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Le rapprochement entre la publicité foncière et le livre foncier

Chapitre premier : La réglementation de la publicité foncière

Section 2 : La publicité foncière en droit français

B. Le rapprochement entre la publicité foncière et le livre foncier

177. La publicité foncière en France, comme précédemment étudiée, est en

grande partie réglementée par les décrets du 4 janvier et du 14 octobre 1955. Le système est à effet purement confortatif des droits. Toutefois, cette conception de la publicité foncière a évolué grâce aux solutions jurisprudentielles et notamment en ce qui concerne le rôle du Conservateur des hypothèques (1), et au recours du législateur à une technique proche de celle de la prénotation (2). Un système médian à mi- chemin de la publicité foncière et du livre foncier a vu le jour, et ses effets sont à évaluer (3).

1. Le rôle des Conservateurs des hypothèques

178. La jurisprudence a réussi, au fur et à mesure, à trouver des solutions

appropriées aux échecs du système foncier et à atténuer les citriques qui lui ont été

adressées. Tel est le cas du rôle des Conservateurs des hypothèques100.

179. L’article 3 du décret du 4 janvier du 1955 pose le principe de l’effet

relatif. Mais une difficulté d’application de cette règle est apparue en cas d’inscription d’une sûreté ou d’une publication d’un droit alors que l’immeuble a déjà

99 Un paragraphe spécial sera consacré pour l’étude de la technique de prénotation : v. infra n° 182 et

s.

100 Un apport jurisprudentiel aussi important que celui-ci sera étudié au chapitre suivant, du fait qu’il

été vendu. Plus précisément, c’est la notion du « disposant ou dernier titulaire »101 qui nécessitait d’être interprété. En revanche, les Conservateurs des hypothèques ne jouaient qu’un rôle passif. En effet, ceux-ci « estimaient que leur responsabilité personnelle serait moins engagée s’ils acceptaient de publier des documents visant d’anciens propriétaires que s’ils refusaient de le faire, étant donné que les documents en question pouvaient éventuellement être déclarés valables par les tribunaux »102. Mais cette position conduisait à créer des doubles chaînes de propriété en matière de publication. Ni la jurisprudence103 ni la doctrine104 n’ont été favorables à la position des Conservateurs des hypothèques.

Pour faire face à cette situation, le législateur est intervenu par le décret n° 67- 1252 du 22 décembre 1967 pour lequel, selon son article 2, complétant l’article 34-2 du décret du 14 octobre 1955, « il n’y a pas discordance lorsque le titre de la personne indiquée comme disposant ou dernier titulaire, au sens du 1 de l’article 32, a cessé, postérieurement à sa publication au fichier immobilier, de produire tout ou partie de ses effets en raison d’un acte ou d’une décision judiciaire ultérieurement publiée ». Ainsi, la solution était en faveur des Conservateurs des hypothèques.

Cependant, la situation va être bouleversée ultérieurement par un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation rendu le 12 juin 1996105. Cet arrêt, dit HEDREUL, a condamné le créancier et les héritiers du Conservateur des hypothèques pour avoir inscrit une sûreté sur un bien n’appartenant plus au débiteur. La Cour de cassation a affirmé que le Conservateur des hypothèques est tenu de « s’assurer de la concordance du document déposé et des documents publiés antérieurement ». À défaut, celui-ci doit rejeter la formalité de l'inscription sous peine d’engager sa responsabilité pour faute professionnelle. Cette décision a été accueillie positivement par la doctrine, alors même qu’elle contredit le décret du 22 décembre

101

Art. 34-2 du décret du 14 oct. 1955.

102 P. FRÉMONT, « Vers la fin de la publicité foncière des actes et des inscriptions hypothécaires

concernant un ancien propriétaire » : JCP N 1997, I, 53, n° 13.

103

CA Paris, 29 nov. 1968 : D. 1969, 401.

104 M. DAGOT, « L’arrêt du cours des inscriptions hypothécaires, Portée de la règle » : JCP N 1979,

I, 63 et s.

