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La réconciliation de l’art, de la technique et de l’imagination

3.3 La mystique du cinéma et son héritage (2) : de la communauté spirituelle rêvée par le

3.3.3 La réconciliation de l’art, de la technique et de l’imagination

- Relire l’histoire de la « projection »

Godard se présente alors en historien des arts au service de la vision et retrace une généalogie des techniques de projection reposant sur les sciences mathématiques et l’allégorie philosophique de la caverne de Platon, mais également sur cette qualité maîtresse de l’homme, l’imagination, au sens du pouvoir d’imager, de mettre en images et en chiffres le monde :

On retrouve la même chose en réfléchissant à l'histoire de l'idée de projection, comment elle est née et a évolué jusqu'à s'appliquer techniquement, dans les appareils de projection. Les Grecs en avaient imaginé le principe, la fameuse caverne de Platon. Cette idée occidentale, que ni les Bouddhistes ni les Aztèques n'ont envisagée, a pris forme avec le christianisme, qui repose sur l'espoir de quelque chose de plus grand. Ensuite vient la forme pratique, les mathématiciens qui, toujours en Occident, ont inventé la géométrie descriptive. Pascal y a beaucoup travaillé, avec encore une arrière-pensée religieuse, mystique, en élaborant ses calculs sur les coniques. Le cône, c'est l'idée de projection. Après, on trouve Jean Victor Poncelet, savant et officier de Napoléon. Il a été en prison en Russie, et c'est là qu'il a conçu son Traité des propriétés projectives des figures, qui est la base de la théorie moderne sur la question. Ce n'est pas par hasard s'il a fait cette découverte en prison. Il avait un mur en face de lui, et il faisait ce que font tous les prisonniers, il projetait. Un désir d'évasion. Comme il était mathématicien, il en a écrit la traduction en équations. A la fin du dix-neuvième siècle est venue la réalisation technique. Un aspect des plus intéressants est qu'à ce moment le cinéma sonore était prêt. Edison est venu à Paris présenter un procédé qui utilisait un disque synchrone de la bande image, c'était déjà le principe de ce qu'on fait aujourd'hui dans certaines salles en couplant un disque compact avec le film pour avoir un son numérique. Et ça marchait ! Avec des imperfections, comme les images d'ailleurs, mais ça marchait et on aurait pu améliorer la technique. Mais les gens n'en ont pas voulu. Le public a voulu le cinéma muet, il a voulu voir481.

Godard noue dans ce récit un lien entre art, science, philosophie et théologie, dont l’entrecroisement fonde les progrès techniques qu’engendre et précède le désir de projection dont le cinéaste développe la polysémie. Godard évoque ainsi les ombres illusoires que les

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Idées relevant du logos grec projetaient sur le monde sensible. Il convoque aussi l’arithmétique de la grâce chrétienne qui projette, attend, calcule l’infiniment grand. La projection est également la puissance optique qui repose sur la privation, celle du prisonnier, privation mise au service d’un renouvellement de la géométrie projective. Enfin, il présente la dernière étape de cette histoire de la projection : celle du cinéma, des images en mouvement, reproduites mécaniquement, désirées pour elles-mêmes, malgré le procédé inventé par Edison qui permettait dès l’origine une projection visuelle et sonore.

