• Aucun résultat trouvé

Les opérations de relogement, d’aménagement et de rénovation urbaine

ET D ’ EQUIPEMENTS PUBLICS

703 P ROGRAMME DES N ATIONS UNIES POUR LES ETABLISSEMENTS HUMAINS (ONU-H ABITAT ), S ECRETARIAT

B. Les opérations de relogement, d’aménagement et de rénovation urbaine

262. Le séisme du 12 janvier 2010 a provoqué une mobilisation importante de nombreuses agences et ONG internationales de développement sur la problématique de la reconstruction et du relèvement d’Haïti qui a aussi apporté une implication plus profonde de ces organismes dans l’urbanisme et l’aménagement en Haïti. Ces agences et ONG sont passées de petites opérations d’aménagement, d’assainissement et d’embellissement urbain aux opérations plus impressionnantes de relogement, d’aménagement et de reconstruction que nécessitaient les besoins immédiats. ′n revanche, ces nombreuses opérations d’aménagement par les agences et ONG internationales de développement, notamment celles de la construction des 750 maisonnettes destinées aux travailleurs du parc industriel de Caracol 721, des T-shelters du

Morne-Hôpital 722 et de nombreux camps de logements provisoires 723 n’ont pas été exécutées

selon des règles d’utilisation rationnelle du sol. Au contraire, elles se sont suivies d’oppositions de part et d’autre tant des acteurs des secteurs d’assistance et des autorités publiques que de leurs bénéficiaires. D’un côté, certaines agences et ONG se plaignent de l’inconséquence des mesures politiques et du mépris des autorités publiques vis-à-vis de l’urbanisme, de l’autre, les autorités publiques accusent ces organismes d’entreprendre des opérations d’aménagement et de relogement sans aucune autorisation 724. Des journalistes et organisations populaires, eux-

mêmes, accusent les deux parties de violer les zones réservées et d’accentuer le mal environnemental du pays. Entre les principaux acteurs, les uns incriminent les autres. Les bénéficiaires, pour la plupart, maugréent à leur manière contre les logements inappropriés, mais, faute de mieux, se résignent à accepter comme salutaires ces mesures palliatives 725. Finalement,

721 Selon les informations fournies par les images vidéographiques concernant le Parc industriel de Caracol, celui-ci

est réalisé dans une zone riche en mangroves, abritant le plus long récif corallien du pays et située dans le centre du bassin versant de la rivière du Trou-du-Nord. Ce projet, financé à l’aide des fonds des gouvernements d’Haïti et des États-Unis, de même que de la Banque interaméricaine de développement (BID) et du SAE-A Trading

Co. LTD, n’a apparemment pas fait l’objet d’un plan préalable de gestion environnementale. DEPARTEMENT

D’ÉTAT :BUREAU DU COORDONNATEUR SPECIAL POUR HAÏTI. « ″iche d’information du Département d’État sur

le Parc industriel de Caracol en Haïti » [en ligne]. 24 octobre 2012. <http://iipdigital.usembassy.gov/>. Voir aussi « Parc Industriel Caracol.m4v » / Documentaire de présentation du projet de construction du Parc industriel de

Caracol [vidéo en ligne]. Ajoutée par Chaîne de CELYSEE. Le 8 mars 2012. Sur :

<www.youtube.com/watch?v=W4hJ4RTRqmc>.

722 Voir : « Le Morne l’Hôpital malade du chaos ambiant » [sic] [vidéo en ligne]. Ajoutée par Le Nouvelliste Haïti. Le

18 avril 2012. Sur :<www.youtube.com/watch?v=QoR18qTSbRY> ; « Morne l’Hôpital démolition compliquée » [sic] [vidéo en ligne]. Ajoutée par Le Nouvelliste Haïti. Le 27 juin 2012. Sur :

<www.youtube.com/watch?v=LF3C_vLPjfA>.

723 Voir « Camp Corail T Shelter Project (Port-au-Prince, Haïti) » [sic] [vidéo en ligne]. Ajoutée par Tom Matkovits Le

11 février 2013. Sur :<http://www.youtube.com/watch?v=HDBq5YdPXPg>.

724 Voir PECK, Raoul [réalisateur]. Haïti : « Assistance mortelle » [Film documentaire]. France : ARTE France. 2013. Voir

aussi AYITI KALE JE [Haïti ouvre les yeux]. « Partenaire dans le déboisement et la bidonvilisation ». 21 mai 2012.

devant la passivité des autorités publiques et faute d’actions juridictionnelles, les agences internationales et ONG finissent par se forger un libre-arbitre pour réaliser leurs opérations en l’absence de toutes règles d’urbanisme et d’aménagement.

