1. Introduction
5.1. La recherche-action
Nous nous sommes placés dans une dynamique de recherche-DFWLRQ,OV¶DJLWG¶XQFKRL[QRQ
VHXOHPHQW G¶RUGUH SKLORVRSKLTXH FDU QRWUH VXMHW G¶pWXGH V¶LQWpUHVVH j O¶pGXFDWLRQ HW j OD
IRUPDWLRQ GX FLWR\HQ PDLV DXVVL HW VXUWRXW G¶RUGUH PpWKRGRORJLTXH FDU LO FRQFHUQH
prioritairement la formulation du problème, le positionnement du chercheur et la nécessité
G¶DYRLU XQH RXYHUWXUH SOXULGLVFLSOLQDLUH YRLUH WUDQVGLVFLSOLQDLUH. René Barbier (1996, 7-9),
FKHUFKHXUHQVRFLRORJLHGHO¶pGXFDWLRQSUpFLVH
« La recherche-action devient existentielle et accepteGH V¶HQTXpULU GH OD SODFH GH O¶KRPPH GDQV OD QDWXUH GH O¶DFWLRQ RUJDQLVpH SRXU OXL GRQQHU GX VHQV [...] Le chercheur en recherche-action [...] dans le cours de sa pratique est parfois sociologue, ou psychosociologue, ou philosophe, ou psychologue, ou historien, ou économiste, ou inventeur, ou militant, etc. [...] La recherche-action
HVW pPLQHPPHQW SpGDJRJLTXH HW SROLWLTXH (OOH VHUW O¶pGXFDWLRQ GH O¶KRPPH VRXFLHX[ G¶RUJDQLVHU O¶H[LVWHQFH
collective de la cité»
'DQV FHW RUGUH G¶LGpH PrPH V¶LO QRXV Hst apparu indispensable dans un
SUHPLHU WHPSV G¶REVHUYHU OHV HQVHLJQDQWV TXL PHWWHQW HQ °XYUH OHV
TICEQRWUH pWXGH V¶HVW
surtout intéressée aux autres, ceux qui ne pratiquent pas. Nous avons tenu à les associer aux
résultats, ce qui a permis de les aider à se positionner en toute connaissance de cause sur
O¶LQWpUrWSRXUHX[GHPHWWUHHQ°XYUHOHV
TICEdans leurs cours. Reprenons avec René Barbier
quelques éléments clés qui distinguent la recherche-action de la recherche classique.
5.1.1.La formulation du problème
&RPPH QRXV O¶DYRQV GpMj VRXOLJQp LO QH V¶DJLW SDV GH IDLUH GHV K\SRWKqVHVa priori que le
chercheur va essayer de valider en mesurant certaines variables prédéterminées, mais plutôt
de prendre connaissance du problème en suscitant la prise de conscience des acteurs. Comme
QRXVO¶DYRQVVRXOLJQpSUpFpGHPPHQWF¶HVWHQDGRSWDQWXQSRVLWLRQQHPHQW© du dedans » et en
V¶DSSX\DQWVXUOHVPHPEUHVGXJURXSHpWXGLpTXHQRXVSRXYRQVFRPSUHQGUHOHXUVPRWLYDWLRQV
SURIRQGHV1RXVDYRQVWRXWG¶DERUGGUHVVpXQpWDWFRQVpTXHQWGHO¶H[LVWDQWHWSURFpGpjXQH
étude de contenus de projets aboutis. La recherche-DFWLRQV¶HQULFKLWHQHIIHWGHO¶DIIURQWHPHQW
GHV WKqVHV GLYHUVHV YRLUH RSSRVpHV HW SHUPHW G¶HQ GpJDJHU OHV FRPSOpPHQWDULWpV DILQ
G¶DERXWLU DX FRQVHQVXV &HOD QRXV D fait prendre conscience, entre autres, de la
méconnaissance et du peu de prise en considération par les études dont pâtissait le groupe des
enseignants non-utilisateurs. Ensuite, afin de bien cerner les utilisateurs tout en essayant de
couvrir une typologiH G¶XVDJHV DVVH] ODUJH QRXV DYRQV SX j SDUWLU GHV UpVXOWDWV REWHQXV
pODERUHUGHVK\SRWKqVHVHWOHVWHVWHUHQPHWWDQWHQ°XYUHGHVREVHUYDWLRQVin situ. Enfin, avec
ODFRQQDLVVDQFHTXHQRXVDYLRQVDFTXLVHGHVFRPSpWHQFHVQpFHVVDLUHVSRXUPHWWUHHQ°XYUH
de façon pertinente le multimédia dans les pratiques quotidiennes des enseignants, et en
portant notre écoute attentive sur les non-utilisateurs, nous avons pu élaborer un certain
QRPEUHG¶K\SRWKqVHVDXVVLELHQHQWHUPHVGHIRUPDWLRQTX¶HQWHUPHVG¶DFFRPSagnement des
utilisateurs pour permettre aux enseignants de se positionner sur la problématique de
O¶LQWpJUDWLRQGHV
TICEdans leurs cours en connaissance de cause.
