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Le Goncourt et les plagiaires

Chapitre 4 Les thématiques scandaleuses

4.1 La sexualité, la marchandisation du corps et la représentation de crimes

4.1.1 La pornographie un discours inacceptable

(5) [PGPN01]

« Ce drame se joue en trente-trois chapitres dont le nombre de pages augmente au fur et à mesure que les images s’entrechoquent dans la tête du narrateur. Et elles sont davantage scatologiques et pornographiques que littéraires. Le résultat, on l’aura deviné… »

L’ouvrage Il entrerait dans la légende de Louis Skorecki, qui met en scène un sérial killer pédophile a été poursuivi à la demande de l’association Promouvoir125 pour « pornographie, violence, atteinte

à la dignité des mineurs, incitation à la débauche et provocation à commettre des atteintes sexuelles sur des mineurs ». D’abord condamné par le tribunal correctionnel de Carpentras à 7 500€ d’amende, l’éditeur (seul mis en cause dans cette affaire) fut par la suite relaxé par la Cour d’appel de Nîmes. C’est donc principalement au motif de la pornographie, que ce texte a pu être inquiété. Que dit précisément la loi à ce sujet ?

L

A PORNOGRAPHIE ET LA PROTECTION DE L

ENFANCE DANS LA LOI

« Les mœurs ont évolué. La France a réformé son droit, mais la loi a continué de régir fermement le sexe dans l’ensemble de ses manifestations. » (Pierrat, 2008, p. 11). La littérature s’inscrit pleinement dans cette affirmation sous l’égide de la protection de la jeunesse. En effet, la parution d’un ouvrage à destination des enfants et des adolescents est strictement encadrée par la Loi du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse. Chaque livre doit passer devant une commission appelée Commission de surveillance et de contrôle des publications destinées à

l'enfance et à l'adolescence126 (dite CSCPJ). Elle veille à ce que ces publications ne représentent pas

de « danger pour la jeunesse en raison de [leur] caractère pornographique » en n’étant pas :

« susceptible[s] d'inciter à la discrimination ou à la haine contre une personne déterminée ou un groupe de personnes, aux atteintes à la dignité humaine, à l'usage, à la détention ou au trafic de stupéfiants ou de substances psychotropes, à la violence ou à tous actes qualifiés de crimes ou de

125 L’association Promouvoir, depuis sa création en 1996 par André Bonnet, ancien magistrat, intervient par voie de justice pour promouvoir (d’où son nom) les « valeurs judéo-chrétiennes et de la famille » selon son fondateur. L’association s’est porté partie civile contre : les films Baise-moi de Virginie Despentes,

Antichrist de Lars Von Trier, 50 nuances de Grey de Sam Taylor-Wood et La vie d’Adèle d’Abdellatif

Kechiche, etc.

Cette même association adressera une requête auprès du Conseil d’Etat pour faire annuler la décision du Ministre de l’intérieur de ne pas interdire l’ouvrage au moins de 18 ans, en vertu de l’article 14 de la loi du 16 juillet 1949. Le Conseil d’Etat estimera que l’association « n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision attaquée » (Conseil d’Etat, 10ème et 9ème sous-sections réunies, du 10 mars 2004, 254788,

mentionné aux tables du recueil Lebon, s. d.)

126 Pour la genèse de cette loi cf. Lévêque, M. (2019). Une liberté sous contrôle : la loi de 1949 sur les publications destinées à la jeunesse. In S. Borvitz & Y. Temelli (Éd.), Liberté e(s)t choix : Verhandlungen

délits ou de nature à nuire à l'épanouissement physique, mental ou moral de l'enfance ou la jeunesse. » (Loi du 16 juillet 1949 - Article 02 | Legifrance, s. d.).