263. De toute évidence, les opérations d’aménagement reposant sur des projets diffus et d’urgence et sur l’assistanat international (d’agences internationales et ONG) représentent un handicap majeur pour un urbanisme performant en Haïti. Ces projets et opérations sont effectués de manière hasardeuse et spontanée, en fonction des aléas de ces organismes, sans être inscrits dans un plan d’urbanisme ou assortis d’une légalité urbanistique 726. Les études les concernant,

comme les projets d’assainissement, ne sont non plus soumis à aucun critère. L’incohérence et l’éloignement de ces projets d’aménagement par rapport aux règles d’urbanisme sont aussi les autres marques de fabrique à ne pas sous-estimer de l’aménagement alternatif désordonné des ONG.

264. La dépendance des opérations d’aménagement de l’assistance et du monopole des agences et ONG internationales de développement entretient une forme d’aménagement anarchique, au gré et selon les stratégies et moyens de financement des donateurs 727. D’où la défectuosité

caractérisée de certains ouvrages d’aménagement et d’équipements publics, qui ne sont pas réalisés pour durer et qui ne tiennent pas compte de l’évolution socioéconomique du pays. Ces projets d’urgence ne font que créer une situation d’urgence perpétuelle.

265. Le « spiralisme vicieux » des projets spontanés d’assainissement, d’équipements, d’aménagement ou de réhabilitation semble entraîner un non-urbanisme dont les conséquences peuvent se révéler irrémédiables. Comme il n’y a non plus aucun plan d’urbanisme, les projets portés par ce secteur semblent être dévolus à apporter des palliatifs temporaires à l’occupation anarchique des sols. N’ayant pas une durée de vie déterminée, ils se détériorent souvent à un rythme tellement rapide et imprévisible que ces mêmes acteurs se voient contraints dans un futur très proche d’intervenir par d’autres petits projets de réhabilitation et d’aménagement brusque. 266. De plus, ces projets, qui se dérobent aux règles des contrats et marchés publics, soustraient ipso

facto les maîtres d’œuvres à toute obligation quant à la durée de vie et la performance des projets d’aménagement urbain. Ainsi, des opérations impromptues d’aménagement, on passe souvent à d’autres d’extrême urgence. Chaque saison cyclonique ou pluvieuse amène son lot de glissements de terrains, d’inondations et de dégâts exigeant des solutions immédiates. Les divers

726 Voir l’occupation anarchique des zones protégées du Morne-Hôpital, en annexe, Photo 25. Occupation anarchique

du Morne-Hôpital [Photo d’′vens Louis], p. 639. Voir aussi AYITI KALE JE. « Partenaire dans le déboisement et la

bidonvilisation ». 21 mai 2012.

727 De l’avis de certains fonctionnaires en charge d’opérations d’aménagement et d’équipements publics, les ponts

d’une seule voie sur les routes nationales, dont la plupart sont dépourvus de passage piéton ou exhibant les boulons et ferrailles objets de la convoitise des délinquants de biens publics sont le fruit de l’assistance internationale. Voir, en annexe, Photo 28, p. 612.

— 182 —

projets et actions jusqu’ici réalisés pour faire face à ce cycle annuel de catastrophes naturelles n’ont pas permis de réduire les risques environnementaux les plus maîtrisables. Ces projets, exécutés dans l’urgence et en l’absence d’une planification appropriée, ne pouvaient pas non plus produire des résultats positifs.

267. Le pire encore est que les ONG ou organismes internationaux, qu’il convient tout de même de présumer innocents, se trouvent continuellement dans une situation pour reprendre ou financer à nouveau les mêmes projets d’opérations d’aménagement qu’ils ont exécutés peu de temps avant. On a apparemment tort d’en vouloir aux ONG pour leurs modes d’interventions. ′lles semblent constituer au contraire une alternative bâclée par les politiques, une résultante passive de la stratégie chaotique d’universalisation d’un modèle unique de gouvernance publique, ainsi qu’un contraste entre modeleurs irresponsables et modelés naïfs.

