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La protection universelle maladie

L’INDEMNISATION EN NATURE DU PRÉJUDICE

Section 1. La protection universelle maladie

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 s’est donné pour objectif d’universaliser la prise en charge des frais de santé en facilitant les conditions d’affiliation des assurés sociaux et en diminuant les démarches administratives afin de limiter les mutations inter-régimes. Ces dernières avaient pour conséquences régulières de laisser les personnes en rupture de droits, car les coordinations entre les organismes de sécurité sociale comportaient des dysfonctionnements. Dès lors, les pouvoirs publics ont souhaité sécuriser la situation des assurés lorsque leur statut professionnel et personnel évoluait au fil du temps. Depuis le 1er janvier 2016, la PUMA, la protection universelle maladie, répond, en partie, à cet objectif. Cependant, des améliorations restent à réaliser.

La nouvelle loi aura pour finalité de supprimer les conditions d’ouverture des droits aux frais de santé. Ainsi, la personne ayant besoin d’être affiliée au régime agricole, de par son statut, verra sa soumission facilitée et sera ainsi quasiment certaine de pouvoir bénéficier d’une prise en charge de ses soins. Auparavant, les conditions d’appartenance à un régime de sécurité sociale, et par conséquent, le remboursement des soins médicaux, découlaient essentiellement de son activité professionnelle, soumise à des critères de durée, de temps de travail ou de pourcentage en salaire par rapport au SMIC. Désormais, le salarié agricole535 n’est plus tenu à ces conditions, et les caisses de mutualité sociale agricole n’ont pas à vérifier les dispositifs

534 Loi du 21 décembre 2015 de financement de la sécurité sociale. L. n°2015-1702, 21 décembre 2015, JO 22 décembre 2015, p. 23635.

535 L’exploitant agricole a toujours été affilié dès le premier jour de son immatriculation en caisse de MSA, le conjoint collaborateur également, s’il ne bénéficie pas d’une couverture dans un autre régime ou sous un autre statut suite à son activité professionnelle. L’apprenti, quant à lui, a toujours été affilié dès le premier jour de son activité, sans condition d’heures et de salaire.

d’ouverture des droits afin de l’affilier. En conséquence, dès que l’activité agricole est constatée, le salarié agricole est couvert au titre de la prestation en nature par la MSA du lieu de cotisation de son employeur. Les seules conditions sont l’obligation de travailler ou de résider en France de manière stable.

Le maintien dans le régime agricole a également été facilité. Auparavant, il existait une période de maintien du droit d’un an536 aux frais de santé, en cas de perte d’une activité professionnelle, sans chômage indemnisé. Dorénavant, avec la PUMA, la personne reste affiliée au sein de son régime, et donc au sein du régime agricole si l’activité était agricole, sur un critère de résidence avec des droits illimités. La notion de maintien du droit aux prestations santé n’a plus lieu d’être. La nouvelle législation garantit donc une protection sociale à l’assuré dans le cas où il n’aurait pas pu travailler ou justifier du prolongement de ses bénéfices à la couverture santé. En effet, avant le 1er janvier 2016, l’assuré qui avait épuisé le maintien de ses droits et qui ne pouvait plus rester au sein de son régime d’appartenance, notamment au sein du régime agricole, devait se diriger vers la CPAM de son domicile afin de faire valoir son droit à la CMU de base. Cette dernière est devenue obsolète avec la nouvelle législation, et les pouvoirs publics l’ont supprimée.

Le législateur a souhaité éviter les périodes sans droits des assurés et a simplifié les démarches administratives afin de faciliter l’accès aux soins de ces derniers. En effet, l’accidenté a besoin rapidement de traitements médicaux qui peuvent être longs et coûteux. Cependant, la PUMA reste une législation inachevée, voire bâtarde.

Tout d’abord, la disparition de la notion d’ayant droit majeur, combinée avec celle d’une condition de résidence, pénalisait les conjoints habitant en France et sans activité professionnelle, et notamment le Français de l’étranger de retour en France pour travailler. Les pouvoirs publics ont pris acte des ratés de la protection universelle maladie et ont adopté un décret537 qui ôte les conditions de résidence de trois mois, sur le territoire français, aux membres majeurs de la famille sans activité professionnelle, qui sont liés à un assuré en activité lors de leur retour en France. Ainsi, l’accès aux soins est simplifié, et l’agriculteur qui a subi un accident peut s’affilier au régime agricole et donc bénéficier des soins en toute quiétude si la personne à laquelle il est rattaché est déjà couverte par le régime agricole en rapport à son activité. Ainsi, un descendant ou ascendant pourra se rattacher, sans condition

536 L’article L. 161-2 du Code de la sécurité sociale est, en conséquence, supprimé.

de stabilité, à l’instar d’un conjoint. En revanche, les adhérents à la Caisse des Français de l’étranger qui regagnent le territoire sans activité professionnelle lors de leur retour bénéficient, pendant trois mois, de la couverture de cette caisse.

