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Equivalents motivés par les dénominations sources : un cas de rapport d’inclusion

CHAPITRE IV :

3. Analyse des termes du corpus : Etat des lieux

3.3 Emprunt

3.4.1 Equivalents motivés par les dénominations sources : un cas de rapport d’inclusion

Il s’agit des traductions motivées par les dénominations sources (signifiants) en mettant en relief des traits sémantiques distincts. On peut illustrer ce cas par régulateur dont le terme « désigne l’activité verbale, vocale et mimogestuelle par laquelle les auditeurs soutiennent la production du tour de parole d’un locuteur. Il est utilisé pour traduire le terme anglais back-channel introduit par V.Yngve (1970) pour désigner le canal sur lequel la personne dont c’est le tour reçoit de courts messages tels que « oui », « hm », ce canal se distinguant du canal principal (main-channel) sur lequel elle émet. La notion de régulation s’apparente aussi à celle de feed-back, qui s’inscrit dans une conception systémique de la communication…Mais ces activités de maintenance dans l’interaction ne se cantonnent pas au canal verbal, elles relèvent aussi de la gestuelle : « Ce système back-channel comprend en sus des éléments voco-verbaux classiquement considérés, des éléments gestuels et mimiques, l’ensemble s’associant pour assurer le pilotage de l’interaction »...» (Charaudeau, Maingueneau 2002 : 496).

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L’interprétation sémantique compositionnelle de la forme طباضلا alð̱aːbiṯ met en évidence les traits contrôle et régulation, auxquels nous ajoutons, le trait associé à la morphologie du mot, soit nom d’agent. Ce dernier en arabe est appelé 95لعافلا مسا iѕm alfaːʕil, c'est-à-dire celui qui fait l’action. Le sens prédictible de طباضلا alð̱aːbiṯ est, donc, celui qui contrôle ou qui rend régulier le fonctionnement de quelque chose. En fonction de la définition terminologique, le sens assigné à cette forme renvoie à un ensemble d’éléments voco-verbaux qui assurent le pilotage d’une interaction dans une communication.

L’adéquation entre la forme طباضلا alð̱aːbiṯ et le sens terminologique assigné révèle que ce dernier est moins prédictible de cette structure morphologique : celui qui rend régulier le fonctionnement de quelque chose peut inférer un sens de supériorité et de force exercée par le responsable de cette action. En revanche, le sens terminologique met en évidence la notion d’interaction et de feed-back. Dans l’activité verbale, vocale et mimogestuelle, les courts messages que reçoit la personne dont c’est le tour modifient cette activité en créant l’interaction ou le feed-back.

La structure morphologique لدعم muʕaddil indique que c’est un nom d’agent véhiculant, le sens de modificateur. Il convient de souligner que l’interprétation sémantique modificateur est adéquate avec le sens terminologique : dans une activité verbale l’intéraction fonctionne grâce à des modificateurs (éléments voco-verbaux). La structure morphosémantique renvoie à un aspect saillant du sens terminologique. Le lien entre la forme et le sens assigné est transparent.

En termes de traduction, les deux équivalents précédents se sont basés sur un même processus dénominatif mais chacun d’eux rend visible un trait sémantique distinct de la dénomination source et par conséquent, ils appréhendent le sens du terme régulateur de deux points de vue différents. La régulation est un ensemble d’éléments gestuels et mimiques qui assurent le pilotage de l’intéraction. Ainsi, l’idée d’assurer le pilotage de l’interaction communicative infère celle de modération et celle de modification véhiculées par la traduction لدعم muʕaddil. C’est sur ce critère d’inférence que nous nous basons pour considérer équivalent adéquat par rapport à طباضلا alð̱aːbiṯ. L’idée du feed-back ou celle d’assurer le pilotage d’interaction dans la communication n’est pas une opération de contrôle de communication mais c’est plutôt celle de modification de la communication. Dans le cas

95 Cf. Les participes, Chapitre III

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de l’équivalent لدعم muʕaddil, un trait sémantique saillant du sens terminologique est prédictible de la forme

Le terme archive est « héritée de l’archéologie du savoir de M.Foucault et employée en analyse du discours avec trois valeurs distinctes. Chez M.Foucault ( 1969b : 171), l’archive permet de penser les pratiques discursives d’une société…l’archive définit un niveau particulier : celui d’une pratique qui fait surgir une multiplicité d’énoncés comme autant de choses offertes au traitement et à la manipulation…Pour M.Pêcheux et C.Fuchs ( 1975 :29), l’archive est prise dans une opposition entre les corpus obtenus par voie expérimentale… et les corpus produits par voie archiviste, c'est-à-dire découpés par l’analyste parmi les énoncés qui ont été conservés, ceux sur lesquels peuvent travailler les historiens. A la place de celle de « formation discursive », D.Maingueneau ( 1991) introduit la notion d’archive pour rassembler des énoncés relevant d’un même positionnement, tout en soulignant…que ces énoncés sont inséparables d’une mémoire et d’institutions qui leur confèrent leur autorité tout en se légitimant à travers eux. » (Charaudeau, Maingueneau 2002: 61-62).

