• Aucun résultat trouvé

Dessin 1 : Deux apprenants face à un ordinateur

1.6. Procédures de transcription des données

1.6.1. Présentation en portée

Le mode de transcription choisi est celui de la transcription en portée car elle permet de rendre compte lisiblement de l’alternance et de la synchronisation entre les prises de parole. En outre, elle a l’avantage de rendre présent le locuteur qui ne parle pas, grâce à la représentation de certains aspects de son comportement non verbal qui ont été retenus dans la transcription. Notre système de transcription se fonde en effet sur le point de vue théorique selon lequel l’interaction doit être envisagée dans sa multimodalité, même si les données verbales restent l’objet principal de l’analyse.

Par rapport à une transcription linéaire, la présentation en portée facilite la notation d’un certain nombre de données non verbales, tels que les regards, dont nous avons voulu tenir compte dans les observations. Nous savons que « les échanges opérés par le

canal visuel ne peuvent être traités aussi aisément que ceux du canal voco-acoustique »

(Cosnier, 1987 : 295). Alors que l’émission/réception par le canal voco-acoustique est discontinue et alternative,

le canal visuel est toujours partiellement ouvert, on ne peut pas ne pas émettre d’image, et il en découle que les positions « d’émission » et de « réception » sont difficiles à préciser en elles-mêmes et la règle d’alternance difficile à leur appliquer (ibid.).

La transcription en portée apparaissait donc comme l’unique moyen de tenir compte du mouvement continu des conduites non verbales des apprenants que nous avions choisi d’étudier.

Exemple (cf. conventions pages suivantes) :

[Corpus 3 : 17-21] Su (Hollandaise) et Jo (Américain) – (séance papier) / Scribe : Su

Extrait 10 : "qu’est-ce que c’est une colline"

Au début de cet extrait, les deux scripteurs sont engagés dans une activité d’élaboration de contenu portant sur la description de la planète où sont arrivés les cosmonautes.

(E……...)

17Jo c’est opff (3s) on peut commencer la description de (3s) [000] sur une colline y a quoi

D…………)

17Su euh

(C………)(E……… 18Jo de particulier sur une colline + <ben une

(mime une

(D……… 18Su euh + <qu’est-ce que c’est une colline> J +

E……….)(C……….)(E… 19Jo colline comme: dans les montagnes t’as des t’as des collines> <ah

colline)(se tourne vers la fenêtre et désigne les montagnes)

D……)(E……….)(D…………..

19Su ah oui un peu comme ça

(mime avec la main

E………….) (C……)

20Jo ouais ouais> + <ouais> (petit rire)

(met son index devant sa bouche)

D……….)

20Su <hill> J (petit rire) merci euh + oui une colline oui + qui qui a l’air

(écrit……….)

(C…)(E………

21Jo au milieu d’un vallée euh:::

(D………)

21Su qui euh: ++ qui avait l’air d’une sorte de ++ non° euh au milieu rouge

(écrit..

A l’instar de l’exemple ci-dessus, lorsqu’un extrait de corpus sera présenté dans les chapitres suivants, il sera précédé :

- des références de l’extrait (numéro du corpus et numéros des rangs, en italique),

- de la désignation des participants,

- d’une indication concernant celui des deux qui occupe la fonction de scribe, lorsque cela est jugé nécessaire pour la compréhension du contexte,

- d’une précision concernant les outils d’écriture utilisés (séance papier ou séance ordinateur) pour les corpus 3 et 4.

En outre, à l’intérieur de chaque chapitre, les extraits sont numérotés afin de pouvoir y référer plus facilement dans le corps du texte. Pour les extraits d’une certaine longueur et lorsque cela a été nécessaire à une meilleure compréhension de ceux-ci, ils disposent d’un titre qui résume le thème de l’épisode ou qui reprend un segment d’énoncé émis par un des deux locuteurs (utilisation de : " "). L’extrait peut également être précédé d’un petit résumé du contexte.