Bref, il s’agit d’écarter la jeunesse française de la représentation de tous les interdits majeurs de la société par des ouvrages qui leur sont pourtant destinés. Cette évolution des mœurs se traduit dans le texte même de la loi qui évolue au fil du temps. Mathilde Lévêque dans ses travaux sur la loi de 1949 précise ainsi que « les vieux péchés capitaux de l’article 2 (paresse, mensonge, débauche) sont remplacés par des « péchés modernes »127 : discrimination, stupéfiants, atteinte à la dignité

humaine » (Lévêque, 2019, p. 193). Ces nouveaux péchés sont les révélateurs des nouveaux interdits d’une époque. En revanche certains perdurent ; ils changent de nom mais pas de cible : la

débauche devient la pornographie mais c’est toujours la représentation de la sexualité qui est visée.

La CSCPJ peut aussi, grâce à l’article 14 de la même loi, prononcer des interdictions (selon trois niveaux128) concernant « les publications de toute nature », c’est-à-dire aussi celles qui ne sont pas

destinées à la jeunesse. Cela veut dire que cette commission a toute latitude pour signaler les publications qui lui paraissent justifier ces interdictions, et ce toujours au nom de la protection de la jeunesse, en interdisant, notamment, la vente de ces œuvres aux mineurs. Même si cette commission a un avis consultatif, et qu’il appartient au Ministre de l’intérieur de suivre ou non ces indications, elle fait partie intégrante des dispositifs disponibles pour réduire la liberté d’expression au motif de l’impact de la littérature sur la jeunesse. Dans les faits, cette commission, ces dernières années, a surtout statué pour des interdictions aux mineurs de certaines revues dont le public n’est de toute façon manifestement pas des mineurs129. Mais elle a aussi la capacité de « convoquer ou

d'alerter les éditeurs sur les manquements qu'ils commettent dans le cadre de la loi, de leur adresser des recommandations ou des avertissements, de tenter de parvenir à une conciliation permettant par exemple d'occulter les passages litigieux des ouvrages, sans disposer toutefois du pouvoir d'injonction » (Rapport d’activité CSCPJ, 2017). Ce pouvoir d’injonction peut être mis en œuvre par un signalement de la CSCPJ aux autorités judiciaires compétentes si la conciliation a échoué.

127 L’auteure emprunte cette formulation à Bernard Joubert dans son Dictionnaire des livres et journaux

interdits.

128 Loi du 16 juillet 1949 – Article 14 – les trois niveaux d’interdiction sont :

« -de proposer, de donner ou de vendre à des mineurs les publications de toute nature présentant un danger pour la jeunesse en raison de contenus à caractère pornographique ou susceptibles d'inciter au crime ou à la violence, à la discrimination ou à la haine contre une personne déterminée ou un groupe de personnes, aux atteintes à la dignité humaine, à l'usage, à la détention ou au trafic de stupéfiants ou de substances

psychotropes ;

-d'exposer ces publications à la vue du public en quelque lieu que ce soit, et notamment à l'extérieur ou à l'intérieur des magasins ou des kiosques, et de faire pour elles de la publicité par la voie d'affiches ;

-d'effectuer, en faveur de ces publications, de la publicité au moyen de prospectus, d'annonces ou insertions publiées dans la presse, de lettres-circulaires adressées aux acquéreurs éventuels ou d'émissions

radiodiffusées ou télévisées.

Ce système, qui a un impact certain sur les auteurs et les éditeurs, est une forme de censure administrative qui se charge de veiller aux intérêts de la jeunesse. Notons que depuis 2011, année d’une grande réforme de la loi du 16 juillet 1949, la Commission n’a plus rendu d’avis d’interdiction au titre de l’article 14. En effet, les nouvelles dispositions législatives prévoient désormais que :

« À l'exception des livres, les publications de toute nature présentant un danger pour la jeunesse en raison de leur caractère pornographique doivent être revêtues de la mention "Mise à disposition des mineurs interdite (article 227-24 du code pénal)" et être vendues sous film plastique. Cette mention doit apparaître de manière visible, lisible et inaltérable sur la couverture de la publication et sur chaque unité de son conditionnement. Cette mention emporte interdiction de proposer, donner, louer ou vendre la publication en cause aux mineurs. La mise en œuvre de cette obligation incombe à l'éditeur ou, à défaut, au distributeur chargé de la diffusion en France de la publication. » (Loi du 16 juillet 1949—Article 14 | Legifrance, s. d.)

