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CHAPITRE II – OBJECTIFS ET MÉTHODE DE RECHERCHE

2.3 Méthode d’analyse des données

Une recherche sur les représentations de la différence sexuelle et de l’égalité semblait bien se prêter à une visée compréhensive et à une démarche inductive. Dans une dynamique de va-et-vient entre le terrain et l’analyse, cette démarche a consisté en une interprétation des représentations de chaque participant, en vue de construire une typologie de modèles culturels. Pour ce faire, nous avons adopté une stratégie mixte: le questionnement analytique et l’analyse à l’aide de catégories conceptualisantes (Paillé et Mucchielli, 2010).

Le questionnement analytique a été utilisé comme première méthode afin d’alimenter nos impressions qui se dégageaient après chaque entretien. Consignées dans un cahier de bord, ces questions ont constitué la toile de fond de l’analyse, qui a débuté dès la première entrevue : « Quel est le rapport du participant aux zones floues du genre? » « Comment prend-il position face aux mouvements féministes en tant que perturbateur de l’ordre social? » « Comment articule-t-il sa compréhension des différences sexuelles avec le concept de l’égalité? » « Quels sont les différents types de positionnement face aux frontières du genre? ». La transcription des entrevues s’est effectuée en même temps que le recrutement. Cette pause a permis d’identifier des pistes d’analyse qui nous semblaient prometteuses et d’orienter la formulation des questions en conséquence. La même souplesse a été appliquée quant à la taille du corpus : au départ, nous avions prévu rencontrer entre douze à seize participants. C’est la cohérence des modèles culturels obtenus qui a imposé cette marge de manœuvre. Ainsi, à la dix-huitième entrevue, nous avons pris la décision d’arrêter puisque nous considérions que chaque élément du corpus avait trouvé sa place dans le schéma (Michelat, 1975). Ce schéma est illustré à la page 45.

Une fois la série d’entrevues terminée, nous avons dressé, à l’aide des fiches de renseignements des participants, un inventaire classificatoire (tableau 1). Ces caractéristiques objectives ont servi à la mise en contexte de leurs propos. Un résumé des principaux traits caractéristiques des personnes rencontrées, accompagnés de une ou deux phrases typiques, a contribué à nous immerger dans les

histoires singulières des participants. Nous avons ensuite procédé à un examen vertical des données, en classifiant les unités de sens en fonction des thèmes de la grille d’entrevue.

L’étape suivante a amené notre analyse vers un niveau plus profond d’interprétation, par la théorisation des données. C’est ce que Paillé et Mucchielli nomment l’analyse à l’aide de catégories conceptualisantes. Selon cette méthode, les unités de sens deviennent des catégories sous l’effet de questionnements tels que : « Compte tenu de la problématique, quel est ce phénomène? » « Quelle est la logique sous-jacente de ces extraits? » « Quel est l’enjeu? ». Il s’agit de déceler, expliciter et reconstruire le sens des phénomènes qui se présentent à nous, et qui se cachent derrière ce qui paraît « ordinaire ». Les catégories ont ainsi été mises en relation afin de retracer les contrastes et les similitudes entre elles, puis de créer des liens plus généraux. Cette opération a conduit à la construction de modèles normatifs, soit des ensembles cohérents de croyances, de symboles, de valeurs, de normes, de rôles et de statuts. La forme en arborescence du logiciel NVivo a d’ailleurs facilité la mise en relation des éléments entre eux. Enfin, alimentée par de nouvelles lectures associées au contenu émergeant, nous avons dégagé un phénomène traversant de façon significative une partie importante du corpus.

Mentionnons que rares sont les individus qui livrent un discours exempt de contradictions, en particulier lorsque l’on aborde un sujet « sensible ». En effet, une personne peut fournir des réponses donnant lieu à de multiples configurations, et ancrant son discours dans plusieurs modèles à la fois (annexe 3), tel que l’exprime cette participante : « Tu me fais réfléchir et je me contredis une fois sur deux. Après ça il faut que tu démêles ce que j’ai vraiment voulu dire! (rires) » (Laura). Nous allons voir que cela témoigne des tensions et des changements à l’œuvre dans la société.