268. L’inefficacité des actions des ONG en Haïti résulte en effet, d’une part, de l’inefficacité naturelle des institutions publiques de ce pays et, d’autre part, de celle du système international de « développement » en Haïti. Les interventions illégales de relogement des victimes du séisme du 12 janvier 2010 effectuées par certaines ONG internationales 728 au Morne-Hôpital qui se sont

accompagnées du déboisement de cette zone protégée et d’aménagement spécial 729 ne leur sont

pas tout à fait imputables. Selon le rapport d’enquête d’« Ayiti Kale Je », elles ont bénéficié de l’appui du CAS′C de la zone, de l’incapacitation de l’organisme de surveillance et d’aménagement du Morne-Hôpital (OSAMH) 730. Ces ONG, soumises à des exigences

administratives, régies par une législation et fonctionnant sous la coordination, la supervision d’un ensemble d’institutions affectées et/ou placées « sous la tutelle » du ministère de la Planification et de la Coopération externe 731, ne tombent pas du ciel. Il est tout à fait illogique

que des autorités publiques se plaignent des opérations de relogement ou d’aménagement réalisées sans permis (permis de construire et de lotir) 732 par des ONG dont elles ont la mission

728 Voir AYITI KALE JE [Haïti ouvre les yeux]. « Partenaire dans le déboisement et la bidonvilisation ». 21 mai 2012.

Ces ONG sont surtout l’Agence d’aide à la coopération technique et au développement (ACTED) et GOAL.

729 Voir art. 9 du décret du 30 octobre 1986 relatif à l’aménagement spécifique du Morne[-]Hôpital.

730 Cet organisme a été créé par la même loi ayant fait de Morne-Hôpital une zone d’aménagement spécial. ′n

revanche, selon les déclarations de son coordonnateur, rapportées par « Ayiti Kale Je » et Alterpresse, la faiblesse institutionnelle et le manque de moyens financiers et humains nécessaires à l’accomplissement de ses missions

auraient favorisé les constructions anarchiques et la bidonvilisation de cet espace. Voir AYITI KALE JE [Haïti ouvre

les yeux]. « Partenaire dans le déboisement et la bidonvilisation ». 21 mai 2012.

731 Voir art. 13 et s. et 28 et s. du décret du 14 septembre 1989 modifiant la loi du 13 décembre 1982 régissant les

[organisations non gouvernementales].

732 Selon « Ayiti Kale Je », plus de 110 000 petits logements ont été construits par des ONG dans le cadre du projet

de relogement : certains sans aucune autorisation d’utilisation du sol, d’autres avec celles de conseil d’administration de section communale (CAS′C) dont la compétence n’est clairement définie en cette matière. Voir : 1. Art. 111 du décret du 1er février 2006 [sur la décentralisation et les collectivités territoriales] et 53 du décret du 1er février

2006 fixant l’organisation et le fonctionnement des sections communales […] ; 2. AYITI KALE JE [Haïti ouvre les

d’ordonner les actions. Pourtant, c’est le cas en Haïti. Les interventions illégales et désordonnées des ONG permettent donc non seulement de compenser l’absence de stratégies et de documents d’urbanisme qui sont prévus depuis 1937 733 mais aussi l’incapacité des autorités

publiques à organiser même les organisations bénévoles en Haïti. Le cas du Morne-Hôpital n’est d’ailleurs pas une exception. Sur les sites de Labadie, comme dans d’autres paysages naturels d’Haïti, plusieurs ensembles immobiliers incompatibles à l’architecture de la zone ou des espaces de relogement seraient réalisés par des ONG 734 en marge des normes minimales d’urbanisme,

avec le financement des Agences internationales de développement.

269. Si l’on se fie aux informations fournies par certains fonctionnaires publics en Haïti et les publications d’Haïti Libre, certains projets et plans d’aménagement de quartiers, à l’instar du projet d’aménagement du quartier Christ-Roi 735, ne font que bénéficier du soutien des autorités

publiques en Haïti. Celles-ci se relaient en instance d’appui et de soutien aux projets d’urbanisme et d’aménagement des ONG, notamment celui du plan d’aménagement de Christ-Roi porté par

Solidarités international [sic]. Cette ONG aurait même réalisé « un plan d’aménagement urbain

global, pour identifier les axes d’intervention stratégiques, en vue d’une future reconstruction saine et pérenne du quartier » et développé une forme de concertation avec des comités de quartiers et d’autres ONG locales et internationales. Pour reprendre certains termes du site de

Solidarités international 736, celle-ci interviendrait dans plusieurs activités en Haïti.

