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a. Des obligations d'action d éduites des dispositions générales

264. Aidée par la formulation explicite de l'article 1 CIADH, la Cour interaméricaine

en a déduit une obligation générale d'assurer l'effectivité des droits, dont elle a précisé petit à petit la portée, se détachant ainsi des intentions des États qui n'avaient sans doute pas conçu cette disposition comme telle. Dès son deuxième arrêt sur les exceptions préliminaires, elle a découvert au sein de cette disposition « l'obligation générale (...) de garantir le libre et plein exercice des

droits reconnus par la Convention à toute personne se trouvant sous sa juridiction »761. Puis dans

son deuxième arrêt au fond, elle l'a qualifié de « devoir fondamental de respect et de garantie »762.

Quant au Comité, il a rebaptisé les obligations issues de l'article 2 PIDCP d'« obligation juridique

760

761 Notre traduction de « la obligación general a cargo de los mismos Estados, de garantizar el libre y pleno ejercicio

de los derechos reconocidos por la Convención a toda persona que se encuentre bajo su jurisdicción (art. 1). » Cour IADH, Exceptions préliminaires, 26 juin 1987, Fairén Garbi et Solís Corrales c. Honduras, C 2, §90 (L. SEMINARA, Les effets des arrêts de la Cour interaméricaine des droits de l'homme, Bruylant, coll. « Droit et justice », 2009, p. 45).

762

Notre traduction de « dicho artículo pone a cargo de los Estados Partes los deberes fundamentales de respeto y

garantía » (Cour IADH, Fond, 20 janvier 1989, Godinez Cruz c. Honduras, C 5, §173). Pour une critique de cette interprétation voir J. A. BARBERIS, « Una reflexión sobre el artículo 1, inciso 1, de la Convención americana sobre derechos humanos », in Amicorum Liber H. GROS ESPIELL, Bruylant, 1997, vol. 1, p. 77-92. L'auteur estime que cette disposition aurait dû être interprétée tel que la Cour l'a fait dans son avis consultatif n° 4, à savoir uniquement comme une obligation de ne pas discriminer (p. 92).

générale »763. Le parachèvement de cette construction a été la qualification, opérée par le Comité

DH et la Cour de San José, de cette obligation d' « erga omnes »764.

265. Ces dispositions, grâce à l'interprétation dynamique opérée par les organes de contrôle, ont donc servi de fondement textuel afin d'imposer des obligations d'action aux États parties. En 1987, dans l'avis consultatif n° 8, le juge interaméricain a estimé que les États ont non seulement « l'obligation de reconnaître et respecter les droits et libertés de la personne, mais également celle de protéger et assurer son exercice à travers des garanties adéquates, c'est-à-dire

des moyens idoines pour que les droits et libertés soient effectifs en toutes circonstances »765. Si le juge n'a pas explicité la règle d'interprétation choisie pour parvenir à cette affirmation, l'interprétation téléologique est visible dans la mention de l'objectif d'assurer l'effectivité des droits « en toute circonstances ».

266. La Cour de San José a développé et explicité cette analyse dans son premier arrêt

contentieux au fond, l'arrêt Velásquez Rodríguez766. Selon le juge, l'obligation de garantir « implique

le devoir pour les États parties d'organiser leur appareil gouvernemental et, plus généralement,

toutes les structures à travers lesquelles s'exerce la puissance publique, de telle manière qu'ils

soient aptes à assurer juridiquement le libre et plein exercice des droits de l'homme. En

conséquence de cette obligation, les États parties doivent prévenir, rechercher et sanctionner toute

763 Comité DH, Observation générale n° 31, 29 mars 2004, Nature de l'obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte.

764 Cour IADH, Avis n° 18, 17 septembre 2003, Statut juridique et droits des travailleurs migrants illégaux, A 18, §140 ; RTDH, 2004, 747, note L. Hennebel ; RTDH, 2005, p. 464, chron. C. Laly-Chevalier, F. Da Poïan et H. Tigroudja ; EDL, n° 12, chron. A. Úbeda de Torres. Elle a également qualifié comme telle l'article 2 CIADH (Cour IADH, Fond, 15 septembre 2005, Massacre de Mapiripán c. Colombie, C 134, §111 ; RTDH, 2006, 289, chron H. Tigroudja ; EDL, n° 19, chron. A. Úbeda de Torres). Pour le Comité, cette qualification ressort de Comité DH, Observation générale n° 31, 29 mars 2004, Nature de l'obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, §2.

