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Charte européenne des langues régionales ou minoritaires

La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires adoptée en 1992 est entrée en vigueur en 1998. Ratifiée par 25 États134, elle vise à protéger et promouvoir les langues régionales et minoritaires, ainsi qu’à permettre aux personnes parlant ces langues de les utiliser dans la vie privée et publique. Son objet prépondérant est culturel et porte intrinsèquement sur les langues régionales et minoritaires, les langues non territoriales et les langues officielles moins largement utilisées, plus que sur les droits des minorités en soi.

Le préambule de la Charte commence par établir les principaux objectifs et principes que les États s’engagent à appliquer à toutes les langues régionales ou minoritaires qui existent dans leur territoire national en «[s]oulignant la valeur de l’interculturel et du plurilinguisme». Il s’ensuit une série de mesures concrètes destinées à faciliter et encourager l’emploi des langues régionales ou minoritaires dans la vie publique (partie III). Ces mesures tendent à garantir, autant que possible, que les langues régionales ou minoritaires sont utilisées dans l’enseignement, les médias, les cadres juridiques et administratifs, la vie économique et sociale, les activités culturelles et les

134 Allemagne, Arménie, Autriche, Bosnie-Herzégovine, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Finlande, Hongrie, Liechtenstein, Luxembourg, Monténégro, Norvège, Pays-Bas, Pologne, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Serbie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse et Ukraine.

échanges transfrontières. Au moment de ratifier la Charte, les États doivent indiquer expressément à quelles langues la partie III s’appliquera; toutes les langues qui relèvent de la définition d’une langue régionale ou minoritaire sont visées par la partie II (voir ci-après).

Selon la définition de la Charte, par «langues régionales ou minoritaires», on entend les langues pratiquées traditionnellement sur un territoire d’un État par des ressortissants de cet État qui constituent un groupe numériquement inférieur au reste de la population de l’État, différentes de la (des) langue(s) officielle(s) de cet État et n’incluant ni les dialectes de la (des) langue(s) officielle(s) de l’État ni les langues des migrants». Par «territoire dans lequel une langue régionale ou minoritaire est pratiquée”, on entend l’aire géographique dans laquelle cette langue est le mode d’expression d’un nombre de personnes justifiant l’adoption des différentes mesures de protection et de promotion prévues par la présente Charte.

Par «langues dépourvues de territoire», on entend les langues pratiquées par des ressortissants de l’État qui sont différentes de la (des) langue(s) pratiquée(s) par le reste de la population de l’État, mais qui, bien que traditionnellement pratiquées sur le territoire de l’État, ne peuvent pas être rattachées à une aire géographique particulière de celui-ci, par exemple le romani et le yiddish.

La situation démographique des langues relevant de la Charte diffère grandement selon un très large éventail de contextes sociaux, politiques et économiques. En conséquence, la Charte permet d’adapter la portée de la protection en fonction de la situation propre à chaque langue, compte tenu notamment des coûts de la protection.

La partie II énonce huit principes fondamentaux et objectifs sur lesquels les États fondent leurs politiques, lois et pratiques et qui sont censés fournir le cadre nécessaire à la préservation des langues concernées:

• La reconnaissance des langues régionales ou minoritaires en tant qu’expression de la richesse culturelle;

• Le respect de l’aire géographique de chaque langue régionale ou minoritaire;

• La nécessité d’une action résolue pour promouvoir ces langues;

• La facilitation et/ou l’encouragement de l’usage oral et écrit des langues régionales ou minoritaires dans la vie publique et dans la vie privée;

• La mise à disposition de formes et de moyens adéquats d’enseignement et d’étude de ces langues à tous les stades appropriés;

• La promotion des formes appropriées d’échanges transnationaux;

• L’interdiction de toute distinction, exclusion, restriction ou préférence injustifiées portant sur la pratique d’une langue régionale ou minoritaire et ayant pour but de décourager ou de mettre en danger le maintien ou le développement de celle-ci;

• La promotion de la compréhension mutuelle entre tous les groupes linguistiques.