105 Cass. 3e civ., 12 juin 1996 : Bull. civ. III, n° 145 ; D. 1997, 257, obs. S. PIEDELIÈVRE ; Rev. dr. immo. 1997, 114, obs. Ph. DELEBECQUE et Ph. SIMLER.

1967106. Un arrêt en date de 18 juillet 2001 est venu confirmer ce revirement107. Quant à l’interprétation de cette politique, les auteurs estiment que la qualité de disposant ou dernier titulaire doit être appréciée en fonction des indications du fichier

immobilier, et non des documents déposés108.

180. L’évolution du rôle des Conservateurs des hypothèques ne s’arrête pas à

ce point. Leur pouvoir a été élargi également en matière de refus et de rejet.

En effet, aux termes de l’article 2452 du Code civil, en dehors des cas où ils sont fondés à refuser le dépôt ou rejeter une formalité, les Conservateurs des hypothèques ne peuvent refuser ni retarder l’exécution des formalités qui leur sont

requises. Ainsi, les Conservateurs ne disposent que d’un pouvoir limité109. Toutefois,

par le moyen des procédures de refus ou de rejet, les Conservateurs se contentent d’un pouvoir d’appréciation sur la validité de l’acte : la forme des actes, le respect du principe de l’effet relatif de la publicité, l’admissibilité du droit à l’inscription, la capacité des parties et la réalité des pouvoirs d’éventuels représentants110.

Ultérieurement, la jurisprudence a conféré aux Conservateurs un rôle plus important dans l’appréciation de la validité de la procédure de rejet. Dans un arrêt en date du 29 novembre 2000111, la Cour de cassation a affirmé que le délai prévu à l’article 34-3 du décret du 4 janvier 1955 s’impose au Conservateur des hypothèques et que les termes de cet article « ne lui laissant, sur ce point, aucune latitude puisqu’ils précisent « la formalité est rejetée ». Par conséquent, la Haute juridiction a énoncé que la cour d’appel qui retient que le Conservateur qui n’avait pas « respecté ces prescriptions en acceptant une régularisation hors délai, peut « en déduire, sans excéder l’étendue de ses pouvoirs ni violer les articles 6 et 13 de la Convention

106 P. FRÉMONT, op. cit., n° 41 : « L’arrêt du 12 juin 1996 présente, pour les usagers, des aspects

avantageux, à tel point qu’il est permis de se demander si la Cour de cassation n’a pas surtout eu en vue ces avantages en rendant cet arrêt qui va manifestement à l’encontre du texte actuel du paragraphe 2 d e l’article 34 du décret du 14 octobre 1955 ».

107

Cass. 3e civ., 18 juill. 2001 : Bull. civ., III, n° 100.

108 S. PIEDELIÈVRE, « Chronique de jurisprudence civile générale » : Défrenois 2001, art. 37424, n°

82.

109

Cass. 3e civ., 14 mars 1968 : Bull. civ., III, n° 115 ; JCP G 1968, II, 15536, note H. BULTÉ.

110 Ph. SIMLER et Ph. DELEBECQUE, Traité de droit civil, Les sûretés, la publicité foncière, Précis

Dalloz, 6ème éd., 2004, p. 811, n° 918.

111 Cass. 3e civ., 29 nov. 2000 : Bull. civ., III, n° 181, p. 126 ; JCP N 2001, 654 et s., obs. A.

européenne des droits de l’homme », qu’il « avait bien commis, dans l’exercice de ses fonctions, une faute ».

Cependant, ce pouvoir n’est pas sans contrôle. Le recours contre la décision de rejet a été institué en 1955. Ensuite, la loi n° 98-261 du 6 avril 1998 a consacré la possibilité de recours contre la décision du Conservateur des hypothèques sans distinction entre un rejet et un refus. Or, cette uniformisation ne nie pas que les conséquences du recours ne sont pas les mêmes dans les deux cas. Selon l’article 26 du décret du 4 janvier 1955 modifié par la loi du 6 avril 1998, la formalité litigieuse est soit définitivement refusée ou rejetée, soit exécutée dans les conditions ordinaires. Dans la première hypothèse, un nouveau dépôt de l’acte après sa régularisation doit être effectué. Dans la seconde hypothèse, la situation diffère si la décision concerne un rejet ou un refus. En cas de rejet, la formalité prendra rang à la date de l’enregistrement du dépôt. Mais en cas de refus, la procédure de publicité devra être recommencée et prendra rang à la date de la nouvelle remise et non à celle de la première112.

