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Repérage des contrats courts à partir des liaisons salariales

Dans l’esprit de ce qui précède, les éléments d’analyse proposés ci-après ne portent pas sur des contrats courts mais sur des liaisons salariales à faible durée de paye ; une liaison salariale « courte » impliquera une durée de paye consolidée de moins de 31 jours. L’enjeu

de cette section est d’indiquer comment notre approche permet néanmoins de faire intervenir le contrat de travail. Nous avons pour ce faire choisi de privilégier l’année 2010. Cela permet d’avoir des informations bien renseignées sur le contrat de travail (information présente dans les DADS depuis 2005 pour le privé et depuis 2009 pour la fonction publique), d’avoir un champ plus complet (y compris particuliers employeurs) et d’être après l’instauration de la filière unique, qui a abaissé le seuil minimal d’affiliation chômage nécessaire pour bénéficier d’une indemnisation chômage à 4 mois dans les 28 derniers (au lieu de 6 mois dans les 22

01/01/N+1 31/12/N-1 28/02/N

172 derniers précédemment) ce qui est suspecté d’avoir accru les entrées au chômage de salariés en contrats courts (Khoury et al., 2019). Nous procédons dans cette section en deux temps. Il s’agit d’abord de souligner en quoi, dans l’optique de décrire l’emploi court, le choix de conserver les postes annexes est complémentaire de l’approche en liaison salariale proposé dans la section précédente. Dans un second temps nous précisons ce que l’on entendra ici par « liaison salariale en contrat court » et situons quantitativement ce type de liaisons dans l’ensemble des liaisons salariales observées en 2010 (et, par comparaison, en 2006).

1.4.1 Les liaisons salariales sur poste annexe

Par rapport aux sources décrivant les MMO, l’information DADS ne permet pas de décrire précisément tous les contrats de travail : nous l’avons vu, déclarations annuelles et, partant, liaisons salariales peuvent être composées de plusieurs contrats de travail ; la durée de chacun de ces contrats n’est alors pas isolable. Cela conduit mécaniquement à sous-estimer la part de contrats de très courte durée : l’approche par la liaison salariale repère bien les contrats courts isolés, « sans suite » dans l’année, difficilement les contrats courts qui s’enchaînent. On sait par le biais d’autres sources, que beaucoup de périodes d’emploi court s’inscrivent dans le cadre de relations de travail « continues » ou « répétées » chez le même employeur56. Cependant, d’après les éléments remontant du terrain qualitatif, du point de vue des employeurs et salariés concernés, la couverture temporelle de la relation d’emploi (captée ici par la liaison salariale) fait davantage sens que la durée de chacun des contrats pouvant composer cette relation57. Au demeurant, la conservation des DADS en poste annexe nous permet de ne pas gommer une part importante de l’instabilité contractuelle. On peut le montrer en décrivant la composition des liaisons salariales considérées ici. Le Tableau 1.5 documente la répartition des liaisons observées en 2010 par type de contrat de travail selon le caractère annexe ou non du poste DADS58 et selon la durée de paye consolidée.

56 Ainsi, selon les données du FNA sur la période 1995-2012, 4 embauches sur 5 en CDD d’un mois ou moins se font chez un ancien employeur (Unedic, « Relation de travail et contrats de moins d’un mois : quelle place dans le marché du travail en France ? Résultats à partir du Fichier national des allocataires. », Septembre 2018).

57 Les salariés enquêtés décrivent leurs expériences professionnelles en distinguant des périodes d’emploi chez différents employeurs, sans s’attarder sur (et même sans avoir nécessairement bien conscience de) la durée de chacun des contrats de travail qui les composent (cf. partie qualitative du rapport).

173

Tableau 1.4 – Répartition des liaisons salariales observées en 2010 par type de contrat de travail selon qu’il s’agit de postes annexes ou non annexes, de courte durée de paye ou non

Contrat de travail enregistré en début de liaison salariale

Liaisons salariales

en poste annexe Liaisons salariales en poste NON-annexe Durée de paye

< 31 j. ≥ 31 j. < 31 j. ≥ 31 j.

CDI privé (y.-c. CPE, CNE) 5,5 19,1 0,5 75,0

CDL public (y.-c. contrats aidés, apprentissage) 2,6 2,2 0,2 95,0

privé (y.-c. CTT) 29,6 14,8 0,8 54,8

Sans

contrat public privé 13,1 5,1 11,1 21,5 0,2 0,6 83,7 64,8 Non

renseigné public privé 0,0 1,9 3,7 2,1 0,0 0,1 96,3 95,8

Ensemble 11,8 13,5 0,5 74,3

Source : Panel FH-DADS 2012. Champ : France entière.

Lecture : les liaisons salariales débutées en CDI en 2010 étaient dans 5,5 % des cas de postes annexes de moins d’un mois, pour 19,1 % de postes annexes de plus d’un mois, pour 0,5 % de postes principaux de moins d’un mois et pour 75,0 % de postes principaux de plus d’un mois.

