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Logiques territoriales et réticulaires

Chapitre 2 - Le transfert du pouvoir : un processus politique et territorial

2. Construire une typologie des déplacements de capitales

2.2. Les processus territoriaux

2.2.1. Les créations d’Etats

La découverte de nouvelles terres en Amérique, en Afrique et en Australie par les Européens, a au fil du temps, conduit dans de nombreuses régions à construire les conditions favorables à l’éclosion de nouveaux Etats. La colonisation a consisté dans un premier lieu à implanter des points de contrôle et d’exportation, puis à définir des domaines et des frontières, d’abord entre Empires coloniaux puis à l’intérieur de ceux-ci. La création de nouveaux Etats s’est opérée à mesure que ces territoires s’affranchissaient des Empires coloniaux. Etats qu’il a fallu pourvoir en capitales.

La première capitale fondée pour les besoins d’un Etat lui-même en pleine construction a été Washington, dans les jeunes Etats-Unis d’Amérique. L’idée de créer une capitale de toutes pièces germe au cours de la décennie 1780 et se définit comme un élément de cohésion d’Etats fédérés jusque-là très indépendants les uns des autres. La capitale devait malgré tout rester un

59 Les termes coréens ont été traduits en anglais ainsi « Special Act on the Establishment of the New Administrative Capital » par la Cour Constitutionnelle (16-2(B) KCCR 1, 2004Hun-Ma554, 566)

60 « Il n’existe aucun texte stipulant expressément dans notre constitution que « Seoul est la capitale ». Toutefois, Seoul est la capitale de notre nation à travers une pratique continue touchant à la vie de la nation et du royaume pendant une période de plus de 600 ans depuis la dynastie Chosun. Une telle pratique devrait être considérée comme un élément fondamental de notre nation qui est parvenu à incarner le consensus national pendant une longue période ininterrompue. »

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« Que Seoul est la capitale de notre nation, c’est écrit dans une tradition constitutionnelle non écrite, et, par conséquent, a la force d’une loi constitutionnelle à moins qu’elle soit invalisée par la mise en place d’une nouvelle ordonnance constitutionnelle stipulant une nouvelle capitale à travers une procédure de révision constitutionnelle. »

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espace de neutralité. Le siège du gouvernement avait changé plusieurs fois au gré des conditions militaires, imposées par la guerre avec les Britanniques, notamment entre Philadelphie et New York depuis la signature de la Déclaration d’Indépendance de 1776. En 1789, un débat a lieu sur la création d’une capitale pour la jeune Union. C’est le premier cas de déplacement du pouvoir d’un Etat décidé par voie parlementaire. Kenneth Bowling et Ulrike Gehrard font d’ailleurs un parallèle intéressant entre ce débat et celui de 1991 qui oppose les partisans de Bonn et ceux de Berlin. En tous les cas, l’idée d’une capitale « neuve » l’emporte et fait l’objet d’un consensus. Elle avait reçu les faveurs des centralistes, pour qui l’intégration des Etats américains dans un Etat unitaire passait par la création d’un siège du gouvernement identifié. Afin de rendre l’idée d’une capitale acceptable, il est décidé que celle-ci serait située sur un terrain neutre, n’appartenant à aucun Etat. D’autre part, cette localité devra rester de petite taille : « it would be just the seat of government »63 (BOWLING et GEHRARD, 2000, p.36) afin de contenter les fédéralistes, réticents à l’idée d’une ville abritant un pouvoir central trop fort. L’idée d’une petite ville préservant le gouvernement démocratique des vices prétendus portés par les grandes villes (à l’image des capitales européennes) était également répandue.

Le site de la future Washington est choisi en juillet 1790 et il fait également l’objet d’un débat. Selon K. Bowling et U. Gehrard, un premier projet sur un site près de Harrisburg en Pennsylvanie échoue. George Washington propose le site, finalement choisi, de la capitale américaine, le long du Potomac, au croisement de plusieurs Etats64. Le Maryland et la Virginie cèdent à eux deux un carré de 10 miles de côté pour la nouvelle ville. La situation de Washington apparaît alors idéale, située à égale distance entre Nord et Sud, assez enfoncée dans les terres pour ne pas craindre une attaque (à la même époque, les préfectures des départements français sont aussi choisies loin de la mer), et dans une vallée conduisant facilement vers l’Ouest.