181. En définitive, le rôle du Conservateur des hypothèques a été renforcé

après une longue période où il était « tenu d’obéir aux réquisitions régulières qui lui sont présentées, sans pouvoir discuter la valeur juridique des actes qui sont produits »113. Le rapprochement entre le système du livre foncier et celui de la publicité foncière est limpide. Mais cette remarque ne concerne pas seulement les pouvoirs du Conservateur des hypothèques. Elle s’étend même à procédure de la prénotation.

2. La prénotation

182. Le législateur a raisonnablement abandonné la publicité foncière à

caractère purement personnel au profit d’un système mixte en vue de rendre la formalité de publicité plus fiable. Une innovation appréciable fut adoptée par le législateur permettant de mieux protéger les acquéreurs des droits. C’est la technique

112 A. MUSSOC-MANDRE, « Le contrôle juridictionnel de la validité des décisions des conservateurs

des hypothèques affecte-t-il la sécurité des transactions immobilières et du crédit hypothécaire ? » :

de la prénotation utilisée dans le système du livre foncier, néanmoins introduite de façon plus simple en droit français.

183. La prénotation permet aux intéressés de publier leurs actes de manière

provisoire en attendant que la formalité définitive se réalise. Dès lors que l’inscription définitive s’achève, l’acte prend rang à la date de la première inscription au registre des dépôts. En aucun cas le terme « prénotation » n’a été utilisé. Pourtant, le mécanisme existe. De fait, les actes visés à l’article 37-2 du décret du 4 janvier 1955, présentés précédemment, ne sont pas les seuls concernés par la technique de la prénotation. Monsieur PIEDELIÈVRE cite, en outre, l’inscription conservatoire

d’hypothèques et « la formalité en attente »114. Concernant la première, selon la loi du

9 juillet 1991, le créancier qui dispose d’une autorisation judiciaire peut prendre une inscription provisoire conservant sa sûreté pendant trois ans et le débiteur doit être informé de cette mesure dans les huit jours qui suivent. Quant à la deuxième, elle désigne la formalité en cours de régularisation suite à une décision de rejet.

Il en résulte ainsi que cette procédure n’est pas instituée en vue de protéger l’intérêt des tiers, mais celui de la partie faible soucieuse de perdre ses droits légitimes115. C’est pour cette raison qu’il serait intéressant de généraliser la prénotation. En effet, la signature de l’acte authentique n’est pas parfaitement sécurisée. L’état de l’immeuble peut être affecté par des inscriptions ou des mutations pendant la période comprise entre la délivrance de l’état obtenu par le notaire et la publication. Ainsi, vu la nécessité de stabiliser et de garantir la situation de l’immeuble, il convient d’admettre une publication provisoire de l’avant-contrat, assortie d’opposabilité, et la rétroactivité de la publication définitive de l’acte.

184. Pourtant, le législateur n’a pas opté pour une prénotation généralisée. Les

effets de cette technique dans le système de livre foncier ne peuvent être restreints puisque le contrat entre les parties ne réalise pas la transmission ou la constitution des

113

R. NERSON, « La réforme de la publicité foncière (Décrets des 4 janvier et 14 octobre 1955) » :

D. 1959, chron. 223.

114 A. PIEDELIÈVRE, « Promesse unilatérale de vente immobilière et prénotation » : Defrénois 1975,

art. 30960, 973.

115

droits mais se limite à créer des obligations personnelles. La prénotation contribue donc à la protection des parties et à atténuer les risques que peuvent engendrer la publication d’un autre acte soumis à publicité. Au contraire, dans le système de la publicité foncière, les parties restent engagées, même à défaut de publicité. Par conséquent, le recours à une prénotation au sens large n’est pas opportun, et risque même de nuire au contractant. Le délai de traitement des formalités par la Conservation des hypothèques serait plus long et aurait un coût plus élevé, alors qu’il existe une forte possibilité de pouvoir signer l’acte authentique sans qu’un conflit n’intervienne.

