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La contradiction des dispositions de zonage et d ’affectation foncière 221 La contradiction des dispositions en matière de zonage et d’affectation foncière peut s’expliquer

L ’ INCOMPATIBILITE DE LA LEGISLATION D ’ URBANISME

L ’ INCOHERENCE DES REGLES DE L ’ UTILISATION DU SOL

B. La contradiction des dispositions de zonage et d ’affectation foncière 221 La contradiction des dispositions en matière de zonage et d’affectation foncière peut s’expliquer

sous divers angles : chronologique, systémique, stratégique, comme sous celui de la sensibilité aux

conditions initiales. Cette contradiction est alimentée par le système politique, les erreurs

fondamentales à l’origine de l’État d’Haïti qui se sont enracinées avec le temps, ainsi que par les effets néfastes exponentiels de ces erreurs sur l’ensemble des structures administratives et catégories sociales. Les dispositions de zonage et d’affectation foncière sont d’une contradiction incroyable en Haïti.

222. Les dispositions de zonage en Haïti peuvent prendre deux formes : des arrêtés présidentiels de déclaration de zonage ou des arrêtés municipaux sur le zonage dans le cadre du plan d’aménagement, d’embellissement et d’extension 616. Cependant, on trouve aussi, dans le

système haïtien, des lois de déclaration d’utilité publique ou de zonage 617. Les arrêtés portent

614 Art. 56 et 58 du décret du 12 octobre 2005 [sur la gestion de l’environnement, la régulation de la conduite des

citoyens et le développement durable].

615 Dans le sens littéral des articles 56 et 58 du décret susmentionné, l’objet des procédures d’audiences publiques

devrait consister en l’établissement de la nécessité de ces dernières pour assurer une participation très large de la population. Le décret a non seulement omis de préciser les procédures d’audiences publiques mais encore il a créé une confusion sur l’objet de ces procédures.

616 Art. 65 (b) de la loi du 29 mai 1963 [sur l’urbanisme].

617 Voir : la loi du 3 février 1926 sur les forêts nationales réservées ; la loi du 27 août 1963 déclarant d’utilité publique

généralement sur des zones dites d’aménagement spécial 618 », des zones réservées, naturelles ou

protégées, des zones touristiques ou d’utilité publique.

223. En fait, il subsiste plusieurs problèmes en amont de la règlementation de ces zones. Le badinage législatif et réglementaire et l’inapplication systématique des dispositions prévues semblent avoir pour effet d’entraîner une négativité sociojuridique qui risque de se révéler très nocive à la performance du droit de l’urbanisme. À l’exemple du Morne-Hôpital 619, une seule et même

zone connaît parfois successivement plusieurs régimes ou textes différents mais totalement inefficients.

224. En outre, plusieurs lois et règlements sur des zones réservées ou protégées 620, sont dans

l’impossibilité de produire des effets positifs. Ces dispositions n’ont créé ni de servitudes d’urbanisme ni de structures susceptibles d’assurer le suivi de la règle exprimée. L’arrêté du 6 octobre 1937 déclarant « zone réservée » la région comprise entre Fonds Verrettes et Bodarie, par exemple, comporte trois articles d’une phrase établissant respectivement la déclaration, la délimitation et la conclusion juridique d’usage. Il n’exprime aucune interdiction ou limitation à la construction, ni les mesures de sa mise en œuvre. Il en est de même du décret du 4 avril 1944 déclarant « zone réservée » l’étendue du territoire comprise dans les limites des îles de la Gonâve et de la Tortue. La loi du 27 août 1963 déclarant d’utilité publique les travaux déjà réalisés et ceux à entreprendre à l’avenir en vue de la restauration du Morne[-]Hôpital n’est pas allée plus loin que les précédents règlements.

225. Il y a, par ailleurs, un paradoxe entre dispositions juridiques relatives à certaines zones et la réalité urbaine de ces zones. La plupart d’entre celles qui ont été déclarées d’utilité publique, zones réservées ou touristiques, ou qui ont été également frappées de constructibilité conditionnée, ne sont aujourd’hui que des bidonvilles 621. Ces dispositions n’ont pas été

effectives. Elles ne pouvaient l’être non plus, vu qu’il leur a manqué le caractère d’utilité

618 Voir art. 2, 8 et 9 du décret du 30 octobre 1986 relatif à l’aménagement spécifique du Morne[-]Hôpital.

619 Voir : décret du 30 octobre 1986 relatif à l’aménagement spécifique du Morne[-]Hôpital ; loi du 27 août

1963 déclarant d’utilité publique les travaux déjà réalisés et ceux à entreprendre à l’avenir en vue de la restauration du Morne[-]Hôpital. ′n revanche, ce morne figure aujourd’hui parmi les zones protégées et à risque aux constructions les plus anarchiques du pays.