Après les Etats-Unis, le Canada et l’Australie utiliseront le même modèle. Les points communs sont évidemment le passé britannique mais surtout un territoire de grande taille approprié par des colons d’origine majoritairement européenne et avec une organisation territoriale de type fédéral. Le choix de la situation répond aussi à des impératifs proches. Trop isolé et dans les deux cas opposant des contraintes climatiques trop dures, le centre géométrique des deux pays est refusé. Le choix se porte pour des lieux proches des centres de gravité démographiques et économiques et donc à de faibles distances des autres grandes villes et des foyers principaux de population de l’époque. Au Canada, le site d’Ottawa a été désigné en 1857 à la limite entre les parties francophone et anglophone du pays. La solution a permis d’apaiser les débats entre les partisans de Montréal et ceux de Toronto (GROULX, 1952). En Australie, le consensus s’est opéré sur un site situé entre deux concurrentes qu’étaient Sydney et Melbourne. Autre point commun entre Etats-Unis, Canada et Australie est le statut particulier donné à la

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« Il devrait juste être le siège du gouvernement. »

64 Le site de Washington se trouvait en fait à une dizaine de miles au nord de la résidence de George Washington lui-même. L’anecdote est savoureuse lorsqu’on se rappelle qu’en 1949, Bonn, choisie et soutenue ardemment comme siège du gouvernement par Konrad Adenauer, premier chancelier de l’Allemagne Fédérale se trouvait également à une dizaine de kilomètres au nord de la maison natale et résidence dudit chancelier.

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capitale. Les Australiens ont opté pour un « Territoire de la capitale australienne », copie conforme du District de Columbia étasunien, neutre et n’appartenant à aucun Etat fédéré, géré directement par l’Etat. La solution adoptée par le Canada est plus ambigüe. Il existe une « Commission pour la Capitale Nationale », sous l’autorité directe de l’Etat, avec une zone de juridiction définie. Cependant, cette structure ne se substitue pas aux Etats fédérés et Ottawa n’en constitue pas un à elle seule65. La Commission, quant à elle, voit par contre son territoire déborder au Québec, s’étendant à l’agglomération, qui déborde sur la rive nord de l’Ouataouais. Aux Etats-Unis comme au Canada, le statut particulier de la capitale pose des problèmes de rapport entre démocratie locale et Etat (même si celui-ci exerce un pouvoir également de nature démocratique). A Ottawa, la Commission a la mainmise sur la plupart des projets d’aménagement alors qu’aucun de ses membres n’est élu par les habitants. De même, les Washingtoniens n’ont eu le droit de vote pour un scrutin national qu’à partir de l’élection présidentielle de 1964.

2.2.2. Les unifications d’Etats

Le deuxième type de cas de villes devenues capitales après des processus territoriaux est celui de l’unification de plusieurs entités politiques existantes. Dans ce cas de figure, le choix entre des capitales déjà existantes (mais en trop grand nombre, une capitale est forcément unique) ou d’une nouvelle localisation inédite s’impose. Les Etats-Unis auraient pu aussi entrer dans cette catégorie même si les Etats fédérés n’ont pas eu d’indépendance propre entre la domination britannique et la création de l’Etat fédéral. Là, l’idée avait été de créer une capitale ex nihilo. Les deux autres cas que nous citerons ici sont les cas de l’Italie et plus brièvement de l’Allemagne parce qu’il fera l’objet de développements ultérieurs.

Dans les années 1860-1870, l’Italie et l’Allemagne se créent en tant qu’Etats. Dans les deux cas, une couronne se dispute un territoire, les Savoie-Piémont et les Hohenzollern. En Italie comme en Allemagne, l’unité part de régions économiquement dynamiques tels le Piémont et la Prusse, encore en marge des grandes régions industrielles mais au centre d’anciens réseaux commerciaux et de puissantes régions agricoles.