En somme, le législateur français a réussi à faire intégrer dans le système de la publicité foncière une technique suivie dans le système du livre foncier, d’une manière appropriée, fidèle à l’inspiration du droit de la publicité foncière français.

3. Appréciation de l’évolution du système foncier français

185. Le système du livre foncier, comme nous avons pu le constater

concernant le registre foncier libanais, est réputé pour sa capacité à mieux répondre au besoin de sécurité des usagers que le système de la publicité foncière. Cependant, un progrès remarquable a été réalisé en droit français dans le but de rendre l’institution de la publicité foncière plus efficace. Paradoxalement, la publicité foncière arrive à assurer un seuil de sécurité pour les usagers qui lui permettra d’être comparé au livre foncier.

En effet, d’une part, le système du livre foncier est en principe plus protecteur pour le tiers ; la constitution des droits étant soumise à leur inscription au registre foncier. Aussi, dans l’absence de délais d’inscription, l’insécurité sera réduite. Cependant, en droit français, où le retard de traitement dans l’alimentation et la consultation du fichier immobilier est remarquable, le législateur essaie de surmonter ce risque par le moyen de l’informatisation des bureaux des hypothèques. Les efforts portent en effet sur la possibilité de rendre accomplissable la vérification de la situation hypothécaire de l’immeuble, les signatures des parties et la publication de l’acte le même jour116.

116 L. n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de

D’autre part, le livre foncier offre aux usagers « une sécurité accrue »117 par le biais de la force probante. Au contraire, le fichier immobilier en droit français n’est qu’un « instrument technique destiné à guider les recherches du Conservateur afin de retrouver la trace des formalités dont il est fait mention au registre des dépôts. Les énonciations figurant sur les différentes fiches qui le composent ne sauraient par elles-mêmes faire foi »118.

Pourtant, à l’instar du livre foncier, le système foncier français permet lui aussi, grâce au concours de la jurisprudence et de la pratique, de protéger les usagers et d’empêcher la remise en cause de l’acte publié. Les textes de loi ne font aucune référence à la force probante de la publication ou même à la validité de l’acte publié. Mais, si en droit français la publicité ne purge pas l’acte de ses vices, tout acte fait l’objet d’un contrôle avant qu’il ne soit porté à la connaissance des tiers. La majorité des actes déposés à la conservation des hypothèques, lesquels doivent en principe être authentiques, sont constatés par un notaire. Celui-ci, exerçant ses fonctions sous peine d’engager sa responsabilité, vérifie le droit de propriété, la situation hypothécaire du bien et la capacité des parties119. De même, le Conservateur des hypothèques prendra soin de contrôler formellement l’acte lors du dépôt en identifiant

les parties et les biens. En outre, depuis l’arrêt HEDREUL120, les usagers ne craignent

plus les inscriptions prises par le chef d’un précédent acquéreur.

Un reproche reste à adresser à l’institution française dans le cas où un conflit resurgit avant l’inscription. Alors que dans le système du livre foncier, le créancier se contente d’un droit personnel à l’égard de son débiteur, lequel est condamné à des dommages intérêts, en revanche, en droit français l’acte peut être annulé après avoir produit des effets. Ainsi, le livre foncier présente, selon Monsieur LEMAIRE, « un bien maigre avantage, même si, en pratique, cette solution a le mérite de simplifier les suites de la procédure »121.

aux actes établis par les notaires, qui doit permettre l’apposition sur l’acte notarié, visible à l’écran, de l’image de la signature manuscrite des parties et des témoins.

117 M. DAGOT, op. cit., p. 20. 118

A. FOURNIER, op. cit., n° 230.

119 J. DE POULPIQUET, « Notaire », Rép. Civ. 2009, n° 296 et s.

120 Cass. 3e civ., 12 juin 1996 : Bull. civ. III, n° 14 ; D. 1997, 257, obs. S. PIEDELIÈVRE ; Rev. dr. immo. 1997, 114, obs. Ph. DELEBECQUE et Ph. SIMLER.