L’admiration pour la science, l’ingénierie et la technique est dans ce propos évidente. Ce récit plaît à Godard, il le réitère dans Les enfants jouent à la Russie en 1993 et dans l’épisode 2a des Histoire(s), où le cinéma est de nouveau présenté comme la fin et l’aboutissement d’une histoire des appareils de vision et d’une tekhnè de la vue, celle que Godard synthétise dans le dénouement de sa parabole, où le désir de vision émane du public même : « Le public a voulu le cinéma muet, il a voulu voir482. » Ce propos entretient une filiation avec le texte d’Élie Faure dont nous reprenons le titre dans ce chapitre consacré à la mystique du cinéma et ses différents déploiements. Godard en effet inscrit la naissance de la technique cinématographique dans une généalogie théologique, philosophique et technique qui a partie liée avec cet élan spirituel des foules que Faure voit se déployer dans l’art cinématographique, qu’il s’exprime dans la fabrique communautaire du film ou dans la réception d’une œuvre procédant de l’agrandissement. Ce désir de vision interroge également le pouvoir même de la machine cinématographique, outil d’émancipation ou d’asservissement. En effet, l’image du prisonnier a une importance singulière dans le récit presque allégorique que présente Godard. André Habib, dans un texte intitulé « Regards sur l’enfermement : projection, prison, évasion », revient sur les effets d’implication contradictoires que produit le dispositif classique de la salle de projection cinématographique selon une double modalité : la première est celle de la clôture, de l’obscurité et de l’immobilité du spectateur, propriétés presque matérielles de la projection cinématographique, la deuxième est celle au contraire du désir d’évasion auquel est souvent associé le plaisir du film et dont procède l’expression « se trouver captivé483 ». Habib rappelle que la puissance du cinéma était analysée mais aussi célébrée par Walter Benjamin avec l’image puissante de « la dynamite de ses dixièmes de secondes », qui « fait sauter [l’]univers carcéral484 », non pas du dispositif de la salle de cinéma, mais des contraintes et

482 Ibid.

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André Habib, « Regards sur l’enfermement (1) : projection, prison, évasion », Hors Champ, le 6 juin 2005, [En ligne], http://www.horschamp.qc.ca/spip.php?article180, *consulté le 3 septembre 2015.

des murs que dressent les lieux quotidiens de la modernité. Habib se réfère également à cette autre image de Benjamin, motivée par le développement, en parallèle des arts de la reproduction mécanique, de cette autre science des temps modernes qu’est la psychanalyse : il s’agit de l’« inconscient visuel485 » que le cinéma révèle et offre en partage. Habib convoque alors la thèse de Jean-Louis Braudy, similaire au récit que développe Godard et qui fait se rencontrer trois paradigmes : la pensée d’une politique de l’esthétique ou d’un spectateur émancipé par le cinéma, art des foules ; l’analyse de la puissance optique comme pouvoir d’aperception similaire aux renversements opérés par la psychanalyse freudienne ; et l’allégorie de la caverne de Platon, considérée comme fondamentale. Il s’agit en effet de relier le « dispositif » platonicien à celui du cinéma : l’éblouissement du spectateur, comme l’aveuglement de celui qui ignore l’Idée ou qui ne porte pas son attention sur la source première des images qui se meuvent sous son regard, sont deux attitudes qui procèdent d’un même désir d’« impression de réalité ». La caverne platonicienne devient l’inconscient de l’invention du cinéma, sa part d’ombre et de lumière. Or, percevoir le vrai au-delà du champ de vision auquel notre corps nous contraint (que ce soit par le mouvement libérateur du philosophe qui invite les esclaves à s’extraire de l’obscurité de la caverne ou par la puissance de lucidité du spectateur du cinéma lorsqu’il comprend la source mentale de la projection filmique et le pouvoir d’aperception qu’elle lui offre en partage) peut à tout moment se renverser en son envers, celui d’un asservissement par l’esthétisation du politique. C’est ainsi que Benjamin conclut sa réflexion sur l’art cinématographique, dans un rappel de l’ampleur du phénomène qu’incarne l’invention du cinéma, de la séduction qu’il exerce sur les différentes instances de pouvoir et des espoirs qui le portent en cette première moitié du XXème siècle.

