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1-2 Les moments formalisés de la vie en collectivité 1-2-1 Au Jardin du Bignon

Il y a plusieurs types d’événement organisés par l’association : des moments de travaux collectifs, des moments de formalisation de la vie en collectivité comme celui de l’assemblée générale, ou des moments purement festifs où l’on montre parfois le jardin au public. Bien évidement, chacun participe à ce qu’il souhaite.

Les travaux collectifs sont organisés à l’avance. Chacun est libre d’y participer ou non. La livraison du fumier commandé en commun donne lieu à un rendez-vous de volontaires en février pour le distribuer dans les parcelles de ceux qui en ont commandé. Ensuite, tout au long du printemps et de l’été, un calendrier de pompage de l’eau est établi afin que ceux qui le souhaitent se chargent de pomper l’eau de la source située en dessous du jardin pour remplir les cuves individuelles et les grandes cuves collectives. Cela a lieu tous les quinze jours environ. Il peut y avoir d’autres travaux plus ponctuels, comme la plantation d’arbres fruitiers ou le creusement d’une canalisation. Les jardiniers sont prévenus par mail et pour les inciter à y participer, le Président leur demande de s’inscrire sur des tableaux ou de faire part de leur présence ou non en répondant.

L’Assemblée générale se tient en décembre dans une salle prêtée par la mairie. Il y est fait état des actions réalisées et des projets au cours du rapport moral, du rapport d’activité et du rapport financier. C’est à cette occasion qu’on renouvelle la cotisation pour la location de la parcelle. On vote pour approuver ces rapports puis on élit le nouveau bureau. Les membres du bureau insistent sur des valeurs qui leur semblent importantes, comme l’entraide, entr’autre quand un jardinier rencontre des difficultés dans sa vie personnelle. Ils reviennent également sur les règles de fonctionnement du jardin, notamment concernant la sécurité mais aussi les orientations écologiques : on rappelle qu’on n’utilise ni engrais ni pesticide et on préconise des méthodes alternatives comme le paillage. Une des orientations de l’association est de développer justement dans ce but des commandes groupées de graines, de paillis de lin, de paille, et de fumier. Elles sont proposées lors de cette assemblée. Hormis le but d'en réduire le coût, il y a celui d’inciter les jardiniers à adopter de nouvelles conduites plus respectueuses de l’environnement. Un autre sujet qui revient fréquemment est celui de l’importance de la qualité de l’entretien des jardins, notamment aux yeux des pouvoirs publics. Au cours des années, des projets ont vu le jour, notamment celui de faire des animations de jardinage dans les écoles (des membres du jardin interviennent dans deux écoles) et un blog été créé. L’Assemblée générale est suivie d’un verre offert par l’association. Certains jardiniers amènent des plats préparés à partager.

Le mois de juin est celui du pique-nique annuel. À cette occasion, on installe un barbecue et chacun amène un ou plusieurs plats qu’il a cuisinés lui-même, si possible avec des légumes ou des fruits de son jardin. Les saucisses et l’apéritif sont offerts par l’association. Le maire y est convié ainsi que la presse locale. Lors de cette journée, on fait connaissance avec des jardiniers qu’on a moins l’habitude de voir. L'après midi se prolonge en discutant, certains en profitent pour montrer aux autres leur parcelle. Depuis quelques années, on fait correspondre la date de ce pique-nique avec celle de la manifestation «Bienvenue dans mon jardin» qui a lieu tous les deux ans, lors de laquelle les particuliers ouvrent leur jardin au public. Des jardiniers se proposent pour accueillir le public et faire visiter le jardin. Avant cela, on avait prévenu les jardiniers de cette manifestation et le Président avait demandé aux jardiniers par mail que les jardins soient beaux et propres. Lors d’une de ces journées, un député est venu, ainsi que l’adjointe au maire, déléguée aux affaires concernant la coordination de la Politique de proximité. Elle est repartie avec deux courgettes offertes par les jardiniers.

On fête également la galette des rois en janvier, à l’abri, dans une salle de la mairie aussi, prétexte encore une fois à boire un verre et partager un repas sur le pouce. Ce moment est particulier, tout comme celui de l’assemblée générale en décembre, car il correspond à la période où les interactions entre les jardiniers sont les moins nombreuses, période de repos du jardin mais aussi du repos de la vie collective.

