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1. Présentation du corpus

1.1. Présentation des ouvrages

1.1.1. Robert Martin, 1992, Pour une logique du sens

Cet ouvrage composé de 319 pages tente de rendre compte du rôle de la notion de vérité dans la sémantique. Dans ce sens, l’auteur montre que « le concept le plus opératoire [dans la sémantique] est celui de vérité » (Robert Martin 1992 : 13). L’approche adoptée est celle de la logique. Celle-ci explique les liens de vérité qui unissent les phrases en constituant une sorte de « logique du sens ».

L’auteur a abordé des notions fondamentales : celle de vérité floue, celle de mondes possibles, et celle d’univers de croyance. Il ajoute également la notion d’analycité qu’il considère comme centrale pour la sémantique puisqu’elle ne paraît pas indépendante des trois précédentes.

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Pour rendre compte de ces différentes notions, l’auteur a exposé ses idées en cinq chapitres :

- Le premier chapitre qu’il considère liminaire dans lequel il donne un aperçu sur les notions fondamentales d’analycité, de flou, de monde possible, d’univers de croyance : il s’agit de faire un examen critique de l’usage que peut faire la sémantique de la notion de vérité.

- Le second chapitre rend compte notamment de la définition linguistique, de la question « du vrai par définition ».

- Le troisième chapitre est consacré aux « mondes possibles » et les « univers de croyance ».

- Le quatrième chapitre évoque la sémantique du flou, donc la question du « plus ou moins vrai ».

- Le cinquième chapitre passe de la phrase à l’énoncé pour introduire le domaine discursif et pragmatique du vrai et du faux.

Pour éclairer ces notions, Martin a eu recours, à des exemples variés tout au long de son ouvrage attestant ainsi du rôle fondamental de ceux-ci pour expliquer les faits et les phénomènes linguistiques.

Cet ouvrage est traduit en arabe par Mejri et Baccouche en 2006 sous le titre ليبس يف ىنعملل قطنم fiː ѕabiːli manṯiqin lilmaʕnaː (Litt. Dans chemin logique pour le sens). Selon les traducteurs, cette traduction apporte aux lecteurs arabophones de nouvelles notions dont le développement en langue arabe reste limité. Par conséquent, les difficultés que pose la traduction de certains termes métalinguistiques suscitent des questions d’une grande importance. Soulignons que la contrainte majeure, dans ce sens, est celle liée à la perte d’information susceptible d’être causée par le choix des correspondants en langue arabe.

Mejri et Baccouche ont justement attiré l’attention sur cette problématique des termes ainsi que sur les contraintes liées à leurs traductions en raison du fonctionnement différent des deux systèmes linguistiques. La langue française, qui compte, entre autres, sur des

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procédés de préfixation et de suffixation pour la formation des termes, est très différente de la langue arabe dont la formation des termes est basée sur la dérivation morphologique à partir de schèmes à nombre limité.

En choisissant de traduire littéralement des termes préfixés exprimant la négation, les traductions obtenues montrent que dans tous les cas de figures, la structure morphologique des termes proposés ne change pas. Les termes comme asémantique, inaccompli, dissymétrie, contrevérité sont traduits en arabe respectivement (traduction littérale des composants des termes sources) par لاد لا laː daːl (Litt. Non signifiant), زجنم لا laː munʒiz (Litt. Non accompli), لﺛامت لا laː tamaːθul (Non homologie, symétrie), ةقيقح لا laː ẖaqiːqa (Litt.

Non vérité). En d’autres termes, on peut reformuler la démarche traductive des différents termes sources de la manière suivante :

Asémantique [A (absence) + Sémantique] : لاد لا (لا + لاد) [l’absence exprimé par A est traduite en arabe par لا (Litt. Non).

Inaccompli [In (non) + Accompli] : زجنﻣ لا (لا + زجنﻣ) [la négation exprimée par in est traduite en arabe par لا (Litt. Non).

Dissymétrie [Dis (séparation) + symétrie] : لثامت لا (لا + لثامت) [l’idée de séparation exprimée dans dis est traduite en arabe par لا (Litt. Non).