Dans son éloge des pouvoirs de la science et de l’imagination conjuguées, Godard pose ainsi d’emblée l’ambivalence du cinéma, notamment par la figure du prisonnier qui s’émancipe de la privation par la projection mathématique sur un mur pénitentiaire, métamorphosé alors en toile picturale et scientifique sur laquelle s’inscrivent les signes de l’imagination, dans leur abstraction arithmétique et numérique, et qui prévoit la future toile de projection aux dimensions rectangulaires. Godard se réfère ainsi à l’emprisonnement de Jean-Victor Poncelet, sur lequel la légende a nourri plusieurs récits, et qui publie en 1814, dès sa libération, à partir des notes prises dans la prison de Saratoff, le Traité des propriétés

projectives des figures. Dans Les enfants jouent à la Russie, l’invention du cinéma est en

485 Ibid., p. 306.

effet présentée comme « l’invention de l’utopie486 » qui se géométrise sur un mur qui « était rectangulaire487. » Dans l’épisode 2b des Histoire(s) du cinéma, le même récit produit un montage d’extraits de La Nuit du chasseur (1955) de Charles Laughton et de la récitation par Julie Delpy du « Voyage » de Baudelaire. André Habib se saisit de cette séquence pour rappeler le lien dialectique qui unit la « capture de la réalité », « la projection libératrice », l’« impression488 » laissée sur la mémoire et envisager une analogie entre les modalités de capture/projection du cinéma et celles du processus même de la mémoire et de l’imagination. Cette réflexion rappelle aussi combien le cinéma est pour Godard l’enfant d’une histoire de la technique qui relève quasiment d’une théologie du visible, telle que l’analyse Georges Didi-Huberman dans les premières pages de Devant l’image489 et qui repose sur une réponse de la science au désir de projet, désir de plus-de-Voir, pour reprendre la formule d’Alain Badiou qui titre son analyse des Histoire(s) et le débordement d’images et de sons montés qui les caractérise490.

- Le cinéma devant la puissance industrielle

Ainsi Godard noue un lien fondateur entre imagination et science, pour parfois les désunir lorsque la science se place au service d’une industrie qui a coupé les ponts avec l’artisanat et donc avec cette part de liberté et d’improvisation que revendique Godard dans l’art industriel qu’est le cinéma :

Le cinéma est un art comme la science est un art. Et puis quelque chose est venu avec la communication, la technique. La technique dans un sens opératoire, non plus artistique. Non pas un mouvement de montre d’un petit horloger du Jura mais cent vingt millions de Swatch. Les Telecom, les sémaphores, c’est né en même temps que la bêtise, que Madame Bovary. C’est Flaubert qui a décrit ça.

La science est comme l’art, c’est la même chose. Et à un moment donné, au XIXe siècle, la science – pas l’art – est devenue ce qui s’est appelé – car le mot n’existait pas avant – de la « culture » et à ce moment-là, c’est devenu autre chose491.

486 Jean-Luc Godard, Les enfants jouent à la Russie, op. cit., p. 30. 487

Ibid., p. 53.

488 André Habib, « Regards sur l’enfermement (1) : projection, prison, évasion », op. cit.

489 « Pour l’énoncer très vite, on dira que le christianisme a finalement convoqué du visible non pas la maîtrise,

mais l’inconscient. Or s’il nous fallait donner sens à cette expression – "l’inconscient du visible" –, ce n’est pas du côté de son contraire, l’invisible, qu’il faudrait le chercher, mais du côté d’une phénoménologie plus retorse, plus contradictoire, plus intense également – plus "incarnée". C’est cela que tente de désigner l’événement, le symptôme du visuel. » (Georges Didi-Huberman, Devant l’image. Question posée aux fins

d’une histoire de l’art, Paris, Minuit, 1990, p. 39). 490

Alain Badiou, « Le plus-de-Voir », op. cit.

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Il s’agit là de la science assujettie à la technique industrielle, équivalent de l’œil machinique de la caméra opérant en dehors de tout visée artistique, qui se met au service du standard et de la production exponentielle de produits rapidement obsolètes, dépourvus de toute autonomie vitale dont procède l’œuvre d’art. Cette science exploitée par la puissance gigantesque de la production industrielle, qui ne sert plus la petite entreprise, mais lui préfère la mécanique de reproduction à grande échelle, participe alors de la disparation de la sincérité de l’art, au profit de la naissance de la « culture », phénomène industriel et consommable.