Sur l’ensemble des liaisons salariales couvrant au moins un jour de l’année 2010, environ un quart (11,8 % + 13,5 %) correspondaient à un poste annexe59 ; c’est le cas de la quasi-totalité des liaisons présentant des durées de paie de moins d’un mois. Cela s’explique aisément : la durée du poste (inférieure ou supérieure à 30 jours) est un des trois éléments concourant à qualifier un poste d’annexe dans les DADS60. Pour les CDD de droit privé, la part de liaisons salariales en poste annexes passe à près de 45 %. On voit donc l’importance de tenir compte des postes annexes. Conserver et traiter les liaisons salariales en poste annexe contribue massivement au repérage de l’emploi court : mieux que ne le font les exploitations habituelles des DADS en « postes principaux » ou de l’enquête Emploi en « emplois principaux ». Notre approche permet en particulier une appréhension complète du pluri-salariat61 (cumul

simultané de plusieurs employeurs) notamment à partir de 2009 lorsque nous repérons les épisodes d’activité auprès d’un particulier-employeur.

59 Au moins au moment de leur commencement.

60 Cf. le document « Présentation générale des DADS grands formats ».

61 Le multisalariat est peu souvent considéré par les études bien qu’il soit important comme le montrent les travaux d’Agostino et al. 2020 : ils parlent « d’emploi éclaté » pour désigner les situations d’emploi multi-salarié. Selon eux, en 2014, 16 % des salariés du privé ont eu plusieurs employeurs au cours de l’année.

174 1.4.2 Les liaisons salariales « en contrat court » en 2010

Les liaisons salariales que nous considérons ont toutes été observées au cours de l’année 2010, mais peuvent avoir commencé avant 2010 (dans près de 60 % des cas) et / ou s’être achevée après (60 % des cas également). Nous considérons les postes observés tout au long d’une année donnée et non à une date donnée, permettant une meilleure image des personnes en sous-emploi (Cnis, 2016).

Les liaisons salariales en contrats courts sont des liaisons salariales dont le contrat de travail principal est un contrat à durée limitée (tous types de contrats à durée limitée :

CDD, contrats de travail temporaires, contrats aidés, apprentissage …) et dont la durée de paye est inférieure ou égale à 31 jours. Par facilité de langage, nous parlerons par la suite de « contrat court » pour désigner ce type de liaisons salariales. Le tableau suivant situe ces

liaisons courtes dans l’ensemble des liaisons salariales observées en 2010.

Parmi les liaisons salariales couvrant au moins une journée de l’année 2010, 32,6 % sont en contrat à durée limitée, essentiellement en CDD de droit privé (le reste étant des contrats aidés et des contrats d’apprentissage), 52 % en CDI et 12,8 % « sans contrat de travail ». Ce dernier cas correspond majoritairement à de l’emploi dans le secteur public on peut donc penser que ce sont des postes de fonctionnaires (tableau 1.5). Bien qu’elle soit renseignée depuis 2005, on constate que l’information sur le contrat de travail dans les DADS n’est pas tout à fait complète : 2,6 % des liaisons salariales observées en 2010 ont une valeur manquante concernant le contrat de travail – il s’agit exclusivement de postes dans le secteur privé.

Tableau 1.5 : Type de contrat de travail principal des liaisons salariales observées en 2010

en %

Contrat à durée indéterminée (CDI) de droit privé 52,0

Contrat à durée limitée (CDL) contrats aidés et contrats d’apprentissage contrats à durée déterminée de droit privé (CDD) et contrats de 2,4

travail temporaires (CTT) 30,2

Sans contrat de travail secteur public 11,2

secteur privé 1,6

Contrat manquant secteur public 0,0

secteur privé 2,6

dont « contrats courts » (liaisons salariales en CDL avec une durée de

paye <= 1 mois) 9 %

Source : Panel FH-DADS 2012, calculs des auteurs.

Champ : France entière, liaisons salariales couvrant au moins une journée de l’année 2010.

Note : le type de contrat de travail est celui enregistré en début ou en fin de liaison salariale, en conservant l’information qui est la plus complète (un contrat défini, que ce soit en début ou en fin de liaison salariale l’emporte sur un contrat « manquant » ou sur la modalité « sans contrat » et on conserve l’information de début de liaison salariale pour les CDL, sachant que certaines liaisons débutées en CDL finissent en CDI).

Lecture : Parmi l’ensemble des liaisons salariales couvrant au moins 1 jour de l’année 2010, 32,6 % avaient pour contrat de travail principal un contrat à durée limitée (contrat aidé, contrat d’apprentissage, CDD de droit privé ou contrat intérimaire) ; 9 % étaient « contrats courts » c’est-à-dire des liaisons salariales en contrat à durée limitée et avec une durée totale de paye inférieure ou égale à 31 jours.

