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Section II L’objectif de la durabilité des ressources naturelles

B. Les principes obligatoires mais non opposables

Les principes directeurs des politiques publiques sont des principes qui définissent le cadre du programme de gouvernement et donc aussi le programme d’adoption des lois. Des mécanismes de contrôle restent des mécanismes parlementaires. Ils ne créent pas de droits de recours contre l’État276.

Sous le régime de la Constitution de 1997, le Conseil des ministres appelé à gouverner, avant d’entrer en fonction, doit faire une déclaration de politique générale devant le Parlement. Lors de cette déclaration, il doit présenter son programme de gouvernement. Ce programme doit respecter les Principes directeurs des politiques publiques fondamentales définies par la Constitution277. Le Conseil des ministres est tenu aussi d’établir et soumettre au Parlement un rapport annuel d’activités qui doit traiter notamment des problèmes et obstacles rencontrés dans la mise en œuvre de son programme de gouvernement. Un Conseil économique et social national est aussi consulté au sujet du Plan national de développement économique et

social et des autres plans prévus par la loi avant l’adoption et publication de ces plans.

Les constituants de 2007 voulaient donner une force obligatoire plus prononcée aux principes directeurs. La Constitution de 2007 ajoute encore une autre exigence à la charge

276 Pairoj Chainam, Constitution : les dispositions et les documents politiques importants de la Thaïlande, Bangkok,

Université de Thammasat, B.E. 1976, p. 16.

277 Constitution du Royaume de la Thaïlande E.B. 2540 (1997), art.88, al.2 ; Constitution du Royaume de la

Thaïlande E.B. 2550 (2007), art.75: « Lorsqu’il expose ses politiques au Parlement conformément à l’article 211, le Conseil des ministres appelé à gouverner précise quelles activités il compte mener pour gouverner conformément aux principes directeurs relatifs aux politiques fondamentales de l’Etat visés dans le présent Titre de la Constitution ; il établit et soumet chaque année au Parlement un rapport d’activités traitant notamment des problèmes et obstacles rencontrés ».

La limitation des droits et libertés dans le but de la durabilité des ressources naturelles | 101

du Conseil des ministres qui est de préparer un Plan annuel d’administration de l’État. 278 Ce plan doit indiquer les mesures nécessaires à la réalisation du programme du gouvernement. Ce plan doit être en conformité avec les Principes directeurs des politiques fondamentales de l’État. Le Conseil des ministres est tenu aussi d’adopter un Plan de projets de loi279.

L’obligation de soumettre un rapport annuel d’activités, le Plan annuel d’administration de l’État et le Plan de projets de loi n’apparaissent plus dans la Constitution de 2017. Cependant, il est possible que ces mécanismes soient prévus plus tard dans les lois organiques qui seront adoptées dans les prochains mois, afin de donner plus de souplesse à certaines dispositions. Seule l’obligation du Conseil des ministres de déclarer le programme de gouvernement, qui doit être en conformité avec les principes directeurs relatifs aux politiques fondamentales de l’État, devant le Parlement est maintenue dans le texte même de la Constitution280.

La cour constitutionnelle thaïlandaise a toujours refusé de contrôler la conformité des lois aux principes des politiques publiques fondamentales de l’État281 . Par conséquent, ces principes ne feraient pas partie intégrante du bloc de constitutionnalité thaïlandais. La cour considère que « les principes des politiques publiques fondamentales de

l’État sont des principes définissant des orientations à long terme des politiques du pays dont le contrôle relève de la compétence du Parlement »282 et refuse donc de leur accorder le caractère normatif.

Il est à noter que le caractère contraignant de ces principes est difficilement soutenable. Les mesures de contrôle sont souples et prévues en amont. Le contrôle reste uniquement de nature politique. Par conséquent, nous pouvons conclure que les principes directeurs des politiques publiques peuvent tout de même contribuer de manière indirecte à l’adoption des règles de droit, si l’autorité au pouvoir est coopérative.

Les devoirs de l’État ouvrant l’action en justice contre lui en cas d’inexécution

Les devoirs de l’État sont une création des constituants thaïlandais de 2017 en réaction à la défaillance des pouvoirs publics de poursuivre les Principes directeurs des

278 Constitution du Royaume de la Thaïlande E.B. 2550 (2007), art.76, al. 1er. 279 Constitution du Royaume de la Thaïlande E.B. 2550 (2007), art.76, al. 2. 280 Constitution du Royaume de la Thaïlande E.B. 2560 (2017), art. 162.

281 Thaïlande, décisions de la Cour constitutionnelle n°37/2542 (1999), 6/2546 (2003), 52-53/2547 (2004). 282 Thaïlande, décisions de la Cour constitutionnelle n°36/2545 (2002), 37-39/2548 (2005).

politiques publiques fondamentales qui sont prévus dans les Constitutions de 1997 et 2007. À la différence des principes directeurs, les citoyens et les communautés qui prétendent à un intérêt direct d’un devoir constitutionnel de l’État ont le droit au recours contre les personnes publiques défaillantes, conformément à la loi. Il s’agit d’une obligation positive de l’État envers les citoyens, en comparaison avec la garantie des droits et libertés qui impose à l’État une obligation négative, c’est-à-dire s’abstenir d’intervenir de manière attentatoire aux droits et libertés283. Les constituants ont pris soin de sélectionner les droits sociaux et environnementaux, ainsi que les Principes directeurs les plus importants, nécessaires et réalisables sous la contrainte de budget de l’État et les ont transformés en devoirs de l’État.

Il y a en tout douze groupes de devoirs de l’État, définis aux articles 51 à 63 du projet de Constitution du Royaume E.B. 2017 284 . Certains devoirs de l’État en droit constitutionnel thaïlandais sont comparables aux droits économiques et sociaux en droit français.

Cette catégorie juridique est peu présente dans le droit interne des autres pays. Cependant, en droit international, la Cour internationale de justice a consacré un double devoir de vigilance et de prévention à la charge des États selon lequel « la vigilance et la prévention

s’imposent en raison du caractère souvent irréversible des dommages causés à l’environnement (…), ces normes doivent être prises en considération non seulement lorsque les États envisagent de nouvelles activités mais aussi lorsqu’ils poursuivent des activités qu’ils ont engagées dans le passé. »285

Nous examinerons d’abord les spécificités des devoirs constitutionnels étatiques thaïlandais (A), ensuite les différents devoirs de l’État concernant les ressources naturelles (B).

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