270. L’urbanisme des ONG risque ainsi de compromettre la réalisation d’un urbanisme performant et durable en Haïti. S’il est vrai qu’on ne peut en vouloir à ces dernières pour leurs actions humanitaires, il faut reconnaître que des projets isolés et désordonnés d’aménagement peuvent constituer un obstacle à un aménagement durable en Haïti. Les ONG, en posture de maître d’ouvrage, n’ont pas les compétences nécessaires pour faire appliquer les règles minimales d’urbanisme et d’aménagement par les maîtres d’œuvre. Par ailleurs, leur philosophie d’évitement des contentieux et d’accommodation au milieu ne garantit pas le respect des normes d’urbanisme dans leurs opérations d’aménagement. Leurs solutions palliatives ou transitoires d’aménagement fragilisent davantage la perspective d’un urbanisme performant dans un pays

733 Voir art. 64, 65 et 66 du décret-loi du 22 juillet 1937 établissant des règles spéciales relatives à l’habitation et à

l’aménagement des villes et des campagnes.

734 Ces informations ont été recueillies de certains fonctionnaires publics du département du Nord suite à un constat

que nous avons fait sur cette zone, lors de l’enquête sur le terrain.

735 Voir HAÏTI LIBRE. « Haïti - Reconstruction : Projet d’aménagement du quartier Christ-Roi ». 20 juillet 2013.

736 SOLIDARITES INTERNATIONAL [sic]. « Haïti, notre action ». <http://www.solidarites.org/fr/>. Cette ONG

interviendrait notamment dans les constructions et la réhabilitation de latrines et de points d’eau, la sensibilisation à l’hygiène publique, la relocalisation des personnes vivant dans les zones à risque, la mise en place de jardins communautaires et la formation à l’agriculture hors sol. ′lle apporterait aussi ses aides dans l’organisation d’ateliers

de planification urbaine, la promotion de la culture des légumes en ville, la construction d’ouvrages visant la

— 184 —

qui remet en grande partie son destin à l’aide internationale et aux ONG 737. Même si elles sont

de bonne foi, elles n’ont pas suffisamment de marge de manœuvre pour s’attaquer aux problèmes fondamentaux d’urbanisme et en imposer un modèle général à l’échelle nationale. 271. La planification urbaine et l’exécution des opérations d’aménagement d’urgence et de

bienfaisance par les acteurs internationaux ne présentent non plus aucune garantie d’efficacité, en raison de la nébuleuse des ONG intervenant dans le domaine et de l’incohérence à laquelle s’exposent leurs projets et plans d’aménagement. Ceux-ci n’obéissent ni à des règles appropriées ni à aucun document hiérarchique d’urbanisme. ′n remettant une partie des opérations d’aménagement aux ONG, Haïti s’hasarde ainsi à de vagues planifications urbaines tous azimuts et à des opérations hétéroclites d’aménagement, dans l’incertitude totale de leurs retombées urbanistiques ou développementales.

Haïti court bien évidemment de gros risques avec des activités et opérations anarchiques d’aménagement de la part d’ONG. Mais il semble s’exposer à une situation bien pire avec des activités remises au libre arbitre des personnes privées du secteur des affaires.

§ 2. L

ES ACTIVITES REMISES AU LIBRE

-

ARBITRE DES PERSONNES PRIVEES

272. Plusieurs activités sont remises au libre-arbitre des personnes privées en Haïti, notamment la mobilité urbaine, l’organisation des villages fermés, la détermination des superficies minimales de construction dans certaines zones, la protection de l’environnement, l’hygiène publique, l’organisation d’espaces sportifs et de loisir, l’électrification des quartiers pauvres et bidonvilles, etc.

273. La mobilité urbaine figure parmi les activités de libre-arbitre les plus évidentes. Au lieu d’une planification du transport et des mesures d’application des dispositions du décret du 1er juin 2005 portant code de la route 738, la mobilité urbaine est quasiment assurée par les initiatives

privées à leur gré. Autre que la compagnie devenue coopérative de transport public « Service plus », dont l’inefficacité est avérée 739, les véhicules, affectés au transport en commun en

nombre illimité et de manière désordonnée, échappent au contrôle des autorités publiques. Le défaut de plan sur la mobilité urbaine a fini par rendre la circulation quasiment impossible et occasionner une pollution diversifiée (sonore, de l’air ambiant, etc.) dans les principales villes

737 Depuis plusieurs années, le budget national d’Haïti est fondé à plus de 60 % sur l’aide internationale. Voir Loi de

finance [exercices : 2001 à 2014]. Sur :<http://www.mefhaiti.gouv.ht/>.

