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VERS UNE SUITE SANS FIN DE L’ÉTAT DE LA QUESTION

8. Les recherches de la pédagogie concernant la construction du sens

La question du sens des savoirs est abordée régulièrement et depuis la nuit des temps par la pédagogie.

Une lecture transversale des grands pédagogues montre que la volonté de donner sens aux savoirs est centrale pour eux. Même si la question est abordée, le plus souvent sans en faire un objet de travail spécifique, les discours la touchent. Et les propositions pédagogiques contiennent souvent l’idée d’une lutte contre une école transmettant des savoirs qui n’ont pas de sens pour les élèves. Alors, que nous disent les pédagogues ? …

Précisions épistémologiques

Ainsi se terminait ce premier état des savoirs il y a 10 ans. Sur un état des recherches de la pédagogie que je ne parvenais pas à réaliser. Car, au moment de l’entreprendre, je ne savais plus qui pouvait être nommé pédagogue ou pas. La dichotomie proposée entre sciences de l’éducation et pédagogie était parfois difficile à opérer pour certaines recherches. Le Mouvement de l’Éducation nouvelle arrivait ici avec toute son histoire rappelant que sciences de l’éducation et pédagogie

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n’avaient pas toujours connu la séparation d’aujourd’hui. Où placer un Langevin, un Wallon, un Mialaret ? Chez les scientifiques alors qu’ils furent des présidents du GFEN ? Où placer un Francis Imbert ? un Meirieu ? une Cifali ? Mais aussi les chercheurs des Mouvements pédagogiques ayant construit scientifiquement et/ou pédagogiquement du savoir. ? La réalité de l’action humaine faisait éclater le cadrage de mon état de la question.

Il me fallait sortir du cadre que je m’étais imposé. Pour répondre en priorité à cette question : Qu’est-ce que la pédagogie ?

C’est alors tout le problème de la pédagogie que j’ai dû poser pour tenter d’y voir plus clair. Cela m’a occupé longtemps. M’a fait écrire beaucoup. M’a demandé de me questionner sur ma posture de chercheuse scientifique et celle de pédagogue. Et c’est finalement toute la question de la différence entre la recherche scientifique et pédagogique que je me décidai d’aborder.

Je dus passer par là pour comprendre comment la pédagogie, les mouvements pédagogiques et un mouvement pédagogique se référant à l’Éducation nouvelle, le GFEN, travaillent la question du sens de la culture à transmettre.

Échos

Faire face à la complexité…

J’avais empilé, avec plaisir de la découverte et curiosité, des savoirs, des savoirs, des savoirs. Je m’étais construit ainsi ma tour de Babel, bruissante de sept entrées

découvertes les unes après les autres. Sept portes choisies par mes soins parmi d’autres, m’ouvrant des champs conceptuels que je jugeais utiles pour mieux poser mes questions et pouvoir y répondre. Mon cadre conceptuel me senblait solide. Jusqu’à ce que la pédagogie me barre la route.

Je rencontrai-là une situation que je jugeai être d’abord une impasse. Si sérieuse que je pensai abandonner ma recherche. Ou consacrer celle-ci à la seule pédagogie.

L’impasse ? Un obstacle conceptuel. Un vrai : mon savoir sur la pédagogie était « un faux savoir ». J’avais choisi de traiter dans mon état de la question les savoirs de la pédagogie en dernier parce que je pensais que ce serait le plus facile. Je me retrouvais bloquée. Je me pensais pédagogue. Je me voyais incapable de définir la pédagogie. Je voulais regrouper les savoirs construits par la pédagogie. Je ne savais plus si ces

savoirs avaient été vraiment élaborés par des pédagogues ou pas, et si certains d’entre eux pouvaient même être qualifiés « savoir »…

Cette recherche sur la pédagogie n’a pas été facile à conduire car plus j’avançais plus je constatais que tant les sciences de l’éducation que les pédagogues et mouvements

pédagogiques n’étaient pas au clair par rapport à cette question. Du même coup elle était délicate à aborder. Plus ma définition de la pédagogie se précisait plus je constatais que certaines recherches qualifiées de scientifiques étaient pour moi des recherches pédagogiques. Dans le même temps, je travaillais avec des pédagogues

conduisant des recherches que je qualifiais de recherches pédagogiques mais qui

voulaient que leur recherches soient qualifiées de scientifiques. Je me suis sentie parfois très seule dans ce moment de ma recherche. Préférant dans un premier temps souvent me taire, pour pouvoir tirer les fils de ce méli-mélo. Un autre trouble m’envahissait aussi. La pédagogie et un pédagogue comme Philippe Meirieu était, durant ce temps de ma recherche, attaqué sans cesse par certains groupes de pression. Il était

extrêmement difficile de comprendre exactement de quoi parlaient ceux qui en voulaient à la pédagogie. De comprendre qui était nommé pédagogue. Ou pédagogiste. J’avais souvent l’impression que certains de mes collègues universitaires étaient affublés de cette dernière étiquette. Mais continuaient à se démarquer des pédagogues qualifiés de même. Le climat de travail était ainsi particulier. Plus je synthétisais les différentes recherches à propos de la pédagogie, plus je parvenais à construire du savoir à son propos, plus il me semblait improbable de voir un jour reconnu mon travail dans le climat actuel.

L’étiquette de pédagogue que j’étais prête à porter —et fière de porter—quand je conduisais une recherche pédagogique me collait à la peau quand je parlais de ma recherche sur la pédagogie menée en sciences de l’éducation.

Cette étrange situation finit par se faire moteur : je me devais de réussir à définir la pédagogie.

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PARTIE II