620 Voir notamment : la loi du 3 février 1926 sur les forêts nationales réservées ; l’arrêté du 30 avril 1926 sur les forêts

nationales de St-Raphael ; l’arrêté du 13 août 1937 déterminant le périmètre de la zone réservée Cerisier-Plaisance ; l’arrêté du 6 octobre 1937 déclarant « zone réservée » la région comprise entre Fonds Verretes et Bodarie ; le décret du 4 avril 1944 déclarant « zone réservée » l’étendue du territoire comprise dans les limites des iles de la Gonâve et de la Tortue, etc.

621 Les zones ayant été déclarées réservées ou touristiques et qui sont devenues des bidonvilles sont légion en Haïti,

notamment la zone de la rue Tirremasse, St-Jean Bosco, Chancerelles, Drouillard, Cazeau, Corail Guérin, etc. Voir : décret du 27 février 1970 déclarant « zone touristique » l’habitation Corail Guérin située en la section rurale de Morne à Bateau, commune de Port-au-Prince ; décret du 17 mars 1970 déclarant « zone touristique et d’utilité publique » l’habitation Corail Ceseless [2e section rurale, Varreux, Cne Croix-des-Bouquets].

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publique 622 qu’elles prétendaient posséder, de même que des éléments et mécanismes

nécessaires à leur mise en exécution. L’implication du public, ainsi que des mesures d’accompagnement et de suivi y ont fait défaut. De plus, ces déclarations d’utilité publique n’ont suivi aucune procédure ni fait l’objet d’opérations, d’ouvrages ou de travaux présentant réellement un caractère d’utilité publique 623.

226. Il est aussi à noter que la plupart des règlements ne portent que de simples intitulés sans mécanismes d’application. Certains décrets 624 ne mentionnent que des bribes de règles

semblables aux zones naturelles ou aux zones protégées 625 dont l’incomplétude ne permet

aucun aboutissement. Le décret du 18 mars 1968 et celui du 4 avril 1983 ont pris le soin d’attribuer au département de l’Agriculture et des Ressources naturelles la compétence de préservation des parcs et sites naturels et de lutte contre la détérioration du territoire 626.

Cependant, en l’absence de mécanismes nécessaires à l’accomplissement d’une telle mission par ce ministère, son effectivité demeurait incertaine. L’exercice d’une pareille mission était impossible faute d’indiquer les modalités de son accomplissement 627.

227. Le décret de 1968 a rendu les parcs nationaux et sites naturels inaliénables et insaisissables 628 et

créé une servitude exploitable à des fins urbanistiques, sur des terres nécessitant protection ou conservation 629. Il a aussi institué une commission chargée de la protection des monuments et

sites naturels dans chaque département 630, ainsi qu’une caisse nationale en vue de la protection

622 Le concept d’utilité publique repose sur un flou juridique en Haïti.

623 Voir « Déclaration d’utilité publique ». in JEGOUZO, Yves (Sous la direction de). Droit de l’urbanisme : Dictionnaire

pratique. 2011.

624 Décret du 18 mars 1968 dénommant « parcs nationaux et sites naturels » les étendues des terres boisées ou parcs

sur lesquels sont établis des monuments historiques ou naturels ; Décret du 4 avril 1983 déclarant « parcs nationaux naturels » les aires entourant le Morne La Visite du Massif de la Selle et le Morne Macaya entourant le Pic Macaya au massif de la Hotte.

625 ′n droit français de l’urbanisme, il revient au plan local d’urbanisme de déterminer les limites et possibilités de

construction dans les zones à protéger (art. L123-4) et de délimiter à travers son règlement les différentes zones (zone à urbaniser, zones agricoles, zones naturelles et forestières, etc.). Voir art. R123-4 C. urb.