L’autre grande manifestation liée au jardin et où le Bignon a une large part est «la fête des jardiniers» organisée en novembre. Elle n’était pas propre à ce jardin à l’origine, mais organisée par une association de commerçants d’un quartier de Saint-Malo, celui de Paramé, sous la houlette de la personne à l’origine de ce jardin collectif. Elle se déroule aussi dans une salle prêtée par la mairie .Depuis 2017, l’organisation a été reprise par un jardinier du Bignon. Tous ceux que le jardinage intéresse y sont conviés, en tant que visiteur ou en tant qu’exposant. Le but est d’échanger des savoirs mais aussi des plants, de développer des réseaux de connaissances et d’échanges. Y participent des jardiniers expérimentés qui amènent leurs boutures, des AMAP, des associations de défense écologique comme Bretagne vivante, un producteur de miel, d’autres associations de jardins collectifs de Saint Malo, etc. Le jardin du Bignon y tient un large stand et y organise des dégustations de soupes, une exposition photo, un concours de gâteaux, un concours de pesée d’un panier de légumes, une vente de courges au profit d’une association différente chaque année. A cette occasion également, on invite les politiques et la presse, ce qui est important pour le Président de l’association des Jardiniers du Bignon. Par ce moyen on affiche le dynamisme de l’association au détenteur du terrain, c’est à dire à la Mairie. Cela peut également permettre de réitérer des demandes d’aménagement pour le jardin à la mairie : barrière, point d’eau…

1-2-2 Au Jardin partagé de Dinan

Au jardin partagé de Dinan il y a deux réunions formalisées par an, ce sont l’assemblée générale et la réunion de planification des cultures. Une fois par mois, on pique nique le vendredi midi après la matinée de travail. Chacun amène un plat à partager. Quand le temps le permet, il a lieu dans le jardin. Quand il fait trop froid il se déroule dans une salle prêtée par la mairie. On décide ensemble le vendredi précédent quel menu on va faire avec les légumes qui sont susceptibles d’être récoltés à ce moment là dans le jardin. Ensuite on se retrouve le matin de ce vendredi et on prépare le repas ensemble. Une participation est demandée à ceux qui viennent, elle est de quelques euros; le but est de faire en sorte de ne pas dépasser cinq euros. Il n’y a pas de travail au jardin ce vendredi là.

1-2-3 Au Jardin de Rothéneuf

Au jardin de Rothéneuf, on refuse la formalisation, par conviction probablement chez ces personnes d’origines sociales et de convictions plus homogènes. Ils ont tous autour de 60 ans et sont souvent impliqués dans des mouvements associatifs pour l’environnement mais aussi pour des pratiques alternatives. Ils revendiquent tous une certaine autonomie, une envie d’échapper à des règles qui pourraient trop les contenir ou leur dicter leurs pratiques. Une réunion est organisée une fois par an mais se veut informelle, « entre copains », on mange ensemble et on en profite pour évoquer les projets du jardin. Si ces jardiniers sont des « potes », les Pot’agés, ce n’est pas pour autant que les discussions sont toujours consensuelles. Alice aurait voulu un mouton sur les parties communes mais les autres ne sont pas d’accord. Certains auraient souhaité construire une réserve d’eau, mais Anne-Claude qui cultive sur la parcelle la plus proche a eu peur que cela ramène des moustiques. Et sinon on se retrouve pour pique niquer, sans véritable organisation. Parfois cependant, on s’organise pour effectuer un travail particulier sur les espaces collectifs, comme ça a été le cas pour construire la cabane.

1-2-4 Au Jardin de la gare

Au jardin de la gare, on refuse également la formalisation du collectif mais pour d’autres raisons. La principale invoquée est que la constitution d’une association serait susceptible de rendre ces jardins visibles aux yeux des collectivités locales et pourrait donc faire courir le risque d’une expropriation. Les plus anciens jardiniers colportent ce message, même si certains plus jeunes le déplorent et trouvent qu’au contraire s’organiser en association pourrait plutôt permettre de défendre ce jardin. Une des jardinières a fait

venir un délégué des Jardinots204. Elle avait convié le plus de jardiniers de sa connaissance pour cette rencontre. Elle le faisait car des projets d’aménagement de la ville de Saint-Malo semblaient vouloir concerner les terrains occupés par ces jardins. Seuls deux sont venus. Le responsable des Jardinots est venu présenter l’Association et expliquer en quoi ils pouvaient se positionner pour la sauvegarde de ces jardins face à la Mairie. La plus ancienne des jardiniers de ce jardin était présente et a bien dit qu’elle était opposée à toute forme d’organisation, sous prétexte qu’elle était trop vieille pour cela. Les deux seuls autres jardiniers présents ne suffisaient pas à mettre en oeuvre une organisation en association.

Comme il n’y a pas d’organisation formelle, la vie en collectivité tient à la proximité géographique. On connait ses voisins de parcelles, ceux qui passent devant pour rejoindre la leur, mais pas forcément ceux qui ont un jardin plus éloigné. Quelques pique-niques sont organisés mais c’est plutôt rare et ils ont lieu entre ceux qui se connaissent, donc plutôt entre ceux qui sont voisins.

1-3 La formalisation de la vie en collectivité : un outil