Dans le passage que nous citons, Godard condamne alors la technique pour avoir trahi un premier rêve d’émancipation, resté au stade d’illusion funeste. Cette trahison trouve son fondement dans un XIXe siècle qui a également vu se développer l’idolâtrie des innovations techniques, notamment la passion de toutes les techniques permettant de transcender les distances, au détriment de l’accidentel, du hasard et de l’incertitude qu’incarne l’expérience esthétique. Ces techniques « opératoire[s] » qui ne sont plus « artistique[s]492 » deviennent les instruments insensés d’un monde emporté par la surproduction et détaché de l’œuvre d’art. Il en va d’ailleurs d’un monde qui prend ces distances avec l’art des cathédrales, image qu’utilisait Élie Faure, dont William Morris faisait un modèle pour la création, et dont l’édification reposait sur des savoir-faire techniques et artisanaux. Il faut noter que, dans une toute autre perspective, selon une inversion du motif, la cathédrale est aussi un symbole emblématique de l’avenir technologique que représente le XXIe siècle, non plus par l’élévation qui la caractérise, mais dans l’horizontalité des réseaux et interconnexions qu’elle déploie. Le cinéma, « cathédrale contemporaine du Futur technologique annoncé493 », ne peut donc que concourir paradoxalement à cette promesse d’un méta-réseau que les nouvelles technologies développent pleinement aujourd’hui et qui poursuivent tout en le nuançant l’idéal saint- simonien d’une société émancipée par la science et la technique. Néanmoins, l’image d’un cinéma actuel, devenu outil d’une production a-humaine, ayant coupé les ponts avec la figure de l’artisan pour devenir une machine reproduisant et réduisant la création, étanchant une soif d’images qui ne font que réfléchir leur surface, s’impose généralement dans le discours de Godard qui s’oppose à la promesse d’un cinéma réconciliée avec la postmodernité. Godard préfère donc incarner la mauvaise conscience du contemporain, même si par ailleurs il use des techniques numériques contemporaines avec délectation, comme le rappelle le

492 Ibid.

493 Pierre Musso développe ainsi l’image du « réseau » qui « apparaît comme la cathédrale contemporaine du

Futur technologique annoncé » (Entretien entre Derrick de Kerckhove et Louise Poissan, dans « Art, matière et lumière », Série télévisée canadienne sur les arts et les nouvelles technologies, Université du Québec à Montréal, 1994).

choix d’un tournage en 3D avec un vaste choix de caméra pour son film le plus récent et comme en témoignent les visiteurs du laboratoire de montage du cinéaste à Rolle, dont l’équipement est à la pointe de la technique numérique494. En effet, en raison peut-être de ce discours de réaction contre les méfaits d’une technique au service d’une industrie toute puissante, Godard compromet son cinéma avec les nouvelles technologies que l’œuvre filmique comprend nécessairement et procède à une pratique marginale et dissidente de ces mêmes techniques.

Godard n’entend donc pas séparer radicalement la technique de l’esthétique, ce qui serait pour lui un autre non-sens, comme il le déclare, en octobre 1991, dans les premières lignes de son « Rapport d’inactivité », article qui défait avec ironie le projet échoué d’une collaboration institutionnelle avec la prestigieuse école de l’Idhec, alors transformée en Fondation européenne des métiers de l’image et du son (Fémis) : « Il n’est guère possible de séparer entièrement la technique et l’esthétique – le culturel –, la circulation du sang de celle des idées (voir les études sur la parole et l’outil de Leroi-Gourhan)495. » Godard nuance son discours et présente ainsi la synthèse de la technique et la pensée comme un horizon nécessaire, sous le patronage d’André Leroi-Gourhan qui a initié une pensée de la technologie et de la culture dont on connaît aujourd’hui la postérité – que ce soit la pensée des techniques telle qu’elle s’élabore dans l’œuvre théorique de Gilbert Simondon496 ou sa relecture critique par Bernard Stiegler497 qui en radicalise la pensée en présentant la technique comme nécessaire à la construction de notre intériorité psychique mais aussi comme un pharmakon, poison et remède, auquel la société doit être éduquée. Godard expérimente par ailleurs la relation entre l’art et la technique dans les différentes sociétés qu’il a fondées, comme le studio qu’il a développé à Rolle qui lui permet de créer, parfois sans tournage, comme ex-nihilo, des œuvres filmiques reposant sur une pratique presque artisanale, mais extrêmement technicienne, de montage des images. L’atelier Peripheria, que

