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POLICE ET RÉPRESSION DANS LA MISE EN ŒUVRE DES POLITIQUES PUBLIQUES

CHAPITRE III. MODES DE RÉPRESSION ET ACTION ADMINISTRATIVE

I. POLICE ET RÉPRESSION DANS LA MISE EN ŒUVRE DES POLITIQUES PUBLIQUES

contradictoires, et concurrents quant à l’utilisation des moyens disponibles. L’administration doit agir dans le respect du droit, mais la finalité de l’action publique n’est pas en soi le respect du droit. En revanche, la mission des juges est d’assurer le respect du droit. Quand l’administration exerce des pouvoirs de police ou de sanction, elle fait appel au respect de la loi pour atteindre des objectifs matériels plus généraux (par exemple préserver la qualité de l’eau, ou préserver les PME contre le risque pour leur survie du non-respect des délais de paiement).

À partir des contrôles, qui révèlent les écarts des actes aux normes, des résultats aux objectifs, pouvoirs de police et répression s’inscrivent dans le cycle de l’action administrative relative à la mise en œuvre d’une politique (1). C’est la logique de l’action qui explique, fondamentalement, la difficulté de distinguer de nombreuses sanctions administratives des mesures de police (2). Dans les contentieux techniques étudiés, l’évolution du droit et des pratiques révèle une tendance à l’intégration des contrôles, des pouvoirs de police et des sanctions administratives, comme de l’initiative des poursuites pénales, dans l’action administrative (3). La réflexion sur les sanctions doit alors être commandée par leur intégration dans le cycle de l’action administrative (4).

I. POLICE ET RÉPRESSION DANS LA MISE EN ŒUVRE DES POLITIQUES

PUBLIQUES

Le développement des sanctions administratives a naturellement conduit à s’interroger sur leur différence avec les sanctions pénales. Mais le fait que les mêmes mesures puissent être énoncées, selon les cas, comme sanctions ou comme mesures de police conduit également à s’interroger sur l’autonomie de la répression administrative. En fait, il convient d’envisager de manière globale les finalités de la répression du point de vue de l’action administrative, analyser l’intégration de la répression dans les dispositifs de mise en œuvre établis par la législation. Sur ce point, la comparaison avec quelques droits étrangers permettra d’éclairer la question et de concrétiser l’approche qui est ici proposée.

A.- Sanctions administratives et sanctions pénales

Si dans les deux cas, il s’agit de punir, la principale différence est alors que les sanctions pénales sont prononcées par un juge, dont l’indépendance est garantie, tandis que les sanctions administratives sont prononcées par des autorités qui dépendent du pouvoir exécutif. C’est ce qui a motivé la jurisprudence de la Cour européenne des Droits de l’Homme (CEDH) sur la « matière pénale », qui vise à garantir qu’en tout état de cause une punition ne puisse être prononcée, ou au moins contrôlée, que par un tribunal indépendant et impartial, conformément au principe affirmé par l’article 6 de la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (CESLFDH).

L’un des premiers auteurs qui ont réfléchi à la distinction des sanctions pénales et des sanctions administratives, James Paul Goldschmidt135, fondait cette distinction, au terme d’une étude historique et comparative, sur la différenciation entre constitution et administration. Tandis que la constitution garantit la liberté de la volonté (Wollendürfen), l’administration a pour but de réaliser le bien-être de la collectivité (Wohlfahrt der

Gesamtheit). L’ordre juridique ne définit pas l’objet de la liberté de la volonté, puisque c’est à

la liberté de se donner son propre objet, et les sanctions pénales visent les différents sujets de volonté autonome qui ne respectent pas les règles qui forment l’ordre juridique. L’administration, au contraire, est action dans l’intérêt collectif ; sa mission n’est pas de produire des règles mais les résultats visés par son action. La constitution et l’administration doivent ensemble concilier la libre volonté des membres de la société et l’intérêt collectif. Le pouvoir de sanction de l’administration n’a pas pour but de sanctionner les infractions à l’ordre juridique fondé par la constitution mais de protéger l’action de l’administration. Le pouvoir répressif de l’administration ne s’exerce que lorsque l’exécution forcée ne suffit pas ou est impossible. Il faut préciser ici que le droit allemand admet que l’administration dispose toujours du pouvoir d’exécuter elle-même ses décisions, à l’inverse de la conception française qui, en principe, ne le permet que si la loi ne prévoit pas de sanction pénale136. La répression

administrative n’est pas du domaine de la justice mais de l’action administrative. Le droit pénal administratif, selon Goldschmidt est un « pseudo droit pénal »137 ; la forme en est la même mais c’est une branche du droit administratif, par laquelle l’administration peut agir en cas d’obstacle aux exigences de droit public de son action.