La question de la capitale en Italie se pose à mesure que s’unifient les différentes régions qui étaient jusque là indépendantes. En effet, le territoire se redéfinit, change d’identité, prend une charge symbolique et mémorielle différente alors que la hiérarchie urbaine se modifie (D JAMENT-TRAN, 2009, p.100). Peu à peu, Rome réapparaît comme une possibilité de consensus et comme objet de la prise de conscience d’un Etat couvrant toute la péninsule italienne, c’est-à-dire comprenant aussi les régions méridionales et leurs difficultés économiques. En 1861, Cavour obtient un vote favorable au choix de Rome comme capitale (DJAMENT-TRAN, 2009, p.103). Comme pour Washington à la fin du XVIIIe siècle, il s’agissait d’un débat parlementaire qui met en scène de multiples dimensions d’un problème à la fois territorial, géopolitique, idéologique et symbolique. Rome a pour elle sa centralité dans la péninsule italienne. Mais ce sont des arguments de nature symbolique ou historique qui sont finalement les plus exprimés.

65 La ville se trouve dans l’Etat de l’Ontario, dont la capitale est Toronto. Il n’y a donc pas confusion entre capitale de l’Etat fédéré et capitale nationale. La situation est comparable à Bonn en Allemagne, qui sans district fédéral fait pleinement partie d’un Etat (Land), la Rhénanie du Nord-Westphalie, dont il n’est pas la capitale.

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Le cas de l’unification de l’Allemagne après la bataille de la victoire Königgrätz/Sadowa (qui donne l’avantage à la Prusse sur l’Autriche) ainsi que celle sur la France (qui permet de rallier définitivement les Etats du Sud comme la Bavière au projet national prussien) relève du même type de formation et de déplacement de capitale que celui de Rome. Et autre point commun, les deux cas sont contemporains. La jeune Allemagne utilise une capitale héritée et imposée par les circonstances historiques, même si celle-ci se trouve relativement bien centrée sur le territoire (qui s’étend à l’époque sur les deux-tiers de la Pologne et sur la Lituanie actuelles) alors que l’Italie réutilise une ville au passé prestigieux. Le Saint-Empire n’a pas vécu à partir d’une ville. Dans le cas de Rome comme de Berlin, il y a donc moins création d’une capitale déjà constituée (dans les faits ou légitimée historiquement) que création de l’Etat qui doit en être digne : un raisonnement exactement inverse à celui des pays neufs. Nous reviendrons plus longuement sur le cas allemand dans le chapitre suivant.

C’est dans ce groupe que l’on replacera aussi le cas de la réunification allemande et du retour à Berlin des fonctions de capitale fédérale dans les années 1990.

2.2.3. Les dislocations d’Etats

Enfin, on peut assister au mouvement inverse, c’est-à-dire non plus le choix d’une capitale lorsque des Etats affirment leur unité à partir de plusieurs ensembles mais quand des Etats qui ont été disloqués et dont les éclats, devenus souverains, ont dû se trouver des capitales. Le choix s’est surtout porté sur des villes qui étaient auparavant des capitales régionales (car souvent les frontières nouvelles sont auparavant des limites régionales). C’est le cas lors de la dislocation de l’Autriche-Hongrie. A la suite du Traité de Versailles, plusieurs Etats ont vu le jour en Europe Centrale tels que la Tchécoslovaquie, la Hongrie et la Pologne. Prague et Budapest, si elles n’étaient pas capitales, n’étaient pas moins des villes d’assez grande taille, dominant totalement l’armature urbaine régionale. D’ailleurs, la République Tchèque et la Hongrie font toujours aujourd’hui partie des Etats dont le taux de primatie de la capitale par rapport aux autres villes est parmi les plus hauts d’Europe. Dans les deux cas, la ville avait déjà été capitale. Prague avait dominé le Saint-Empire au XIVe siècle et était devenue le centre de l’affirmation nationale tchèque dans les décennies précédant la Première Guerre Mondiale. Il en est un peu de même avec Budapest, ancienne capitale de la Hongrie et quasi capitale au sein d’une Autriche-Hongrie coupée en deux administrativement entre les fameux K & K (Kaiserreich & Königreich66). Le cas de Varsovie est un peu différent. La ville est bien la dernière capitale de la Pologne avant sa dernière et complète partition en 1795 mais la capitale médiévale historique était Cracovie. La ville redevient capitale à la faveur de la disparition non pas d’un seul Empire mais de 3 (Allemagne, Autriche-Hongrie et Russie). De la même manière, la Finlande qui prend son indépendance en 1917 conserve Helsinki comme capitale, une ville choisie par les Russes au cours du XIXe siècle.