494 C’est ce dont témoigne Olivier Séguret « envoyé spécial » du journal Libération à Rolle, alors que Godard

est en plein tournage d’Adieu au langage : « Dans cette petite maison qui est un domicile, un plateau, un studio et une remise technique, on trouve essentiellement, outre le nécessaire domestique, des reproductions de tableaux affichés sur les murs, des livres souvent posés en pile par terre (« voilà mes sources, hé hé… »), et, contrastant avec la sobriété générale, une profusion baroque, luxuriante, de matériel dernier cri. Rien de spectaculaire, à part la taille de certains écrans plasma, mais une quantité incroyable de petites choses high- tech qui constellent étagères et placards : caméras flip-flop et caméras go-pro, smartphones vidéo, petits et grands appareils, photos-vidéo, ordinateurs… » (Olivier Séguret, « Tournage », Libération, le 26 juin 2013).

495 Jean-Luc Godard, « Rapport d’inactivité. Les mésaventures du Centre de recherche sur les métiers de

l’image et du son », op. cit., p. 249.

496 Nous pensons notamment aux deux principaux ouvrages de Gibert Simondon, Du mode d’existence des objets techniques (Paris, Aubier, 1958) et L’individuation à la lumière des notions de forme et d’information

(Grenoble, Millon, 2005) qui interrogent la richesse de significations humaines contenues dans la technique.

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Nous pensons tout particulièrement aux trois tomes de La Technique et le temps (t.1, La Faute d’Épiméthée, 1994, Paris, Galilée, 1994 ; t.2, La Désorientation, Paris, Galilée, 1996 et t. 3, Le Temps du cinéma et la

Godard décrit dans son rapport d’inactivité au sein de l’école de cinéma, est à l’origine un projet institutionnel et collectif, porté par Jack Lang, alors ministre de la Culture, prévoyant la création d’un vaste studio de montage, à la « périphérie de la Fémis498 », comme le souligne ironiquement Godard. Le Centre de recherche cinéma et vidéo Peripheria, pensé comme lieu d’expérimentation et d’apprentissage d’un cinéma ouvert aux nouvelles technologies et à la création de prototypes techniques, associant Miéville et Godard au travail des étudiants de la Fémis, est finalement abandonné. Du rêve d’un « Palais de l’Image499 » de 350 mètres carrés, où pratique et pensée du cinéma nouaient une alliance autour de la figure de Godard, ne reste que le nom, conservé par Godard et Miéville pour désigner leur société Peripheria, alors installée à Paris. Cette factory godardienne, restée à l’état de projet, proposait d’expérimenter la relation presque physique qu’entretient le créateur avec sa créature filmique, dans un programme éducatif que le cinéaste avait imaginé pour les étudiants de la Fémis :

Possibilité pour l’élève débutant ou en fin de cours de la Fémis de voir et de toucher tout ce qui compose la création cinématographique. […]

Voir ses droits à la création – mixer dès le début du tournage ou à la fin – et voir aussi ses devoirs – nettoyer et démonter une simple colleuse500.

Le projet Peripheria possédait ainsi un « bénéfice culturel, c’est-dire moral501 », comme le corrige Godard. L’« esthétique de l’avenir502 » qu’évoque alors le cinéaste se distingue de la technique servile, qui renonce à l’amour de la fabrication pour s’adonner à la seule rentabilité culturelle. Godard illustre cet anti-modèle de production intensive et industrielle des œuvres avec l’image de l’agriculture intensive des États-Unis, jeu de mots qui met en cause le terme