Contrevérité [Contre (inverse) + Vérité) ةقيقح لا (لا + ةقيقح) [l’inverse exprimé dans contre est traduit par لا (Litt. Non).

Il convient de souligner que le choix de la procédure de traduction adoptée pour rendre les termes sources montre un schéma homogène au niveau des équivalents. Les différents sens exprimés par les préfixes des termes en français sont rendus en arabe par une seule particule de négation لا (Litt. Non).

1.1.2. Robert Martin, 2004 Comprendre la linguistique, épistémologie élémentaire d’une discipline

Cet ouvrage, de 206 pages, aborde les finalités de la linguistique et les types de questions que les linguistes se posent ainsi que les différentes méthodes adoptées, par eux, afin d’apporter des éléments de réponse. Il s’agit, en effet, de notions élémentaires qui sont

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également à la portée de ceux qui n’ont pas acquis de connaissances préalables dans le domaine de la linguistique : «cela s’appellerait une « épistémologie de la linguistique » : l’épistémologie dit ce qu’une science se propose et de quelle manière elle procède. Mais c’est ici une épistémologie « élémentaire », c'est-à-dire formulée dans le langage de tous, aussi aisée que possible, même si elle cherche à aller aussi loin que l’auteur en est capable. » (Robert Martin, 2004, p 9-10)

Ce manuel est rédigé en six parties : il donne un aperçu sur les différentes approches des sciences du langage à savoir la linguistique descriptive (que signifie décrire en linguistique ?), la linguistique théorique (l’explication en linguistique), la linguistique générale (les concepts qui sont valables pour toutes les langues), la philosophie du langage ( les rapports liant le langage à la réalité, à la pensée, à la vérité, à l’action), la linguistique historique (l’évolution des langues) et la linguistique appliquée (cette partie évoque la didactique des langues, la thérapeutique des troubles du langage et notamment « les industries de la langue »). Soulignons que dans le cadre de la linguistique générale, on évoque les concepts qui peuvent être valables dans toutes les langues.

Cet ouvrage est traduit en arabe par A. Mhiri en 2002 sous le titre de تايناسللا مھفل لخدم madϰal lifahm aliѕaːnijaːt (Litt. Introduction à la compréhension de la linguistique). Le traducteur évoque dans son introduction les contraintes qu’a posées la traduction vers l’arabe des exemples servant l’illustration des faits linguistiques. Nous aborderons dans notre analyse la nature des problèmes liées à la traduction des exemples : il s’agit de vérifier l’adéquation entre les sens des termes traduits avec les exemples illustratifs.

Le traducteur souligne avoir traité la traduction des exemples en fonction des solutions qu’il considère adéquates aux objectifs visés par l’auteur du texte en tentant d’éviter de tomber dans de fausses interprétations. Cependant, dans des cas de similitude entre les deux langues, le traducteur Mhiri a traduit les exemples vers l’arabe étant donné que la traduction rend le sens visé : dans un passage lié à la définition du terme autonymie, l’auteur de l’ouvrage source affirme que « les signes [parfois], au lieu de renvoyer aux choses renvoient à eux-mêmes. Au pluriel, table s’écrit avec un S : voilà qui ne dit rien de tout d’aucune table…Toutes les langues du monde se prêtent à l’autonymie ; toutes peuvent servir à elles-

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mêmes de métalangage ». En arabe, le traducteur a illustré le sens du terme en question par la traduction littérale de l’exemple table, soit ةلواط (Litt. Table) qui rend parfaitement le sens du concept puisqu’il s’agit d’une notion partagée par toutes les langues.

Le traducteur était contraint, dans des cas, de donner les exemples en français accompagnés de leurs traductions en arabe pour transmettre leurs sens. Cette procédure est complétée, quand les cas évoqués le permettent, par des notes de bas de pages afin de donner des équivalents en langue arabe qui se rapprochent des faits décrits.

Par ailleurs, il est question parfois de certains exemples relevant des expressions figées dont la traduction vers l’arabe pose de véritables contraintes. Dans ce sens, le traducteur a opté pour une traduction littérale en soulignant l’objectif visé par l’auteur et en tentant de présenter, dans la mesure du possible, des équivalents en langue arabe.

