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LE MOMENT DES QUESTIONS

3. Les présupposés théoriques ayant donné du sens à ces questions

Les dimensions que j'ai décidé d'étudier s'appuient sur les problématiques et présupposés théoriques suivants :

- La construction du sens des savoirs en classe est un objet pédagogique que les sciences de l'éducation ne peuvent saisir qu'à travers l'analyse de l'imbrication de deux pôles : celui du « faire », du dispositif dans lequel travaillent les différents acteurs, et celui du « dire », de ce qui meut l'action de l'enseignant avant, pendant et après la séquence d'enseignement-apprentissage. (Meirieu, 1995).

- Le sens des savoirs enseignés se construit et n'est pas donné d'avance. Il se

construit à partir d'une culture, d'un ensemble de valeurs et de représentations. Il se construit en situation d'interaction et de relation. L'école et les enseignants exercent par conséquent une influence sur la construction du sens des savoirs chez les apprenants (Perrenoud, 1993,1994 g, 1995 b).

- Le métier d'enseignant et celui d'élève sont deux métiers imbriqués (Perrenoud, 1994, 1995): les différents types d'agir de l'enseignant influencent les types d'agir des apprenants; le métier d'élève varie d'un dispositif d'enseignement-apprentissage à l'autre (Perrenoud, 1993, 1994 g; Baeriswyl &Vellas, 1993 ; Charlot, Bauthier et Rochex, 1992).

- La pluralité des savoirs mobilisée dans la pratique éducative n'a pas d'unité

épistémologique, ce qui rend problématiques toutes les recherches sur l'enseignant ou la pratique idéale. À défaut d'une unité épistémologique, le « savoir enseigner » possède une spécificité pratique qui a pour fondement des choix éthiques et

techniques (Meirieu, 1984,1987,1990, 1991, 1992, 1993 a, b, 1994, 1995) qui semblent fortement influencés par le fond culturel commun de l'organisation scolaire dans laquelle l'enseignant agit (Tardif 1993). Cette culture professionnelle est composée des attitudes, valeurs, croyances, présupposés théoriques et manières de faire, partagés à l'intérieur d'un établissement, d'un groupe d'enseignants, ou d'une communauté élargie (Gather Thurler 1992, 1993, 1994 a,b.c ; Vermersch ; 1994).

- Au vu des présupposés ci-dessus, l'analyse des dispositifs de construction de savoir proposés à l'école aux élèves, peut donner des indications sur les sens des savoirs susceptibles d'être construits par les élèves à l'intérieur de ces dispositifs.

- Le métier d’enseignant implique un savoir à transmettre, quelles que soient les modalités de transmission qui peuvent être magistrales ou passer par des

démarches de construction. Mais le métier d’enseignant est aussi une pratique du savoir.

Échos

Devrait s’inscrire ici le chemin d’un canevas de thèse : Les mille et un éclatement des canevas successifs.

Les désirs de poursuivre et de tout lâcher.

Les lâchers prises.

La passion de découvrir, de lire, lire, lire, encore et toujours.

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Et puis devraient figurer aussi toutes les prises de notes, les pages cornées, les phrases soulignées, colorées, sur-sur-sur-soulignées et cochées. Marquées d’une croix en plus.

Si nécessaire. Et ces copies de bouts de textes, écrites au crayon (oui, j’aime le crayon et sa taille qui permet de respirer). Et puis le bureau où les piles s’empilent. Les couches de piles aussi. Et les piles de piles. Les cathédrales de piles.

Avec les Joies, les Angoisses, les Désirs. Face à l’écran lisse qui s’impose. Et le crayon tout près quand même. Quand l’écran trop lisse résiste au regard poétique, aux soupirs, au je n’en peux plus.

Quels sont les mobiles qui nous poussent à nous lancer un jour dans une thèse ? Ceux qui font qu’on ne va finalement pas lâcher prise ?

Je n’ai pas dit les buts déclarés, mais les mobiles. Ces mobiles qui sont parfois si invisibles, inconscients qu’on ne les connaît pas. Alors que d’autres sont prêts à apparaître, si on veut bien aller les chercher, mais sans aucune garantie que d’autres mobiles ne sont pas en action. Plus sourds, mais plus forts peut-être.

Quand je disais aux parents de mes élèves : « il ou elle n’est pas motivé(e) pour ceci ou cela». Qu’en savais-je ? Quels étaient les mobiles agissants qui finissaient par faire se détourner les élèves du travail ? Quelles peurs à la base de ces refus d’entrer dans la tâche ? Quels ennuis aussi à la source de ces impossibilités d’agir ?

Qu’est-ce qui avait enclenché mon écriture et l’écriture de mes élèves dans l’atelier co-pillage ? Qu’est-ce qui avait provoqué cette forte mobilisation ? Où était le moteur ? Dans le dispositif ? Dans l’animateur ? Dans la rencontre avec les autres ? Quels autres ? Dans la rencontre avec les mots ? Les mots des morts ou des vivants ? Dans la découverte de poèmes emplis de sens… Sans pourtant les comprendre ?

En présentant ci-dessus mon hypothèse de recherche, mes premières questions

principales et spécifiques et ci-après les buts de ma recherche, combien d’hypothèses, de questions et de buts « écrasés » successivement auparavant ? Pourquoi n’est-il pas de tradition d’avoir une rubrique « mobile » dans le canevas de thèse ? Pour

comprendre ce qui pousse à faire ? Et refaire ? Et refaire ?

Mon canevas de thèse n’avait pas prévu les mobiles. Puis-je répondre aujourd’hui, tant d’années plus tard à la question ? Quels mobiles au départ d’une thèse ? Il y avait à prouver. Quoi ? À qui ? Un peu de tout ça je pense :

- Prouver aux professeurs de l’université qui m’ont fait confiance dont je pouvais réaliser une recherche qui soit vraiment la mienne.

- Prouver à mon institution que j’ai joué le jeu attendu. Ainsi les morceaux de recherche laissés dans ce travail que j’aurais pu « écraser » sont demeurés là, en partie du moins, pour expliquer à l’institution le chemin parcouru… L’explication officielle est : le lecteur doit pouvoir comprendre les fondements de ce qui a permis à la

recherche de démarrer. Je ne triche pas en disant cela. Ce sont mes sources théoriques de départ. Elles peuvent faire comprendre par où la recherche est passée. Il est certainement nécessaire de le faire. Mais encore ? N’y a-t-il pas aussi, ici, dans ces traces-là, une preuve à donner d’abord à l’institution ? Une preuve du chemin réalisé… Mais preuve avant tout de docilité ?

- Prouver aux Sciences de l’éducation que la pédagogie ne peut se diluer dans les différentes disciplines des sciences de l’éducation.

- Prouver aussi, et c’est peut-être le plus important, que le mouvement de l’Éducation nouvelle n’appartienne pas au seul passé.

Si j’ai ainsi voulu éprouver mon hypothèse, répondre à mes questions de recherche, accepter de m’éprouver fortement dans ce chemin, c’est que le désir de prouver était fort. Dès le départ.

Alors… Rendre un élève actif intellectuellement… Lui faire construire son savoir, comme un chercheur de métier construit un savoir, ne serait-ce pas lui offrir des conditions faisant émerger le désir de prouver, pour vouloir éprouver, et accepter de s’éprouver ?