765 Notre traduction de « como los Estados Partes tienen la obligación de reconocer y respetar los derechos y libertades

de la persona, también tienen la de proteger y asegurar su ejercicio a través de las respectivas garantías (art. 1.1),

vale decir, de los medios idóneos para que los derechos y libertades sean efectivos en toda circunstancia » (Cour IADH, Avis n° 8, 30 janvier 1987, L'habeas corpus en période de suspension des garanties, A 8, §25).

766 Concernant le terme « respecter », la Cour a indiqué que « l'exercice de la puissance publique a des limites qui

proviennent de ce que les droits de l'homme sont des attributs inhérents à la dignité humaine et sont, par

conséquent, supérieurs aux pouvoirs de l'État », puis citant un extrait de son avis n° 6, elle a affirmé que « la

protection des droits de l'homme et, en particulier des droits civils et politiques énumérés dans la Convention part

de l'affirmation de l'existence d'attributs inviolables de la personne humaine, que ne peut légitimement réduire

l'exercice de la puissance publique. Il s'agit de sphères individuelles auxquelles l'État ne peut porter atteinte ou

dans lesquelles il ne peut pénétrer que de manière limitée. Ainsi la notion de protection des droits implique

nécessairement celle de restriction de l'exercice du pouvoir de l'État » Cour IADH, Fond, 29 juillet 1988, Velásquez Rodríguez c. Honduras, C 4., §165 G)7.5(D",9- @   ) (    U )* O   )  &( &

violation des droits reconnus par la Convention, tenter de rétablir dans la mesure du possible le

droit lésé et, le cas échéant, réparer les dommages causés par la violation des droits de l'homme » (§166). De plus, « l'obligation de garantie du libre et plein exercice des droits de l'homme n'est pas

remplie avec l'existence de normes destinées à rendre possible son accomplissement ; elle comporte

aussi la nécessité d'une action gouvernementale assurant dans les faits une garantie efficace du

libre et plein exercice des droits de l'homme » (§167). L'objectif d'effectivité des droits était omniprésent. Il est tout comme dans le système européen, le fondement des obligations d'action des États.

267. Cet objectif est également implicitement présent dans la jurisprudence du Comité

des droits de l'homme, dans laquelle les obligations positives déduites du texte sont justifiées par la nécessité « d'assurer la jouissance » des droits. Il a ainsi affirmé dans son Observation générale n° 3 en 1981, que les obligations qu'impose le Pacte aux États « ne se limitent pas au respect des droits

de l’homme, et qu’ils se sont également engagés à assurer la jouissance de ces droits à toutes les

personnes relevant de leur juridiction. Cela exige des États parties qu’ils prennent des mesures

spécifiques pour permettre aux particuliers de jouir de leurs droits. (...) cette obligation vaut pour

tous les droits énoncés dans le Pacte »767.

268. L'Observation générale n° 31, qui « reprend et développe les principes »768 de l'observation générale n° 3, est venue apporter des éléments de précision. Selon le Comité, « l’obligation juridique énoncée au paragraphe 1 de l’article 2 est à la fois négative et positive. Les États parties doivent s’abstenir de violer les droits reconnus par le Pacte, et toute restriction à leur

exercice doit être autorisée par les dispositions pertinentes du Pacte »769, et « en vertu de l’article 2,

les États parties doivent prendre des mesures d’ordre législatif, judiciaire, administratif, éducatif et

autres appropriées pour s’acquitter de leurs obligations juridiques »770. Néanmoins, dans un premier temps, le Comité n'a pas fait référence à ces articles afin de dégager des obligations positives prétoriennes. Il a tout d'abord déduit des obligations d'action étatiques directement de

l'article 6 PIDCP (droit à la vie) et ce, sans se justifier et sans faire référence à l'article 2 PIDCP771.

767 Comité DH, Observation générale n° 3, 20 juillet 1981, Mise en œuvre du Pacte dans le cadre national, §1.

768 Comité DH, Observation générale n° 31, 29 mars 2004, Nature de l'obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, §1.

769 Ibid., §6.

770 Ibid., §7.

Dans une affaire Dermit Barbato de 1982, il a ainsi reconnu la responsabilité de l'Uruguay pour ne pas avoir pris les « mesures adéquates pour protéger la vie » d'un détenu décédé lors de sa

détention772. Il a jugé de même dans des affaires de disparitions forcées, estimant que « les États

parties doivent prendre des mesures spécifiques et efficaces pour empêcher les disparitions de

personnes »773, reprenant ainsi les termes de son Observation générale n° 6 de 1982 sur le droit à la vie774.

