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Chapitre 3. J EU ET FORMATION : UNE ASSOCIATION SOURCE DE PARADOXE ET D ’INTERET

4- Simulation et jeux de rôle pédagogiques

3.5. Le débriefing : un moment-clé de la formation par le jeu

3.5.3. Organisation du processus de débriefing

Le débriefing a généralement lieu après le jeu, mais dans le cas d’un dispositif qui se déroule sur une période plus longue et composé de plusieurs sessions de jeu, des débriefings intermédiaires peuvent être envisagés.

Thiagarajan (1992) souligne que l’une des difficultés dans l’organisation d’un débriefing est de trouver un juste équilibre entre une discussion très structurée et des échanges plus libres. En se basant sur les travaux de Thiagarajan (1993 in Kriz 2010) et sur des éléments issus de travaux qu’il a menés auparavant, Kriz (2010) propose d’organiser les débriefings autour de six grandes phases ou questions afin de s’assurer que ce moment joue pleinement son rôle.

Tout d’abord, le débriefing vise à décrire l’expérience vécue :

La phase 1 s’intéresse aux émotions ressenties et pose la question «Qu’avez-vous

ressenti ? » Les participants font ici part des émotions ressenties au moment même du débriefing, c’est-à-dire après le jeu, mais ils se remémorent également ce qu’ils ont ressenti pendant le jeu. L’objectif est relâcher les tensions éventuelles et de favoriser la concentration pour la suite du débriefing. Cette phase va également permettre aux participants de prendre de la distance par rapport à l’expérience de jeu et de se détacher des rôles qu’ils ont joués.

La phase 2 revient sur l’expérience vécue afin d’en élaborer une description issue des différents points de vue des participants. Elle est menée autour de la question «Que s’est-il passé ? » qui initie une discussion autour des perceptions, observations et réflexions portant sur l’activité elle-même. Le formateur peut orienter ces échanges autour des objectifs pédagogiques ou des dynamiques de fonctionnement qui se sont mises en place au sein des groupes selon les éléments sur lesquels il souhaite attirer l’attention. Le but ici est de reconstituer ce qui s’est passé.

La phase 3 va inciter les participants à établir un lien entre le jeu et l’expérience réelle par l’intermédiaire d’une question du type «De quelle manière le jeu et la réalité sont-ils connectés ? ». C’est ici qu’on initie un transfert de ce qui s’est passé dans le jeu (compétences et connaissances mises en œuvre et acquises) vers la vie réelle, et plus particulièrement dans le cas d’une formation professionnelle, vers le contexte professionnel. Dans cette phase le jeu va être déconstruit : les rôles, règles et ressources du jeu sont comparés avec les rôles, règles et ressources du système réel. L’accent est tout particulièrement mis sur l’identification de similarités et de différences entre l’expérience de jeu et la réalité pour éviter que les participants n’aboutissent à des conclusions et généralisations inappropriées.

La phase 4 constitue une synthèse sur les apprentissages, basée sur les éléments issus des trois phases précédentes. A travers la question «Qu’avez-vous appris ? » les participants sont invités à identifier les apprentissages issus de l’expérience de jeu. On vise ici à mutualiser, formaliser voire généraliser les conclusions issues de cette expérience. L’expérience vécue et les nouveaux apprentissages commencent à être intégrés aux structures cognitives des participants et sont consolidés à travers les échanges avec les autres participants (approche constructiviste et socio-constructiviste de l’apprentissage).

Afin de favoriser davantage le transfert des apprentissages issus de l’expérience de jeu et en vue de préparer l’application des nouvelles compétences acquises, la fin de la discussion peut être organisée autour de deux phases supplémentaires.

La phase 5 s’intéresse à des prolongements de l’expérience de jeu, à l’élaboration de scénarios hypothétiques répondant à la question «Que serait-il arrivé si… ? ». Les participants sont invités à réfléchir à ce qui aurait changé dans leur comportement, dans celui de l’équipe ou des autres participants si les règles, les conditions ou un paramètre quelconque du jeu avaient changé. De cette façon, ils sont incités à envisager l’application de ce qu’ils ont appris à des contextes différents.

La phase 6 vise plus précisément à préparer la mise en application des compétences acquises. La question «Que fait-on maintenant ? » invite à définir des objectifs clairs, réalistes et mesurables en termes d’actions futures qui seront menées par les participants dans des situations analogues à celles abordées dans le jeu.

Plusieurs méthodes peuvent être utilisées pour mener un débriefing selon la structure présentée précédemment (Kriz 2010) : présence ou non d’un animateur menant les échanges, débriefing oral ou écrit, débriefing individuel, en binôme ou avec l’ensemble des participants, etc. La plupart du temps, un débriefing va faire appel à une combinaison de plusieurs méthodes.

Petraneket al. (1992) détaille notamment l’intérêt d’un débriefing individuel écrit, prenant la forme de la rédaction d’un journal. Cette méthode a l’avantage de permettre à chaque apprenant

d’organiser et de poser concrètement, de manière personnelle, les connaissances issues du jeu et les informations issues du débriefing collectif oral. Elle permet de garder une trace et favorise la prise de recul, accentuant davantage la réflexivité sur l’expérience vécue et favorisant l’intégration des nouveaux apprentissages.

Synthèse : le débriefing

Dans notre contexte d’intégration du jeu dans un dispositif de formation, le recours au débriefing s’avère incontournable. C’est au cours du débriefing que se fait le lien entre l’expérience de jeu et le réel, favorisant ainsi la prise de conscience des objectifs de formation et le transfert, dans la situation professionnelle réelle, des compétences acquises. Le débriefing s’avère d’autant plus utile lorsque la situation proposée dans le jeu n’est pas strictement fidèle à la réalité : c’est le cas lorsqu’une métaphore de la situation réelle est utilisée pour décontextualiser les connaissances et les mettre en exergue. Afin de s’assurer d’atteindre au mieux les objectifs qui lui sont assignés, la phase de débriefing doit être organisée et conduite de manière rigoureuse, selon les méthodes détaillées précédemment.