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PREVU REALISE Exécution 24

2.4. Les entretiens d’experts

Cette étape avait pour but de repérer des informations pertinentes obtenues auprès de personnes- clés afin d’affiner le guide d’entretien semi-directif et d’en faciliter l’interprétation.

Ces entretiens ne constituent pas en soi une étape permettant d’obtenir des résultats valides sur la culture cheminote ; les personnes interrogées ne constituent pas un échantillon représentatif, ni des dirigeants passés ou actuels de la SNCF, ni d’une vision dirigeante ou politique de l’entreprise.

Toutefois quelques idées fortes peuvent être soulignées parce qu’elles nous ont guidés dans la recherche ou parce qu’elles reviennent de manière assez récurrente.

Deux séries d’entretiens ont été menées

- auprès d’experts « historiques » : Ils sont encore ou ont été à la SNCF ; ils peuvent également lui avoir été extérieurs mais dans une position proche du chemin de fer ; ils ont été à un ou plusieurs moments des témoins d’événements importants de l’entreprise ; ils peuvent mettre en évidence des constantes de l’entreprise.

- auprès d’experts « stratégiques » : ils occupent actuellement des positions où une vision stratégique de la SNCF se développe ; ils peuvent mettre en évidence des enjeux actuels importants de l’entreprise.

Sans faire un rapport de ce qui a été présenté par ces différents experts aux situations, parcours et visions forcément différents et non représentatifs au sens statistique du terme, quelques points peuvent être soulignés car ils ressortent nettement des entretiens malgré la diversité des personnes rencontrées.

Experts historiques

- La SNCF est un monde fermé : Les experts nous décrivent la SNCF comme un monde fermé vis-à-vis de l’extérieur. On y fait peu attention à l’autre qui est à l’extérieur, que ce soit les clients ou les acteurs autres. De ce fait la SNCF ne voit pas toujours les évolutions venant de l’extérieur. Elle a tendance à les subir plutôt qu’à les initier. Seuls les grands chantiers techniques, permettant de mieux produire, sont considérés comme des domaines de changement possibles ou du moins, ceux auxquels on reconnaît in fine une légitimité.

- Elle vit sur elle-même, c’est ce que représente la notion de corps. A l’intérieur elle est suffisamment cloisonnée pour croire vivre dans un monde qui se suffit à lui-même. C’est un lieu où on « joue », à partir du moment où les principes de sécurité sont respectés et où le corps n’est pas remis en cause. Les relations y sont alors assez bonnes. On intègre les personnes, on y développe traditionnellement un vrai esprit d’appartenance qui fonctionne encore pour les jeunes.

La SNCF demeure un lieu où peut se vivre une mission, un sens du service public, pas trop étroitement conditionné par des considérations économiques de base qui remettent en cause un bon exercice du métier. Ce corps est tellement fort que parfois l’extérieur, dans l’histoire, ne manquera pas, dans ses rapports avec la SNCF de « flatter » ce corps social.

La notion de lutte y est capitale, c’est une des causes (au sens juridique du terme) de la solidarité, qui se nourrit d’une perception permanente d’un environnement menaçant auquel elle essaie moins de s’adapter que de résister.

- Pourquoi changerait-elle ? Elle a une culture industrielle de permanence, de production, au mieux de ce qui peut être fait. Cette difficulté à changer en fonction des événements extérieurs et des changements de contexte est appelée par certains une « allergie » au changement. Cela s’explique d’une part par la solidité du corps, le sentiment

d’appartenance : on trouve tout à la SNCF, pourquoi aller voir ailleurs ? La qualité de l’esprit interne est suffisamment forte pour que le regard à l’extérieur ne soit pas pertinent.

Plus encore, cette attitude vis-à-vis du changement paraît liée selon les interlocuteurs à une culture industrielle, une culture de la production où des règles ainsi qu’une compétence certaine garantissent le meilleur résultat possible. Cette culture privilégie la qualité du fonctionnement du système à son utilité ou, du moins, la dernière paraît inéluctablement dépendante de la première.

Cette approche industrielle rend le management particulièrement difficile, comme le dit un interlocuteur : les cadres savent faire de la technique, ils peuvent faire du management mais il leur est difficile de faire les deux simultanément. Il existe un tel sentiment de qualité, de maîtrise du métier et du chemin de fer que toute perspective de changement est perçue comme un piège.

- Mais les experts historiques expriment également, chacun avec sa propre expérience et ses mots singuliers, un sentiment général : L’entreprise doit changer, c’est un impératif urgent et vital pour tous les interlocuteurs étant donnée la situation.

Ils décrivent l’entreprise comme un corps social meurtri. Il l’est du fait des conflits qui sont considérés comme des blessures remettant en cause la solidité, l’intégrité de ce corps social, bien qu’ils découlent du souci de sa défense. Il l’est ensuite du fait des multiples attaques qu’il perçoit subir sans jamais vraiment les affronter.

D’aucuns soulignent que cette difficulté à affronter l’extérieur, cette « allergie » au changement pourrait très bien conduire l’entreprise à rejoindre la situation de ces autres chemins de fer nationaux dont la SNCF s’estime pour l’instant si éloignée.

Experts stratégiques

Le discours des experts stratégiques est fortement marqué par trois considérations.

La SNCF va avoir à faire face à des enjeux majeurs, internes et externes presque simultanément : des besoins d’investissement très forts pour maintenir le parc de matériel, le changement démographique de l’entreprise, la concurrence et l’ouverture à l’Europe, le problème actuel du fret.

De façon générale, ces changements posent le problème d’une réinvention d’un service public adapté à ces nouvelles donnes. Nul ne sait ce que seront les transports ferroviaires dans quelques années mais il leur paraît certain que ces changements subis par l’entreprise devront se traduire par des changements profonds de comportements à l’intérieur de l’entreprise. De nombreuses « constantes » de la maison depuis des décennies leur paraissent devoir être remises en cause par ces évolutions : importance de la fonction de gestion, changement des règles de gestion du personnel, évolution du rôle de l’encadrement.

Face à ces évolutions, les points forts relevés concernent la nécessité de beaucoup embaucher pour faire face aux évolutions démographiques et rompre ainsi avec la tendance de la dernière décennie. Un autre point fort pourrait venir de la prise de conscience par l’entreprise de ses forces sur ce marché qu’elle craint tant : « combien savent que la SNCF est le premier groupe de services en Europe ? »

2.5.

Les groupes miroirs

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