269. Quant aux articles concernant l'obligation d'adoption de mesures en droit interne

(article 2§2 PIDCP, article 2 CIADH), ils ont également été exploités afin d'imposer des obligations d'action aux États. Ils ont également été interprétés comme imposant aux États d'abroger les normes contraires aux deux textes de protection des droits de l'homme et d'adopter les normes effectives et nécessaires à leur mise en œuvre775.

270. Ces clauses dites générales, qualifiées par le professeur M. Nowak de « umbrella

clause », sont applicables à tous les droits du Pacte776 et ne sont pas autonomes. Elles ne peuvent

être invoquées qu'en combinaison avec un droit protégé par le texte777. La pratique des deux organes

n'est cependant pas identique à cet égard. La Cour interaméricaine accompagne tout constat de violation d'un droit de la violation de l'article 1 CIADH778, et le cas échéant de la violation de

Comité des droits de l'homme des nations unies – les communications individuelles-, IDEDH, 1995, p. 111.

772 Comité DH, Const., 21 octobre 1982, Dermit Barbato c. Uruguay, comm. n° 84/1981, §9.2.

773 Comité DH, Const., 22 novembre 1989, Sanjuán Arévalo c. Colombie, comm. n° 181/1984, §10 ; avec une référence à l'article 2 : Comité DH, Const., 2 novembre 1987, Herrera Rubio c. Colombie, comm. n° 161/1983, §10.3.

774 Comité DH, Observation générale n° 6, 30 avril 1982, Le droit à la vie (article 6), §4.

775 Cour IADH, Fond, 30 mai 1999, Castillo Petruzzi et al. c. Pérou, C 52, §207 ; Comité DH, Observation générale n° 31, 29 mars 2004, Nature de l'obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, §13. La Cour interamericaine a ajouté une obligation de s'abstenir d'adopter des mesures en contradiction avec la CIADH (Cour IADH, Avis n° 14, 9 décembre 1994, Responsabilité internationale pour l'exécution et l'application des lois contraires à la Convention, A 14, cité par H. TIGROUDJA, I. K. PANOUSSIS, La Cour interaméricaine des droits

de l'homme – Analyse de la jurisprudence consultative et contentieuse, op. cit., p. 173).

776 M. NOWAK, U.N.Covenant on Civil and Political Rights, CCPR Comentary, op. cit., p. 29.

777 Comité DH, Const., 27 mars 1981, K. L. c. Danemark, comm. n° 81/1980 ; Comité DH, Const., 28 novembre 1989, H. G. B. et S. P. c. Trinité-et-Tobago, comm. n° 268/1987 ; Comité DH, Const., 4 avril 1990, S. E. c. Argentine, comm. n° 275/1988 (M. NOWAK, U.N.Covenant on Civil and Political Rights, CCPR Comentary, op. cit., p. 35 ; L. HENNEBEL, La jurisprudence du Comité des droits de l'homme des Nations Unies, Bruylant, 2007, p. 44).

778 « Cet article contient l’obligation pour les États parties de respecter et garantir chacun des droits protégés de telle

manière que toute atteinte à l’un de ces droits implique nécessairement que l’article 1§1 ait été violé » Cour IADH, Fond, 29 juillet 1988, Velásquez Rodríguez, préc., §162.L. Hennebel, note que le juge A. Cançado Trindade a défendu au contraire le caractère autonome des articles 1§1 et 2 CIADH (Cour IADH, Fond, 15 septembre 2005, Massacre de Mapiripán, préc., opinion du juge A. Cançado Trindade, §6 et s.

l'article 2 CIADH779. Quant au Comité DH, sa démarche est pour le moins aléatoire. Il peut ne faire

aucune référence à l'article 2 PIDCP afin de dégager des obligations d'action étatique780, conclure à

la violation de l'article 2 PIDCP, sans toutefois préciser quelle était la disposition en cause au sein

de cet article et après avoir retenu la violation d'un droit garanti par le Pacte781, ou encore procéder à

une lecture conjointe de l'un des droits avec les articles 2§1 et 2§2 PIDCP afin d'en déduire des obligations d'action pour les États782. Cependant les deux organes ont en commun d'employer

largement ces dispositions au stade de la réparation, l'article 2 CIADH pour l'un783, l'article 2 PIDCP

pour l'autre784.

271. En se fondant sur ces dispositions générales ou en s'appuyant directement sur un

droit garanti, et afin de garantir l'effectivité des droits, ces deux organes ont imposé aux États à la fois des obligations d'abstention et des obligations d'action. Ces dernières ont en outre un contenu équivalent aux obligations positives européennes.