Conclusion

En résumé, notre recherche analyse et théorise les représentations de l’égalité à travers le prisme de la différence sexuelle. Plus précisément, nous questionnons le sens que les jeunes attribuent au concept d’égalité entre les sexes, à la lumière de leurs représentations de l’être femme et de l’être homme. La prise en compte de la distance critique à l’égard des catégories de genre expose une logique de conformisme ou d’aspiration au changement social chez les participants. Maintenant que les objectifs et la méthode de recherche ont été explicités, le prochain chapitre ouvre la voie de l’analyse en s’intéressant aux représentations des différences et ressemblances entre les sexes.

Tableau 1: Caractéristiques sociodémographiques des répondants

Pseudonyme Âge O ccupation/ Domaine d’études

Niveau de scolarité

atteint

Sexualité O ccupation du père Scolarité du père O ccupation de la mère de la mère Scolarité

Julien 23 Psychologie Étudiant/ 2e année Bac Hétéro Professeur au cégep Maîtrise T ravailleuse sociale Maîtrise

Jean-

François 22 Informatique Étudiant/ 2e année Bac Bi Conducteur de camions Secondaire 5 comptable Assistante Collégial

Philippe 24 Étudiant/ Politique Bac 1re année Hétéro Ouvrier et propriétaire d’immeuble

Ne sait pas Psychoéducatrice Bac Adam 21 Étudiant/ Biologie 2e année Bac Hétéro Distributeur de loterie Bac Réviseure Maîtrise

Mathieu** 29 chimique/ Ingénieur

Génie chimique Maîtrise Hétéro

Professeur

de cégep Doctorat Éducatrice Bac Francis 24 Philosophie Étudiant/ Maîtrise 1re année Hétéro Artisan du bois Bac Coordonnatrice d’un OSBL Bac

Martin** 29 Kinésithérapeute/ Kinésiologie Bac et diplôme de 2e cycle

Hétéro Ingénieur Maîtrise Archiviste Collégial

Jérôme** 26 T raduction Étudiant/ 3e année Bac Hétéro et ventes Finances Bac Au foyer Collégial

Gabriel 21 Étudiant/ Génie informatique

Bac

1re année Bi Infirmier Baccalauréat en informatique T echnicienne Collégial

Myriam 23 Physiothérapie Étudiante/ 3e année Bac Hétéro Ouvrier Secondaire 5 Concierge diplôme Pas de

Isabelle 23 Étudiante/ Médecine 2e année Bac Hétéro Physicien Doctorat Enseignante Maîtrise

Marie 26 Étudiante/ Médecine Maîtrise 2e année Hétéro Magasinier Secondaire 5 T echnicienne en administration Collégial

Janick* et** 30 T raductrice Maman à la maison/ T raduction

Bac Hétéro d’assurances Agent Secondaire 5 Secrétaire médicale Secondaire 5

Joanie** 22 Orthophonie Étudiante/ Maîtrise 1re année Hétéro Contremaître Collégial Enseignante (retraitée) Bac

Élizabeth 25 Communication Étudiante/ Maîtrise 1re année Hétéro Entrepreneur Secondaire 5 Au foyer Secondaire 5

Sophie 20 Étudiante/ Politique 1reBac année Hétéro Ingénieur (retraité) Maîtrise (retraitée) Secrétaire

Diplôme spécialisé

en secrétariat Cassiopée 29 mécanique/ Ingénieure

Génie mécanique Bac Homo

Ouvrier

agricole diplôme Pas de

T echnicienne

de laboratoire Bac Laura** 21 Étudiante/ Foresterie 1reBac année Ne sait pas Conducteur de camions Professionnel Secrétaire Collégial

* Cette répondante a un enfant

** La mère de ces répondantes et répondants est restée à la maison pour une durée variant entre 8 à 17 ans afin d’élever ses enfants.

CHAPITRE III - PORTRAIT DES REPRÉSENTATIONS DES