• Aucun résultat trouvé

Procédure relative aux requêtes individuelles Introduction d’une requête

Afin de pouvoir introduire une requête auprès de la Cour, le requérant doit satisfaire à certains critères de recevabilité130. La plupart des requêtes sont rejetées au stade de la recevabilité et, une requête ne pouvant être introduite deux fois sur les mêmes faits doit impérativement remplir d’emblée les critères.

La Cour dispose de son propre formulaire de requête (disponible auprès du Greffier de la Cour dans toutes les langues officielles des États contractants) qui doit être rempli et renvoyé à la Cour.

Outre ses renseignements personnels et ceux concernant son représentant légal, le requérant doit fournir les informations suivantes:

• Exposé des faits;

• Rapport détaillé sur les droits de la Convention qui auraient été violés;

• Confirmation d’avoir exercé les recours internes, y compris les dates et détails des arrêts rendus;

• Recours introduit devant la Cour.

130 Guidance for those wishing to apply to the European Court of Human Rights (Note d’orientation destinée aux requérants désireux de saisir la Cour européenne des droits de l’homme), disponible sur www.echr.coe.int/

ECHR/EN/Header/Applicants/Apply+to+the+Court/Application+pack (site consulté le 4 décembre 2012).

Des copies de tous les documents à l’appui doivent être jointes à la requête.

La Cour n’accepte pas de plaintes anonymes et le nom du requérant sera communiqué à l’État.

La procédure est publique, mais la confidentialité peut dans certains cas être garantie en mentionnant le requérant par ses initiales. Les États sont tenus de ne pas bloquer la requête et de coopérer avec la Cour dans son enquête.

Pour engager une procédure en vertu de la Convention, un requérant doit alléguer une violation d’un ou de plusieurs droits prévus dans la Convention ou l’un de ses protocoles. Une requête peut susciter des mesures de la part de l’État, d’un de ses organes – tels que forces armées, police, tribunaux ou autres organismes publics. La Cour n’a que rarement fait droit à une requête alléguant un préjudice causé par une partie privée; dans ces cas, soit l’État a confié une fonction publique à un organisme privé, soit il incombait à l’État d’empêcher ce type d’acte par des tiers.

La Convention protège quiconque relève de la compétence de l’État. La nationalité du requérant est sans importance; en fait, un recours peut même être introduit par un apatride. Une instance peut être saisie quand une mesure prise par un État porte atteinte à des droits dans un autre État, même si ce dernier n’est pas partie à la Convention. Le cas d’une personne qui cherche à éviter une expulsion ou une extradition vers un État où il existe un risque de torture ou de mort est l’exemple le plus courant de ce type de situation.

Définition de la «victime»

La personne qui saisit la Cour en vertu de la Convention doit avoir subi personnellement la violation alléguée. Il peut s’agir des effets directs d’une mesure prise par l’État, par exemple, le requérant a subi la torture, une publication lui a été saisie par le gouvernement, ou il lui a été interdit de pratiquer sa religion. Toute violation peut porter préjudice également aux proches des personnes dont les droits ont été directement violés: des parents peuvent faire valoir un préjudice découlant de la détention de leur enfant ou de tout autre mauvais traitement.

Des victimes potentielles peuvent également saisir la Cour dans certaines circonstances. La Cour a admis l’argument selon lequel un requérant est une victime s’il existe un risque qu’il soit directement atteint par une mesure de l’État, telle que l’application de lois réprimant l’homosexualité ou exigeant l’éducation sexuelle en classe contrairement aux souhaits des parents. Toutefois, le requérant doit attester qu’il court un risque personnel réel, non une simple éventualité, d’être victime d’un préjudice à l’avenir. Une requête générale concernant une loi ou une mesure est irrecevable, de même qu’une requête au nom de tiers (excepté s’ils sont clairement identifiés et si le requérant les représente officiellement).

Toute personne physique, tout groupe de particuliers et toute organisation non gouvernementale (ONG) peuvent introduire des requêtes. Un groupe ou une ONG qui dépose une plainte doit toutefois répondre à la définition de «victime». Il suffit manifestement que l’organisation soit victime de la violation (école fermée ou organisation faisant l’objet d’une surveillance indue de la police). La Cour a estimé que des syndicats, sociétés, organismes religieux, partis politiques et citoyens d’une ville remplissent les conditions requises pour être considérés comme «victimes».

Quand des membres d’un groupe ou d’une association sont les victimes, il peut être judicieux d’introduire une requête individuelle et une requête collective. Si la requête collective est déclarée irrecevable, la requête individuelle peut permettre à l’affaire d’aboutir.

Un groupe n’a pas à être enregistré ou reconnu officiellement par l’État pour introduire une requête. De plus, le fait que la non-reconnaissance prive de la possibilité de saisir les instances nationales et empêche un groupe minoritaire d’agir pour défendre ses droits peut s’assimiler au déni du droit à un procès équitable ou un recours effectif (art. 6 et 13, respectivement), qui peut être contesté en vertu de la Convention.

