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Procédures concernant les divers Etats membres

165 A. Droit interne suisse

B. Avis des organes de contrôle

1. Procédures concernant les divers Etats membres

Les nombreux avis des organes de contrôle ont notamment porté sur les formes que peut prendre le licenciement discriminatoire, sur la na-ture et les modalités des protections que les Etats sont appelés à insti-tuer et sur les protections spécifiques qui doivent être assurées aux diri-geants et représentants syndicaux.

a) Formes du licenciement discriminatoire

Les actes répréhensibles peuvent revêtir différentes formes. Ils ne se limitent pas au licenciement, à la réduction des effectifs ou à la cessa-tion de service, mais englobent également toute mesure de représailles, telle que la suspension prise contre un travailleur exerçant des activités syndicales174.

La mise à la retraite d’office en raison d’activités syndicales licites est également couverte175. Par ailleurs, il faut veiller à ce que l’application des programmes de réduction du personnel ne soit pas utilisée pour procéder à des actes de discrimination antisyndicale176.

172 Voir DUNAND/MAHON/BOUVERAT/BRÜGGER/HASSISSENE/MADER, Représentants des travailleurs, N 379-386.

173 CEACR, Etude d’ensemble sur les conventions fondamentales, N 180.

174 CLS, Liberté syndicale, N 1088.

175 CLS, Liberté syndicale, N 1109.

176 CLS, Liberté syndicale, N 1112.

Jean-Philippe Dunand

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b) Nature des protections

De nombreux avis des organes de contrôle ont porté sur la question de la nature des sanctions ordonnées en cas de licenciement antisyndical pour que la protection soit considérée comme adéquate.

Selon la Commission d’experts, sont compatibles avec la convention les systèmes qui prévoient des mesures préventives comme la nécessité d’obtenir une autorisation préalable d’une autorité judiciaire, des in-demnités et des sanctions suffisamment dissuasives, et/ou la réintégra-tion des travailleurs licenciés177.

Bien que la Convention n’exige pas des Etats qu’ils introduisent la réin-tégration du travailleur dans leur législation, la Commission estime que ce type de sanction devrait au moins figurer parmi l’éventail des me-sures pouvant être ordonnées par l’autorité judiciaire en cas de licen-ciement antisyndical178.

Lorsque le pays opte pour un système d’indemnisation et d’amendes, la Commission d’experts estime que, premièrement, l’indemnisation pour licenciement antisyndical doit être plus élevée que celle prévue pour les autres types de licenciement, et, secondement qu’elle doit être adaptée à la taille de l’entreprise concernée (une indemnité de six mois de salaire peut avoir un caractère dissuasif pour les petites et moyennes entre-prises, mais pas forcément pour les entreprises à forte productivité ou pour les grandes entreprises)179.

En complément à d’autres mesures, un moyen d’assurer une protection efficace peut consister à faire obligation à l’employeur d’apporter la preuve de la nature non syndicale du motif qui sous-tend son intention de licencier un travailleur180.

Selon la Commission d’experts, il n’apparaît pas qu’une protection suffi-sante soit accordée par une législation permettant en pratique aux em-ployeurs, à condition de verser l’indemnité prévue par la loi pour tous les

177 CEACR, Etude d’ensemble sur les conventions fondamentales, N 182.

178 CEACR, Etude d’ensemble sur les conventions fondamentales, N 183.

179 CEACR, Etude d’ensemble sur les conventions fondamentales, N 185.

180 CLS, Liberté syndicale, N 1155.

La discrimination antisyndicale

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cas de licenciement injustifié, de licencier un travailleur si le motif réel en est son affiliation ou son activité syndicale181.

Dans de nombreux cas, le Comité a demandé aux Etats concernés de garantir que les travailleurs qui ont été victimes de licenciements anti-syndicaux soient réintégrés dans leur poste de travail sans perte de ré-munération182.

Lorsqu’une réintégration sous une forme ou sous une autre s’avère im-possible, pour des raisons objectives et impérieuses, les gouvernements doivent veiller à ce que soit versée aux travailleurs concernés une in-demnisation adéquate qui constitue une sanction suffisamment dissua-sive contre les licenciements antisyndicaux183.

c) Protection spécifique des délégués syndicaux

Les organes de contrôle ont souvent affirmé que les représentants et dirigeants syndicaux devaient bénéficier de protections spécifiques. Il faut alors tenir compte de la nature, de l’importance des fonctions du représentant syndical, et des exigences de ce type de mandat pour éva-luer la gravité du licenciement et fixer les réparations184.

En particulier lors des premières étapes de la syndicalisation d’un lieu de travail, le licenciement de représentants syndicaux peut mettre en péril les premières tentatives d’exercice du droit d’organisation car cela a non seulement pour conséquence de priver les travailleurs de leurs représen-tants, mais aussi d’avoir un effet intimidant sur les autres travailleurs qui auraient pu envisager d’assumer des fonctions syndicales ou simple-ment d’adhérer à un syndicat185.

L’une des manières d’assurer la protection des délégués syndicaux est de prévoir qu’ils ne puissent être licenciés ni dans l’exercice de leurs fonctions, ni pendant un certain laps de temps suivant la fin de leur mandat, sauf évidemment en cas de faute grave186.

181 CEACR, Etude d’ensemble sur les conventions fondamentales, N 180 ; CLS, Liberté syndicale, N 1106.

182 CLS, Liberté syndicale, N 1163-1171.

183 CLS, Liberté syndicale, N 1172-1177.

184 CEACR, Etude d’ensemble sur les conventions fondamentales, N 186.

185 CLS, Liberté syndicale, N 1131.

186 CLS, Liberté syndicale, N 1122.

Jean-Philippe Dunand

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Les activités des dirigeants syndicaux doivent être examinées dans le contexte des situations particulières qui peuvent être spécialement ten-dues et difficiles en cas de différend du travail et de grève187.

Cependant, le principe suivant lequel un travailleur ou un dirigeant syn-dical ne doit pas subir de préjudice en raison de ses activités synsyn-dicales n’implique pas nécessairement que le fait de détenir un mandat syndical doive conférer à son détenteur une immunité contre tout licenciement, quelles que soient les circonstances188.

Ainsi, le congédiement de syndicalistes pour absence de travail sans le consentement de l’employeur, par exemple afin de participer à un cours d’éducation ouvrière, ne semble pas constituer en soi une violation de la liberté syndicale189.