• Aucun résultat trouvé

L’article 1382 du Code civil impose à toute personne l’obligation de

Chapitre second : La protection des tiers contre l’inexécution contractuelle

Section 1 : Les obligations des contractants

A. Des obligations de sécurité des personnes et des biens

62. L’article 1382 du Code civil impose à toute personne l’obligation de

prudence et de diligence. Incontestablement, le contractant doit tenir compte de ce devoir général en exécutant son contrat. À défaut, le tiers peut se prévaloir de la faute du contractant et agir contre lui sur le fondement de la responsabilité délictuelle. Autrement dit, le débiteur sera sanctionné pour toute atteinte à la sécurité des personnes causée par sa faute lors de l’exécution de ses obligations.

Avant la réglementation actuelle4, l’exemple fréquent était celui du

constructeur automobile qui doit impérativement livrer des voitures dans un bon état

4 En effet, d’une part, en ce qui concerne le contrat passé entre le propriétaire d’un véhicule et le

constructeur ou dans la pratique le concessionnaire, le premier bénéficie, lorsque l’automobile révèle un défaut de fabrication, de la garantie légale de conformité conformément à l’article L. 211-4 du Code de la consommation. Celui-ci peut aussi utiliser la garantie légale des vices cachés résultant de l’article 1641 du Code civil selon lequel : « le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de al chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus ». (Cass. Com. 11 juin 1954 : D. 1954, 697 ; Gaz. Pal. 1954, II, 285 ; RTD Civ. 1955, 128, obs. J. CARBONNIER). D’autre part, la loi impose actuellement de se doter d’un contrat d’assurance au tiers en responsabilité civile couvrant tous les dommages pouvant être causés à la personne ou aux biens d’autrui (Article L. 211-1 du Code des assurances).

général. Dans le cas contraire, celui-ci sera responsable de tout éventuel accident que les vices de construction peuvent provoquer. En effet, la chambre des requêtes de la Cour de cassation a affirmé que l’article 1382 du Code civil ne peut pas être invoqué en ce qui concerne une faute commise dans l’exécution d’une obligation contractuelle. Seuls les tiers étrangers au contrat sont en droit de faire appel à son

application5. Les victimes d’un accident causé par une automobile et dû à un vice de

construction de la voiture sont considérées comme tiers au contrat passé entre le constructeur et le propriétaire du véhicule. Dès lors, elles seront autorisées à réclamer au constructeur, en leur nom propre, la réparation du préjudice occasionné par l’accident. En l’espèce, selon le contrat de vente, la Société Mathis constructrice de la voiture n’était engagée envers son acquéreur qu’à la seule garantie des accidents mécaniques qui peuvent arriver à la voiture. Cependant « cette clause n’est pas exclusive de la responsabilité délictuelle ou quasi-délictuelle que le constructeur est susceptible d’encourir ». La Cour de cassation a en effet retenu la responsabilité du constructeur puisqu’il a été constaté que l’accident de voiture est dû à une défectuosité des freins, et « que cette mauvaise conception du système de freinage constitue une faute lourde » à sa charge exclusive.

De même, un acheteur d’une machine « sécheuse-repasseuse » blessé au cours de son utilisation a demandé à la société vendeuse, ainsi qu’à la société distributrice de ces machines, la réparation du préjudice qu’il a subi. Il a été constaté que la sécurité de l’appareil vendu n’était pas correctement assurée par la société vendeuse, et que la société concessionnaire avait procédé au montage et à la mise en service de la machine. Par conséquent, les juges du fond ont retenu que le monteur de la société distributrice « n’a pas mis les utilisateurs en garde contre le vice de la machine dont ladite société ne pouvait ignorer la défectuosité et que la notice technique remise aux acheteurs n’était pas explicite sur le danger présenté par cette machine ». Conformément à ces constatations, la Cour d’appel a retenu la responsabilité du concessionnaire fautif à l’égard des tiers victimes sur le fondement de l’article 1382 du Code civil. Sa décision a été confirmée par la Cour de cassation qui a rejeté le pourvoi6.

5 Cass. Req. 7 oct. 1940 : D. 1940, 180. 6

Dans l’affaire suivante, la Haute juridiction a approuvé l’arrêt de la Cour d’appel ayant retenu la responsabilité délictuelle d’un entrepreneur défaillant envers un tiers lésé7. Il s’agissait d’un motocycliste qui avait glissé en circulant près d’une carrière sur un chemin départemental desservant un chantier d’autoroute. L’entrepreneur « n’avait pas respecté les obligations résultant de son marché de travaux d’entretenir et de maintenir en bon état des voies publiques constituant l’itinéraire de transport jusqu’au chantier de l’autoroute », et n’avait pas signalé non

plus la présence d’une boue laissée sur la chaussée pardes engins de chantier.

Dans une autre affaire, un enfant s’est coincé le pied en descendant un escalier mécanique dans un magasin. La Cour d’appel a relevé que cet escalier présentait un certain nombre de défauts qui avaient déjà provoqué plusieurs incidents impliquant des enfants chaussés de bottes en caoutchouc. De plus, ce sont ces mêmes défauts qui ont entraîné le blocage du pied de l’enfant entre la plinthe et la contremarche mobile. La Cour de cassation a alors constaté que le manquement de la société ayant fourni l’appareil en cause à ses obligations contractuelles de constructeur, de vendeur et d’installateur, constitue également une faute délictuelle à l’égard de l’enfant victime de l’accident8.