Autres conditions de recevabilité

Comme il ressort des procédures internationales relatives aux droits de l’homme, les requérants doivent prouver qu’ils ont exercé un recours relatif à la violation présumée de la part de l’État concerné. Dans de rares cas, il peut ne pas exister de recours utile et effectif pour violation d’un droit particulier prévu dans la Convention. Toutefois, si un requérant n’a pas exercé un recours comme il aurait dû le faire, la Cour déclarera l’affaire irrecevable. Seuls les recours «effectifs»

susceptibles de corriger intégralement la violation doivent être épuisés – à savoir procédures judiciaires et administratives. Les recours discrétionnaires (tels que recours en grâce après une condamnation) ne doivent en général pas être introduits.

Toute personne peut saisir d’une requête la Cour européenne des droits de l’homme dans un délai de six mois à partir de la date de la décision interne définitive. Quand une loi en vigueur constitue une violation permanente, la requête peut être déposée à tout moment. Si le requérant n’a initialement pas connaissance de la violation, le délai de six mois commence à partir de la date où il en prend effectivement connaissance. Il importe de noter que la requête ne peut avoir été introduite au préalable auprès de tout autre organe d’enquête international, tel que le Comité des droits de l’homme de l’ONU.

Enfin, la requête doit alléguer la violation d’un droit qui est effectivement protégé par la Convention.

Ainsi, une allégation de discrimination ethnique ou religieuse dans l’administration du régime de sécurité sociale d’un État ne sera pas recevable dès lors que la Convention ne prévoit aucun droit à la sécurité sociale. Toutefois, cette interprétation restreinte de la discrimination a été élargie par l’entrée en vigueur du Protocole no 12 à la Convention.

Enquête et décision

Un échange de mémoires peut avoir lieu sur les questions de recevabilité et l’examen au fond d’une requête. Chaque partie peut formuler des commentaires sur les observations de l’autre. La procédure se déroule d’ordinaire par voie de mémoires seulement, mais la Cour peut décider de procéder à une audience orale sur la recevabilité ou le fond, voire les deux. Chaque partie est représentée à toute audience et la procédure est fondée sur l’égalité entre le requérant et l’État en tant que partie.

Des ONG peuvent être appelées à déposer en tant qu’experts ou témoins et tout défenseur des droits des minorités doit savoir qu’il peut intervenir comme amicus curiae dans le cas d’une affaire particulièrement préoccupante. Cette procédure, appelée intervention de tiers, peut être requise après communication d’une affaire à l’État défendeur aux fins d’observations. Elle offre la possibilité de fournir à la Cour des renseignements utiles sur une question qui peut avoir une incidence directe sur les droits des minorités dépassant la portée du cas d’espèce. Toute ONG qui souhaite intervenir ainsi doit en demander par écrit l’autorisation au Président de la Cour dans un délai de 12 semaines à partir de la communication de l’affaire à l’État concerné, information qui peut être obtenue sur le site Web de la Cour.

La Cour examine l’affaire au fond par voie de mémoires et peut entendre des témoins, voire se rendre dans le pays concerné si elle l’estime nécessaire. La Cour cherchera à parvenir à un règlement amiable, si possible, qui n’intervient toutefois qu’avec l’accord des deux parties.

La Cour délibère en séances à huis clos, mais ses arrêts sont publics et communiqués immédiatement aux deux parties. La Cour se limite, dans ses arrêts, à déterminer s’il y a eu violation ou non de la Convention et, dans le cas de violation avérée, à accorder des indemnités pécuniaires et les frais et dépens. La Cour, en principe, n’ordonne pas au gouvernement, par exemple, de libérer un détenu ou de modifier ses lois. Toutefois, ces dernières années, elle a quelque peu évolué à cet égard, notamment en indiquant qu’une personne privée illégalement de liberté devrait être

libérée (Ilascu et autres c. Moldova et Russie [GC] (2004)). Comme précisé plus haut, l’arrêt de la Cour est légalement contraignant pour les États parties à la Convention. Il incombe au Comité des ministres, en vertu de l’article 46.2) de la Convention, de veiller à l’exécution d’un arrêt de la Cour, mais la grande majorité des États se conforment sans délai aux arrêts.

Une chambre de sept juges peut se dessaisir d’une affaire en faveur d’une grande chambre de 17 juges lorsque l’affaire soulève une grave question d’importance générale ou un point délicat touchant l’interprétation ou l’application de la Convention. Les arrêts d’une chambre ne sont pas définitifs avant un délai de trois mois. Durant cette période, l’une des parties peut demander le renvoi à la grande chambre; un collège de cinq juges examine cette requête.

Affaires urgentes

La Cour peut accorder la priorité à des affaires urgentes. Elle peut également accorder des mesures provisoires en cas de risque imminent, réel et grave pour la vie du requérant ou de mauvais traitements graves. La Cour peut déclarer que l’État doit se garder de certains actes ou prendre des mesures pour protéger le requérant. Les mesures demandées et les raisons de les solliciter doivent être indiquées sur le formulaire de la requête.

Documents relatifs