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Chapitre 6. A SSISTANCE A LA CONCEPTION PEDAGOGIQUE Comme nous l’avons déjà souligné, la conception de scénarios pédagogiques, à l’instar de toute

6.4. Soutien à la conception et réutilisation

6.4.1. Principes généraux

Paquette (2005) précise que :

« Les scénarios concrétisent des méthodes pédagogiques qui ont fait leur preuve et dont des répertoires existent dans les ouvrages de science de l’éducation […]. Réutiliser des modèles de scénarios de qualité, éprouvés dans de nombreux contextes éducatifs peut souvent apporter davantage de qualité que la simple réutilisation de ressources de contenu. »

La réutilisation suppose que des objets réutilisables aient été partagés. Dans le domaine de la scénarisation pédagogique, plusieurs types de scénarios peuvent être partagés pour être réutilisés (Emin 2010 ; Villiot-Leclercq 2007) :

des scénarios instanciés, plus ou moins contextualisés par rapport à une situation spécifique ;

des gabarits de scénarios, ossatures à partir desquelles les concepteurs vont définir plus précisément leurs propres scénarios ;

des patrons : version opérationnelle d’un modèle de scénario identifié comme une solution éprouvée pour répondre à un problème de conception récurrent identifié. (Ce type de scénario spécifique est abordé de manière plus approfondie dans la suite de cette section – cf. § 6.4.2).

Les scénarios réutilisables dans un processus de conception concernent également différents niveaux de granularité et de généricité : activités ou séquence d’activités, « patrons (ou squelettes) d’unités complètes, mais aussi d’activités génériques dont le déroulement demande une description fine […]. Nous devons travailler dans cette optique à recenser des séquences types d’activités, aussi bien sur un plan générique, c’est-à-dire transdisciplinaire, que dépendant du domaine d’apprentissage et/ou du type de pédagogie mise en œuvre» (Ferrariset al. 05). Selon la nature de l’objet réutilisé (scénario instancié, gabarit ou patron), un concepteur va pouvoir faire appel à différentes stratégies (Emin 2010) :

Des stratégies d’imitation dans le cas où les concepteurs s’inspirent de scénarios instanciés existants. Ces stratégies supposent que le concepteur effectue une décontextualisation du scénario exemple, c’est-à-dire qu’il identifie les caractéristiques liées aux spécificités du contexte initial afin de les adapter à son propre contexte.

Des stratégies d’instanciation lorsque l’activité porte sur la réutilisation de gabarits. Ce type de stratégies se focalise sur la contextualisation d’éléments pré-identifiés du gabarit. Des stratégies de composition où il s’agit d’associer différents scénarios ou composants

de scénarios.

Au sein d’une même activité de conception, un concepteur est susceptible de faire appel à plusieurs de ces stratégies : par exemple, il peut tout d’abord effectuer une composition d’éléments, puis instancier certains des composants agrégés et adopter une stratégie d’imitation pour adapter d’autres composants à son contexte.

Dans ses travaux de recherche, Villiot-Leclercq (2007) s’est attachée à définir un modèle pour assister la réutilisation de scénarios : le modèle MOSCA (Modèle de soutien à l’élaboration et la réutilisation de scénarios d’apprentissage). Ce modèle est basé sur le processus CAA qui fait apparaître trois grandes étapes dans un processus de réutilisation de scénarios : le Choix, l’Appropriation et l’Adaptation.

Le choix d’un scénario parmi l’ensemble des scénarios existants, faisant partie des références internes du concepteur ou mis à sa disposition dans une bibliothèque, est la première étape du processus de réutilisation nécessitant une assistance. Il s’agit ici de guider le choix d’un scénario adapté en identifiant des critères pertinents par rapport à la tâche de conception demandée (contexte de formation, objectif et public cible par exemple), aux intentions du concepteur, à ses représentations préalables de solutions au problème.

La seconde étape identifiée dans le processus de réutilisation d’un scénario est l’appropriation du scénario par le concepteur. Un objectif de l’assistance est de faciliter cette appropriation à travers : des scénarios structurés et formalisés, exprimés dans un langage familier des concepteurs ; des représentations multiples des scénarios qui visent à correspondre aux différents types cognitifs, préférences et habitudes des concepteurs

(niveaux de description plus ou moins détaillés, représentations textuelles ou graphiques).

La troisième étape du processus de réutilisation sur laquelle va également porter l’assistance est l’adaptation du scénario aux besoins spécifiques de la situation et aux souhaits du concepteur. A ce niveau, il est notamment nécessaire d’offrir une certaine flexibilité et une facilité d’adaptation des scénarios réutilisables afin de favoriser la créativité et l’innovation (Bonnardel 2006).

Villiot-Leclercq s’est par ailleurs appuyée sur des principes issus de l’apprentissage situé dont elle a retenu :

la modélisation des processus qui l’a conduite à la définition du formalisme des Pléiades en vue d’une expression formalisée des scénarios (cf. section 6.5.3) pour une présentation détaillée du formalisme) ;

l’accès a l’expertise, principe à partir duquel elle s’est intéressée à l’usage de patrons de conception ;

l’approche multi-perspectives ;

l’approche par étayage qui l’a amenée à intégrer un système de suggestions dans son modèle d’assistance.

Le modèle de soutien MOSCA a à la fois été défini à partir de ces principes et du processus de réutilisation CAA. Il fait apparaître quatre niveaux de soutien dans lesquels des « artefacts » ou outils supports sont proposés pour mettre en œuvre les interventions d’assistance :

le niveau 1 offre une vue d’ensemble du processus de réutilisation visant à favoriser la conscience métacognitive des concepteurs. A ce niveau, le processus de réutilisation est représenté sous forme d’un graphe des tâches ;

le niveau 2 concerne la mise à disposition de patrons décrits avec le formalisme des Pléiades ;

le niveau 3 propose un accompagnement à la sélection d’un scénario adapté aux besoins du concepteur ;

le niveau 4 a pour objectif d’accompagner l’adaptation du scénario choisi en fournissant au concepteur des suggestions.

Pernin & Lejeune (2004a) adoptent une approche complémentaire à celle de Villiot-Leclercq. Ils s’intéressent de manière plus large aux problématiques de partage et de réutilisation en jeu dans le processus de conception de scénarios pédagogiques (présenté dans la section 5.2.2). Ainsi, ils identifient de leur côté trois principaux niveaux du processus de conception pour lesquels ils proposent de fournir des outils informatiques d’assistance :

La conception de scénarios abstraits : assister la création ou la modification de scénarios pédagogiques abstraits, c’est-à-dire décrits en termes génériques.

La contextualisation des scénarios : assister la définition d’un scénario opérationnel pour une situation spécifique, c’est-à-dire faciliter la définition plus précise du scénario, l’affectation des rôles-types du scénario abstrait à des acteurs réels identifiés, la planification concrète des activités, l’association de ressources et outils réels aux activités, etc.

L’indexation et la recherche de scénarios dans une bibliothèque : proposer des outils pour faciliter le catalogage des scénarios créés et les recherches ultérieures dans le répertoire de scénarios indexés afin de favoriser la réutilisation des scénarios existants.