Il est donc aujourd’hui de la responsabilité des éditeurs de prendre des dispositions d’évitement pour que les revues les plus explicites ne soient pas accessibles facilement aux mineurs. Nous verrons ci-après que la pratique de la mise sous plastique a aussi été pratiquée pour des romans. Plus généralement, lorsqu'on évoque la répression des œuvres licencieuses, l’accusation d’outrage

aux bonnes mœurs vient immédiatement à l’esprit. Bien que ce libellé n’apparaisse plus

aujourd’hui dans les textes de loi, l’article 227-24 du nouveau Code pénal lui fait échos. Il stipule que :

« Le fait soit de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support un message à caractère violent, incitant au terrorisme, pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine ou à inciter des mineurs à se livrer à des jeux les mettant physiquement en danger, soit de faire commerce d'un tel message, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende lorsque ce message est susceptible d'être vu ou perçu par un mineur.

Lorsque les infractions prévues au présent article sont soumises par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle ou de la communication au public en ligne, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables. » (Code pénal | Legifrance, s. d.)

Pogrom d’Éric Bénier-Bürckel sera, lui aussi inquiété via cet article (mais aussi pour injures

antisémites et provocation à la haine raciale comme on le verra par la suite). L’auteur et l’éditeur seront finalement dédouanés de tous ces chefs d’inculpation. Enfin, l’ouvrage Rose Bonbon de Nicolas Jones Gorlin sera ciblé au titre de l’article 14 de la loi du 16 juillet 1949, là encore sans résultat aux niveaux administratif et juridique.

D

E LA PORNOGRAPHIE

?

Avec le balisage légal que je viens de présenter, on pourra constater que les représentations de la sexualité sont clairement visées dans la protection due aux plus jeunes. Comme je le signalais déjà à propos de Madame Bovary, chaque époque oppose ses propres seuils de tolérance (ou plutôt d’intolérance) à la littérature.

Plus encore que la réalité de la réponse juridique (nulle pour la période concernée) c’est l’ampleur des polémiques à substrat sexuel qui est remarquable dans le corpus de référence. En effet, les

parutions de Rose Bonbon et de Il entrerait dans la légende ont été parmi les événements discursifs polémiques les plus retentissants des seize années à l’étude. Parutions qui, par ailleurs, ont eu lieu la même année (2002). Elles ont fait réagir sur un versant moral un grand nombre de spécialistes, de politiques et de commentateurs de tous ordres. Et comme le précise Emmanuel Pierrat :

« En matière d'écrits et d'images, la justice tant bien que mal, a suivi l'évolution des mœurs. Les lois se sont assouplies, la censure est moins présente. Certaines pratiques sont cependant taboues au point d'être proscrites dans les livres mêmes - comme la pédophilie -, car le droit reste vigilant : les textes permettant de limiter les "excès" sont toujours là ; et ils servent sporadiquement. La notion d'outrage aux bonnes mœurs est toujours présente dans l'esprit des autorités, quand bien même son acception a fortement évolué. » (2008, p. 169)

Cette notion « d’outrage aux bonnes mœurs » est, me semble-t-il, bien présente aussi dans l’esprit des commentateurs de la littérature et dans celui de la société civile, représentée par de nombreuses associations promptes à intervenir dans le débat public. De ce fait, je me suis demandé, pour paraphraser une interrogation de Michel Foucault, ce qu’il y avait de si dangereux à ce que la littérature « pornographique » prolifère. Déjà, est-ce vraiment de la pornographie ? Pourquoi la littérature qui contient des scènes sexuelles explicites est-elle considérée par certains comme dangereuse ?

