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Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales

La Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ou Convention européenne des droits de l’homme) est entrée en vigueur en 1953, inaugurant le premier système régional de protection des droits de l’homme. Elle a été révisée à plusieurs reprises par une série de protocoles et, en 1998, la Cour européenne des droits de l’homme est devenue la première cour permanente en la matière au monde. Tous les États membres du Conseil de l’Europe sont parties à la Convention. Le droit de recours individuel est inhérent au système de la Convention et les arrêts de la Cour ont force obligatoire pour les États parties.

128 Albanie, Allemagne, Andorre, Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, ex-République yougoslave de Macédoine, Fédération de Russie, Finlande, France, Géorgie, Grèce, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Malte, Monaco, Monténégro, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République de Moldova, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Saint-Marin, Serbie, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Turquie, Ukraine.

Les 47 juges de la Cour sont élus par l’Assemblée parlementaire. Les affaires sont traitées par des chambres de sept juges et les affaires importantes peuvent être déférées devant une grande chambre de 17 juges. Le Comité des ministres veille à l’exécution des arrêts de la Cour.

Dans certaines circonstances, un requérant peut obtenir l’aide juridictionnelle et, dans le cas d’une violation avérée, peut également être remboursé des frais encourus par la mise en état de l’affaire. Toutefois, cette aide est en principe possible après seulement qu’il a été demandé au gouvernement défendeur de formuler ses observations sur la recevabilité de la requête.

Contrairement à certains systèmes juridiques internes, il ne peut être imposé aux requérants de payer les frais de justice encourus par l’État qui fait l’objet d’une plainte.

La Cour examine un grand nombre d’affaires de particuliers, ainsi que des affaires opposant des États (rarement); sa jurisprudence est abondante129. Ces dernières années, de 40  000 à 50 000 demandes ont été déposées chaque année. Le résumé ci-après présente certaines questions soulevées par des affaires portées devant la Cour et liées aux minorités.

La Convention ne contient aucune disposition en matière de droits des minorités semblable à l’article 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Les membres de groupes minoritaires ne disposent par conséquent d’aucun moyen de revendiquer directement des «droits des minorités» devant la Cour européenne des droits de l’homme. Néanmoins, un certain nombre de droits prévus par la Convention peuvent être invoqués en matière de protection des minorités.

La Convention et les droits des minorités

La plupart des droits prévus dans la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales s’appliquent aux minorités, mais l’expression «minorité nationale»

apparaît dans deux de ses articles seulement.

L’article 14 dispose que «la jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation».

L’article 14 n’exprime pas un droit autonome à la non-discrimination et il ne peut être invoqué qu’à raison d’un autre droit consacré par la Convention. Malgré ses limitations, l’article 14 a, ces dernières années, été invoqué à bon escient pour régler des questions préoccupantes de minorités, en particulier roms. Dans l’affaire Gaygusuz c. Autriche (1996), la Cour a constaté une violation de l’article 14 lu en corrélation avec l’article 1 du Protocole no 1 concernant la différence de traitement entre Autrichiens et non-Autrichiens quant à leur droits à une aide d’urgence. Dans l’affaire Nachova c. Bulgarie (2005), la Cour a conclu pour la première fois à une atteinte au principe de non-discrimination raciale reconnu par l’article 14 (lu en corrélation avec l’art. 2 sur le droit à la vie) au motif que les autorités n’ont pas recherché d’éventuels motifs racistes à l’origine de la fusillade par la police militaire visant des Roms. Dans l’affaire D. H. et autres c. République tchèque (2007), la Cour a admis dans sa jurisprudence, au titre de l’article 14, que le placement d’un nombre disproportionné d’élèves roms dans les écoles dites «spéciales» pour enfants atteints de troubles mentaux portait atteinte au droit à la non-discrimination raciale (lu en corrélation avec l’art. 2 du Protocole no 1 sur le droit à l’éducation).

La Cour a réaffirmé cet avis dans l’affaire Oršuš et autres c. Croatie (2010) en concluant que

«le placement des requérants dans des classes réservées aux Roms à certaines périodes de leurs études primaires était dépourvu de justification et qu’il y a eu violation de l’article 14 associé à l’article 2 du Protocole no 1». Dans l’affaire Religionsgemeinschaft der Zeugen Jehovas et autres c. Autriche (2008), elle a conclu à une violation de l’article 14, lu en corrélation avec l’article 9 quant aux modalités d’octroi du statut de société religieuse aux communautés religieuses.

129 Voir www.echr.coe.int.

Le Protocole no 12, entré en vigueur en 2005, crée une interdiction générale de la discrimination dans l’exercice de tout droit prévu par la loi ou de la part de toute autorité publique. Ainsi, il n’est plus nécessaire de lier une allégation de discrimination à un droit matériel expressément énoncé dans la Convention.

La discrimination ne se limite pas aux cas où une personne ou un groupe de personnes est moins bien traité que tout autre groupe. Traiter différents groupes comme s’ils étaient semblables, par exemple traiter de la même manière un groupe minoritaire et un groupe majoritaire, peut porter préjudice à la minorité. La Cour a admis que les mesures concrètes prises pour améliorer la situation de minorités sont compatibles avec le principe de non-discrimination. Elle a souligné que «la démocratie ne se ramène pas à la suprématie constante de l’opinion d’une majorité mais commande un équilibre qui assure aux minorités un juste traitement et qui évite tout abus d’une position dominante» (Chassagnou et autres c. France (1999) et Gorzelik et autres c. Pologne (2004)).