Frank Moderne critique cette terminologie, qu’il juge confuse138. S’il s’agit, selon les termes de Goldschmidt, d’un « pseudo droit pénal », c’est parce qu’il s’agit d’un « vrai » droit administratif. Les pouvoirs de sanction exercés par certaines autorités administratives n’en font pas des juridictions pénales, ils font au contraire partie des moyens d’exécution attribués à l’administration pour assurer l’exécution de la loi.

En fait, l’attention portée à la « peine » fausse le regard. Elle fait perdre de vue que la différence fondamentale entre la répression administrative et la répression pénale, aujourd’hui, ne résulte ni de la nature de la sanction, de sa gravité ou des garanties, ni de la violation de la loi, mais du fait que, prononcée par l’autorité administrative, elle prolonge l’action administrative, alors que la sanction pénale prononcée par le juge n’a pas d’autre objet que de sanctionner l’auteur d’un acte illicite qui a causé un trouble à l’ordre public.

135 J.P. Goldschmidt (1902), Das Verwaltungsstrafrecht. Eine Untersuchung der Grenzgebiete zwischen Strafrecht und

Verwaltungsrecht auf geschichlicher und rechtsvergleichender Grundlage, Berlin, Carl Heymann Verlag, pp.537 et suiv.

136 Pour une comparaison et une explication des différences entre le droit allemand et droit français sur ce sujet, voir : K.

Glaab (2010), Die zwangsweise Vollstreckung von Entscheidungen der Verwaltung. Ein deutsch-französischer Vergleich, Berlin, Duncker & Humblot.

137 J.P. Goldschmidt, op. cit. p.556.

138 F. Moderne (1993), Sanctions administratives et justice constitutionnelle. Contribution à l’étude du ius puniendi de l’État

L’ouvrage dirigé par Oswald Jansen sur les sanctions administratives dans l’Union européenne repose sur une double comparaison des sanctions administratives avec les sanctions pénales et avec les autres formes de réaction de l’administration au non-respect de prescriptions légales, ce qui correspond largement, concernant la France, aux mesures de police administrative139. La comparaison porte alors sur la distance entre ces notions et les régimes juridiques applicables dans les différents systèmes juridiques nationaux. Les pays européens étudiés sont alors classés selon que les sanctions administratives sont plus ou moins différenciées des sanctions pénales, du point de vue substantiel et du point de vue procédural, et selon que les sanctions administratives comprennent des mesures correctives ou conservatoires ou que celles-ci relèvent plus ou moins distinctement d’un régime juridique distinct140. Cette approche met en lumière les différences qui existent quant à la conception des sanctions administratives en tant que décision affectant les droits de l’auteur d’un acte illicite, et quant aux garanties que le droit a généralement développées, notamment sous l’influence de la Cour européenne des droits de l’homme, mais elle n’explique pas le développement récent des sanctions administratives, qu’elle met seulement en rapport avec des politiques de dépénalisation. En réalité, la dépénalisation a donné lieu à plus de discours que de législation. On ne trouve des politiques explicites de dépénalisation, qui s’expriment dans la législation, qu’en Italie et, plus récemment, au Royaume-Uni, et seulement de manière limitée ou incidente en Grèce et au Portugal.

Toutefois, il faut remarquer que l’objet de cette branche du droit administratif n’est pas exactement le même dans tous les pays et que, de plus, il évolue. Les pays européens qui ont introduit de longue date une législation sur les infractions administratives ont en commun plusieurs caractéristiques : 1) l’héritage d’un régime autoritaire, une pénétration tardive des conceptions juridiques du libéralisme politique ; 2) ce sont des infractions mineures, des infractions à la réglementation plutôt qu’à la loi (bien que cela ne soit pas toujours le cas), donc considérées comme mineures, qui font l’objet du pouvoir répressif de l’administration, et dont le jugement a été par la suite parfois confié à la justice pénale ; 3) dans une certaine mesure, il s’agit aussi d’infractions politiques mineures. Répondent à ces caractéristiques l’Autriche, l’Allemagne, l’Espagne, le Portugal, ainsi que la Russie. Dans tous ces pays, les changements politiques ont conduit à libéraliser ces législations, notamment par l’exclusion de sanctions privatives de liberté, par la suppression des infractions politiques, et, en Russie, par le transfert aux tribunaux de la compétence pour prononcer les sanctions les plus lourdes prévues par le Code des infractions administratives de 2001.