Ce cas préfigure un peu de futures partitions de grands Etats, parfois considérés métaphoriquement comme des Empires. On pense tout de suite à la dislocation de l’Union

66 « Empire et royaume » : c’est ainsi qu’est souvent désigné en allemand l’Etat formé de l’Empire d’Autriche et du Royaume de Hongrie, sous la couronne du même souverain.

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Soviétique et à l’émergence de 15 nouveaux Etats et donc de 15 nouvelles capitales. Là encore, les villes choisies ne sont pas le fruit du hasard mais sont presque toutes des capitales d’anciennes régions, devenues républiques autonomes ou des formes d’Etats fédérés dont les contours sont devenus des frontières internationales. Le réseau urbain soviétique s’était souvent rapproché d’un modèle de type christallérien67 avec donc une forte importance des lieux centraux les plus importants. Par ailleurs, dans un régime avec une économie planifiée comme celui de l’Union Soviétique, le poids des emplois dans l’administration, et donc dans les villes désignées comme chefs-lieux est très important. Ainsi, Kiev, berceau historique de la Russie et capitale d’une province relativement puissante comme l’Ukraine devient naturellement capitale. Il en est de même pour Minsk en Biélorussie. Dans un modèle transposé à des Etats plus petits, les capitales des trois Etats baltes étaient aussi des capitales des républiques soviétiques. Vilnius et Tallinn étaient capitales respectivement de la Lettonie et de l’Estonie lorsque ces deux Etats étaient indépendants68. En Slovaquie, Bratislava est capitale d’Etat fédéré depuis 1969 à l’intérieur de la Tchécoslovaquie.

L’éclatement de la Yougoslavie suit un peu le même schéma. La capitale régionale d’avant devient la capitale de l’Etat devenu indépendant. Il en est ainsi de Ljubljana à Skopje. Le modèle est également suivi dans le sens où même si l’éclatement a été plus progressif (parce qu’aussi plus dramatique), il s’est toujours fait dans le même sens, avec un noyau de l’ancien Etat et sa capitale (ici, en l’occurrence Belgrade) qui voit se détacher des « provinces », périphériques d’abord puis de plus en plus proches.

2.2.4. Un cas particulier : les capitales dans des régions détruites, rendues

inaccessibles ou dangereuses

Nous n’avons recensé qu’un seul cas de déplacement de capitale consécutif à une catastrophe naturelle qui aurait rendu l’exercice du pouvoir impossible dans ce lieu-là. Il s’agit du Belize qui déplace son pouvoir de Belize City (toujours aujourd’hui la plus grande ville du pays) pour Belmopan à la suite de la destruction totale de la ville après le passage d’un cyclone en 1961. Il semble pourtant que ce cas soit l’exception qui confirme la règle. Car il n’arrive quasiment jamais qu’une capitale perde son statut après avoir subi des destructions.

Des événements de grande ampleur ont bien été à la source de déplacements brusques du pouvoir mais dans des capitales d’entités territoriales inférieures aux Etats. On peut penser à Saint-Pierre, en Martinique, qui a perdu son statut de préfecture après l’éruption de la Montagne Pelée en 1902. Une autre éruption, au Cameroun, est à l’origine du départ de la capitale de l’Etat colonial, alors sous domination allemande, de Buéa à Douala en 1908 (BOPDA, 2003, p.72). Aux Etats-Unis, la ville de Cahaba n’est plus capitale de l’Alabama après avoir été gravement endommagée par une inondation en 1825. Le gouverneur part pour Tuscaloosa puis Montgomery en 1846. En fait, le rôle et l’activité d’une capitale peuvent se maintenir, même dans des conditions extrêmement difficiles, comme par exemple, lorsque les bâtiments officiels sont tous détruits. Lors du tremblement de terre du 12 janvier 2010en Haïti, le fait que l’événement ait