738 Art. 20 du décret du 1er juin 2005 portant code de la route.

739 Voir METROPOLEHAÏTI.COM. « La compagnie de transport public « Service Plus » en difficulté ». 27 février 2002.

Selon les révélations du directeur de cette compagnie qui sont rapportées par la Radio Métropole d’Haïti, des

dizaines de véhicules de la compagnie tombés en panne étaient remisés sans pouvoir être réparés, faute de moyens financiers et de pièces de rechange pour les remettre en état.

du pays. Les rues de celles-ci, en majorité dépourvues d’espaces d’arrêt et de stationnement pour les véhicules, offrent un spectacle de désordre systématisé et ahurissant 740.

274. Une mobilité impraticable par les innombrables camionnettes délabrées et inappropriées au transport et à la circulation, les motos-taxis souvent dépourvues de plaques d’immatriculation, les camionnettes artisanales aux habitacles mal confectionnés et mal aérés, les véhicules sans toiture ni siège, pour l’entassement des voyageurs le long des routes en partie poussiéreuses, sous les températures élevées d’Haïti, tel est le décor qui caractérise le transport en commun urbain et interurbain. Contrairement à la ville du Cap-Haïtien où l’on peut embarquer dans un taxi avant même d’indiquer son lieu de destination, les prétendus taxis de Port-au-Prince et d’autres villes ne conduisent pas les usagers où ils le souhaitent. Les conducteurs de ces derniers choisissent les destinations les plus proches ou les moins à risques, pour un prix fixe (le tarif étant fixé par zone de destination plutôt que selon les indications d’un compteur), ce qui complique souvent la mobilité des personnes se rendant dans des endroits plus éloignés ou réputées de non-droit. Prendre un taxi dépend donc de l’assentiment du chauffeur au lieu de destination du voyageur.

275. À ces problèmes, s’ajoutent le défaut de marques indicatrices, de circuit de transport en commun, de matérialisation des voies de circulation 741, la mise à l’écart des règles de police

routière dans les espaces urbains, etc. Dans certains endroits de centre-ville, les tas d’ordures, commerces ambulants ou exposés sur les trottoirs ou à même les rues, matériaux de construction installés sur les voies, cabrouets, brouettes, conducteurs d’animaux 742, piétons,

cyclistes, motocyclistes, camions… se disputent souvent un droit de priorité dont eux seuls connaissent le bien-fondé, dans les bouchons dénués de sens. Les voies n’étant pas aménagées en fonction de la diversité des usagers routiers, tout se mélange. Même les déchets agricoles transportés avec les produits dans les marchés trouvent leur place dans le blocage de la circulation et l’impraticabilité des centres villes du pays.

276. La situation de la mobilité en Haïti est telle que n’importe qui met en circulation des véhicules de transport en commun, à n’importe quel moment, sur n’importe quel circuit et selon le type qui lui plait (motocyclettes, camionnettes dépourvues de carrosserie, fourgons, bus, poids lourds, etc.). Actuellement, le nombre incontrôlé de motocycles (deux ou trois roues) assurant le transport en commun est l’un des défis insoupçonnés des principales villes d’Haïti où ces véhicules se croisent dans tous les sens, en l’absence de normes d’urbanisme et de contrôle de la circulation.

740 Voir art. 137 et 138 du décret du 1er juin 2005 portant code de la route.

741 Art. 240 à 263 du décret du 1er juin 2005 portant code de la route.

742 Même décret. Art. 225 à 232. La circulation d’animaux (bêtes de somme et de chair) se fait souvent dans l’irrespect

— 186 —

277. Par ailleurs, en l’absence d’exigences pour la création d’espaces de stationnement dans les constructions par les propriétaires, chacun se débrouille comme il peut pour garer sa voiture. Ainsi, garages sauvages et parking à même les rues complètent le décor des villes encombrées de déchets et de tas de matériaux de construction. Entre pylônes électriques mal disposés et câbles et branches de fils électriques en désordre, une folle situation est complétée par des piétons en mal d’orientation, des commerçants ambulants, écoliers et habitants, dans une ville où tout semble s’activer selon les initiatives individuelles et les actions isolées et incohérentes des acteurs publics.

278. Il est évident que la mobilité mérite d’être organisée d’une façon plus appropriée en Haïti. Au lieu d’amplifier la pléthore de motocycles qui handicapent déjà la circulation dans les villes, on pourrait regrouper les propriétaires et investisseurs du secteur en une compagnie ou coopérative de transport en commun, pour leur permettre de disposer de moyens confortables de locomotion, de faciliter une mobilité urbaine adéquate des personnes et de réduire le nombre de véhicules de transport dans les conditions infrahumaines en Haïti.

Outline

Documents relatifs