La PUMA montre ses limites au moment où l’assuré change d’activité professionnelle. Certes, il est possible d’y voir les prémices d’un régime unique mais, dans l’immédiat, elle présente bien des dysfonctionnements, surtout au sein du régime agricole qui base l’affiliation sur le lieu de cotisation de l’employeur et non sur la résidence de l’assuré. La situation du salarié agricole est celle qui doit être revue en priorité par le législateur. De nombreux agriculteurs n’ont pas une situation professionnelle unique, et leur emploi suit les mutations des saisons. Il n’est pas rare, par exemple, qu’un agriculteur qui habite dans le Vaucluse (84) fasse les vendanges à Gigondas (84), la récolte des fruits à Sénas (13)538, et ensuite la taille des vignes à nouveau à Gigondas (84), puis la cueillette des cerises dans la Drôme (26), avec probablement des périodes entrecoupées de chômage. Il faut savoir que le salarié est affilié à la caisse du lieu de cotisation de son employeur et qu’en cas de chômage indemnisé, il dépend alors de la caisse de mutualité sociale agricole du département du Pôle emploi qui l’indemnise. Le changement de situation peut mener fréquemment le salarié à changer de caisse de MSA, le laissant parfois dans des périodes de rupture de droits. En effet, les organismes de protection sociale ont régulièrement du retard dans le traitement des demandes des assurés à cause des baisses des effectifs539 dans les caisses de MSA540. Si ce délai de traitement est préjudiciable aux assurés sociaux, il l’est aussi pour les employés des caisses, qui se trouvent sous pression, avec pour objectif de traiter un maximum de demandes avec peu de personnel, tout en respectant les délais fixés par la convention d’objectifs et de gestion. La qualité du travail est sans aucun doute remise en cause.

538 Tous ces départements sont limitrophes du lieu d’habitation du salarié pris pour exemple.

539 Depuis 2006, la mise en œuvre des précédentes COG (conventions d’objectifs et de gestion) a permis la suppression de 3 193 équivalents temps plein (ETP) sur toutes les caisses de MSA. La nouvelle COG, qui couvre les années 2016 à 2020, prévoit la disparition de 1 300 ETP sur les quatre années à venir. Cela implique que 8% des effectifs des caisses de MSA seraient menacés par la nouvelle convention : force-ouvriere.fr, « 8% des effectifs de la MSA menacés par la nouvelle convention », M. LEPRAND, 18 mars 2016.

540 En 2000, il existait 74 caisses de MSA, alors qu’aujourd’hui, il n’en reste plus que 35. Les COG souhaitent une optimisation des gestions, à des fins de mutualisations et éventuellement de fusions pour certaines caisses, compensant la réduction des effectifs. En réalité, les tâches sont réparties mais ne diminuent pas. Le personnel des MSA se retrouve alors en sous-effectif et n’arrive pas à absorber les demandes des assurés dans des délais raisonnables. Les représentants syndicaux tels que Force Ouvrière ont eu l’occasion de faire part de leur inquiétude à propos des baisses d’effectifs. La CFDT, quant à elle, estimait en 2015 « que la réduction des effectifs de la MSA a atteint ses limites » ; fga.cfdt.fr : « MSA : sans contester l’obligation d’une bonne gestion, la FGA-CFDT considère que la réduction des effectifs de la MSA a atteint ses limites », publié le 19/10/2015 par D. LONGERON et communiqué de presse n°35-2015.

Pour sécuriser le parcours professionnel des assurés, faciliter l’accès aux soins et faire face à une baisse des effectifs alors que les demandes des assurés sont toujours aussi pressantes, il est nécessaire que ces derniers puissent changer de caisse le moins souvent possible. C’est pourquoi, il faudrait que le centre d’affiliation soit celui du domicile des personnes et non celui de l’employeur en cas d’emploi, ou celui du département du Pôle emploi qui verse les indemnités, en cas de chômage. La meilleure solution serait l’existence d’un régime unique dont dépendrait l’assuré selon son lieu de résidence. Ce mécanisme d’affiliation éviterait les perpétuels mouvements de dossiers d’une caisse de MSA à une autre ou d’une caisse de MSA vers un autre régime.

La protection universelle maladie a, certes, amélioré la situation de certaines personnes en supprimant la CMU de base ou le maintien du droit d’un an après la fin de l’activité, en créant des droits personnels en illimité. Cependant, elle n’a pas repensé le phénomène des mutations de l’assuré d’un organisme vers un autre. L’agriculteur est souvent une personne mobile qui change d’emploi au gré des saisons, et donc de lieu de travail et de caisse d’affiliation. En ce sens, la loi reste un texte inachevé car l’accès aux soins n’est pas facilité dans tous les cas. L’appartenance à un régime de protection sociale est un point fort car celle-ci permet la prise en charge des soins médicaux. L’assouplissement des conditions d’affiliation par la PUMA avait donc cette finalité, et l’agriculteur victime d’un accident de droit commun devait pouvoir se soigner sans rencontrer de difficultés découlant des problèmes d’ouverture de droits.

Toutefois, l’indemnisation de l’accidenté non professionnel est bien distincte de l’accident professionnel car le taux de prise en charge est différent. Les soins ne sont pas remboursés à 100% du tarif de responsabilité par le régime obligatoire, et la victime doit régler le ticket modérateur. D’où l’intérêt de mettre en place une assurance complémentaire obligatoire.

Section 2. L’assurance complémentaire obligatoire en faveur des salariés

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