5.1.2./¶LPSOLFDWLRQGXVXMHWG¶pWXGH
La recherche-action implique les sujets dans le contexte même de la recherche. Le sujet est
SDUWLHSUHQDQWHGHO¶DFWHGHUHFKHUFKHLOHVWDFWHXUDXVHQVSOHLQGXWHUPHLOGRLWFRPSUHQGUH
la totalité de son action. On est loin de la notion de sujet cobaye. Évidemment les individus
VRQW VRXUFHV G¶LQIRUPDWLRQ PDLV LOV VRQW FRQVLGpUpV DXWUHPHQW TX¶HQ WDQW TX¶XQLWpV
statistiques. Dans le projet
AUPEREL, nous avons associé deux enseignants à tous les groupes
de réflexion. Ils ont collaboré étroitement et ont pesé de tout leur poids, notamment au cours
de la première phDVH G¶REVHUYDWLRQV HW G¶DQDO\VH GHV SUDWLTXHV ,OV RQW FRQWULEXp j
O¶pODERUDWLRQ GHV RXWLOV HW j O¶pFULWXUH GHV UpVXOWDWV 'DQV OH PrPH RUGUH G¶LGpH QRXV DYRQV
demandé à quelques enseignants impliqués dans les observations de rédiger des récits. Enfin,
chDTXHHQWUHWLHQDpWpYDOLGpSDUO¶LQWHUYLHZp/HVHQVHLJQDQWVVRQWGRQFDVVRFLpVjO¶pFULWXUH
et, de manière réflexive, peuvent ainsi analyser leurs pratiques et les modifier au fur et à
PHVXUHGHO¶DYDQFHPHQWGXSURMHW
5.1.3.La collecte de données
René Barbier DIILUPH TX¶LO Q¶\ DXUDLW SDV GH UHFKHUFKH-DFWLRQ VDQV OH SULQFLSH G¶pFRXWH
sensible (Barbier 1996, pp 65-TXLPHWHQMHXjODIRLVO¶HPSDWKLHHWODFRQJUXHQFHGDQV
WRXV OHV UDSSRUWV KXPDLQV GX SURFHVVXV GH UHFKHUFKH /¶HPSDWKLH XQH SUDWLTXH LVVXH GH Oa
SV\FKDQDO\VH SHUPHW O¶pFRXWH G¶DXWUXL VDQV SRUWHU GH MXJHPHQW VDQV PHVXUHU HW VDQV
FRPSDUHU/HFKHUFKHXUGRLWWRXWPHWWUHHQ°XYUHSRXUFRPSUHQGUHOHVXMHWVHQWLUVRQXQLYHUV
affectif, imaginaire et cognitif. Il doit situer celui-ci dans son contexte social, dans son
V\VWqPHG¶LGpHVHWGHYDOHXUV/DFRQJUXHQFHHVWDXVHQVpW\PRORJLTXHEUXWODIDFXOWpGHVH
UHQFRQWUHUHWGHFRQFRUGHU(QIDLWLOV¶DJLWOjGHFRPPXQLTXHUDYHFOHVXMHWGHGpYRLOHUVHV
propres idées, ses motivations et ses émotions. Dans un dialogue, il faut que la
communication passe dans les deux sens. Cette attitude permet une mise en confiance
mutuelle et un partage plus facile des objectifs, donc une dynamique plus forte. Ces deux
SULQFLSHV SHUPHWWHQW G¶pWDEOLU OH FOLPDW GH FRQILDnce au sein du groupe de recherche, bien
HQWHQGXPDLVpJDOHPHQWDYHFOHVHQVHLJQDQWVTXLDFFHSWHQWGHSDUWLFLSHUDXSURMHW&¶HVWGDQV
FHWHVSULWTX¶RQWpWpPHQpHVWRXWHVOHVLQWHUYLHZVVHPL-directives, lesquelles se sont révélées
très riches lorsque cette relation authentique était établie. Il est rare que dans un entretien, il
ne soit pas possible de trouver des motivations communes et de partager des passions avec la
SHUVRQQHTXHO¶RQLQWHUYLHZH&HSHXWrWUHODPXVLTXHOHVSRUWRXWRXWHDXWUHDFWLYLWp TXLQ¶D
pas forcément un rapport direct avec le sujet mais qui permet de partager une position
commune et donc de créer les conditions de la confiance. Certes il est parfois difficile de ne
SDVLQIOXHQFHUVRQLQWHUORFXWHXU/DFRUGHHVWUDLGHHWO¶LQWHUYLewer doit rester en permanence
FRQFHQWUp VXU VRQ VXMHW SRXU QH SDV SHUGUH OH ILO GH O¶HQWUHWLHQ 1RXV YHUURQV TXH FHWWH
PpWKRGH D SHUPLV G¶DSSURIRQGLU OH GLDORJXH HW TXH OHV HQVHLJQDQWV RQW SX DLQVL © avouer »
quelques raisons pour lesquelles ils ne pratiquaient pas les
TICEen classe.
