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Commission interaméricaine des droits de l’homme

La Commission compte sept experts indépendants présentés par des États et élus par l’Assemblée générale de l’OEA188. Elle se réunit à Washington en sessions ordinaires et extraordinaires plusieurs fois par an (la durée et la fréquence des réunions sont déterminées par les membres de la Commission et peuvent varier). Elle peut tenir des audiences à tout moment sur des affaires ou des sujets préoccupants. Particuliers, représentants d’organisations non gouvernementales (ONG) et gouvernements participent à de nombreuses audiences qui sont désormais diffusées sur le site Web de la Commission. La Commission organise des audiences thématiques (changement climatique, incidence des projets de grands barrages sur les droits de l’homme) d’une manière irrégulière. Elle peut effectuer des visites sur place, avec le consentement ou sur invitation de l’État concerné.

La compétence de la Commission est très large: elle s’étend à chacun des États membres de l’OEA, ainsi qu’à l’élaboration des rapports de pays, aux enquêtes relatives aux communications individuelles alléguant des atteintes aux droits de l’homme et la saisine de la Cour interaméricaine des droits de l’homme (si l’État concerné en a reconnu la compétence). La Commission exerce un pouvoir analogue au titre de la Déclaration (applicable à tous les États membres de l’OEA) et de la Convention (applicable uniquement aux États parties). Pour toute question juridique, il importe de savoir à quel titre la Commission est appelée à intervenir, mais les deux instruments prévoient une pratique et une procédure similaires. Le pouvoir de la Commission relève de son statut et règlement intérieur. En raison de la taille restreinte de la Commission et de son effectif, les procédures peuvent subir un retard et ne pas suivre les mêmes règles qu’au titre de la Convention européenne des droits de l’homme (voir chap. XII).

Rapports de pays

Le pouvoir le plus inhabituel et effectif de la Commission est probablement sa capacité à ouvrir une enquête sur une situation des droits de l’homme dans tout État membre de l’OEA, à la suite d’une information reçue ou de sa propre initiative. Cette enquête est ouverte quand la Commission décide, à une majorité, qu’elle est justifiée et il n’existe aucun moyen de l’y obliger.

Nul particulier ni ONG n’ont à intervenir à cet effet, mais l’information qu’ils ont communiquée fonde la Commission à décider d’ouvrir une enquête et d’établir un rapport.

La Commission peut réunir des informations librement, notamment lors d’audiences ou d’audition de témoins. D’ordinaire, elle demande à l’État concerné d’autoriser une visite sur place qui permet à ses membres de rencontrer des particuliers, des ONG et des représentants de gouvernements. Ce type de visite suscite normalement une grande publicité dans le pays et offre ainsi une excellente occasion aux minorités de soumettre leurs préoccupations directement à la Commission.

188 Voir www.cidh.oas.org/DefaultE.htm (site consulté le 6 décembre 2012).

Les rapports de la Commission, qui sont presque toujours diffusés, contiennent des renseignements sur le système juridique et la condition sociale du pays, ainsi que sur les questions préoccupantes relatives aux droits de l’homme. Un rapport peut aborder la condition des minorités dans un État, tel que l’enquête ouverte en mars 2009 sur les personnes d’ascendance africaine en Colombie. Ces dernières années, la Commission s’est attachée à enquêter davantage sur la situation de certains groupes − femmes, enfants, demandeurs d’asile et migrants − que sur la situation générale des droits de l’homme dans un État donné. Un État n’est pas tenu de répondre directement aux conclusions ou aux recommandations de la Commission, mais un rapport de la Commission rendu public peut servir efficacement à exercer des pressions politiques pour améliorer la situation des droits de l’homme. Ces dernières années, la Commission n’a publié qu’un rapport par pays et par année en moyenne; les plus récents ont porté sur le Honduras (2010, 2009), la Bolivie (État plurinational de) (2009, 2007), le Venezuela (République bolivarienne du) (2009, 2003), Haïti (2008, 2005) et le Guatemala (2003, 2001). Dans les cas de discrimination généralisée envers les minorités, qu’elle soit ou non réprimée, les défenseurs des droits des minorités devraient envisager (outre déposer une plainte) de s’adresser à la Commission et de rechercher le moyen de la persuader d’ouvrir une enquête.

Communications individuelles de violations des droits de l’homme

Tout particulier, groupe de personnes ou ONG peut saisir la Commission d’une requête alléguant une violation des droits de l’homme dans un État membre de l’OEA. Lorsque l’État est partie à la Convention, c’est la Convention qui s’applique; sinon, les droits protégés relèvent de ceux énoncés dans la Déclaration. Dans les deux cas, le requérant ne doit pas être nécessairement victime d’une violation, même si la requête invoque des cas précis de violations présumées. La requête peut porter sur un seul cas et une seule personne, ou elle peut soulever des préoccupations plus étendues qui touchent de nombreuses personnes.

La communication doit exposer les faits avec autant de détails que possible, notamment concernant les actes ou fonctionnaires du gouvernement contestés, ainsi que les droits de l’homme qui auraient été violés. Le requérant doit établir que tous les recours internes disponibles ont été épuisés. Toutefois, il en est dispensé si l’État ne garantit pas une procédure régulière, les voies de recours n’ont pas été accessibles, la procédure interne a été indûment retardée ou le requérant n’a pas pu être représenté en justice. Le simple fait que la procédure interne n’a pas abouti est insuffisant, sauf si ladite procédure a violé les garanties des droits de l’homme – la Commission n’est pas une instance de recours dont la tâche consiste à examiner le bien-fondé des décisions internes rendues sur des points d’ordre matériel. L’affaire peut certes être examinée si la loi est en soi présumée incompatible avec des droits protégés. La Commission exige strictement que toute requête soit déposée dans les six mois à partir de la date à laquelle la décision de la plus haute instance nationale a été notifiée à la victime (ou dans les six mois à compter de l’incident, à défaut de voies de recours disponibles).