626 Voir : art. 3 (e) du décret 4 avril 1983 déclarant « parcs nationaux naturels » les aires entourant le Morne La Visite

du massif de la Selle et le Morne Macaya du Pic Macaya au Massif de la Hotte ; et 3 du décret du 18 mars 1968 [concernant les parcs nationaux et sites naturels].

627 Le ministère aurait peut-être pris les mesures efficaces nécessaires pour grever les parcs et sites naturels d’une

interdiction ou d’une limitation de construire ou d’utilisation, s’il en savait les mécanismes et modalités. Il est juridiquement illogique de laisser ces derniers à la discrétion d’un ministère.

628 Voir art. 2 du décret du 18 mars 1968 dénommant « parcs nationaux, sites nationaux et sites naturels » toutes

étendues de terres boisées ou parcs sur lesquels sont établis des monuments historiques ou naturels.

629 Selon l’article 4 (c) de ce décret, les terres nécessitant protection ou conservation sont celles qui présentent un

intérêt faunique ou botanique, historique, scientifique, géologique ou touristique.

630 Art. 5 du décret du 18 mars 1968 dénommant « parcs nationaux, sites nationaux et sites naturels » toutes étendues

des objectifs suscités 631. L’inaliénabilité et le statut d’utilité publique dont sont frappées ces

zones au regard de ce décret étaient, par ailleurs, des atouts majeurs pour permettre au ministère de l’Agriculture de cadastrer les aires légalement désignées et de prendre les mesures nécessaires pour les protéger et les conserver 632. En revanche, comme l’atteste la situation actuelle des parcs

et sites naturels en Haïti, ce règlement ne semble pas avoir entraîné le résultat souhaité.

228. Soulignons de surcroit que même les nouvelles règles sur les aires protégées n’ont pas amélioré les lacunes de la législation haïtienne en la matière 633. Le décret en question du 12 octobre

2005 sur la gestion de l’environnement et le développement durable n’a pas relaté un rapport quelconque entre les aires protégées et un plan d’urbanisme. La compétence dont disposerait l’Agence nationale des aires protégées concernant la préservation des aires protégées, qui sont placées dans son champ d’actions, lui aurait permis de créer des limitations à la construction et aux installations susceptibles de nuire à l’existence de ces aires. Cependant, le silence de ce décret sur cette attribution risque d’exposer cette agence à des conflits sans issues avec les autorités territoriales. Au regard des dispositions de la Constitution et du Code civil d’Haïti 634, cette

structure n’est pas compétente pour créer des limitations de protection des aires protégées. Les agences et établissements publics ne sont pas non plus suffisamment outillés pour produire des effets positifs en matière d’urbanisme.

229. Par ailleurs, le décret du 12 octobre 2005 sur la gestion de l’environnement et le développement durable prévoit l’élaboration et l’approbation de plans d’aménagement des aires protégées par l’agence sans faire mention d’une concertation avec les autorités territoriales, ce qui risque d’amplifier les actions isolées et incohérentes en matière d’urbanisme. Les aires protégées évoquent encore une fois la nécessité d’une intégration de tous les plans d’aménagement prévus çà et là dans un seul document d’urbanisme. De même, l’élaboration et la mise en œuvre d’outils divers par des autorités multiples ne feront qu’aggraver la situation déjà problématique de l’urbanisme.

631 Art. 15 du décret du 18 mars 1968 dénommant « parcs nationaux, sites nationaux et sites naturels » toutes étendues

de terres boisées ou parcs sur lesquels sont établis des monuments historiques ou naturels.

632 Même décret. Art. 6 à 14.

633 Voir art. 48 à 55 du décret du 12 octobre 2005 [sur la gestion de l’environnement, la régulation de la conduite des

citoyens et le développement durable].

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Pour ce qui concerne les règlements de création de zones touristiques 635, la situation

juridique n’est pas non plus meilleure. Ils sont caractérisés par les mêmes lacunes 636, la même

incohérence et la même absence de règles.

230. L’incohérence dans la création des zones en Haïti y explique aussi la problématique complexe de l’urbanisme. Les différentes zones sont établies de manière sporadique, en l’absence de documents d’urbanisme (aucun n’a jamais existé). Les règlements de création des zones en Haïti n’ont pas une fonction urbanistique 637. En plus de l’incohérence des règlements de zonage et

l’absence de mécanismes nécessaires à leur mise en œuvre, ces derniers n’ont aucun rapport avec les libellés de documents relatés dans la législation d’urbanisme 638.