779

La relation entre ces deux articles et leur champ d'application respectif est très discuté par la doctrine et par les juges eux-mêmes. La pratique de la Cour a cet égard n'est pas des plus limpides. Il a ainsi été noté que « le brouillage du

distingo » entre les deux dispositions « est aujourd'hui total et généralisé » (L. BURGORGUE-LARSEN, A. QA30+ DE TORRES, Les grandes décisions de la Cour interaméricaine des droits de l'homme, op. cit., p. 284 ; H. TIGROUDJA, I. K. PANOUSSIS, La Cour interaméricaine des droits de l'homme – Analyse de la jurisprudence

consultative et contentieuse, op. cit., p. 162 et s.).

780 Comité DH, Const., 29 juillet 1980, Motta et al. c. Uruguay, comm. n° 11/1977 ; Comité DH, Const., 21 octobre 1982, Dermit Barbato, préc. ; Comité DH, Const., 23 août 1990, Delgado Paéz c. Colombie, comm. n° 195/1985 (article 9 PIDCP, droit à la liberté et à la sécurité).

781

Comité DH, Const., 2 novembre 1987, Herrera Rubio, préc., §10.3 ; Comité DH, Const., 18 avril 2000, Carlos Dias c. Angola, comm. n° 711/1996.

782 « Bien que les tribunaux aient maintes fois condamné l’épouse de l’auteur à une amende pour ne pas avoir respecté

les ordonnances préliminaires accordant à l’auteur le droit de voir son fils, les amendes imposées n’ont été ni

pleinement mises à exécution ni remplacées par d’autres mesures destinées à garantir les droits de l’auteur. Dans

ces circonstances et compte tenu du retard considérable constaté dans différentes phases de la procédure, le Comité

est d’avis que les droits de l’auteur consacrés par l’article 17 du Pacte, lu conjointement avec les paragraphes 1 et 2

de l’article 2, n’ont pas été protégés d’une manière effective. En conséquence, le Comité estime que les faits dont il

est saisi font apparaître une violation de l’article 17, lu conjointement avec l’article 2 du Pacte » Comité DH, Const., 19 août 2002, L. P. c. République Tchèque, comm. n° 946/2000, §7.4.

783 L. BURGORGUE-LARSEN, A. QA30+ DE TORRES, Les grandes décisions de la Cour interaméricaine des

droits de l'homme, op. cit., p. 295 et s.

b. Des obligations équivalentes aux obligations positives européennes

272. La Cour EDH a, grâce à la technique des obligations positives, d'une part conféré

un effet horizontal indirect aux droits conventionnels, et d'autre part dégagé des obligations d'action

aussi bien substantielles que procédurales785. Le Comité DH et la Cour IADH ont procédé de même,

sans avoir nécessairement recours à la technique des obligations positives.

273. Tout comme la Cour EDH dès ses arrêts Young James et Webster de 1981 et H$  

I$ )BB? ces organes ont conféré un effet horizontal aux droits garantis par leurs textes de référence. Ils ont imposé aux États de prendre des mesures pour prévenir ou sanctionner une violation d'un droit individuel commise par une personne privée. Cependant, il est probable que, pour ce faire, ils se soient davantage inspirés de la jurisprudence arbitrale relative à l'obligation de due diligence des États vis-à-vis des étrangers présents sur leur territoire que de la jurisprudence européenne787.

274. La Cour interaméricaine a reconnu une l'effet horizontal de la CIADH dès son

premier arrêt au fond en 1988 dans l'affaire Velásquez Rodríguez. L'article 1§1 CIADH a tenu une place centrale à cet égard. La Cour a en effet établi que « l'article 1§1 est fondamental pour

déterminer si une violation des droits de l'homme reconnus par la Convention peut être imputée à

un État partie » (§164). Elle a estimé que « ledit article oblige en effet les États parties à respecter

et garantir ces droits de telle manière que tout manquement aux droits de l'homme reconnus pas la

Convention qui peut être attribué, par application des règles du droit international, à l'action ou à

l'inertie d'une autorité publique, constitue un fait imputable à l'État »788. Plus loin, elle a précisé qu'« un acte attentatoire aux droits de l'homme et qui initialement ne serait pas directement

imputable à un État – par exemple s'il est l'œuvre d'un particulier ou si son auteur n'est pas

identifié – peut néanmoins engager la responsabilité internationale de cet État, non en raison du

fait lui-même, mais en raison du manque de diligence de l'État pour prévenir la violation des droits

785

et s.