L’équivalent فيشرأ aгʃiːf (Litt. Archive) est un emprunt du terme source. Il est également utilisé en langue générale dont le sens attesté est choses conservées, documents anciens et institution qui se charge de la procédure de conservation. Au niveau terminologique, il n’existe aucun rapport sémantique entre la structure morphologique de cet équivalent et le sens qui lui est assigné : le sens terminologique n’est pas du tout prédictible à partir de la forme. Cette dénomination, est donc caractérisée par une opacité sémantique car sa structure morphologique ne permet aucune accessibilité au sens. L’équivalent فيشرأ aгʃiːf (Litt. Archive) implique, donc, un choix qui n’est pas motivé et qui risque de rendre l’interprétabilité du sens terminologique ambigu.

Dans le cadre traductif, le choix de cet équivalent peut être justifié par la transposition du sens lexical attesté dans le sens terminologique. Le traducteur a eu recourt à cette unité de la langue générale en basant son choix sur le rapport sémantique qui existe entre le sens lexical de l’unité فيشرأ aгʃiːf et le sens terminologique du terme archive. L’idée de rassemblement en fonction du critère de positionnement ainsi que celle d’institution sont les traits conceptuels saillants du terme archive. Dans cette perspective, il existe une adéquation entre le sens du terme archive et le sens lexical de l’unité فيشرأ aгʃiːf. L’opacité de la structure morphologique n’est pas prise en compte par le traducteur. L’équivalence traductive se distingue du processus de la dénomination terminologique. Si dans l’approche terminologique, le choix de la forme فيشرأ aгʃiːf n’est pas motivé, manque de transparence et

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ne permet pas l’accéssibilité au sens terminologique assigné, du point de vue traductif, cet équivalent est adéquat au terme source car il rend le sens véhiculé. Il convient de souligner que le traducteur a visé un équivalent dans la langue cible pour rendre le sens véhiculé par le terme de la langue source. Dans une approche onomasiologique, la motivation terminologique tend à faire coincider la forme avec le sens : le choix de la dénomination doit, en principe, rendre visible une relation sémantique entre le sens terminologique et la forme.

L’équivalent تاظوفحملا almaẖfuːð̱aːt (Litt. Choses conservées) est une dénomination formée d’un seul élément de nomination. La structure morphologique montre que c’est un nom de patient, en arabe 96لوعفملا مسا iѕm almafʕuːl dont le sens exprime le patient qui subit l’action ou le résultat de celle-ci. Ce nom de patient est au pluriel. Le sens compositionnel de cette structure morphologique véhicule le nom de patient, le trait sémantique conservation et le pluriel. L’ensemble de ces éléments donnent lieu au sens de choses conservées. .

En étudiant le rapport qui existe entre la forme de l’équivalent تاظوفحملا almaẖfuːð̱aːt et le sens terminologique qui lui est assigné, nous constatons que le sens prédictible choses conservées correspond à la composante du sens terminologique exprimée par les énoncés qui ont été conservés. Le sens du terme archive révèle un aspect qui n’est pas pris en charge par la forme en arabe. Le trait conceptuel véhiculé par énoncés rassemblés sur le critère d’un même positionnement n’est pas couvert par le sens sémantique choses conservées. Le sens rassemblement d’énoncés ne peut être déduit de la structure morphologique تاظوفحملا almaẖfuːð̱aːt. Ceci implique que le sens terminologique est moins prédictible de cette forme.

La motivation terminologique implique l’interprétabilité du sens terminologique à partir de la structure morphologique assignée. Le sens sémantique dégagé par cette forme doit, en principe, permettre l’inférence en pointant vers le sens. En occultant une partie du sens, la dénomination adoptée rend le sens terminologique moins prédictible. Du point de vue de la motivation traductive, l’équivalent تاظوفحملا almaẖfuːð̱aːt manque d’informativité et donne lieu à un cas de perte d’information. Nous considérons l’équivalent تاظوفحملا almaẖfuːð̱aːt inadéquat car en focalisant sur la seule information de conservation transmise par la forme la dénomination en arabe risque de limiter l’interprétabilité du sens terminologique de archive à énoncés conservés. En utilisant l’équivalent تاظوفحملا almaẖfuːð̱aːt dans le sens que Maingueneau (1991) donne à archive, il convient de souligner que des énoncés rassemblés en fonction d’un même critère de positionnement ne sont pas des énoncés conservés.

96 Cf. Chapitre III, Les participes.

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Les deux équivalents فيشرأ aгʃiːf et تاظوفحملا almaẖfuːð̱aːt entretiennent un rapport sémantique d’inclusion : l’unité فيشرأ aгʃiːf est l’hyperonyme de تاظوفحملا almaẖfuːð̱aːt.

L’interprétabilité du sens véhiculé par le terme archive est différente en arabe selon qu’on recourt à l’une des deux dénominations ou à l’autre. Ce cas décrit un aspect de la variation terminologique en langue arabe : les deux équivalents partagent un lien sémantique mais ne peuvent pas se substituer l’un l’autre dans leurs usages.