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Le chevauchement des attributions gouvernementales d’urbanisme 77 Le chevauchement des attributions gouvernementales d’urbanisme s’explique par une mauvaise

L ES MISSIONS PUBLIQUES PROBLEMATIQUES D ’ URBANISME

L ES MISSIONS ETATIQUES D ’ URBANISME

B. Le chevauchement des attributions gouvernementales d’urbanisme 77 Le chevauchement des attributions gouvernementales d’urbanisme s’explique par une mauvaise

organisation des institutions placées sous l’autorité directe du Premier ministre et/ou interministérielles, ainsi que des organismes et services placés sous l’autorité ou « la tutelle » ministérielle. Trois catégories d’institutions gouvernementales se superposent en matière d’urbanisme. En plus des ministères composant son gouvernement, le Premier ministre est habilité à créer des comités interministériels sous sa présidence ou sous celle d’un ministre désigné à cet effet, ou encore des conseils interministériels sous sa présidence directe 226. Aux

termes des articles 104 et 105 du décret du 17 mai 2005 portant organisation de l’administration centrale de l’État, les comités interministériels sont chargés de la coordination et de l’harmonisation des politiques publiques, et les conseils, de débattre des questions susceptibles d’avoir des incidences sur leur champ de compétences respectives 227. Cependant, ces

institutions sont en général secondées d’un secrétariat technique permanent fonctionnant sous la forme d’une agence publique, parallèlement à des organismes, directions ou services ministériels exerçant des missions identiques. Sous cette même forme, on en trouve aussi qui fonctionnent directement sous l’autorité du Premier ministre sans être couvertes par une représentation interministérielle définie. Du nombre des institutions de la sorte mises en place 228, citons : le Conseil de développement économique et social (CDES) 229, le comité

interministériel de l’aménagement du territoire (CIAT) 230 et l’Unité de construction de

logements et des bâtiments publics 231.

78. Le CIAT, présidé par le Premier ministre, a pour mission de « définir la politique du gouvernement en matière d’aménagement du territoire, de protection et de gestion des bassins

226 Art. 104 et 105 du décret du 17 mai 2005 portant organisation de l’administration centrale de l’État.

227 La Constitution haïtienne ne s’est pas prononcée sur ces institutions.

228 Parmi ceux qui n’ont jamais été mis en place, relevons : le Conseil national de l’aménagement du territoire, le conseil

interministériel sur l’aménagement du territoire et l’environnement, les commissions techniques interministérielles de haut niveau sur l’environnement et les unités techniques environnementales sectorielles. Voir art. 15, 16, 18 et 23 du décret du 12 octobre 2005 [sur la gestion de l’environnement, la régulation de la conduite des citoyens et la promotion du développement durable].

229 Art. 110 à 112 du décret du 17 mai 2005 portant organisation de l’administration centrale de l’État. Ce conseil

coïncide avec la direction de programmation économique et sociale du ministère de la Planification et de la Coopération externe.

230 Voir l’arrêté du 30 janvier 2009 portant création du comité interministériel d’aménagement du territoire. Cet arrêté

a mentionné dans ses motifs le décret du 17 mai 2005 portant organisation de l’administration centrale de l’État mais a omis d’y relater le décret du 12 octobre 2005 [sur la gestion de l’environnement, la régulation de la conduite des citoyens et le développement durable]. Il ne s’est pas non plus prononcé sur la situation des comités et commissions interministérielles apparentés au CIAT prévus par ce dernier décret.

231 Selon les informations publiées sur le site Web de l’UCLBP, celui-ci est un organisme étatique rattaché à la

primature et dirigé par un comité de pilotage composé de plusieurs ministres. Il ne dispose pas encore de cadre

juridique de fonctionnement. Voir UNITE DE CONSTRUCTION DE LOGEMENTS ET DE BATIMENTS PUBLICS. « Profil

versants, de l’assainissement, de gestion de l’eau, de l’urbanisme et de l’équipement » 232. Aux

termes de l’article 4 de l’arrêté portant création du CIAT, celui-ci a pour principales attributions : « de coordonner et d’harmoniser les actions du gouvernement en matière d’aménagement du territoire et d’urbanisme ; d’assurer la révision du cadre légal, réglementaire et institutionnel d’aménagement du territoire ; de garantir une répartition des ressources humaines, techniques et financières permettant la mise en œuvre adéquate de la politique d’aménagement du territoire et le développement des collectivités territoriales ; de s’assurer de la supervision, du contrôle, du suivi et de l’évaluation des actions en cours en matière d’aménagement du territoire et d’urbanisme ». ′n d’autres termes, ce comité est chargé de l’urbanisme sous divers aspects (réglementaire, opérationnel et prévisionnel).

79. Le CIAT n’est pas simplement un comité interministériel. Il est assisté par un secrétariat technique placé sous l’autorité du Premier ministre, qui a pour attributions 233 de préparer les

documents de politiques et de s’assurer de la mise en œuvre des orientations définies par le comité, de recevoir, d’étudier et d’orienter tous programmes ou projets d’interventions relatifs à l’aménagement du territoire et à l’urbanisme de manière conforme à la politique définie par le CIAT. Le secrétariat est aussi chargé de veiller à la cohérence des programmes et projets en la matière avec la politique définie, de s’assurer d’une répartition équilibrée des services publics de base sur le territoire national, de diffuser les informations et décisions, ainsi que de faire les rapports et recommandations nécessaires au CIAT.

80. Plusieurs lacunes sont à souligner dans l’arrêté du 30 janvier 2009.

Premièrement, la notion d’urbanisme n’y est pas tout à fait bien cernée 234.

