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CHAPITRE III :

2. Du système dérivationnel de la langue arabe

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comprendre de quelle manière la langue arabe procède pour créer des mots nouveaux dont la finalité est de couvrir des sens nouveaux. « Chaque mot à sa racine et son schème ; on pourrait comparer le vocabulaire à un tissu dont le trame serait l’ensemble des racines attestées dans la langue et la chaine l’ensemble des schèmes existants, chaque point d’intersection de la chaine et de la trame serait un mot sans ambigüité par sa racine et son schème, tout schème de son côté fournissant des mots de différents schèmes66. » (Cantineau 1950:74).

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2.1.1. Verbes simples

En arabe on les appelle ةدّرجﻣ لاعفأ afʕaːl muʒaгrada parce que la troisième personne masculin singulier de l’accompli ne possède que les trois ou quatre consonnes de sa racine et des voyelles brèves. La structure de leur schème à l’accompli est R1aRvR3a et à l’inaccompli c’est R1aR2vR3 (la lettre v représente une voyelle brève quelconque).Par exemple, le verbe

َبَتك kataba (Litt. Ecrire) à l’accompli, son schème étant َلَعَف faʕala .A l’inaccompli, le schème correspondant est لَعفي jafʕal, c'est-à-dire بُتكي jaktub. Précisons que dans d’autres exemples de verbes, la voyelle qui suit la radicale R2, c'est-à-dire v, peut être i ou u aussi bien à l’accompli qu’à l’inaccompli.

2.1.2. Verbes augmentés

Ces verbes sont caractérisés par le fait qu’on trouve en plus de leurs consonnes radicales soit des voyelles longues, soit une ou plusieurs consonnes additives. Les formes augmentées les plus fréquentes sont au nombre de dix, les autres sont rares et certaines ont mêmes disparu de l’usage. Ces formes débutent du numéro II car la première est celle des verbes simples. « Ces formes dérivées sont fondées sur l’utilisation des procédés classiques de la morphologie arabe ; alternance de timbre et de durée des voyelles, gémination68 de consonnes, affixation et infixation de consonnes…Bien que tous les mots formés sur la même racine aient souvent une parenté sémantique, et bien que les mots de même schème aient souvent des comportements syntaxiques et sémantiques comparables, ce serait une erreur de supposer que l’on peut aisément deviner le sens et l’usage d’un verbe augmenté à partir de la seule connaissance du sens général de la racine et de la valeur supposée stable su schème. » (Kouloughli 1994 : 199-200).

Malgré celà, on suppose que des valeurs sémantiques générales peuvent être associées à chaque forme ajoutée. Nous présentons comme suit quelques unes de ces formes pour donner un aperçu sur la dérivation verbale, c'est-à-dire les schèmes verbaux.

2.1.2.1. Forme verbale II

Cette forme est obtenue par le redoublement (gémination) de la radicale R2. Il s’agit du schème لٌعف faʕʕal comme par exemple : بٌوذ daωωab (Litt. Faire fondre). Il est à noter que

68Il s’agit du redoublement de consonnes. Il ne consiste pas en le fait d’articuler deux fois la consonne mais de renforcer celle-ci.

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cette forme est caractérisée par une valeur causative-conative que nous constatons dans le verbe précédent. Elle peut avoir, également, une valeur dénominative qui consiste à former un verbe à partir d’un nom comme par exemple le cas du nom دَسج ʒaѕad (Litt. Corps) le verbe دٌسَج ʒaѕѕad (Litt. Incarner).

2.1.2.2. Forme verbale III

Cette forme est connue par la présence d’une voyelle longue après R1. Les verbes formés sur cette forme expriment souvent l’idée de mise en commun. On peut citer, à titre d’exemple, َرطاش ʃaːṯ aгa (Litt. Participer à, prendre part à), كراش ʃaːгaka (Litt. Participer, s’associer).

2.1.2.3. Forme verbale IV

C’est une forme caractérisée par le préfixe de la hamza (Ar. عطق ةزمھ). Celle-ci est stable, par conséquent, elle est obligatoirement prononcée et graphiée. En ce qui concerne sa valeur sémantique, elle est causative « pur ». Pour illustrer ce cas, on peut donner le verbe مَھفأ ʔafham (Litt. Expliquer). Il est possible de faire en arabe une opposition entre le causatif-conatif et le causatif pur, alors qu’au niveau de la langue française les sémantismes sont proches : la différence entre مَھف ʔafham (Litt. comprendre) de cette forme et مٌھف fahham (Litt.

Faire comprendre).

2.1.2.4. Forme verbale V

Il s’agit de la forme II à laquelle on a ajouté [Ta] pour obtenir une valeur aspectuelle du duratif :

َمٌلع ʕallama (Litt. Enseigner) مٌلَعت [Ta]ʕallama (Litt. Apprendre).

2.1.2.5. Forme Verbale VI

C’est la forme III à laquelle on a ajouté la préformante [Ta] pour exprimer entre autres la valeur du réfléchie :

رَواش ʃaːωaгa (Litt. Consulter) رَواشت taʃaːωaгa (Litt. Se consulter).