786 Cour EDH, Plén., 13 août 1981, Young, James et Webster c. Royaume-Uni, A 44 ; CDE, 1982, 226, chron. G. Cohen Jonathan ; JDI, 1982, 220, obs. P. Rolland ; Cour EDH, 26 mars 1985, X et Y c. Pays-Bas, A 91 ; Rev. sc.

crim., 1985, 629, obs. L.-E. Pettiti ; JDI, 1986, 1082, chron. P. Rolland et P. Tavernier ; CDE, 1988, 462, chron. G. Cohen-Jonathan.

787

de l'homme »789. Initialement, la Cour s'est donc fondée uniquement sur l'article 1 CIADH et sur les règles du droit international général concernant la responsabilité des États afin de reconnaître l'effet horizontal des dispositions conventionnelles. Ce n'est que plus tard, dans son avis consultatif n° 18

qu'elle a eu recours à la technique des obligations positives pour ce faire790.

275. Le Comité DH a quant à lui affirmé dans son Observation générale n° 31 que

l'article 2§1 PIDCP impose que les individus soient « protégés par l’État non seulement contre les

violations de ces droits par ses agents, mais aussi contre des actes commis par des personnes

privées, physiques ou morales, qui entraveraient l’exercice des droits énoncés dans le Pacte dans la

mesure où ils se prêtent à une application entre personnes privées, physiques ou morales ». Ainsi, « dans certaines circonstances, il peut arriver qu'un manquement à l’obligation énoncée à l’article

2 de garantir les droits reconnus dans le Pacte se traduise par une violation de ces droits par un

État partie si celui-ci tolère de tels actes ou s’abstient de prendre des mesures appropriées ou

d’exercer la diligence nécessaire pour prévenir et punir de tels actes commis par des personnes

privées, physiques ou morales, enquêter à leur sujet ou réparer le préjudice qui en résulte en sorte

que lesdits actes sont imputables à l’État partie concerné »791. Il l'avait déjà reconnu de longue date dans sa jurisprudence, sans nécessairement le déduire de l'article 2§1 PIDCP. Ainsi, dès 1982, dans l'affaire Dermit Barbato, le Comité avait estimé que, dans l'impossibilité de déterminer si le cousin de l'auteur de la communication « s'était suicidé, avait été poussé au suicide, ou avait été tué par

d'autres lors de sa détention », l'État uruguayen devait être reconnu responsable de son décès que ce soit du fait de son action ou de son omission à prendre les mesures adéquates afin de protéger sa vie

tel que le requiert l'article 6 PIDCP792. Il avait par ailleurs estimé dans d'autres affaires que « l’État

789 Ibid., § 172. Dans cette affaire de disparition forcée, la responsabilité des agents de l'État n'ayant pu être démontrée, la Cour a conclu à la responsabilité de l'État non pour son action mais du fait que « l'appareil d'État » s'était « abstenu d'agir » (§182), et a retenu la violation des articles 7 (droit à la liberté), 5 (droit à l'intégrité de la personne) et 4 (droit à la vie) de la CIADH. Sur l'application horizontale de la Convention IADH se reporter à M. GARCÍA ELORRIO, « Algunas consideraciones en torno a la naturaleza y alcance de la noción de diligencia debida en la jurisprudencia de la Corte interamericana de derechos humanos », Revista Electrónica Cordobesa de Derecho

Internacional Público), Vol. 1, No. 1 (2011).

790 Cour IADH, Avis n° 18, 17 septembre 2003, Statut juridique et droits des travailleurs migrants illégaux, préc..

791 Comité DH, Observation générale n° 31, 29 mars 2004, Nature de l'obligation juridique générale imposée aux États parties au Pacte, §8. D'autres Comités des Nations Unies ont reconnu cette possibilité : Comité EDAW, Observation générale n° 19, 1992, Violence à l'égard des femmes, §9 ; Comité EDAW, Const., 16 juillet 2010, Karen Tayag Vertido c. Philippines, comm. n° 18/2008, §8.4.

792

« While the Committee cannot arrive at a definite conclusion as to whether Hugo Dermit committed suicide, was

driven to suicide or was killed by others while in custody; yet, the inescapable conclusion is that in all the circumstances the Uruguayan authorities either by act or by omission were responsible for not taking adequate measures to protect his life, as required by article 6 (1) of the Covenant » Comité DH, Const., 21 octobre 1982,

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