Tous les textes de loi activés pour empêcher la libre diffusion des ouvrages du corpus font état de

pornographie. Or le paratexte éditorial de chacun de ces textes n’utilise que la mention générique

de roman sans précisions sur une qualification érotique ou pornographique du texte. Cette mention n’a donc pas été jugée opportune par leurs auteurs ou les éditeurs. Pourtant, le roman érotique ou pornographique est un genre de la paralittérature tout à fait institué (Maingueneau, 2007, p. 14). Il possède une tradition, des auteurs canoniques, des formes spécifiques et reconnaissables. Marie- Anne Paveau explique que :

« La catégorie "pornographie" englobe des manifestations relevant de réalités différentes, comme le sexe, la sexualité, la nudité, la séduction, par exemple. Dans les discours juridiques, médiatiques et ordinaires, il existe une sorte de conglomérat englobant sexe, sexualité, nudité, érotisme et pornographie dans une même réserve, voire un rejet, d’ordre moral, esthétique ou social, ou les trois à la fois. » (Paveau, 2014, p. 24).

Ces notions, bien qu’interchangeables pour les commentateurs de la littérature, ne désignent pourtant pas la même chose. Pour y voir plus clair, on posera d’abord que la pornographie est un

discours, une graphie, comme son nom l’indique : porno/graphie. En effet, rien n’est

pornographique en soi. La pornographie « est une construction, par les mots et/ou les images, plus ou moins sophistiquée, et donc une activité de représentation du rapport sexuel, représentation directe et explicite » (Paveau, 2014, p. 34), dont le but est de « produire une excitation sexuelle » chez le lecteur/spectateur. Le discours pornographique est donc reçu comme tel par un lecteur qui est partie prenante de cette qualification qui n’a de sens que par sa réception, suivie d’effets. En soi, une représentation de rapport sexuel n’est donc pas obligatoirement pornographique. Qu’en est-il pour les sept textes du corpus de référence ? « Comme tout texte, le texte pornographique a

ses lois et ses contraintes : il existe des formes discursives spécifiques dans la littérature pornographique, en particulier sous l'angle des types de récit, des dispositifs énonciatifs, du vocabulaire et des formes langagières utilisées » (Paveau, 2014, p. 163). Déjà, pour le critère minimal : il existe bien dans les sept textes du corpus une ou des scène(s) de représentation de rapport(s) sexuel(s) explicite(s)130. Quel est le statut de ces scènes dans les romans ?

Je regarde avant tout les dispositifs énonciatifs. Les passages sexuels sont tous préparés narrativement dans un lien causal entre la situation précédente et la situation suivante. Ils sont inclus dans un récit dans lesquels ils font figure d’événement. Ils sont en quelque sorte préparés par la narration ; or souvent, « dans le texte pornographique, la conjonction est immédiate, sans causalité narrative, sans préliminaires romanesques ». On objectera que l’ouvrage Une semaine de

vacances de Christine Angot, commence in medias res, par une scène sexuelle :

« Il est assis sur la lunette en bois blanc des toilettes, la porte est restée entrouverte, il bande. Riant à l’intérieur de lui-même, il sort de son papier une tranche de jambon blanc qu’ils ont achetée à la supérette du village, et la place sur son sexe. Elle est dans le couloir, elle sort de la salle de bain, elle marche, elle prend la direction de la chambre pour aller s’habiller, il l’appelle, lui dit de pousser la porte.

- Tu as pris ton petit déjeuner ce matin ? Tu n’as pas faim ? Tu ne veux pas un peu de jambon ? » (Angot, 2012, <Chapitre 1>)

Ici donc il n’y a pas de rencontre, pas de causalité, pas de narration préparatoire. Mais ce passage est tout de suite intégré dans le corps du récit dans une narration en devenir. Chacun de ces textes est par ailleurs résumable ; ils présentent une profondeur narrative dans un souci de vraisemblance que ne cherche pas le discours pornographique, car son objectif est ailleurs. Et c’est là peut-être le point fondamental. Alors que le texte pornographique a pour fonction de provoquer une excitation sexuelle chez le lecteur, les ouvrages de notre corpus ne remplissent pas ce but, ou en tout cas pas uniquement. Ils ne sont pas pornographiques, mais ils incluent des représentations de rapports sexuels, certes plus ou moins explicites et dont l’interprétation peut à un moment de la lecture être considérée par un lecteur comme pornographique, mais, intégrées à l’ensemble du texte, elles ne sont pas de nature à qualifier la totalité du texte comme pornographique. La partie ne faisant pas le tout. Dominique Maingueneau établit à cet effet une différence entre une œuvre pornographique et une séquence pornographique :