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2.1.2.6. Forme verbale VII

Les verbes formés à partir de cette forme prennent un [n] avant la R1. Néanmoins, cette forme connaît des incompatibilités avec certaines consonnes, c'est-à-dire qu’on ne trouve pas cette forme avec des racines dont la R1 serait l’une des consonnes suivantes : [ʔ, t, r, n, i, w, y]. On peut donner l’exemple de عطق qaṯ aʕa (Litt. Couper) et عطقنا ʔinqaṯ aʕa (Litt.

S’interrompre). Dans cette forme, on peut exprimer l’idée que les grammairiens appellent ةعواطﻣ muṯ aːωaʕa (Litt. Se laisser faire).

2.2. Schèmes nominaux

Les noms se subdivisent en sous classes, c'est-à-dire les adjectifs et les substantifs.

On doit savoir qu’à chaque verbe correspondent des formes déverbales associées avec lesquelles il peut avoir des relations morphologiques, syntaxiques et sémantiques. Ainsi, les déverbaux les plus importants sont le nom verbal (Masdar), le participe actif (nom d’agent) et le participe passif (nom de patient). Nous avons également, les noms exprimant les notions de temps et de lieu, le nom d’instrument, le nom d’une fois et le nom de manière, l’élatif et l’adjectif de relation69. Les schèmes nominaux sont nombreux et variés. Il faut souligner que le plus grand nombre est enregistré par les substantifs. Nous présenterons dans ce qui suit les définitions des formes les plus courantes.

2.2.1. Le nom verbal ou masdar

C’est un nom abstrait qui est formé de la même racine du verbe auquel il correspond.

Il exprime le même contenu sémantique de ce verbe mais il ne rend aucune idée de temps, de modalité ou de personne. « Le masdar joue en arabe un rôle complexe et particulier car il est à la fois un verbe et un nom ; que d’autre part, il fait simplement fonction de substantif abstrait, et que par là, il tient une place considérable dans le vocabulaire de l’arabe classique. » (R.

Blachère, M. Gaudefroy-Demombynes 2004 :84).

Au niveau du sens véhiculé par le nom verbal, on peut dire qu’il exprime une action, un état ou un processus : par exemple le verbe simple ظفح ẖafið̱a (Litt. Conserver, maintenir), son nom verbal est ظفح ẖifð̱ (Litt. Le fait de conserver, de maintenir). Précisons que si les

69L’adjectif de relation n’est pas dérivé du verbe.

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verbes augmentés de mêmes schèmes ont des noms verbaux formés sur un schème unique ce n’est pas le cas des verbes simples.

2.2.2. Les participes

Le participe actif, ou le nom d’agent (en ar. لعافلا مسا iѕm alfaːʕil) est un nom associé à tout verbe d’action (transitif ou intransitif). Sémantiquement, il exprime l’agent du verbe, c'est-à-dire celui qui fait l’action. Dans la langue moderne, on peut citer l’exemple du verbe نھَر гahana (Litt. Hypothéquer), le non d’agent est نھار гaːhin (Litt. Débiteur). Les schèmes des participes actifs dépendent des formes des verbes auxquelles ils correspondent.

Le participe passif, ou le nom de patient (en ar. لوعفملا مسا iѕm almafʕuːl) est associé à tout verbe transitif. Il exprime le patient qui subit l’action ou le résultat de celle-ci. Par exemple, le verbe بَتك kataba (Litt. Ecrire), son nom de patient est بوتكَﻣ maktuːb (Litt. Ecrit).

Les schèmes des participes passifs sont stables aussi bien pour les verbes simples que pour les verbes augmentés.

Il existe des formes apparentées au participe correspondant à la forme adjectivale, dérivées de l’intransitif comme ةھبشملا ةفصلا asfa almuʃabbaha, ةغلابملا ةفص sifat almubaːlaɤa exprimant l’adjectif d’intensité et ليضفتلا مسا iѕm atafḏiːl, c'est-à-dire le comparatif.

Noms crées par suffixation

Les adjectifs de relation sont considérés comme étant des dénominatifs dont le rôle est d’exprimer l’origine, le rapport. Ces adjectifs se forment par l’adjonction du suffixe ijj. Il faut savoir que cet ajout se fait après avoir supprimé tous les suffixes de genre ou de nombre que peut avoir l’item de base concerné. Par exemple pour le nom, ةنيدملا almadiːna (t) (Litt.

Ville), l’adjectif de relation ٌيندﻣ madanijj (Litt. Citadin).

Il existe un adjectif de relation suivi du suffixe taːʔ maгbuːṯ a exprimant un substantif abstrait de qualité ou de collectivité. Par exemple, ٌيناسنا inѕaːnijj (Litt. Humain), pour rendre l’idée d’humanité, on dit ةيناسنإ inѕaːnijja. On appelle en arabe ce substantif abstrait ردصﻣ يعانص mas̱daг s̱inaːʕiː (Litt. Nom de source artificielle).