La contradiction des dispositions de zonage n’est pas la seule à compromettre le futur urbanistique d’Haïti. Il y a lieu de décrypter d’autres entraves posées à ce futur par les dispositions sur l’affectation foncière, caractérisée par une récurrence de règlements problématiques pour la performance.

231. En 1948, une loi a rendu propriétaire tout individu occupant et possédant une construction, à titre de fermier pendant cinq ans au moins, ou un terrain du domaine privé de l’État situé dans certaines villes et les quartiers 639. Deux ans plus tard, un décret modifiant la loi précédente

relève cette durée à vingt ans 640, avec cette fois-ci une restriction portant sur « l’étendue du

terrain » (qui n’a pas été précisée) et l’attribution d’un seul don national à une personne 641.

635 Voir arrêté du 29 octobre 1968 fixant les limites d’une zone touristique ou seraient construits avec des centres

créatifs, un shopping center moderne et un parking industriel de reproduction [sic] ; décret du 27 février 1920 déclarant « zone touristique » l’habitation Corail Guérin située en la section rurale de Morne-à-Bateau ; décret du 17 mars 1970 déclarant « zone touristique » l’habitation Corail Cessless [2e section rurale, Varreux, Cne Croix- des-Bouquets] ; etc.

636 Rappelons, par exemple, les lacunes de la déclaration d’utilité publique relatives à l’absence d’un projet déterminé

et de servitudes d’urbanisme.

637 La fonction de la règlementation des zones consiste à créer des servitudes d’urbanisme, savoir à déterminer et/ou

à établir des limitations quant à la construction ou à l’utilisation de l’espace.

638 Le fait que les zones ne sont intégrées dans aucun document d’urbanisme est l’une des causes fondamentales de

leur inapplication et de leur échec. Néanmoins, le document d’urbanisme n’est pas une fin en lui-même. Sa performance dépend des mécanismes et structures de sa mise en œuvre.

639 Art. 1er de la loi du 8 septembre 1948 [concernant les fermiers du domaine privé de l’État].

640 L’article 1er de la loi du 8 septembre 1948 [concernant les fermiers du domaine privé de l’État] dispose : « [t]out

individu qui occupe ou occupera à titre de fermier, un terrain du domaine privé de l’État, situé dans les communes 4e, 5e, et 6e classe et dans les quartiers ruraux deviendra, de droit, propriétaire du terrain s’il peut justifier, par la production des récépissés qui lui ont été délivrés par l’Administration générale des contributions, avoir occupé ledit terrain par lui-même ou ses auteurs pendant au moins 20 ans et qu’il y possède une construction pouvant servir de maison d’habitation ; il sera émis en sa faveur un titre de don national, sans autres restitutions que celles prévues par la présente loi. »

232. Une loi de 1963 vient rompre cette durée, offrant aux fermiers du domaine privé de l’État en règle avec le fisc et justifiant de l’occupation du terrain visé pendant une période d’au moins cinq ans, y ayant édifié des constructions ou y ayant entretenu des cultures régulières, la possibilité de devenir acquéreurs de ces immeubles, ce sans aucune autre restriction concernant les réserves foncières ou la cause d’utilité publique 642. L’année suivante, un autre décret prévoit

de cadastrer les terres du domaine privé de l’État en vue de les affermer aux personnes intéressées 643. Ce dernier décret visait de mettre fin aux baux en cours et de reprendre

possession de la propriété affermée, en indemnisant le preneur 644.

233. En 1989, une autre stratégie discontinuait la précédente en promouvant le lotissement et la distribution des terres cultivables du domaine privé de l’État aux familles paysannes nécessiteuses qui en produisaient la demande 645, avec pour obligation pour ces dernières de

mettre en culture les 2/3 au moins des terres dont elles sont bénéficiaires. Pire, un décret de 1995 est venu dispenser les fermiers du domaine privé de l’État établis dans les sections communales, qui sont en règle avec le fisc et ayant édifié des constructions ou entretenu des cultures régulières sur le terrain affermé, de payer leur fermage 646. Or, sachant que la quasi-

totalité des terres d’Haïti se trouve dans les sections communales, à l’exception de celles des centres villes, ce décret n’a fait que dispenser la majorité des fermiers du paiement des terrains qui leur ont été affermés.