« Cette distinction permet de gérer la différence entre les textes dont la visée globale est pornographique, les œuvres pornographiques proprement dites, et les textes dont la visée n'est pas essentiellement pornographique, mais qui contiennent des séquences pornographiques, c'est-à-dire des morceaux de texte, de longueurs très variables, qui relèvent de l'écriture pornographique et sont donc prédisposés à susciter une consommation de type pornographique. » (2007, p. 13)

C’est exactement le cas de figure de ces textes qui intègrent donc des séquences pornographiques. Les auteurs semblent jouer sur les codes de la pornographie quitte à susciter chez les commentateurs exactement les mêmes réticences qu’ils auraient pour une œuvre pornographique

en tant que telle. C’est dans le mouvement entre l’œuvre littéraire et les séquences pornographiques qu’elle contient que le sens du texte est perceptible. La note préliminaire de l’éditeur d’Une semaine

de vacances nous donne des indications en ce sens :

« On s’aperçoit vite en lisant que le texte possède en lui-même le pouvoir d’agir avec violence. Il suscite des sentiments dont l’angoisse ne peut être évacuée. Il provoque le saisissement par lequel on reconnaît un des pouvoirs de la littérature : donner aux mots toute leur puissance explicative et figurative, plutôt que de s’en servir pour recouvrir et voiler.

C’est comme si l’écrivain levait le voile, non pas pour nous faire peur, mais pour que l’on voie et comprenne. » (Angot, 2012, <Présentation de l'éditeur>)

Pouvoir d’agir, susciter des sentiments, saisir, expliquer et figurer, voir et comprendre sont les

objectifs de ce texte. Les autres œuvres du corpus prétendent : décrire le mal ou faire le portrait d’une société décadente, confesser la tristesse du mal aimé, bref, il ne s’agit jamais d’une volonté de susciter une excitation sexuelle. Il est notable d’ailleurs que l’ensemble des commentaires qui font état de la qualification de pornographie le font sur un versant moral comme charriant des représentations négatives d’obscénité dont le but est de choquer et non de provoquer des excitations lascives. Le terme pornographie en vient ainsi à qualifier toutes sortes de productions verbales, même celles qui s’éloignent franchement de la pornographie. Donc, en plus de faire référence à un genre, c’est avant tout, dans les polémiques littéraires à l’étude, un qualificatif péjoratif utilisé pour disqualifier un texte et le rejeter dans la sphère de l’interdit et de la transgression.

Mais même la pornographie a ses seuils d’acceptabilité. Dominique Maingueneau précise que la littérature pornographique s’organise en deux grandes catégories : la pornographie « canonique » et la pornographie « interdite » (Maingueneau, 2007, p. 33‑43). On constate que ces deux catégories sont aussi opérantes dans les métadiscours à teneur polémique pour l’évaluation des textes qui contiennent des séquences pornographiques.

Au sein de la pornographie canonique, une subdivision s’instaure entre les textes qui représentent « des activités compatibles avec les principes généraux de la vie en société » (Maingueneau, 2007, p. 34) et ceux, « "tolérés" qui montre[nt] des pratiques jugées "anormales", tout en restant dans le cadre du consentement et de la "satisfaction partagée" » des protagonistes (Maingueneau, 2007, p. 35). Alors que la représentation de rapports sexuels « canoniques » n’est pas, ou très peu, commentée, j’ai constaté qu’à partir du deuxième seuil, celui de la pornographie « tolérée », les polémiques commencent à prendre corps. Elles deviennent exponentielles lorsque les séquences mettent en scène le troisième et dernier seuil, celui de la pornographie « interdite » qui « contrevient au principe de satisfaction partagée et/ou tombe sous le coup de la Loi » (Maingueneau, 2007, p. 35).

Je vais maintenant présenter les polémiques littéraires liées à la représentation de la sexualité