1.1.3. Jean Pruvost, Jean-François Sablayrolles, 2003, Les néologismes

Cet ouvrage est publié dans la collection « Que Sais-je ? ». Comme le titre l’indique, il aborde les questions relatives aux néologismes. Les deux linguistes rendent compte de l’importance des néologismes qu’ils considèrent comme condition pour qu’une langue quelle qu’elle soit reste vivante : « un constat s’impose : chaque langue et par conséquent chaque système linguistique est articulé de manière à permettre la créativité lexicale, avec un arsenal diversifié de procédés morphologiques et sémantiques. » (Pruvost, -François Sablayrolles 2003 : 11).

Des questions ont été posées sur les procédures de formation des mots et les emplois nouveaux de mots déjà existants ainsi que les mécanismes selon lesquels ces néologismes sont utilisés et les modalités qui expliquent leurs intégrations dans les dictionnaires. Les idées de cet ouvrage sont présentées en six chapitres de telle manière à répondre aux exigences de la collection :

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Cet ouvrage est traduit par Jahima en 2010 sous le titre de ءانب يف ةسارد ،دلوملا ظافللأا almuːωalad diгaːѕa fiː binaːʔi alalfaːð̱ (Litt. Néologisme, étude de la formation des termes).

Après avoir souligné l’utilité de la traduction de cet ouvrage vers l’arabe, le traducteur, indique les contraintes rencontrées durant son travail. Il s’agit, en premier lieu, de la différence entre les deux langues en contact en ce qui concerne les créations néologiques. Il attire, également, l’attention sur ce qu’il considère comme objectif réellement visé par la traduction car selon lui, de mauvaises interprétations sont susceptibles de créer une polémique par rapport aux finalités que l’activité traduisante est tenue de se fixer.

Jahima pense que les traducteurs sont conscients que la traduction consiste à transmettre un vouloir dire et le travail du traducteur n’est nullement la substitution d’un mot d’une langue par un mot d’une autre langue. Ainsi, la difficulté de la traduction ne réside pas dans les différences de mots entre les langues en contact. Par conséquent, on ne peut dire que la traduction entre deux langues proches du point de vue structure morphologique est moins difficile que la traduction entre deux langues différentes sur ce plan. En outre, le traducteur souligne que les adeptes de cette idée sont les partisans de la « théorie linguistique » qui focalisent leur attention sur la comparaison entre les mots et les expressions d’une langue par rapport à une autre. Pour eux, la traduction est rendue possible ou difficile en fonction des différences entre les structures morphologiques.

Le traducteur s’oppose à cette approche et considère que la traduction ne vise pas un transfert de mots d’un texte à un autre mais elle doit plutôt rendre un vouloir dire de la langue de départ à la langue d’arrivée. (Jahima 2010 : 16-17).

En revanche, les difficultés de traduction ne se situent pas au niveau de la compréhension du texte, ni d’ailleurs du vouloir dire de l’auteur, mais la difficulté majeure que pose la traduction de cet ouvrage vers l’arabe, selon le traducteur, réside dans les unités de la langue française qui sont dépourvues de sens car elles sont prises indépendamment du contexte. Celles-ci sont des exemples illustrant le phénomène du néologisme en langue française ainsi que ses caractéristiques : elles rendent compte du fonctionnement de la langue française dans le domaine de la création néologique.

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Cette situation est la raison pour laquelle le traducteur est plus qu’un traducteur c’est aussi un chercheur contraint à trouver dans la langue arabe des unités ayant les mêmes structures morphologiques que celles de la langue française. Khaled Jahima souligne que cet objectif n’est pas seulement difficile, mais il est impossible dans la plupart des cas. Si la traduction visait le transfert des unités d’une langue à une autre, elle serait impossible du point de vue théorique car les unités entre les langues ne s’équivalent presque pas. Ceci permet de dire qu’il est difficile de trouver des équivalents en langue arabe à des exemples en langue française ayant des structures morphologiques spécifiques, notamment quand il s’agit de néologismes pas encore stables ou de néologismes formés par jeu de mots etc.