5.1.4.Analyse et interprétation des résultats
(QUHFKHUFKHDFWLRQLOHVWDGPLVTXHO¶rWUHKXPDLQSURGXLWGHVGLVWRUVLRQVGXHVDXFDUDFWqUH
inhabituel et artificiel de la situation, qui peuvent être prises pour la réalité. Le chercheur,
sensible à cet état de fait, doit en tenir compte dans ses conclusions. Pour cela, il communique
OHV UpVXOWDWV DX[ PHPEUHV LPSOLTXpV TX¶LO DVVRFLH j OD UpGDFWLRQ GH FHUWDLQV GRFXPHQWV
(relecture, réactions et validation, entre autres, de ce qui les concerne directement : interviews,
récits, etc.), ce qui ne signifie pas bien sûr que tout écrit soit collaboratif. Le langage doit être
DFFHVVLEOH j WRXV FH TXL Q¶HPSrFKH QXOOHPHQW OHV FRPPXQLFDWLRQV GDQV GHV UHYXHV
spécialisées, lors de conférences ou de colloques. Il faut cependant noter que la recherche
action SRVHVDQVGRXWHSOXVGHTXHVWLRQVTX¶HOOHQ¶HQUpVRXW
5.1.5.La recherche-action et le changement
René Barbier (1996, 75) cite à ce sujet Ardoino
« la recherche-DFWLRQYLVHDXFKDQJHPHQWG¶DWWLWXGHVGH SUDWLTXHV GH VLWXDWLRQV GH FRQGLWLRQV GH SURGXLWV GH GLVFRXUV«HQ IRQFWLRQ G¶XQ SURMHW-visée »
. Il est
important de préciser que nous ne nous sommes pas positionnés en moteur du changement,
nous visions simplement à donner aux acteurs des éléments leur permettant de mettre en
°XYUHFHFKDQJHPHQWDYHFGLVFHUQHPHQW1RXVSUpIpURQVQRXVSRVLWLRQQHUFRPPHDFWHXUVGX
TXHVWLRQQHPHQW GDQV O¶HVSULW TXH SUpFLVH %DUELHU
« la recherche-action est toujours unTXHVWLRQQHPHQWSROLWLTXHDXVHQVG¶XQHRUJDQLVDWLRQ de la cité »
. Notre travail doit participer à la remise
HQFDXVHUpIOH[LYHGHOHXUVKDELWXGHVSDUOHVDFWHXUVTX¶LO\DLWRXQRQXQFKDQJHPHQWGHYDQW
conduire à un nouvel équilibre. Nous cherchons en fait à étudier quelle forme de réponse
donnent ou pourraient donner les enseignants dans leur environnement en perpétuelle
évolution. Nous avons pu ainsi observer différentes attitudes chez les enseignants qui
GpFRXYUDLHQWDXWUDYHUVG¶XQHYLGpROHXUVSUDWLTXHVRXOHVSUDWLTXHVGHOHXUVFROOqJXHV1RXV
avons G¶DLOOHXUV UHPDUTXp TX¶LO pWDLW VRXYHQW SOXV IDFLOH SRXU HX[ G¶DSSUpKHQGHU de façon
réflexive ce que faisait leur voisin. '¶XQH PDQLqUH générale, il nous semble, et cela paraît
normal, que les enseignants qui mettent HQ°XYUHUpJXOLqUHPHQWOHV
TICEen classe analysent
DYHF EHDXFRXS SOXV GH SHUWLQHQFH OHV SUDWLTXHV 4XDQG RQ SDUOH GH SHUWLQHQFH LO V¶DJLW
essentiellement de donner un avis qui repose sur une argumentation raisonnée et qui ne soit
pas, par exemple, influencé par le discours officiel plutôt positif, que nous avons mis en
évidence dans la première partie de cette étude. Les enseignants praticiens se montrent très
FULWLTXHV QRWDPPHQW VXU OHV HIIHWV EpQpILTXHV GH O¶DSSRUW GHV
TICEdans les apprentissages.
Nous avons noté cette tendance dans le projet
CELEBRATEpar exemple. Leur résistance se
trouve ainsi motivée par un regard très lucide, sans concession. Nous avons observé très peu
GH VpDQFHV GRQW OH VHXO REMHW pWDLW G¶RFFXSHU OHV HQIDQWV ,O VHPEOHUDLW FHSHQGDQW TXH FHV
activités « passe-temps » existent. Il faudrait une étude plus approfondie sur ce sujet.
Dans le document
Les TICE en classe : de l'analyse des usages à l'analyse des non-usages
(Page 107-111)