Dans la transcription en portée, chaque portée est numérotée. A l’intérieur de chacune, trois lignes sont attrib uées à chaque interactant : la ligne centrale rend essentiellement compte des données verbales et para-verbales, la ligne supérieure est consacrée au regard et la ligne inférieure est porteuse d’autres types d’informations (données non verbales et commentaires de l’observateur).

1.6.2. Conventions de transcription25

- Données figurant sur la ligne centrale

Sur cette ligne principalement réservée au canal vocal figurent les données verbales de l’interaction ainsi que les rires, et les éventuelles modalités intonatives, interrogatives et/ou exclamatives. On a également intégré sur cette ligne, un phénomène non verbal : le sourire26.

Conventions de transcription27

: allongement de la syllabe ou du phonème qui précède (le nombre de : est

approximativement proportionnel à l’allongement)

/ rupture dans l’énoncé sans qu’il y ait réellement de pause

+ pause allant jusqu’à une seconde

++ pause de 1 à 2 secondes

(2s) pause égale ou supérieure à deux secondes, durée indiquée entre ( )

NON accentuation d’une syllabe, d’un mot

I. O. M. prononciation de lettres isolées ou action d’épeler

j’veux effacement d’un phonème ou d’une syllabe

euh, ah, oh unités non lexicalisées

° modalité interrogative

“ modalité exclamative

25

Celles-ci figurent également dans le volume d’annexes (cf. annexe 2).

26

La ligne supérieure étant réservée à la direction des regards et la ligne inférieure aux gestes et mouvements, la mimique que constitue le sourire nous a paru plus à sa place sur la ligne de la parole.

27

Ces conventions de transcription des interactions entre pairs ont été reprises pour la transcription des entretiens.

<ça veut dire quoi> le locuteur parle à voix basse

[0000] séquence inaudible ou incompréhensible

[pancarte?] tentative de transcription pour une séquence dont l’interprétation est

incertaine

(rire) rire

(rire : une pancarte) parle en riant

J sourire

S extraterresses + TES

E ces extra/ extraterresses terresses E. extra/ ouais

Lorsque les énoncés des interlocuteurs sont superposés, il y a chevauchement. - Données figurant sur la ligne inférieure

Etant donné notre objectif d’analyser notamment la place de l’outil ordinateur dans ce type d’interaction, il était essentiel de transcrire tous les gestes de manipulation de l’outil : placement du clavier et de la souris, manipulation de la souris, mouvements liés à la saisie, gestes déictique s en direction de l’écran. Ces indications sont présentées sous forme de commentaires sous la ligne réservée à la transcription des données vocales. Certaines conduites non verbales nécessaires à la compréhension de la tâche en cours ont également été signalées sur cette même ligne : lecture ou relecture de consignes à l’écran, recherche d’un mot dans un dictionnaire ou dans un livre. Enfin on pourra également y trouver des indications concernant certains gestes et postures manifestement dirigés vers le partenaire : contact tactile, buste entièrement tourné vers lui alors que la position « habituelle » est le face à face avec l’ordinateur et le côte à côte avec l’interlocuteur.

Conventions de transcription

I main dirigée vers l’écran

F doigt pointant un élément affiché sur l’écran dans les corpus 1, 2, 4 et un

élément inscrit sur une des feuilles de papier dans le corpus 3.

8 manipule la souris

(désigne la fenêtre) commentaire du transcripteur - Données figurant sur la ligne supérieure

Cette ligne est exclusivement consacrée à l’orientation des regards ; quatre orientations différentes y sont signalées : vers le partenaire, vers le clavier, vers l’écran de l’ordinateur et dans une direction autre que les trois précédemment citées. Dans ce

dernier cas, lorsque cela nous semblait utile, nous avons écrit en toutes lettres vers quel « objet » était dirigé le regard.