175

Tableau 1.6 : Caractéristiques des liaisons salariales observées en 2010

Liaisons salariales … En « contrat court »

(contrat à durée limitée, durée de paye

≤ 1 mois)

En autre CDL (contrat à durée limitée, durée de paye

> 1 mois)

Ensemble des liaisons salariales observées

en 2010

% de postes « non annexes » 2,6 80,7 74,7

Durée de paye (en jours)

Q1 3 107 172

Médiane 9 343 930

Q3 20 907 2129

Source : Panel FH-DADS 2012, calculs des auteurs.

Champ : France entière, liaisons salariales couvrant au moins une journée de l’année 2010. Lecture :

- Seules 2,6 % des liaisons salariales en « contrat court » correspondent à des postes « non annexes » au sens des DADS contre 81,1 % des liaisons salariées dont le contrat principal est un CDI.

- La durée médiane de paye de ces « contrats courts » est de 9 jours, le premier quartile de 3 jours et le troisième quartile de 20 jours.

Les « contrats courts »62 représentent près de 9 % des liaisons salariales couvrant au moins une journée de l’année 2010 et 27,6 %63 des liaisons salariales en contrat à durée limitée. Insistons à nouveau sur l’importance de conserver les postes dits « annexes » dans les

DADS pour capter ces liaisons salariales en « contrat court » (tableau 1.6) : en effet, si 74,7 % de l’ensemble des liaisons salariales observées en 2010 sont « non annexes », ce n’est le cas que de 2,6 % de celles en « contrat court ».

La durée de ces « contrats courts » est très souvent bien inférieure à un mois : la durée médiane de paye est en effet de 9 jours64 contre 343 jours pour les autres liaisons salariales en contrat à durée limitée (cf. tableau 1.6 et figure 1.3).

62 C’est-à-dire les liaisons salariales en contrat à durée limitée dont la durée de paye est inférieure ou égale à 31 jours.

63 = 9,0 / (30,2 + 2,4).

176

Figure 1.3 : Distribution des durées de paye selon le type de contrat principal des liaisons salariales de 2010 (en jours)

Encadré 5 : Évolutions des contrats courts entre 2006 et 2010 (hors secteur des particuliers employeurs)

Liaisons salariales … En « contrat court »

(contrat à durée limitée, durée de paye

≤ 1 mois)

En autre CDL (contrat à durée limitée, durée de paye

> 1 mois)

Ensemble des liaisons salariales 2006

Durée de paye (en jours)

Médiane 10 217 1 110

Part de chaque type de liaison

salariale 10,3 % 20,7 % 100 %

2010 Durée de paye (en jours)

Médiane 9 343 1 031

Part de chaque type de liaison

salariale 10,2 % 26,7 % 100 %

Source : Panel FH-DADS 2012, calculs des auteurs.

Champ : France entière, liaisons salariales couvrant au moins une journée de l’année 2006 ou 2010, hors secteur des particuliers employeurs.

Lecture : Entre 2006 et 2010, la part des liaisons salariales en « contrat court » (contrat à durée limitée avec une durée de paye inférieure ou égale à 31 jours) est restée stable à environ 10 % ; leur durée médiane a légèrement diminué : de 10 jours en 2006 à 9 jours en 2010.

177 Nous avons cherché à comparer deux années, 2006 et 2010, pour voir si nous pouvions déceler des évolutions dans la part et la durée de paye de chaque type de liaison salariale. Pour les besoins de cette comparaison, le champ est restreint car les particuliers employeurs n’étaient pas encore dans les DADS en 200665. La comparaison ne fait pas apparaître de tendance claire : si la part des liaisons salariales en « autres contrats à durée limitée »66 augmente, de 6 points environ, celle des « contrats courts » est stable. La durée moyenne et médiane de ces liaisons salariales en « contrat court » a légèrement diminué, tandis que celle des « autres CDL » a fortement augmenté. Ces constats ne sont pas incompatibles avec un développement des contrats courts, tel qu’il est généralement documenté dans d’autres sources (Acoss). En effet, nous rappelons que l’unité d’observation dans les DADS étant une entreprise × année, des contrats courts successifs chez un même employeur au cours d’une année sont regroupés au sein d’une même liaison salariale et sont donc susceptibles de se trouver dans la catégorie liaisons salariales en « autres CDL ». Il est néanmoins intéressant d’observer que ce raccourcissement des contrats ne semble pas être allé de pair avec un raccourcissement des durées globales de rémunération des liaisons salariales en contrats à durée limitée (qui peuvent rassembler plusieurs contrats courts) puisque, en moyenne, la durée des « autres

CDL » a au contraire augmenté. Dans la suite des analyses, nous ne nous concentrons que sur l’année 2010.

65 D’où les résultats un peu différents pour l’année 2010 par rapport à ceux présentés dans le tableau 1.6, qui portait sur l’ensemble des observations de 2010 donc y compris les particuliers employeurs.

66 Liaisons salariales dont le contrat de travail est un contrat à durée limitée et dont la durée de paye totale est de plus d’un mois.

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