• Aucun résultat trouvé

Les implications méthodologiques de la démarche du projet

Nous abordons maintenant les implications méthodologiques de notre démarche de recherche. Celles-ci sont déterminées par le cadre théorique et épistémologique présenté précédemment et la nécessité de recourir à l’analyse d’une situation particulière pour apporter les déterminants de la contextualisation du métier de contact.

2.1.

Le choix d’une méthodologie qualitative

Pour aborder, la partie empirique de notre projet de recherche, il nous a fallu définir les limites de celui-ci et déterminer la pertinence des informations recueillies ; en parallèle, notre problématique s’est construite dans une reformulation du projet au fur et à mesure de l’analyse. L’analyse théorique à laquelle nous avons soumis la notion de culture et compétence situées nous semble ainsi ouvrir notre champ d’investigation. Nous avions donc un cadre théorique, un minimum d’a priori théoriques comme le préconise Eisenhardt [1989], la volonté de ne pas se laisser emprisonner dans une théorie afin d’élargir le champ de notre investigation [Glaser & Strauss, 2009] et une expérience de projet collectif de recherche, un minimum d’a priori sur l’appréciation de nos compétences en matière de construction d’un projet de recherche. Dans notre projet, cette double approche devrait être une opportunité qui permette un enrichissement des connaissances [Thiétart & coll., 2003]. Notre démarche vise à construire des connaissances sur la dialectique « culture-compétence ». Nous n’avions aucune hypothèse formulée et nous ne connaissions pas à l’avance les résultats que nous souhaitions découvrir.

« La validité d’une méthode pose la question de savoir si oui ou non cette méthode permet de mesurer ou d’étudier ce qu’elle prétend mesurer ou étudier. Les résultats d’une méthode n’auront de valeur scientifique que si l’on peut déclarer évidente la

validité de la méthode employée pour les établir et les mesurer » [Gruère, 1991, p. 38].

Le choix d’une méthodologie qualitative se justifie par notre projet de recherche et les matériaux nécessaires à la confirmation ou l’infirmation de nos propositions que nous formulons aujourd’hui de la façon suivante :

 La légitimité et la professionnalisation de la fonction de l’ACC (Agent en Contact avec la Clientèle) s’analyse au regard des positions adoptées par celui-ci dans et hors de l’organisation.

 Par leur légitimité et l’exercice de rôles, ils structurent et modifient leur environnement en le transformant en objet de décision.

 Au quotidien, ces objets de décision s’accumulent et s’articulent entre eux selon un processus dialectique de mise en forme d’une politique R.H. et d’ancrage dans le quotidien de cette politique par un « bricolage » ou un ajustement créé dans la confrontation des représentations avec les porteurs de problèmes et de préoccupations.

Ainsi, l’approche de la dialectique « culture-compétence » nous semble en cohérence avec une approche qualitative construite à partir des discours des acteurs sur les déterminants de la contextualisation de la fonction et des rôles de l’ACC dans le développement des compétences implicites.

Le terme de qualitatif est retenu ici dans son acceptation la plus courante portant sur la nature des données recueillies, principalement, des données qualitatives [Glaser & Strauss, 2009 ; Miles & Huberman, 2003]. La démarche peut être aussi qualifiée de qualitative par sa visée exploratoire et non confirmatoire [Silverman, 1970 ; Brabet, 1988 ; Thiétart & coll., 2003]. Ainsi, la démarche que nous avons adoptée, l’étude de cas, est celle qui nous est apparue la plus appropriée à la compréhension et à l’interprétation de la dualité « culture-compétence » comme phénomène social complexe [Yin, 2008].

Si nous avons opté pour ce type de recherche, c’est par le souci d’une meilleure compréhension, explication et description des éléments composants la relation. Eu égard à la définition même du concept de la culture et de la compétence : s’agissant de deux processus dynamiques et non

pas d’un état statique, nous ne pouvons pas éluder les aspects dynamique et temporel dans le cadre de notre recherche ainsi que l’évolution chronologique de certains éléments.

Nous visons une recherche mixte s’axant sur le contenu et le processus. Nous cherchons à comprendre, décrire et expliquer des phénomènes et des relations en nous inscrivant dans le contexte et la dynamique dans le temps des relations étudiées. Nous retenons la méthode de l’étude de cas qui s’avère la plus appropriée dans le cadre de notre recherche.

En ce sens Hlady-Rispal [2002] note que « La compréhension de processus relationnels, de modes de création ou de fonctionnement organisationnels, de décisions entrepreneuriales, l’examen des faits et des perceptions que les acteurs attachent aux actions, justifient pleinement le recours à cette stratégie de recherche à part entière ».

Objectif et question de recherche Hypothèses implicites et contrôle Investigations et exemples

Étude de cas Exploration, compréhension,

générer des hypothèses sur le pourquoi et le comment Capacité du chercheur à se distancier au moment de l’analyse Le groupe, l’organisation, les relations inter- organisationnelles

Tableau 3-Hypothèses et exemples associés à l’utilisation des études de cas [Wacheux, 1996, p. 92]

2.2.