234. La législation concernant la question foncière et des terres du domaine privé de l’État a donc donné lieu à une dérive foncière. Minée par le non-respect de la hiérarchie des normes, par l’absence d’une gouvernance législative et réglementaire et surtout par la récurrence des anomalies juridiques, elle a fini par créer un droit acquis pour les occupants des terres du domaine privé de l’État, ainsi qu’une tradition selon laquelle toute occupation continue d’un terrain de ce type peut donner lieu à un droit de propriété. Cette législation semble avoir pour effet de porter tout individu à envahir les terres non occupées auxquelles celui-ci peut prêter les statuts de terres du domaine privé de l’État. D’où la ruée des constructions à la hâte sur les terres du domaine privé de l’État dont l’issue certaine des occupations est le paiement de loyers auprès d’un service des contributions avec la validation de l’administration communale. Aujourd’hui à

642 Art. 2 du décret du 16 janvier 1963 sur l’aliénation des biens immeubles du domaine privé de l’État.

643 Art. 5 à 14 du décret du 22 septembre 1964 adoptant une base plus équitable et plus rationnelle pour la fixation

des loyers et fermages des biens du domaine privé de l’État.

644 Même décret. Art. 15.

645 Art. 2 du décret du 14 juillet 1989 autorisant le ministère de l’Économie et des ″inances à procéder au relevé

systématique de toutes les terres cultivables disponibles du domaine privé de l’État et à en faire dresser le cadastre, afin [de les] distribuer aux familles paysannes nécessiteuses.

646 Art. 1er du décret du 16 mai 1995 dispensant tous fermiers de l’État en règle avec le fisc qui ont édifié des

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force de déraisonner, la législation foncière a fini par céder le pas à une forme de « terrae occupatio

est lex » 647.

235. L’inexistence d’un droit de préemption urbain pour les communes, ainsi que l’absence de notion de réserves foncières ou d’espaces parmi les causes de déclaration d’utilité publique 648

sont aussi des défaillances flagrantes de la législation foncière à ne pas ignorer. Les causes de déclaration d’utilité publique sont toutes tournées vers l’urgence et les travaux actuels ou tangibles 649. Même si l’article 10 de la loi sur l’expropriation pour cause d’utilité publique offre

une possibilité aux autorités pour déclarer les réserves foncières ou les projets futurs comme cause d’utilité publique 650, rien ne laisse présager que les réserves foncières ou projets futurs

seraient considérés comme telles.

La défectuosité des règles d’urbanisme ne s’arrête pas aux dispositions compromettantes pour le futur urbanistique d’Haïti. Elle relève également des carences sur le plan du contentieux qui méritent d’être analysées.

§ 3. L

ES CARENCES PROFONDES DU CONTENTIEUX DE L

URBANISME

236. Avant d’établir les carences du contentieux de l’urbanisme, il convient de préciser que le système juridictionnel haïtien se caractérise par un mono-céphalisme de recours tant pour la juridiction administrative que pour la juridiction judiciaire. L’exercice des missions juridictionnelles 651 est

assuré par la Cour de cassation, des cours d’appel, des tribunaux de première instance (incluant tribunaux civil, commercial, correctionnel, les cours d’assises criminelles et les chambres d’appel), des tribunaux spéciaux et des tribunaux de paix 652. En plus des tribunaux de première

instance, cinq cours d’appel 653 partagent les juridictions d’appel de la justice ordinaire en Haïti.

Il s’agit d’un monisme binaire où les deux sous-ordres de juridictions administrative et judiciaire sont placés sous la hiérarchie d’une seule instance suprême de cassation. Le sous-ordre de juridiction administrative est représenté par la cour supérieure des comptes et du contentieux administratif (CSCCA). Les carences de contentieux de l’urbanisme le concernant, comme pour le sous-ordre judiciaire, sont analysées à travers les dispositions concernant le contentieux administratif (A) et le contentieux judiciaire (B).

647 Formulation personnelle.

648 Voir les causes de déclaration d’utilité publique en l’article 10 de la loi du 5 septembre 1979 sur l’expropriation pour

cause d’utilité publique.

649 Même loi. Art 1er et 10.

650 Ceci pourrait s’expliquer par le caractère non-limitatif des causes d’utilité publique.

651 Article 2 du décret du 22 août 1995 relatif à l’organisation du pouvoir judiciaire en Haïti.

652 Même décret. Art. 1er.

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