Conventions de transcription

C le locuteur regarde son interlocuteur situé à sa droite. La flèche est orientée

vers la gauche ce qui correspond à la perception de l’observateur lorsqu’il visionne l’enregistrement.

D le locuteur regarde son interlocuteur situé à sa gauche. La flèche est orientée

vers la droite ce qui correspond à la perception de l’observateur lorsqu’il visionne l’enregistrement.

7 regard dirigé vers le clavier

7/: mouvement de va et vient du regard entre le clavier et l’écran pendant la saisie

# regard dirigé dans une autre direction que celles de l’écran, du clavier ou de

l’interlocuteur

# la position du locuteur ne permet pas de voir dans quelle direction s’oriente

son regard (ex : tête baissée mais tournée vers le partenaire)

Par défaut, lorsque aucune indication n’est donnée concernant la direction du regard d’un apprenant, cela signifie qu’il est dirigé vers l’écran de l’ordinateur (:) lorsque les apprenants travaillent avec le logiciel (corpus 1, 2, 4), ou vers la feuille de papier sur laquelle ils écrivent lorsqu’ils travaillent sur papier (corpus 3)

1.6.3. Présentation linéaire

Malgré son intérêt, la transcription en portée n’est pas sans inconvénient du fa it de la difficulté à suivre le fil du texte conversationnel, notamment dans le cas de longs extraits de corpus. C’est la raison pour laquelle, dans le corps de notre travail, les extraits de corpus seront la plupart du temps présentés sous la forme d’une transcription en mode linéaire. Le retour à la ligne systématique à chaque nouvelle contribution et la limitation de la transcription aux données verbales et para- verbales facilitent en effet grandement la lecture.

Les conventions de transcription sont les mêmes que celles qui sont utilisées pour la ligne centrale de la présentation en portée. Seule l’indication concernant les chevauchements se présente de façon différente : les segments en chevauchement sont soulignés.

Exemple :

3K cosmonautes

Exemple :

[Corpus 2 : 1-3] R (Néo-zélandaise) et K (Allemande) / Scribe : K

Extrait 3 : "c’est quelle planète°"

Les deux apprenantes ont pris connaissance du texte-amorce et de la consigne générale d’écriture. Au début de cet extrait, elles lisent la première consigne intermédiaire fournie par le logiciel.

1K euh cette pancarte [00] + 2R les ayant intrigués les cos 3K cosmonautes

4R monautes se mettent à la recherche des habitants de la planète : décrivez brièvement leurs actions ++ euh (7s)

5K hmm: mais ça [000] sur planète° [00] 6R hm hm + ils euh +

7K ils [prirent?] 8R c’est quelle planète° 9K bon euh: ++

10R Mars°

Avec ce mode de transcription, les informations liées au comportement non verbal des interactants (regards, gestes, postures, actions non verbales de type saisie), n’apparaissent pas. Cependant, des commentaires du transcripteur portant sur ce type d’information sont ajoutés entre parenthèses, lorsque cela a été jugé nécessaire pour la compréhension du segment cité. Par ailleurs, les observations du corpus ont toujours été faites à partir de la présentation en portée, si bien que nous pouvons tenir compte, dans les descriptions et les analyses, d’éléments ne figurant pas dans la présentation linéaire.

Précisons que pour les transcriptions d’extraits complémentaires (ajoutés à notre corpus initial), nous nous sommes limitée à une présentation linéaire considérée comme suffisante pour rendre compte du phénomène observé.

L’ensemble de ce dispositif méthodologique, dans la lignée des travaux de l’interactionnisme et des conversationnalistes s’inspirant de l’ethnométhodologie, vise à indiquer clairement nos options : partir de la transcription multimodale des données brutes, avec le minimum d’a priori ou de préconstruits, afin de tester nos hypothèses de départ et de les revisiter au fil de l’analyse. Celle-ci s’appuie sur la pragmatique linguistique et vise à articuler interactionnisme et acquisition.

CHAPITRE 2