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Mise en contexte relationnelle et report de grossesse

CHAPITRE 3 : LES ÉGLISES D'OCCIDENT ET D'ORIENT DEVIENNENT UN

2. Le corps en laboratoire

2.2. La stérilité

2.2.2. Mise en contexte relationnelle et report de grossesse

Il est donc peu étonnant de lire en consultant la section témoignage du site américain « Eggsurance

Inc.TM », que les femmes qui ont décidé de congeler leurs ovocytes soient âgées de 37 à 40 ans, et que le désir d'enfants et la possibilité de ne plus en avoir en raison de leur âge aient motivé leur décision. En congelant leurs ovocytes, ces femmes s'offrent une assurance de conserver la possibilité d'en avoir plus tard. Mais quand pourrions-nous interroger ? Le fait d'avoir des enfants ne repose pas uniquement sur des fonctionnalités biologiques ou technologiques. " Définitivement un jour, mais pas maintenant nous donne à lire la page de présentation ". « Une source complète en matière de congélation pour les femmes proactives qui veulent s'assurer d'avoir des enfants un jour, mais pas maintenant70. » Une sollicitation par la même occasion envers les femmes plus jeunes qui souhaitent ne plus s'inquiéter d'avoir la possibilité de donner naissance dans le futur, en dépit de « l'horloge biologique » puisqu'ayant des ovocytes congelés.

L'image montrée sur cette page nous semble éclairante de réalité. Elle est celle d'une femme enceinte seule, occupée par un arrière-fond mal défini s'apparentant à un paysage désertique. Le point de focalisation de l'image est placé sur le ventre de la femme, qui tête penchée regarde son ventre avec un sourire pouvant évoquer plusieurs réalités possibles : dont celle, que cette femme soit une mère porteuse, une mère réelle en devenir appartenant à un couple ou pas, indiscernable de ses orientations sexuelles floues qui s'intègrent parfaitement à l'arrière-fond qui l'est tout autant. Là n'est pas la question. Ce qui l'est cependant c'est que dans tous les cas de figure : cette femme est seule. Aucune personne significative ne figure auprès d'elle. Alors qu'anthropologiquement être mère sous-tend l'existence d'un couple, la présence et le soutien d'une personne aimée et aimante, et davantage. En quoi le changement reflété par l'image présentée sur ce site est-il révélateur du déplacement du rôle et du choix de la maternité au XXIe siècle ?

Les avancées féministes du XXe siècle ont permis aux femmes d'accéder aux institutions occidentales dont elles étaient autrefois exclues : professions libérales, postes de responsabilités sur le marché du travail, accès au monde de la finance. Ces changements ont permis du même souffle une redéfinition des responsabilités et des obligations à l'égard du foyer. De cet

affranchissement, quelque chose de l'ordre du rapport à la vie est demeuré coincé. Les réflexions, les prises de conscience et les actions entreprises par les femmes au siècle dernier ont eu une incidence sur le rapport entre les femmes, entre les femmes et les hommes et vice versa, et entre ceux-ci. La mise en contexte relationnelle que nous abordons est reliée à la vie du corps, ses liens relationnels et sexuels, dans la vie des femmes et des hommes. Les idées, les mentalités et les rapports entre les femmes et les hommes ont certes été discutés, revus et examinés. Mais les attitudes et les comportements fondamentaux procédant des rapports amoureux et plus spécifiquement ceux des hommes à l'égard des femmes dans une perspective parentale, perdure à opérer largement par le biais des ancrages de la famille nucléaire. Le rapport affectif intrinsèque des femmes avec leurs corps dans le cas où elle porte un enfant inspire les mêmes besoins qu'auparavant de la part de la mère et de l'enfant. Par contre, le lien relationnel de la femme à l'autre parent si l'on se réfère aux indicateurs de la page de présentation d' « Eggsurance Inc.TM », l'on retrouve plutôt une femme de plus en plus seule à répondre aux besoins du fœtus et à sa condition maternelle dans l'expérience de la grossesse et de la mise au monde.

Contrairement aux périodes historiques précédentes même si cela se présentait parfois essentiellement sous son aspect symbolique, la femme semblait pouvoir compter davantage sur une présence masculine, un entourage familial, une société où les enfants occupaient l'espace de la vie. Il apparait plutôt qu'actuellement les enfants se conçoivent dans une perspective individuelle en regard d'un choix et d'une décision des femmes, et que le rapport symbolique du lien au « collectif » se soit effacé en partie du monde occidental, telle que nous le renvoie cette image du site web : « Eggsurance Inc.TM ».

Les femmes parcourent ainsi leurs existences en étant certes plus autonomes, plus assurées de leurs corps, mais dont toute forme de sacralité semble avoir disparu. Précisons tout de suite, que ces propos ne sont pas un hymne psalmodiant aux façons de faire et au retour en arrière. Mais une reconsidération de ce qui semble s'être perdu dans l'oubli du respect du corps et du principe féminin. Dans les faits, les femmes apparaissent symboliquement plus seules à assumer le choix de la maternité. Peut-être est-ce le retour d'une intégrité profonde, un retour du balancier en quelque sorte qui exprime au grand jour une vérité historique, assumée au temps de la « Grande déesse », où le féminin sacré s'exprimait symboliquement dans la vérité singulière du corps des

femmes, où les assesseurs masculins étaient secondarisés ? Où peut-être est-ce réellement la fin du corps au sein d'une ère posthumaine ?

Anthropologiquement, dans l'état actuel des connaissances, les enfants naissent de la rencontre de gamètes des femmes et des hommes. Qu'est-ce qui fait alors que les femmes dans leurs désirs légitimes de sortir du modèle patriarcal qui les soumettaient à n'être qu'une partie d'elle-même, en étant mère et épouse, aient du mal au XXIe siècle à porter des enfants dans une présence reconnaissante et aimante de la sacralité du rôle maternel ? La réponse se trouve peut-être dans la question. La Vie du corps sur terre n'est pas considérée sacrée par un bon nombre de ceux qui ont formé l'intelligentsia dominante et dualiste depuis des siècles en Occident. La Vie du corps serait plutôt à vaincre, à conquérir, à maitriser, à combattre, à comprendre par les voies du raisonnement plutôt que d'en saisir et en comprendre le sens et le caractère sacré, ici-bas. Les penseurs moraux ont plutôt localisé l'Idée du sacré uniquement dans l'au-delà. Ce faisant, ils ont évacué le corps et ses liens avec l'Esprit, sans considérer et comprendre la nature des communications qui s'opèrent dans ses liens qui existent entre le corps et l'esprit et leurs apports dans la Vie incarnée.

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