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CHAPITRE II : Le parcours littéraire de Jòrgi Reboul

A) LES POÈMES « SILVIANA CANTA » (OC, 1973)

En 1973, Reboul fait paraı̂tre dans la revue Oc une série de six textes inédits, datés de janvier à mai 1972 et regroupés sous le titre « Silviana canta »272. Ces textes sont

266 « Georges Reboul », La France latine, n°71, 3ème trimestre 1977, p. 6. 267 Le texte d’origine écrit (1938).

268 « Au mas dau retiràs », « Sens adieu… », et « Carles d’Eigaliera » : Aicí e Ara, n°5, novembre 1979, p. 40- 44. Le titre « Carles d’Eigaliera » renvoie à Charles Galtier dont ce nom était le pseudonyme.

269 « Per dos cambaradas de trabalh » : Occitanie 70. Les poètes de la décolonisation, anthologie bilingue, Honfleur, P. J. Oswald, 1971, p. 47-48.

270 « Li a una pichòra man » et « Per Gil » : La poésie occitane, édition bilingue, Paris, Seghers, 1972, p. 224- 227.

271 « Relargs » : Octave Prour, Relais latins. Anthologie en langue d’oc et langue roumaine [supplément au magazine Prométhée, n°4-5], Paris, Prométhée, 1973, p. 61-62.

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accompagnés d’un dessin d’Enric Paraire qui fera en 1985 la couverture du recueil Pròsas

geograficas (voir p. 173).

Ces poèmes sont d’une grande variété de thèmes. Trois sont clairement d’inspiration médiévale : « Auba de mon desir… » qui renoue avec la tradition des Albas ; « Un rigau aquest matin… » qui se termine sur une tornada humoristique ; et « Arnaud, Arnaud, mon Arnaudet… », largement inspiré du troubadour Arnaud Daniel. Les deux derniers textes, « La Libertat » et « Lei Camisards », respectivement dédiés à Antoine Richard et à Robert Lafont, sont quant à eux clairement engagés du côté des idées occitanistes postérieures à mai 1968 et dans la critique de la tradition félibréenne sclérosée. A# la fin du dernier poème, un commentaire succinct explique que ces six textes ont été repris en chansons par la fille du poète, Sylviane Reboul (Figure 27)273.

Figure 27. Sylviane Reboul, dans les années 1970274

Celle-ci a pu m’apporter quelques précisions supplémentaires sur certains de ces textes et sur leur devenir précis275.

Pour ce qui est du poème « Arnaud », il a été composé à l’occasion de la naissance du fils de Gérard Reboul, fils aı̂né du poète. Les deux premiers poèmes, « Auba de mon desir » et « Un rigau aquest matin… » sont quant à eux directement liés au cabanon que Reboul 273 La revue indique en bas de la page 8 : « Paraulas de Jòrgi REBOUL. / (Se canta amb musica de Silviana

REBOUL.) » {Paroles de Jòrgi REBOUL. / (Se chante sur musique de Sylviane REBOUL.)}.

274 Archives du CIRDOC, dossier auteur R-Reboul (Dos-A/R). La photo est collée sur une feuille A4 blanche, accompagnée d’un mot manuscrit de Reboul sur un bout de papier crème : « SILVIANA / CANTA… / son Paire ! » (son Paire !, souligné) {Sylviane chante… son Père !}.

275 Conversation téléphonique avec Sylviane Reboul du 13 mai 2018.

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possédait à Trets et où il goûtait aux plaisirs de la nature. Enfin, pour ce qui est du texte « Lei daufins » à la versification si complexe (engendrement des rimes d’une strophe à l’autre, reprise du deuxième vers de chaque strophe comme premier vers de la strophe suivante…), il pourrait avoir été composé — mais sans certitude de la part de Sylviane Reboul — à la suite d’un voyage que Reboul avait fait en Grèce en 1972 et au cours duquel il avait vu des dauphins suivre le bateau sur lequel il avait pris place.

Selon les souvenirs de Sylviane Reboul, la plupart des textes de « Silviana canta » ont d’abord été écrits par son père avant qu’elle ne décide de les mettre en musique. Ce serait notamment le cas pour « Un rigau aquest matin », « Lei daufins » ou encore « Les camisards ». Elle m’a indiqué avoir aussi chanté d’autres poèmes, non repris dans le recueil, comme « Partirai »276 ou « Viro la rodo »277.

Sylviane Reboul a interprété à de nombreuses reprises en public les poèmes de son père, dans la période où elle était âgée de 15 à 21 ans environ. Les débuts de cette carrière musicale semblent dater des années 1970-1971, comme le suggère un document d’époque publié par Lo Calen278 : « UNE NOUVELLE CHANTEUSE nous est née, Sylviane REBOUL, qui avec ses chansons (poèmes de Jorgi REBOUL) a déjà séduit le public de Saint- Mitre, Martigues, Peynier, Gardanne, Marseille… »

A# cette époque, Sylviane Reboul était très impliquée dans le mouvement occitaniste post-mai 1968, tant par le biais du Centre dramatique occitan d’André Neyton auquel elle participait que par celui des balètis qu’organisait le groupe de musique occitane Mont- Jòia#. La mise en chansons par Sylviane Reboul des poèmes de son père s’inscrit ainsi clairement dans la mouvance de la Nòva cançon occitana {Nouvelle chanson occitane}279.

D’après Sylviane Reboul, Jean-Marie Carlotti#, l’un des membres fondateurs de l’association Mont-Jòia, avait un temps envisagé d’enregistrer toutes ces chansons dans le studio du groupe mais le projet n’a finalement pas abouti hormis pour quelques-unes d’entre elles, regroupées en 1984 dans le recueil « Curriculum Vitae » dont il sera question

infra (voir p. 166 et s.).

On peut malgré tout noter au passage que par la suite sortiront trois disques dans lesquels figureront des textes de Reboul : d’abord Poèmas occitans per uèi, lecture de poèmes par André Neyton où figure le poème « Per dos cambaradas de trabalh » ; puis deux disques de chansons : d’abord Anita Anita dans lequel Jan-Marie Carlòtti met en

276 Initialement publié dans les revues Marsyas (n°200-201, août-septembre 1937, p. 944) et L’Armana

marsihés (1937, annexe Quinquet, p. 31), puis réédité plusieurs fois, notamment dans le recueil Terraire nòu : pouèmo, Aigues-Vives, Marsyas, 1937, p. 88-89.

277 Initialement publié dans Sènso relàmbi, Aigues-Vives, Marsyas, 1932, p. 66-71.

278 Lou Calen, « Bref de nos activités – Année universitaire 1971-1972 », Archives du CIRDOC, CQ 623 12 (32 lettres envoyées à Ismaël Girard).

279 Pour une étude détaillée de la Nòva cançon occitana, voir Philippe Martel, « La Nòva Cançon occitana : révolution en occitan, révolution dans la chanson occitane ? », Lengas, n°74, 10 décembre 2013, [En ligne : http://journals.openedition.org/lengas/303].

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musique et chante le poème « Tot es van » ; puis En balans de Gaël Hemery qui interpètre le poème « Arnaud » sur une musique de sa composition280.