Le cadre général du processus de sélection d’une étude de

cas

L’étude de cas est définie par Yin [2008] comme « une enquête empirique qui examine un phénomène au sein de son contexte réel lorsque les frontières entre phénomène et contexte ne sont pas clairement évidentes et pour laquelle de multiples sources sont données ». De même, dans la partie consacrée aux nouvelles perspectives de la recherche en G.R.H. de l’ouvrage « Repenser la G.R.H. », les auteurs présentent l’étude de cas comme la démarche adaptée à la recherche à visée compréhensive et instrumentale.

« Si l’on accepte que l’un des objectifs de la recherche en G.R.H. est la meilleure compréhension des évènements et des processus concernant les salariés dans le

cadre du travail, l’étude de cas peut apparaître comme l’une des démarches de recherche qui permet de mieux approcher la complexité organisationnelle » [Bournois & al., 1993, pp. 232-233].

La rhétorique managériale use abondamment de l’étude de cas, comme autant de support à la diffusion des modes managériales et des « bonnes pratiques » [Midler, 1986, Abrahamson, 1991, Keiser, 1997]. Ainsi, l’étude de cas approfondie doit constituer une critique des cas habituellement accessibles aux chercheurs. Notre démarche s’est donc efforcée de se centrer sur l’analyse d’une seule entreprise, la SNCF, comme un système complexe [Yin, 2008] afin de mieux comprendre l’exercice et la conjugaison des rôles des agents de métiers de contact avec la clientèle.

L’examen des cas menés montre que ceux-ci sont parfois structurés pour défendre une thèse et une seule et pour élaborer des recettes pour « reconnaître » le bon manager ou le bon leader. Les « récits bien ficelés » [Padioleau, 1982] présentent ses deux caractéristiques des cas illustratifs à visée d’établissement de recettes. La présentation du développement et de l’analyse d’une situation complexe proposée doit permettre au lecteur de se forger une interprétation différente. Notre démarche a été de tenter de répondre à un critère de complétude, par l’analyse d’un cas dans son épaisseur et sa richesse. Ce critère n’a pas toujours été facile à rendre opérationnel, cependant Yin le définit ainsi :

« For case studies, completeness can be characterized in at least three ways. First the complete case is one in which the boundaries of the case – that is, the distinction between the phenomenon being studied and its context – are given explicit attention. If this is done only mechanically – for example, by declaring at the outset that only certain time intervals or spatial boundaries will be considered – a nonexemplary case study is likely to result. The best way is to show, through either logical argument or the presentation of evidence, that as the analytic periphery is reached the information is of decreasing relevance for the case study. Such testing of boundaries can occur throughout the analytic and reporting steps in doing case studies. A second way involves the collection of evidence. The complete case study should demonstrate convincingly that the investigator expended exhaustive effort in collecting the relevant evidence. The documentation of such evidence need not be placed in the text of the case, thereby dulling its content. Footnotes, appendixes and the like will do. The overall goal, nevertheless, is to convince the reader that very little relevant evidence remained untouched by investigator,

given the boundaries of the case study. This does not mean that the investigator should literally collect all available evidence – an impossible task – but that the critical pieces have been given “complete” attention. Such critical pieces, for instance, would be those representing rival propositions » [Yin, 2008, pp. 148-149].

Dans notre démarche nous avons tenté de sélectionner un cas qui réponde partiellement à ce critère : si aucun cas ne répond totalement à ce critère, par ailleurs problématique, nous avons sélectionné un cas pour son caractère d’originalité.

Cependant une fois le cadre général du projet de recherche fixé et compte tenu des limites existantes nous avons accordé un temps et un soin particuliers au choix du terrain d’étude. Le choix d’un cas s’est fait sur la base d’un échantillonnage théorique, représentatif de notre projet de recherche. Les raisons qui ont déterminé notre choix sont multiples toutefois ce choix a été aussi imposé par des contraintes particulières.

L’intérêt de « notre cas » est qu’il s’agit d’une étude de cas multiples par la complexité des activités et la diversité des pratiques analysées. Si nous mettons en avant les notions de complexité et de diversité, c’est aussi que ce cas se déroule à un moment singulier de l’histoire de la SNCF : la préoccupation des dirigeants portant sur l’unicité de l’entreprise, sa structure de direction et certains processus décisionnels, une mise en cohérence des activités dans le respect des différences de chacune et une singularité dans son modèle stratégique.

Notre démarche vise donc à développer une étude de cas proche de celui dont Yin [2008] a fait la théorie. Nous avons mis en œuvre une approche par entretiens tout au long de la phase de compréhension des rôles de l’agent en contact avec la clientèle dans le groupe afin d’analyser la représentation de certains acteurs impliqués dans ce changement structurel.

Nous avons aussi choisi de représenter une entité organisationnelle complexe sous la forme d’un système comportant une frontière et composé d’acteurs rationnels en interaction. Cette entité organisationnelle n’est pas toujours aisée à appréhender. Qualifiée parfois d’entreprise, de groupe ou d’organisation, la multiplicité des termes conjugués à leurs polysémies ne facilite pas la construction des représentations de ce système.

3. Le cadre méthodologique du récit du cas : la collecte et l’analyse

Outline

Documents relatifs