La partie III (art. 8 à 14) contient des mesures détaillées dans de nombreux domaines, offrant aux États un éventail de 68  engagements concrets à choisir dans sept domaines de la vie publique. Les États s’engageant à appliquer les dispositions de la partie III auxquelles ils ont adhéré, les obligations souscrites varieront d’un État à l’autre, mais également d’une langue à l’autre dans un État donné. Au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, par exemple, différentes dispositions de la partie III s’appliquent au gallois, à l’écossais gaélique et à l’irlandais, respectivement, alors que la partie II seule s’applique à l’écossais, l’écossais d’Ulster, au cornique et au mannois.

Les États doivent retenir un minimum de 35 engagements pour chacune des langues désignées comme relevant des dispositions de la partie  III de la Charte. De nombreuses dispositions de la Charte comprennent plusieurs options plus ou moins rigoureuses, dont l’une doit être choisie «selon la situation de chaque langue». Les États sont encouragés à souscrire à d’autres dispositions au titre de la Charte ou adapter leurs engagements à tout moment ultérieur, selon l’évolution de leur situation légale ou en fonction de leur situation financière (art. 3. 2).

Les domaines de la vie publique, chacun correspondant à un article de la partie  III, où les engagements doivent être choisis, sont les suivants:

• Enseignement;

• Justice;

• Autorités administratives et services publics;

• Médias;

• Activités et équipements culturels;

• Vie économique et sociale;

• Échanges transfrontaliers.

Application et suivi

Les membres d’un comité d’experts indépendants, composé d’un membre pour chaque État partie, sont désignés par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe sur une «liste de personnes de la plus haute intégrité, d’une compétence reconnue dans les matières traitées par la Charte, qui seront proposées par la Partie concernée». Comme il est souligné dans le rapport explicatif de la Charte (par. 131) «en mettant l’accent sur le trait intrinsèquement personnel de la «plus haute intégrité», la Charte indique que les experts nommés au comité doivent, dans l’accomplissement de leurs tâches, agir de façon indépendante et non suivant des instructions des gouvernements concernés».

Les rapports des États sur l’application de la Charte doivent être présentés périodiquement: le premier dans l’année qui suit l’entrée en vigueur de la Charte pour l’État et les autres rapports tous les trois ans après le premier rapport.

Le mécanisme de suivi commence avec la soumission par l’État de son rapport. Le comité d’experts a élaboré des méthodes de travail novatrices et utilise pleinement les larges pouvoirs que lui confère le paragraphe 2 de l’article 16 de la Charte pour demander et obtenir des informations de sources non officielles, en particulier des ONG. Le comité organise des visites sur place, qui permettent à ses membres envoyés dans l’État examiné de rencontrer des autorités gouvernementales et des représentants des communautés linguistiques.

Compte tenu de ces informations, le comité adopte un rapport et le présente au Comité des ministres qui adresse des recommandations à l’État, fondées sur le rapport et les observations dudit État. Ces rapports sont rendus publics et sont normalement traduits dans les langues officielles de l’État135.

Rôle des organisations non gouvernementales dans le suivi

Le comité d’experts attribue une grande importance au rôle effectif des ONG dans le mécanisme de suivi et voit dans ces organisations des partenaires égaux et essentiels du dialogue entre

135 Disponibles sur www.coe.int/t/dg4/education/minlang/Report/default_fr.asp (site consulté le 4 décembre 2012).

les États et le Conseil de l’Europe. Les ONG ont l’occasion de fournir au comité leurs avis sur la situation des langues régionales ou minoritaires dans les pays examinés, de même qu’elles participent aux travaux du Comité consultatif de la Convention-cadre. Les ONG et autres partenaires peuvent à tout moment s’adresser au comité d’experts pour lui faire part d’informations pertinentes.

Afin de favoriser la participation des ONG au mécanisme de suivi, le Conseil de l’Europe a publié, en 2004, la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires: Travailler ensemble – Les ONG et langues régionales ou minoritaires.

Adresses et autres renseignements

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