La Commission rend un avis officiel sur la recevabilité de la requête, à savoir si elle remplit toutes les conditions requises pour sa présentation. Le Secrétariat de la Commission effectue un examen préliminaire qui, en principe, produit l’un des trois effets suivants: 1) rejet de la requête au motif qu’elle est manifestement infondée − la violation alléguée ne relève pas de la Déclaration ou la Convention; 2) demande de renseignements complémentaires, ou 3) communication de la requête à l’État concerné. Dans un cas d’urgence et de risque de préjudice irréparable pour la vie ou l’intégrité physique de la victime, la Commission peut être invitée à prendre des

«mesures provisoires» en demandant à l’État de ne pas prendre de mesures qui pourraient nuire à l’existence continue de l’objet de l’instance. Ainsi, la Commission peut demander de surseoir à une exécution ou expulsion, ou que le gouvernement s’abstienne de toute autre mesure qui rendrait la requête sans objet ou causerait un préjudice irréparable.

Si l’État répond, le requérant a la possibilité de présenter des observations par écrit. Si l’État ne répond pas ou oppose simplement un déni général, la Commission est fondée à considérer que les faits allégués sont exacts. À tout moment, le requérant (ou l’État) peut demander à être entendu, bien que la Commission y consente uniquement si elle l’estime nécessaire. La Commission proposera également une médiation ou un «règlement amiable» entre le requérant et l’État, qui doit être convenu par les deux parties. Ce type de règlement peut prévoir une indemnisation, la libération d’une personne détenue, voire l’engagement de l’État à modifier une loi ou une pratique.

À défaut de règlement amiable, la Commission délibère à huis clos et rédige finalement un rapport contenant des conclusions et recommandations sur l’affaire. Après un intervalle de trois mois, durant lequel le rapport est envoyé à titre confidentiel à l’État et au requérant, le rapport est soit transmis à la Cour aux fins d’examen, soit publié dans le rapport annuel de la Commission à l’Assemblée générale de l’OEA. Le rapport de la Commission n’est pas juridiquement contraignant pour l’État concerné et la Commission ne peut directement ordonner la libération d’un détenu, le versement d’une indemnisation ou la modification d’une loi qui viole les droits de l’homme. Elle peut toutefois donner (et le donne) son avis quant à savoir si la Déclaration ou la Commission a été violée et adresse des recommandations aux États. Ces recommandations n’étant pas toujours systématiquement respectées, le requérant ou une ONG peut demander instamment à l’État d’adopter les recommandations de la Commission.

La procédure peut durer deux ans ou davantage, en raison d’un manque de ressources qui empêche d’instruire rapidement le millier d’affaires en suspens. Un avis favorable de la Commission représente, au minimum, une victoire morale et politique et la procédure peut en soi inciter l’État à faire droit à la demande du requérant avant même l’adoption d’un rapport définitif. Rares ont été les requêtes individuelles traitant de questions relatives aux minorités, bien que les affaires concernant des peuples autochtones soient de plus en plus courantes.

Rapporteur pour les droits des personnes d’ascendance africaine et contre la discrimination raciale

En 2005, la Commission a créé la fonction de Rapporteur pour les droits des personnes d’ascendance africaine et contre la discrimination raciale, qui est chargé d’encourager, de systématiser, de renforcer et d’harmoniser les activités de la Commission dans ce domaine189. Le Rapporteur collabore avec les États membres de l’OEA en vue:

• De sensibiliser aux obligations des États en matière de droits de l’homme des personnes d’ascendance africaine et d’élimination de toutes les formes de discrimination raciale;

• D’analyser les difficultés effectives que rencontrent les pays de la région dans ce domaine, de formuler des recommandations visant à traiter ces difficultés et à déceler et échanger les bonnes pratiques;

• De surveiller et d’offrir une assistance technique sur demande d’un État membre.

Au sein de la Commission, le Rapporteur cherche à faire respecter les mandats de l’Assemblée générale de l’OEA liés aux personnes d’ascendance africaine, au racisme et à la discrimination raciale. Il soutient les travaux de la Commission comme suit:

• Élabore des rapports et des études spéciales sur les droits des personnes d’ascendance africaine et sur des questions concernant l’élimination de la discrimination raciale;

• Examine des communications sur des actes de racisme et de discrimination raciale reçues par la Commission et soumet des avis et recommandations à la Commission;

189 Voir www.oas.org/en/iachr/afro-descendants/default.asp (site consulté le 6 décembre 2012).

• Formule des recommandations à la Commission sur les audiences à accorder et y participe;

• Aide les parties à parvenir à un règlement;

• Engage des consultations et présente des recommandations aux États membres concernant la modification des lois relatives aux droits des personnes d’ascendance africaine et à la discrimination raciale;

• Accompagne la Commission dans ses visites sur place;

• Aide à rédiger des décisions sur la recevabilité et des rapports sur le fond dans des affaires litigieuses, ainsi que des rapports thématiques, de pays et annuels.

Le Rapporteur s’occupe, avec les autres rapporteurs de la Commission, des questions relevant du mandat et s’associe à la société civile pour sensibiliser aux garanties et aux mécanismes offerts par le système interaméricain des droits de l’homme. Le Rapporteur tient également une base de données d’information liées au mandat et collabore avec des organes de l’ONU, notamment la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, le Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine et le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et d’intolérance qui y est associé.

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