L’objet traditionnel de ces législations justifie, dans une certaine mesure, la terminologie du « droit pénal administratif », d’ailleurs couramment utilisée en Suisse, bien qu’elle y soit controversée. Évidemment la Suisse n’est pas à ranger parmi les pays de tradition autoritaire, mais la constitution fédérale attribue aux cantons la compétence en matière de droit pénal administratif, peut-être sous l’influence de ses grands voisins de langue allemande. Aux Pays-Bas également, la notion de « droit pénal administratif » est utilisée et a donné lieu à des discussions dans le cadre du développement de la loi générale sur le droit administratif (Awb), et à la proposition d’une législation spéciale, séparée à la fois de la procédure pénale et de la procédure administrative141. Mais ce n’est pas l’option qui a prévalu. Considérant l’introduction d’amendes administratives, le gouvernement a jugé qu’il fallait attribuer le pouvoir de sanction aux autorités administratives chargées de l’application d’une législation, en ce qui concerne les relations entre ces autorités et les citoyens ou les entreprises, et la quatrième « tranche » (entrée en vigueur le 1er juillet 2009) de la loi générale sur le droit administratif a introduit un cadre général pour l’application des sanctions

139 O. Jansen (ed.) (2013), Administrative sanctions in the European Union, Cambridge / Anvers / Portland, Intersentia. 140 C.E. Paliero (2013), “The definition of administrative sanctions – General report”, pp.1-33 dans: O. Jansen (ed.), op. cit. 141 O. Jansen (2013), « Country analysis – the Netherlands », notamment pp.352-353, dans : O. Jansen (ed.), op. cit.

administratives, celles prévues par cette loi elle-même et celles prévues par l’ensemble des lois spéciales prévoyant de telles sanctions (plus de 100 !). Ces dispositions se trouvent dans la cinquième partie de la loi générale, dont l’article 5 : 2 distingue trois catégories de sanctions administratives142. La loi prévoit formellement l’application de ses dispositions générales aux sanctions prévues par des lois particulières (art. 5 : 3). Le pouvoir de sanction est donc rattaché à l’autorité chargée de l’administration de la législation qui prévoit les sanctions. À l’inverse, l’Angleterre, la France, l’Italie, la Belgique ont progressivement réservé l’essentiel des fonctions répressives à la justice pénale.

La plupart des infractions ainsi visées traditionnellement sont des troubles à l’ordre public général (bien que le champ couvert soit plus ou moins étendu), ce qui justifie la terminologie du droit pénal administratif, mais se raccorde mal à la thèse de Goldschmidt, lequel rattache les sanctions à l’action administrative, ce qui ne vaut que dans le cas (en Allemagne, à l’époque où il écrit) des obligations mises à la charge de particuliers qui ne les respecteraient pas.

À la différence du Royaume-Uni, les États-Unis connaissent un régime de sanctions administratives étendu qui s’exprime dans les pouvoirs attribués par le Congrès aux commissions réglementaires fédérales ou à d’autres agences rattachées à des départements fédéraux pour assurer l’exécution de leurs missions. Ce régime vise à sanctionner le respect des réglementations ou des licences assorties de conditions qu’elles édictent. La loi sur la procédure administrative de 1946 définit les sanctions qui peuvent être prononcées par une « agence », dont le même article donne d’ailleurs une définition très extensive (§551). Dans ce cas, il est dérogé à la compétence de principe du pouvoir judiciaire (art. III de la Constitution des États-Unis) dès lors qu’est en cause un « droit public », lequel est identifié soit parce qu’il se rapporte à la mise en œuvre d’un programme fédéral établi par le Congrès, soit parce qu’il s’agit d’un droit dont l’exécution est réclamée par l’administration fédérale ou contre l’administration fédérale143. Les agences (autorités administratives) peuvent alors

