d'accueil, au préalable. Il s’agit par exemple de controverses relatives au montant de l'indemnité d'expropriation, ou de savoir si une expropriation a effectivement eu lieu et la valeur de la compensation. Tous les autres litiges portant sur les disciplines restantes de l'accord, telles que le traitement national ou le traitement juste et équitable, nécessitent un accord d'arbitrage spécifique entre les autorités du pays hôte et l'investisseur étranger.

L’Etat peut restreindre la portée de son engagement en excluant certains litiges ou en listant les questions susceptibles d’être soumises à la compétence du CIRDI. L’Etat peut aussi, au travers de sa législation, restreindre les sujets à soumettre au CIRDI.

Dans l’affaire SPP v. Egypt307, l’Egypte estimait que le CIRDI n’était pas compétent car il s’agissait d’une inexécution contractuelle or la loi relative à l’investissement prévoyait, qu’en matière contractuelle, seules les juridictions internes étaient compétentes308.

Les restrictions substantielles peuvent également se rapporter à un certain type d'investissement ou à la phase de l'investissement. Dans le cas du TBI de l'AELE-Corée, le consentement préalable des parties ne s'applique qu'aux litiges initiés par des investisseurs étrangers qui ont déjà une position d'investissement, dans le pays d'accueil, mais pas à ceux impliquant des

303Saipem S.p.A. c. Bangladesh, (affaire CIRDI n° ARB/05/07), sentence du 30 juin 2009, paras. 120-132.

304Telenor Mobile Communications AS c. République de Hongrie, (affaire CIRDI n° ARB/04/15), sentence du 13 septembre 2006, paras. 18(2), 25, 57.

305TBI entre le Chine et le Singapour, article 13.3. 306TBI Bulgarie- Danemark, article 9(3).

307SPP c. Egypte, affaire CIRDI n° ARB/84/3), décision sur la compétence du 27 novembre 1985.

308SCHREUER Christoph H., The ICSID Convention : A commentary Second edition, Cambridge University Press (2009).

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investisseurs qui cherchent à faire un investissement - de manière à prévenir les différends concernant la phase de pré-établissement de l'investissement.

En outre, un certain nombre d'accords a restreint le consentement à l'arbitrage, en matière d'investissements, dans certains secteurs. Plusieurs TBI et accords commerciaux préférentiels récents ont, en particulier, restreint l'accès à l'arbitrage international des investisseurs, dans le secteur des services financiers, ce secteur étant sensible aux préoccupations réglementaires). Pour les réclamations concernant ce secteur, certains accords permettent aux investisseurs de contester des mesures gouvernementales uniquement sur la base des dispositions de protection des investissements comme l’expropriation et l'indemnisation et le transfert de fonds. Ces accords ne permettent pas de contester sur les disciplines relatives au traitement national ou à l'accès au marché. D'autres accords, nécessitent l'autorisation d'un comité (composé de représentants des parties au TBI ou aux accords commerciaux préférentiels) pour procéder à des arbitrages d'investisseur-État sur les services financiers.