Deuxièmement, certains ministères très concernés par l’urbanisme et l’aménagement – notamment le ministère du Commerce et de l’Industrie (pour ce qui est de l’urbanisme commercial), le ministère du Tourisme (pour ce qui est de l’urbanisme touristique), le ministère de la culture (pour ce qui est des sites, monuments et patrimoines historiques, archéologiques et culturels) 235 — ne figurent pas parmi les membres du CIAT.

Troisièmement, les missions des diverses cellules du secrétariat technique du CIAT sont aussi celles de divers directions et services des ministères le composant, notamment la direction de

232 Art. 2 de l’arrêté du 30 janvier 2009 de création du comité interministériel d’aménagement du territoire.

233 Art. 7 de l’arrêté du 30 janvier 2009 de création du comité interministériel d’aménagement du territoire.

234 On y a dissocié les termes d’assainissement, d’équipements, de protection des bassins versants et de gestion de

l’eau. Pourtant la planification urbaine intègre les plans d’eau et de gestion des bassins-versants.

235 Voir : art. 3 de l’arrêté relatif à la création du CIAT et 27 [du décret du 18 octobre 1983 portant organisation et

fonctionnement du MTPTC]. Le service de planification urbaine de ce ministère a quasiment les mêmes missions que la cellule d’urbanisme et d’habitat du CIAT.

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l’aménagement du territoire ou de la coordination des directions départementales du ministère de la Planification, la direction des collectivités territoriales du ministère de l’Intérieur et des Collectivités territoriales, les services et directions de planification urbaine, de génie urbain et autres du ministère des Travaux publics, des Transports et de la Communication (MTPTC) 236.

81. Le CIAT est aussi appelé à exercer des missions analogues au ministère de l’′nvironnement qui doit assurer la coordination exécutive du programme d’aménagement du territoire 237, ainsi qu’à

l’unité d’aménagement du territoire (UAT) 238 du ministère de la Planification. Or, le secrétariat

technique du CIAT dispose de son propre personnel, qui diffère de ceux des divers services et directions des ministères intervenant dans le domaine de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire. Ainsi, le CIAT devient une nouvelle institution en doublon, par rapport aux services antérieurs dans les domaines susmentionnés. Faute pour le secrétariat technique de ce comité interministériel d’intégrer les personnels des directions et services ministériels intervenant dans l’urbanisme, ceux-ci semblent désormais perdre le bien-fondé de leur existence, d’autant qu’ils n’ont jamais pu remplir leurs missions de manière efficace.

82. Le secrétariat technique du CIAT, tel qu’il existe, éclipse tous les services et directions ministériels intervenant dans l’urbanisme et l’aménagement du territoire. Des missions identiques ne sauraient être confiées à la fois au secrétariat technique de ce comité et à des services et directions composant ce dernier. De multiples institutions et instances aux missions identiques ne paraissent pas non plus nécessaires dans un pays où l’utilisation rationnelle des ressources devient de plus en plus impérative. Des compétences concurrentes en matière d’aménagement du territoire et d’urbanisme entre le Premier ministre et des ministères du gouvernement de celui-ci ne semblent pas promettre une meilleure efficacité en matière du développement urbain. Une rivalité ou un antagonisme entre la « primature » ou le Premier ministre et les ministères du gouvernement dirigé par ce dernier, ou encore entre un comité interministériel et d’autres ministères, est également contraire à la logique d’une gouvernance performante.

83. Si la formation d’un comité interministériel autour de thématiques d’urbanisme peut être considérée comme une démarche fondée de performance, le mode opératoire du CIAT compromet davantage la performance urbanistique. Mais il n’est pas le seul dans cette situation. L’Unité de construction de logements et de bâtiments publics (UCLBP), pour ce qui la concerne,

236 Voir les composantes de ces ministères in infra, n° 101.

237 Voir art. 35 du décret du 12 octobre 2005 [sur la gestion de l’environnement, la régulation de la conduite des

citoyens et le développement durable].

238 L’unité d’aménagement du territoire est la nouvelle dénomination de la direction d’aménagement du territoire et

de la protection de l’environnement. Voir MINISTERE DE LA PLANIFICATION ET DE LA COOPERATION EXTERNE.

n’a pas encore de cadre juridique pour son organisation et son fonctionnement. Selon un document émané de cette entité, celle-ci est une institution créée par le gouvernement haïtien, « pour impliquer les ministères et les institutions publiques concernés » dans la mise en œuvre de la politique du logement et de l’habitat 239. Placée sous l’autorité du Premier ministre, cette

unité opérationnelle se donne plusieurs missions en matière de logements et de bâtiments publics 240.

84. La situation tacite de l’UCLBP ne nous permet pas de porter une appréciation définitive là- dessus. Néanmoins, signalons qu’elle prend le parti des logements qui est une mission similaire à celle de l’Établissement public de promotion de logements sociaux (EPPLS) 241, de l’Office

nationale d’assurance-vieillesse (ONA) 242 et à celle du comité interministériel d’aménagement

du territoire (CIAT), via sa cellule de service « urbanisme et habitat ». Celle-ci se charge de « coordonner et d’harmoniser l’action publique dans les domaines d’urbanisme et d’habitat » 243.

Or, l’UCLBP se propose d’intervenir sur les questions de qualité et de sécurité de l’habitat 244,

qui sont aussi dans les champs de compétence du Laboratoire national du bâtiment et des travaux publics (LNBTP), ainsi que de certains services du ministère des Travaux publics, des Transports et de la Communication (MTPTC) 245.

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