3. Conceptions et pratiques déclarées de professeurs d‟économie-gestion de BTS en Guadeloupe,
3.3. Analyse transversale des résultats
3.3.2. Les conceptions des professeurs sur les étudiants
Comme nous venons de le voir, les professeurs font part d‟un « manque d‟ouverture » chez
les étudiants qu‟ils mettent en relation avec les difficultés rencontrées par certains étudiants
pour voyager hors de la Guadeloupe. Dans le même temps, les professeurs leur reconnaissent
des qualités certaines, comme leur implication lors des stages, mesurée par des retours positifs
venant des tuteurs de stage (question 7), vue comme témoignant d‟une importance accordée
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par les étudiants à leur insertion professionnelle. De même, ils relèvent la motivation et
l‟enthousiasme des étudiants engagés dans la formation, facteur de réussite. Néanmoins, ces
unités d‟enregistrement sont relativement rares, les professeurs insistent sur trois principales
difficultés que nous étudions successivement.
Tout d‟abord, un manque de culture générale est noté. Ainsi un professeur en BTS tourisme
que « la culture générale, ça manque ! […] il y a des manques pour moi au niveau de leur
culture qui est désagréable » (L-HT2). Ceci est relié par un professeur du BTS assistant de
manager au manque d‟ouverture au monde (déjà évoqué) et à un manque d‟éveil face à
l‟actualité : « leur problème essentiel réside dans le fait qu‟ils ne suivent pas, à mon avis
suffisamment, les informations… voilà. Ce qui fait que bon, [grimace] ils sont un petit peu
déconnectés si je peux dire » (L-PB3).
La deuxième difficulté provient du manque de maîtrise de la langue écrite, unité
d‟observation apparue à plusieurs reprises (par exemple aux questions 6 et 7). Certains
professeurs estiment que les étudiants ont du mal à comprendre certains documents, à
argumenter, à exprimer leur point de vue et ont parfois un vrai manque de vocabulaire.
Nous regroupons un certain nombre d‟éléments relatifs au comportement des étudiants dans
un troisième groupe de difficultés. Il va s‟agir à la fois d‟un manque de maturité et d‟un
manque de motivation.
Le manque de maturité peut être mis en relation avec la question de l‟autonomie des
étudiants, caractéristique ambivalente pour les professeurs enquêtés. Certains professeurs
déplorent un manque d‟autonomie, attribué au passé scolaire des étudiants : « […] je me rends
compte aussi […] qu‟en Première et en Terminale, au moins dans les sections tertiaires,
STMG en ce moment […] l‟habitude de travail n‟est pas donnée ! » (L-PB1). La formation
BTS semble placer les étudiants dans un cadre d‟apprentissage proche de celui existant en
lycée, en privilégiant l‟encadrement : « [les étudiants] choisissent cet encadrement et
forcément cet encadrement signifie un peu moins d‟autonomie ! » (E-CM).
Ainsi, l‟acquisition de l‟autonomie des étudiants est contrariée par l‟encadrement et
l‟accompagnement, pourtant décrits comme des points forts de la formation par les
professeurs enquêtés, et qui seraient recherchée par les étudiants. D‟ailleurs, certains des
étudiants qui sont présents en BTS ont d‟ailleurs été en situation d‟échec dans le premier
cycle universitaire :
Page 160 sur 603 « On… récupère, enfin on… encore une fois si vous me permettez l‟expression hein ! De temps en temps effectivement des étudiants qui euh… après un échec d‟une ou deux années à l‟université parce qu‟ils étaient perdus dans cette foule et qu‟ils avaient du mal à s‟organiser de manière autonome pour pouvoir préparer les examens » (L-HT3).
De fait, compte tenu de la pression rencontrée pour l‟admission en BTS en Guadeloupe,
certains lauréats des baccalauréats professionnels s‟inscrivent à l‟université, où ils connaissent
malheureusement un échec fréquent. Nous reviendrons sur l‟échec des baccalauréats
professionnels dans l‟enseignement supérieur dans le chapitre 5.
Un des professeurs s‟interroge d‟ailleurs sur la relation entre le manque de motivation
(marqué par un manque de travail) qui pourrait être liée à une orientation par défaut en BTS
assistant de manager (c‟est nous qui soulignons) :
« Le problème c‟est que souvent […] ils ne font rien. Peut-être parce qu‟ils considèrent que bon… ils sont dans une voie de garage -je n‟en sais rien-, et voilà ! Ce qui fait que… bon, s‟ils parviennent en BTS, et pour certains d‟entre-eux, […] ça arrive non par forcément parce qu‟ils étaient bons ! Mais simplement parce que, bon, il y a de la place et que, bon, on les a pris ! [Ils] ne parviennent pas souvent à suivre, euh et en particulier c‟est ce qui est plus bête, ne parviennent pas à suivre dans des matières [respiration] qu‟ils ont vu quand ils étaient euh… au, au secondaire, voilà ! ». (L-PB3)
A l‟appui de cette dernière formation, le professeur L-PB3 note que bien souvent des
étudiants n‟ayant jamais eu de cours d‟économie-droit au Lycée, s‟en sortent mieux que ceux
qui en avaient déjà eu. Un autre professeur du BTS assistant de manager, L-PB1, note qu‟« au
moins un quart des étudiants sont là plus ou moins par défaut ! C‟est un peu dommage ! ». Le
constat semble analogue dans la filière « tourisme » où la professeure L-HT1 remarque à la
fois que les étudiants la rejoignant ne sont pas les meilleurs et qu‟ils ne sont pas fixés sur leur
avenir professionnel :
« Ici spécifiquement, alors je vais quand même vous dire quelque chose que… je… j‟ai vraiment observé ici, c‟est que les élèves que nous recrutons euh… euh… sont ceux finalement de la fin de la liste ! […] Oui ! Oui ! Oui ! C‟est ceux de la fin du classement ! Qui n‟ont pas forcément mis en premier vœu les BTS de tourisme, ils ont mis trois quatre autres BTS, ce qui veut dire aussi qu‟ils ne sont pas très fixés. […] Ils sont un peu là par défaut pour les BTS de tourisme, je ne vais pas me permettre de parler d‟autres BTS, donc pour les BTS de tourisme certains sont là par défaut. Et, c‟est davantage vrai en BTS
Page 161 sur 603 « ventes et productions touristiques » à mon avis qu‟en BTS « animation et gestion touristiques locales ». (L-HT1)
En définitive, nous avons l‟impression que le manque de motivation constaté par les
professeurs semble être du à une orientation non choisie, avec des étudiants qui, comme le dit
le professeur L-HT3 sont présents en se demandant pourquoi.
La question sur les difficultés quotidiennes rencontrées par les professeurs lors des
apprentissages, entraine des durées de réponses variables dont le tableau 3.14 rend compte.
Interlocuteurs L-PB1 L-PB2 L-PB3 L-HT1 L-HT2 L-HT3 E-CM
Durée 8 min 42 s 2 min 27 s 1 min 13 s 5 min 35 s 1 min 4 s 2 min 28 s 1 min 49 s