67 Voir à ce sujet : SHUPER, 1983, 1989, 1999 et RICHARD, 2003

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touché la ville capitale a sans doute été un handicap dans l’organisation des secours et dans la difficile remise en place des structures politiques et économiques du pays. Cependant, le statut de la capitale n’a pas été remis en cause. Un déplacement du pouvoir royal portugais avait été évoqué après le tremblement de terre de Lisbonne en 1755 (qui avait détruit entre 80 et 90% des constructions dont les édifices abritant les institutions de l’Etat) sans aboutir. Lorsque la destruction de la ville n’a pas pour origine la nature mais des événements militaires, la réaffirmation du pouvoir est encore plus forte et tend au maintien dans la capitale dégradée. Le gouvernement polonais impose le maintien de l’Etat à Varsovie en 1945 (brûlée à 80%) et résiste à Staline qui proposait un déménagement à Cracovie. De même, Anthony Pitch évoque un cas américain en citant un extrait du National Intelligencer qui écrivait « With what shame and mortification would [George Washington] hear a debate in Congress about a removal of his capital » 69 après que les Britanniques aient incendié méthodiquement tous les lieux du pouvoir de la très jeune Washington en 1814 (PITCH, 2005).

Par contre, des déplacements dus à des périodes de guerre ou de crise grave ont concerné des capitales d’Etat. Ces cas sont en revanche toujours temporaires. Ainsi, en France, le pouvoir politique a quitté deux fois Paris depuis la Révolution. La première fois intervient en 1870 alors que les troupes prussiennes envahissent le Bassin Parisien. En 1940, dans des circonstances similaires, le gouvernement quitte Paris pour Bordeaux puis pour Vichy70. Dans les deux cas, le retour à Paris du pouvoir avec le gouvernement provisoire tient presque autant du retour à une situation de paix normale, qu’à l’extrême capacité de résilience de Paris comme capitale française. Car la question de ne pas faire revenir le gouvernement à Paris en 1871 et en 1944 ne s’est jamais posée. Dans le dernier cas, le nom même de la ville de Vichy suffit désormais pour désigner et repousser un régime politique.

De même, les dirigeants polonais avaient pour quelques jours quitté Varsovie pour Lublin en 1939 avant un départ pour Londres. Benito Mussolini, alors que Rome est occupée par les Américains, a aussi installé le gouvernement de la République de Saló dans la ville du même nom où il resta de septembre 1943 à avril 1945. En revanche, lors de cette même guerre, le gouvernement et la famille royale sont restés à Londres directement attaquée durant toute la bataille d’Angleterre (qui, il est vrai, n’était pas une invasion terrestre). Staline n’a jamais quitté Moscou fin 1941 alors que le front ne se trouvait pas à plus de 30 km du Kremlin. De même, Adolf Hitler a toujours refusé de quitter Berlin en avril 1945, alors que nombre de ses proches lui conseillaient de diriger les opérations militaires depuis sa résidence de Berchtesgaden.

Un autre cas historique plus ancien illustre la capacité de certaines capitales à incarner la centralité, même après une longue période. En 1526, après la bataille de Mohacs, les Ottomans prennent possession d’une grande partie de la Hongrie, dont Budapest fait partie. Les souverains hongrois se replient sur Poszony (aujourd’hui Bratislava) et en font la capitale d’un royaume qui

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« avec quelle honte et quelle mortification [George Washington] entendrait-il un débat au Congrès sur le déplacement de sa capitale ?»

70 Rappelons tout de même que lors de la période de l’Occupation, Paris n’a pas perdu toutes ses fonctions de capitale et bon nombre d’administrations centrales n’ont pas bougé pour Vichy. De même, les autorités allemandes en charge du territoire français ont toujours été situées à Paris.

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correspond à environ un tiers de la surface de la Hongrie avant l’invasion. La présence turque est