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Section II L’objectif de la durabilité des ressources naturelles

A. Les spécificités des devoirs constitutionnels étatiques thaïlandais

Les caractères spécifiques des devoirs constitutionnels étatiques thaïlandais sont d’abord à constater dans le fondement du devoir de l’État qui est la source traditionnelle de la

283 Procès-verbal de la Réunion du Comité de rédaction de la Constitution n°12, ayant lieu le 21 octobre 2015. ประชุมคณะกรรมการร◌่างรัฐธรรมนูญ ครั้งท◌ี◌่ ๑๒ ว◌ันพ◌ุธท◌ี◌่ ๒๑ ต◌ุลาคม ๒๕๕๘

284 Ce sont le devoir d’organiser une éducation obligatoire et gratuite pour tous les enfants pendant une période de

douze ans, le devoir de constituer un fonds d’éducation pour réduire la disparité éducative, le devoir d’assurer un service public de santé efficace et accessible par tous, le devoir d’assurer un accès aux services de base nécessaires à la vie quotidienne de la population en respectant le principe de développement durable, et le devoir de mettre en place des mesures et mécanismes efficaces de protection des droits des consommateurs.

La limitation des droits et libertés dans le but de la durabilité des ressources naturelles | 103

légitimation du pouvoir dans la société siamoise (1), et notamment dans sa normativité et l’opposabilité directe (2).

1. Le fondement du devoir de l’État :

Source traditionnelle de la légitimation du pouvoir

L’ancien État du Sud-Est était fondé sur la confusion entre les attentes politiques et la morale religieuse 286 . Le but principal du gouvernant était de diriger les gouvernés vers le Nirvana ou la libération de l’esprit des attachements. Le roi se prétendait le gardien des droits moraux. Il était qualifié de « Dharma-raja » ou « Roi vertueux ». Les académiciens soutiennent que la réception de la conception de « Deva-raja » ou « Roi divin » sous Ayutthaya n’était qu’un renforcement apporté à la conception de « Dharma-raja » 287 et que la royauté dans l’ancien Siam n’a jamais été une réelle monarchie de droit divin. La conception de la monarchie du droit divin en Asie du Sud-Est servait plus à lier le bouddhisme au royaume qu’à diviniser la personne du roi288. La légitimité du gouvernant résidait donc dans ses devoirs politiques encadrés par la moralité bouddhique. C’était donc le « dharma » ou la moralité bouddhique qui encadrait et limitait le pouvoir du souverain.

La conception de « Dharma-raja » est toujours actuelle mais s’applique notamment au roi, le chef d’État. Le roi Bhumibol Adulyadej (Rama IX) (1946 – 2016) déclara lors de la cérémonie de l’accession au trône289 qu’il règnerait avec le Dharma pour le bonheur du peuple siamois290. Ce dharma correspond au Dasavidha-rājadhamma291 (les dix vertus des régnants) issu de la philosophie bouddhique.

286 Thaned Apohnsuwan, Droits et libertés dans l’histoire politique de la Thaïlande, Bangkok, Presse de

l’Université de Thammasat, 2013, p. 41-45.

287 Theerayuth Boonmee, « L’histoire des pensées de la société thaïlandaise (période du début) : l’expansion et

l’évolution des pensées bouddhiques dans la société thaïlandaise », documents de la Conférence du 30 septembre 1986, pp. 59-61.

288 Voir Lorraine-Marie Gesick, Centers, symbols and hierarchies: essays on the classicla states of Southeast Asia.

New Haven, Conn., Yale University, 1983.

289 Discours donné le 5 mai E.B. 2493 (1955).

290 Suppalak Prangnakee, “We shall reign in righteousness for the benefits and happiness of Siamese people.” In

the auspicious occasion of the 70th anniversary celebrations of His Majesty’s Accession to the throne”, disponible en ligne sur http://click.senate.go.th/?p=21453.

291 Composée de 1) Dāna (charité) - le sacrifice de son propre Bonheur pour le bien-être du peuple ; 2) Sīla

(moralité) ; 3) Pariccāga (altruisme) ; 4) Ājjava (honnête) - L’accomplissement de ses devoirs avec sincérité ; 5) Maddava (gentillesse) - le non arrogance et l’évitement de diffamer les autres ; 6) Tapa (la maîtrise de soi) — l’accomplissement des devoirs sans indolence ; 7) Akkodha (non-colère) - la délibération du soi de toute haine et le maintien du calme dans les situations de confusion ; 8) Avihimsa (non-violence) - l’évitement d’exercer de la violence et de la vengeance ; 9) Khanti (Tolérance) ; 10) Avirodhana (Droiture) - le respect des opinions des autres, l’évitement des préjudices et la promotion de la paix et ordre social.

2. L’opposabilité directe des devoirs de l’État

L’opposabilité directe des devoirs de l’État est une innovation du paysage constitutionnel thaïlandais qu’apporte la Constitution de 2017. Dans le souci de garantir au peuple l’effectivité des devoirs de l’État, l’article 51 de la constitution prévoit « le droit,

reconnu à toute personne et à toute communauté, aux actions de suivi et de pression sur l’État pour l’accomplissement de ses devoirs constitutionnels, mais aussi le droit au recours contre

l’agent public concerné pour obtenir l’exécution en nature de la mesure, conformément aux

conditions et procédures définies par la loi ». Cette disposition serait, à notre avis, d’applicabilité directe. Certes, la Constitution prévoit que ce droit au recours devrait s’exercer conformément aux conditions et procédures déterminées par la loi, mais celle-ci correspondrait plutôt aux règles de procédure administrative.

Avant la Constitution de 2017, une mesure de contrôle était aussi prévue pour le devoir constitutionnel de la neutralité politique imposé aux agents publics conformément à l’article 70 de la Constitution de 1997, repris à l’article 74 de la Constitution de 2007. Au cas où un agent néglige ce devoir, l’intéressé a le droit de recours à ses supérieurs. Cependant, la portée dudit devoir est plus limitée.

Il convient aussi de poser la question de la légitimité des constituants de définir les politiques sous la forme des « devoirs de l’État » assortie de l’instrument de contrôle juridictionnel. La question de la légitimité se pose à deux échelons, à savoir au niveau des constituants et au niveau du juge. Il est vrai que la Constitution de 2017 a été approuvée par le référendum national le 7 août 2016. Les dispositions constitutionnelles sont donc présumées acceptées et voulues par la majorité du peuple thaïlandais. Néanmoins, le Comité constituant et l’Assemblée constituante ne sont pas élus, mais nommés par la junte militaire issue du coup d’État du 22 mai 2014. Par ailleurs, le juge est-il légitime à imposer l’obligation à l’État d’exécuter une action de nature politique ?

Il est aussi soutenable que cette légitimité se trouve dans la substance même de ces devoirs. Les devoirs environnementaux de l’État sont les principes quasi-universels de droit de l’environnement et ils sont d’intérêt général pour l’ensemble de la nation.

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