infliger des sanctions dans les limites de leur propre compétence. Ce pouvoir de sanction est donc étroitement associé à la mise en œuvre des actions ou programmes dont elles sont chargées par le Congrès. Il en va de même au Canada, où la loi autorise les autorités administratives à prononcer des sanctions dans l’exercice de leurs pouvoirs relatifs à des régimes d’autorisation, de prestations ou de prélèvements. Comme l’écrivent Pierre Yssalis et Denis Lemieux, l’administration exerce ainsi une fonction répressive qui « associe étroitement la visée punitive et la poursuite des objectifs d’intérêt public de la loi à laquelle il a été contrevenu : d’où l’attribution de ce pouvoir répressif à l’autorité administrative chargée de contrôler l’application de cette loi ».144

Selon Frank Moderne, les sanctions administratives se définissent, d’après la jurisprudence des cours constitutionnelles européennes, par quatre caractéristiques : 1) une finalité punitive ; 2) un contenu afflictif, c’est-à-dire qui comporte la privation d’un droit ou l’imposition d’une obligation nouvelle ; 3) l’existence d’une infraction au droit, qui se

142 Cet article distingue : 1) la sanction administrative proprement dite (bestuurlijke sanctie) : c’est une obligation ou une

abstention imposée à l’auteur d’une infraction par une autorité administrative ; 2) la sanction réparatrice (herstelsanctie) : l’autorité administrative enjoint à l’auteur de l’infraction d’éliminer les suites de l’infraction commise ; 3) la sanction punitive (bestraffende sanctie) : c’est une sanction prononcée par l’autorité administrative qui a une portée afflictive pour l’auteur de l’infraction ; il s’agit d’amendes administratives. Les sanctions réparatrices comprennent les mesures de contrainte administrative (last onder bestuursdwang) (art.5:23), qui correspondent, pour l’essentiel, aux mesures de police administrative du droit français, tandis que d’autres mesures de police seraient comprises comme des sanctions administratives proprement dites.

143 On résume ici une jurisprudence parfois incertaine : voir notamment « Crowell v. Benson » 285 US 22 (1932), et en

dernier lieu : « Stern v. Marshall » 131 S. Ct 2594 (2011). Cf A. Aman Jr (2014), Administrative law and process, LexisNexis, 3e éd. pp.611 et suiv.

144 P. Yssalis / D. Lemieux (2009), L’action gouvernementale. Précis de droit des institutions administratives, Cowansville

distingue de l’illicite pénal ; 4) le caractère administratif de l’autorité compétente pour prononcer la sanction145.

B.- Sanctions administratives et action administrative

Cependant, le regain d’intérêt que l’on observe pour les sanctions administratives depuis les années quatre-vingt, parfois un peu avant, ne correspond pas, ou seulement en partie, à l’objet des sanctions administratives dans les pays où elles étaient traditionnelles. Et, en particulier, il n’est pas suffisant aujourd’hui de définir leur finalité comme punitive. Ce regain d’intérêt semble porté, au contraire, par deux autres mouvements : les politiques de dépénalisation et les nouvelles politiques économiques déclenchées par l’Union européenne ; ces deux mouvements n’affectent pas nécessairement les mêmes domaines, et n’ont pas eu la même portée.

Les politiques de dépénalisation ne sont ni générales ni toujours explicites, et ne visent pas toujours à modérer la répression, mais parfois au contraire à la rendre plus efficace. Une telle politique a été menée en Italie à partir de la fin des années 1960. Plusieurs lois ont alors sorti des infractions pénales plusieurs catégories d’infractions en matière de circulation routière ou à des règlements municipaux ou provinciaux, ou dans divers domaines particuliers (lois de 1967, 1981, décret législatif de 1999).

Au Royaume-Uni, malgré la réticence traditionnelle envers les sanctions administratives, la jurisprudence et la législation ont ouvert la voie à l’utilisation des sanctions administratives pour la mise en œuvre de la régulation qui accompagne les politiques de libéralisation. L’arrêt

« R. v. Panel on Take-Overs and Mergers ex parte Datafin plc »146 a admis qu’un organisme

professionnel dépourvu de base légale et chargé d’appliquer une sorte de code conduite pouvait néanmoins infliger des sanctions à ses ressortissants, et que le recours de judicial

review était ouvert pour contester les décisions d’un tel organisme. Plus récemment, deux

rapports, qui ont eu une influence considérable, ont orienté la législation vers la définition de stratégies de contrôle et de sanction visant à assurer une meilleure application de la loi en fonction des objectifs politiques poursuivis.

