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Type II : les bourgs et bourgades se distinguant des villes précédentes par l’absence

1.5. Nouveaux corpus et projets

1.5.2. La région Centre, publication de la table ronde d’Orléans

En 2004, dans le cadre du PCR sur la région Centre, une table ronde sur les agglomérations est organisée sous la direction de C. Cribellier et d’A. Ferdière. La publication de cette table ronde fait l’objet du supplément 42 de la RACF, en 2012. C. Cribellier dans un premier article historiographique sur l’étude des agglomérations en région Centre, justifie le choix d’utiliser dans le cadre du PCR le terme d’agglomération dans la définition donnée par M. Mangin (Cribellier 2012 : 9). Il fournit également la liste des agglomérations de l’ensemble des cités présentes en région Centre (ibid. : 11). À sa suite, C. Hervé s’évertue à réaliser une synthèse pour la cité des Turons (5 agglomérations attestées et 21 potentielles). Elle note que la première agglomération est à 10 km du chef-lieu, les suivantes au-delà de 31 km (Hervé 2012 : 29). La synthèse débute par la topographie et l’organisation urbaine des agglomérations qui apparaît mal connue en l’absence de plans complets. Il en ressort cependant l’importance du réseau viaire principal avec des installations le long d’un axe ou à

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un carrefour (ibid. : 30). L’étendue des sites, limitée par les nécropoles, est difficilement perceptible puisque seules 11 nécropoles sont connues (ibid. : 32). Différentes activités artisanales ont été recensées au sein des agglomérations : terre cuite, tabletterie, tissage, métallurgie, carrières, verre (ibid. : 37). Une tentative de classement en 4 rangs en fonction de l’évaluation, subjective, de l’importance des fonctions est proposée en synthèse (ibid. : 41-42). L’attribution d’une valeur d’importance aux fonctions présentes au sein des agglomérations ne repose malheureusement que sur l’image que le chercheur peut s’en faire au regard de la documentation disponible. En l’absence de réels critères qualitatifs et quantitatifs il est nécessaire de rester prudent sur ce genre d’exercice. L’étude chronologique de l’occupation des sites montre une rupture à la fin du IIe siècle ou au début du IIIe siècle.

É. Roux et J.-P. Chimier proposent de s’interroger sur la place de l’artisanat au sein des agglomérations. Pour eux, « les agglomérations sont les acteurs essentiels d’un vaste réseau économique au sein d’une cité à la fois productrice et consommatrice […] et elles possèdent dans la majorité des cas des structures de production » (Roux, Chimier 2012 : 85). La présence d’un artisanat est soumis par les auteurs à trois niveaux de fiabilité : 1 = mentions anciennes de structures de productions ou de déchets ; 2 = artisanats supposés dont le contexte est connu avec la présence de structures de fabrication ou d’abondants déchets ; 3 = productions attestées par des structures de fabrication ou des outils et par des produits finis ou des déchets (ibid. : 86). L’étude montre qu’il est délicat en l’absence d’études suffisantes de faire la partition entre production d’objets et atelier privé pour l’entretien et la réparation. Les espaces funéraires, traités par P. Georges, peuvent apparaître comme un critère de détermination d’un site comme agglomération, notamment lorsque celle-ci n’est pas connue (Georges 2012 : 104). Pour l’auteur, si la vie prend place dans l’habitat, la mort trouve sa place dans la nécropole. Cependant, il met en avant qu’il n’est pas nécessaire que chaque agglomération dispose de sa propre nécropole (ibid. : 107). L’étude des cas de la région Centre l’amène à constater que le modèle urbain de l’emplacement de la nécropole ne semble pas s’appliquer de manière systématique dans le contexte des agglomérations secondaires (id.). L’évolution des agglomérations durant le haut Moyen Âge, étudiée par S. Jessé dans le Loiret, offre trois possibilités : les agglomérations antiques distinctes du bourg actuel et sans traces d’occupation au haut Moyen Âge, celles dont l’occupation au HMA connaît un glissement de quelques centaines de mètres, celles dont les occupations se superposent complètement ou partiellement (Jessé 2012 : 112). Les sites réoccupés au haut Moyen Âge ne présentent pas de phénomène de perchement lorsqu’il y a déplacement mais au contraire plutôt en direction de la vallée (ibid. : 128). Les carrefours routiers montrent un rôle