121

186. Actuellement, le système de la publicité foncière est le fruit d’une

politique tendant à éviter les inconvénients du système strictement personnel ou strictement réel. Certes, cette politique législative et jurisprudentielle est à saluer, surtout au vu des obstacles qui se sont opposés au cours de son processus d’évolution. Cependant, la conciliation entre les principes des deux systèmes fonciers sans porter atteinte aux règles du droit commun français était un véritable défi.

En premier lieu, une contradiction entre l’esprit du droit français et le droit de la publicité foncière peut être soulignée. Les rédacteurs de la réforme du 1955 ont pris le soin de préserver le principe du consensualisme. La validité des actes juridiques n’est soumise à aucune condition particulière de forme. Les parties créent le droit par le seul consentement. L’opposabilité ne vient que le renforcer. Pourtant, suite à l’évolution du système foncier, l’accord des volontés ne permet plus, en pratique, à l’acte de produire tous ses effets. L’acte, pour assurer son efficacité, doit être immédiatement publié, selon Monsieur FLOUR « dans l’exigence d’une forme déterminée par la loi et à défaut de laquelle la manifestation de volonté se trouve

frappée d’inefficacité à un degré quelconque »122. L’exemple le plus fréquent est celui

du propriétaire d’un bien immobilier bénéficiant d’un crédit auprès d’une banque. Celui-ci signe un acte de prêt faisant ultérieurement objet d’une sûreté réelle. Le créancier, alors même que l’acte est valable entre les parties, se hâte d’inscrire sa sûreté. À défaut, la garantie est censée être moins utile et la possibilité d’être payé sera plus faible.

En revanche, même si le législateur renforce le formalisme en matière de publicité foncière, le maintien du principe du consensualisme et des principes du droit commun n’a pas été entièrement rejeté. La jurisprudence l’ordonne notamment en cas

de mauvaise foi du second acquéreur123.

En second lieu, la publicité foncière constitue une menace pour les parties. L’article 3 du décret du 4 janvier 1955 exige la publication préalable du titre du disposant. Ainsi, le droit du disposant se trouve affecté ; aucun transfert ou mutation

122 J. FLOUR, « Quelques remarques sur l’évolution du formalisme », in Le droit privé français au milieu du XXe siècle, Études offertes à Georges RIPERT, T. 1, L.G.D.J., 1950, p. 93.

123 Cass. 3e civ., 22 mars 1968 : D. 1968, 412, note J. MAZEAUD ; JCP G 1968, II, 15587, note A.

ne sera faisable vu les délais nécessaires pour accomplir la formalité. C’est pourquoi, le décret du 14 octobre 1955 tempère cette difficulté en prévoyant que le titre du disposant peut être publié simultanément. Toutefois, si le législateur a réussi à limiter l’atteinte de la publicité foncière à la liberté du disposant, les apports jurisprudentiels, contrairement à l’esprit des rédacteurs du décret du 4 janvier 1955, restent de grande incidence sur les effets de l’accord et de la volonté des parties. En effet, le Conservateur des hypothèques est tenu de veiller à la conformité des actes déposés aux textes régissant la publicité foncière. En plus de son rôle de juge de propriété, le Conservateur est devenu également juge de refus ou de rejet de la formalité. Par conséquent, les pouvoirs du Conservateur des hypothèques contraignent les parties, d’une façon ou d’une autre, à adapter l’acte constatant leur volonté à la publicité foncière, et non l’inverse.

Cependant, malgré ces inconvénients, il est indéniable que la sécurité du commerce juridique offerte par le système actuel est plus efficace. L’évolution ne s’est imposée ainsi que dans le but d’être plus performant.

187. Les législateurs français et libanais, suite aux circonstances historiques et

politiques, ont adopté deux systèmes qui se distinguent quant à la conception de la publicité foncière. De plus, chacun de ces systèmes se contente de ses propres caractéristiques techniques. Cependant, l’opposition entre ces deux systèmes juridiques n’est pas inconciliable. L’examen de l’efficacité de la législation foncière en pratique dans les deux pays, la France et le Liban, peut servir notre démonstration.

Chapitre second : La performance de la législation foncière quant à