Le Rapport Hampton (2005)147, ayant passé en revue tous les systèmes de contrôle et d’inspection, de compétence nationale ou locale, recommandait que tous les « régulateurs » (c’est-à-dire toutes les autorités administratives chargées d’assurer l’exécution d’une législation et d’en contrôler le respect) redéfinissent leur stratégie de contrôle en fonction d’une évaluation des risques et soient dotés du pouvoir de prononcer des sanctions administratives (administrative penalties) de nature à au moins compenser le profit illicite. Il s’agissait de renforcer l’efficacité du contrôle en allégeant la charge qu’il représente pour les entreprises en général. En 2005, une quinzaine de régulateurs étaient dotés du pouvoir de prononcer des sanctions administratives. La loi de 2016 (Legislative and Regulatory Reform

Act 2006 – c. 51) a mis en œuvre ces recommandations, permettant notamment aux ministres

de prendre les mesures réglementaires nécessaires pour adapter les pouvoirs des régulateurs placés sous son contrôle (s.2).

L’année suivante, le Rapport Macrory (novembre 2006)148 poursuivait la réflexion en se

concentrant sur le système des sanctions. Il critique, à la suite du Rapport Hampton, l’inadaptation des sanctions pénales aux besoins des politiques publiques, notamment parce

145 Op. cit. pp.77 et suiv.

146 [1987] 2 WLR 699), confirmé par plusieurs décisions ultérieures, notamment « Guinness ».

147 Philip Hampton, Reducing administrative burdens. Effective inspection and enforcement, Londres, HM Treasury, mars

2005.

148 Richard B. Macrory, Regulatory Justice. Making sanctions effective. Final Report, Better Regulation Executive, Cabinet

que les peines ne sont jamais à la hauteur des profits illicites. Il préconise d’élargir la gamme des « sanctions réglementaires » (regulatory sanctions), de faire passer délibérément une partie de l’activité des juridictions pénales aux autorités de régulation, et de renforcer par conséquent les pouvoirs de celles-ci149. Le Rapport Macrory définit six principes de la sanction administrative (penalties principles), parmi lesquels on relève que le but de la sanction n’est pas seulement de punir mais de conduire le contrevenant à changer son comportement ; les sanctions doivent correspondre et être appropriées à la fois au type de contrevenant et au but de la régulation. Les sanctions peuvent aussi viser à réparer le dommage causé, et en particulier prendre en compte les besoins des victimes150. Dans le cadre proposé pour la mise en œuvre des principes de la sanction, le Rapport propose que les régulateurs publient les orientations de leur politique visant à imposer le respect des règles (enforcement policy), mesures les résultats de leur action, rendent compte et assurent un suivi de leur action151. Les poursuites pénales demeurent nécessaires en présence des infractions les

plus graves ou répétées, et intentionnelles ; les régulateurs doivent pouvoir opter pour la répression pénale quand elle leur paraît nécessaire et appropriée. En revanche, l’élargissement annoncé de la gamme des sanctions n’est pas développé dans le Rapport, qui privilégie les amendes, en distinguant les amendes forfaitaires et les amendes variables, après des avertissements sans suite, et envisage aussi des engagements de la part du contrevenant à respecter la réglementation. Un schéma résume le type de stratégie répressive qui est recommandé152. Enfin, à la différence du Rapport Hampton, le Rapport Macrory préconise que le recours contre les sanctions soit porté, non devant la juridiction pénale ordinaire (Magistrates' Court) mais devant un « tribunal de la régulation », c’est-à-dire une instance de recours extérieure à la juridiction ordinaire et qui est liée à l’administration.

Une loi de 2008 a mis en œuvre les recommandations du Rapport Macrory (Regulatory

Enforcement and Sanctions Act 2008 – c.13). Cette loi permet aux ministres d’attribuer aux

régulateurs placés sous leur contrôle le pouvoir de prononcer des amendes forfaitaires dans les cas les moins graves et des pouvoirs de sanction discrétionnaires comportant l’amende

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