81 important dans la fixation pérenne d’une occupation. Sur les mêmes problématiques d’occupation au haut Moyen Âge, l’article sur la Touraine de A. Moreau et É. Zadora-Rio met à mal le postulat de la présence systématique d’une agglomération antique à l’emplacement d’un vicus mérovingien (qui devient une affirmation dès la découverte du premier tesson antique). Elles affirment que l’état des recherches actuelles est loin d’appuyer cette proposition et qu’au contraire on ne peut plus ignorer l’existence de créations aux Ve et VIe siècles (Moreau, Zadora-Rio 2012 : 131). M. Dondin-Payre revient sur les questions de terminologie. Elle réaffirme, dès le résumé de l’article que « Vicus et agglomérations “ secondaires” ne sont pas équivalents ». Pour l’auteur, « leur signification n’est ni juridique ni géographique ni sociale ; il convient donc d’éviter leur emploi qui conduit à des contre-sens et leur substituer […] des mots simples (localité, agglomération) » (Dondin-Payre 2012 : 153). Elle propose de remplacer le terme d’agglomération secondaire par celui de localité (ibid. : 157). Pour l’auteur, les vici ne sont pas des agglomérations avec une spécificité juridique (ibid. : 158) et aucun élément ne permet de justifier une telle proposition, affirmant même que le « vicus n’existe pas » (ibid. : 159). Elle rejette les différentes affirmations faisant des agglomérations avec une certaine parure urbaine des « vici authentiques » et ceux qui ne seraient pas digne de cette appellation, malgré l’existence d’une inscription, des « vici secondaires », mais aussi, l’idée de l’existence d’une subdivision de la cité en pagi avec des

vici comme chef-lieu de pagi (ibid. : 159-160). Le chef-lieu et lui seul doit être qualifié de

ville, les autres groupements doivent trouver une terminologie simple et sans connotation (agglomération dans le vocabulaire moderne traduit un certain niveau d’urbanité, secondaire suppose une hiérarchie interne, vicus qui serait un synonyme dénoterait en même temps un statut et un paysage privilégié…). L’auteur montre une préférence pour la terminologie de « villes secondaires » proposée en 1980 par C. Goudineau et P.-A. Février (ibid. : 161). Pour P. Leveau, la position n’est pas identique. En s’appuyant sur une série de textes antiques et les travaux de M. Tarpin, déjà présentés en 2002, il réaffirme son point de vue. Élargissant la question, pour P. Leveau « le dossier de la mansio est aussi complexe que celui du vicus. Le terme désigne en effet probablement divers groupements d’édifices sans qualité juridique particulière, dans une incertitude qui en justifie précisément l’emploi et en fait un équivalent du terme “ agglomération” » (Leveau 2012 : 168). Ainsi, la signification du latin vicus est bourg, bourgade, village (ibid. : 173). Pour M. Tarpin, « ce terme [vicus] relève des modes d’organisation de l’Empire et seules les inscriptions permettent de savoir si telle ou telle agglomération est ou non un vicus, sans d’ailleurs que cela ait un impact quantifiable sur son faciès urbanistique » (Tarpin 2012 : 180). Au sujet des typologies, M. Tarpin affirme « que le

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classement des habitats par typologies matérielles appartient épistémologiquement à notre époque et non à l’Antiquité et que ces typologies ne refléteront jamais la perception des Anciens » (id.). En guise de conclusion, P. Garmy réaffirme la solution terminologique « d’agglomération secondaire » proposée par M. Mangin (Garmy 2012a : 183). Il met également en garde contre l’écueil langagier d’appliquer des termes contemporains comme hameau, bourg, village, qui sont fortement connotés dans le langage contemporain (id.). Pour lui, il faut aussi, dans les études actuelles, prendre en considération l’ensemble des réalités recouvertes par ce terme et ne pas exclure a priori les établissements déclarés routiers ou ruraux. Ces études doivent également être à la fois intra-urbaines et interurbaines (ibid. : 184).