En 2009, la Cour a conclu que les dispositions de la Constitution de Bosnie-Herzégovine qui limitent certains postes politiques à des membres des trois «peuples constituants» de l’État (Bosniaques, Croates et Serbes) violent l’article 14 de la Convention lu en corrélation avec l’article 3 du Protocole no 1, lequel prévoit des élections qui assurent la libre expression de l’opinion du peuple, ainsi que l’interdiction générale de la discrimination visée à l’article 1 du Protocole no 12. Les requérants d’origine rom et juive ne pouvaient partant, au sens de la législation de Bosnie-Herzégovine, se porter candidats aux élections à l’une des chambres du Parlement ou à la Présidence de la Bosnie-Herzégovine (Sejdic et Fincic c. Bosnie-Bosnie-Herzégovine (2009)).

Un certain nombre d’affaires au titre de la Convention ont porté sur les droits linguistiques.

Les institutions de Strasbourg n’ont cessé de soutenir qu’il n’existe aucun droit d’utiliser une langue particulière dans les relations avec les autorités gouvernementales, mais, dans le cadre d’une procédure judiciaire, chacun a le droit d’être informé promptement, dans une langue qu’il comprend, des raisons de son arrestation (art. 5. 2) et de la nature de l’accusation portée contre lui (art. 6. 3. a)); un défendeur a également le droit de se faire assister gratuitement d’un interprète, s’il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l’audience (art. 6. 3. e)).

L’article 8 de la Convention prévoit le droit au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance. Dans l’affaire Yordanova et autres c. Bulgarie, concernant un projet d’expulsion de Roms vivant dans un camp à Sofia, la Cour a conclu qu’au sens de l’article 8, le principe de proportionnalité doit être pris en considération au regard des particularités des requérants qui forment un groupe socialement défavorisé, ainsi que de leurs besoins propres et que l’application de l’ordonnance emporterait violation de l’article 8.

L’article  10, en garantissant le droit à la liberté d’expression, protège le droit d’utiliser une langue minoritaire dans la vie privée ou au sein d’un groupe minoritaire. Les minorités ont le droit de publier leurs propres journaux ou d’utiliser d’autres médias sans ingérence d’autorités publiques ou autres.

L’article  2 du Protocole additionnel no  1 dispose que nul ne peut se voir refuser le droit à l’instruction. L’instruction des enfants appartenant au groupe est un autre moyen de protéger l’identité d’une minorité. La Convention ne prévoit pas explicitement de droit à l’instruction dans la langue maternelle; toutefois, l’abandon de l’enseignement dans la langue maternelle peut dans certaines circonstances violer le droit à l’instruction (Chypre c. Turquie (2001)).

L’article  9 consacre le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Ce droit suppose la liberté de manifester sa religion, en d’autres termes, qu’une minorité doit pouvoir suffisamment maîtriser les questions religieuses communautaires. La Cour a statué que l’État ne doit pas s’ingérer dans les affaires intérieures d’une église et «que la liberté de pensée, de conscience et de religion représente l’une des assises d’une «société démocratique» au sens de la Convention. Il y va du pluralisme − chèrement conquis au cours des siècles − consubstantiel à pareille société» (Serif c. Grèce (1999)).

L’État peut restreindre les manifestations de la religion d’une minorité exclusivement pour des motifs raisonnables et objectifs.

[L]orsque l’organisation de la communauté religieuse est en cause, l’article  9 doit s’interpréter à la lumière de l’article 11 de la Convention qui protège la vie associative contre toute ingérence injustifiée de l’État. Vu sous cet angle, le droit des fidèles à la liberté de religion suppose que la communauté puisse fonctionner paisiblement, sans ingérence arbitraire de l’État. En effet, l’autonomie des communautés religieuses est indispensable au pluralisme dans une société démocratique et se trouve donc au cœur même de la protection offerte par l’article 9. Elle présente un intérêt direct non seulement pour l’organisation de la communauté en tant que telle, mais aussi pour la jouissance effective par l’ensemble de ses membres actifs du droit à la liberté de religion. Si l’organisation de la vie de la communauté n’était pas protégée par l’article 9 de la Convention, tous les autres aspects de la liberté de religion de l’individu s’en trouveraient fragilisés (Hasan et Chaush c. Bulgarie (2000)).

En outre, selon la Cour, un groupe minoritaire est en principe habilité à revendiquer le droit au respect du mode de vie qu’il s’est choisi, à savoir de sa «vie privée

»

, sa «vie familiale» ou son

«domicile» en vertu de l’article 8 de la Convention (G. et E. c. Norvège (1983)).

La Cour a récemment rappelé, en invoquant la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales «qu’un consensus international se fait jour au sein des États contractants du Conseil de l’Europe pour reconnaître les besoins particuliers des minorités et l’obligation de protéger leur sécurité, leur identité et leur mode de vie, non seulement dans le but de protéger les intérêts des minorités elles-mêmes, mais aussi pour préserver la diversité culturelle qui est bénéfique à la société dans son ensemble. La force des croyances collectives d’une communauté culturellement bien définie ne peut pas être ignorée» (Munoz Diaz c. Espagne (2009)). En l’espèce, la Cour a «estimé disproportionné le fait que l’État espagnol, après avoir fourni à la requérante et à sa famille un livret de famille, leur avoir reconnu la situation de famille nombreuse, accordé une assistance en matière de santé à l’intéressée et ses six enfants et encaissé les cotisations de son mari pendant plus de dix-neuf ans, méconnaisse aujourd’hui la validité de son mariage rom en matière de pension de réversion».

Procédure relative aux requêtes individuelles

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