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Des conceptions et représentations sociales aux rôles des stages dans la formation supérieure

2. Le cadre théorique

2.1. Des conceptions et représentations sociales aux rôles des stages dans la formation supérieure

Pour rendre compte de ce que nous souhaitons observer chez les professeurs et les étudiants

de BTS, nous avons relevé les termes de représentations sociales et de conceptions que nous

allons mettre en discussion dans cette sous-partie.

2.1.1. Les conceptions et les représentations sociales

À notre connaissance, la paternité du concept de représentations en sciences humaines et

sociales, revient à Durkheim. Il a été le premier à les évoquer à travers l‟étude des religions et

des mythes essentiellement : « les premiers systèmes de représentations que l‟homme s‟est

fait du monde et de lui-même sont d‟origine religieuse » (Durkheim, 1912, 1991). Au XIX

siècle, Durkheim (1912) met en exergue le concept de représentations collectives, en veillant

à les distinguer des représentations individuelles. Selon lui, au sein d‟une société, chaque

individu interprète ce qui se passe autour de lui et élabore des représentations du monde social

et physique ainsi que de lui-même et des activités accomplies. Ces représentations

comprennent une partie individuelle renvoyant à l‟interprétation personnelle et subjective,

variable donc d‟un individu à l‟autre, et une partie beaucoup plus collective faisant appel aux

idées partagées avec d‟autres individus et/ou groupes sociaux. Les représentations collectives

sont envisagées comme une forme de connaissance, socialement élaborée et partagée (savoir

naïf), ayant une visée pratique et concourant à la construction d‟une réalité commune à un

ensemble social. Celles-ci permettent alors aux individus de vivre ensemble sans être réduits

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à vivre selon les seules interprétations individuelles. Durkheim (1912) considère aussi que la

partie individuelle des représentations est plus instable et transitoire tandis que la partie

collective est plus constante et ancrée. L‟importance et l‟utilité des représentations

(individuelles et collectives) est aussi reconnue dans la littérature scientifique développée à ce

sujet. Comme le précise Jodelet (1989), les individus ont toujours besoin de savoir à quoi s‟en

tenir avec le monde qui les entoure et à le maîtriser physiquement ou intellectuellement. Pour

ce faire, ils élaborent des représentations individuelles ou recourent à des représentations

sociales (savoir naïf ou du sens commun) qui leur servent de repère pour savoir comment

s‟ajuster, se conduire, ou bien identifier et résoudre des problèmes. Ceci est aussi valable pour

les représentations des acteurs (enseignants et élèves) dans le milieu scolaire. Comme le

précise Ecalle (1998), en tant que milieu socio-institutionnel, l‟école met en interaction des

individus qui développent, chacun de part et d‟autre, un ensemble d‟idées sur eux-mêmes, les

autres, et leur environnement commun, autrement dit un faisceau de représentations multiples.

Enseignants et élèves tentent de comprendre leurs activités, interactions et environnement.

Pour ce qui est des enseignants, de nombreux travaux cités dans la note de synthèse de

Crahay, Wanlin, Issaieva et Laduron (2010), ont été consacré à la place et au rôle que peuvent

avoir les représentations des enseignants.

Dans le cadre de notre étude sur les professeurs (chapitre 3), nous nous appuyons sur ces

travaux et sur ce que les chercheurs anglo-saxons appellent « teachers beliefs », « teacher

knowledge » ou « teacher knowledge and beliefs » (Calderhead, 1996; Kagan, 1992; Pajares,

1992; Verloop, Van Driel et Meijer, 2002; Woolfolk Hoy, Davis et J.Pape, 2006). En effet,

des termes variés sont employés pour mobiliser le concept de « teachers beliefs » : croyances,

connaissances, conceptions, représentations, perceptions etc. Bien que les définitions

abondent pour alimenter la distinction entre ces différents termes, ces derniers demeurent

difficilement différenciables (Crahay et al. 2010). À l‟instar de Pajares (1992), nous

considérons dans le cadre de ce travail qu‟il est possible de les utiliser de manière

interchangeable. Toutefois, nous préférons employer le terme de conception lorsqu‟on cible

l‟étude des représentations de l‟enseignant (professeur) car nous considérons, comme le

suggère Kagan (1992), que l‟enseignement est un domaine caractérisé par l‟absence de

certitudes. De ce fait, les enseignants n‟ont guère à leur disposition des représentations et

modèles simples. Souvent pour expliquer les phénomènes complexes de la classe (capter les

difficultés des élèves, résoudre des situations problématiques, etc.), vaincre le doute et garder

le sentiment de contrôle, ils recourent et sélectionnent parmi de nombreuses croyances,

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théories, modèles scientifiques divers ou encore des représentations du sens commun, des

éléments qui leur semblent pouvoir rendre compte de la réalité (Crahay, Wanlin, Issaieva et

Laduron, 2010). En définitive, ils fabriquent leur propre théorie de l‟enseignement, qui se

présente comme une sorte de conception subjective, empreinte de savoirs scientifiques et du

sens communs.

Par conséquent, d‟une façon générale nous parlerons de conceptions des professeurs, pour

aborder leur regard sur des éléments didactiques et pédagogiques en BTS, sur l‟insertion

professionnelle des étudiants de BTS en Guadeloupe ainsi que sur les écarts de contextes

entre l‟Hexagone et la Guadeloupe et les marges de manœuvre dans l‟application des prescrits

nationaux. Nous considérons aussi que ces éléments se sont construits et évoluent au fil de

leur expérience professionnelle et de leurs pratiques d‟enseignement en économie-gestion, en

BTS et qu‟ils sont fortement liés à leurs pratiques pédagogiques, comme l‟avancent Crahay,

Wanlin, Issaieva et Laduron (2010) en précisant que « les croyances et les connaissances des

professeurs entretiendraient un lien conditionnel avec leurs pratiques ».

En ce qui concerne notre étude sur les étudiants (chapitre 4), nous préférons parler de

« conceptions ou représentations partagées » au sein de deux groupes d‟étudiants, chaque

groupe constituant une promotion de BTS (Clément, 2010). Nous effectuons ce choix pour

mettre l‟accent sur la dimension sociale de leur pensée que nous estimons importante en

suivant Abric (2003) :

« Une représentation sociale est un ensemble organisé d‟informations, d‟opinions, d‟attitudes et de croyances à propos d‟un objet donné. Socialement produite, elle est fortement marquée par des valeurs correspondant au système socio-idéologique et à l‟histoire du groupe qui la véhicule pour lequel elle constitue un élément essentiel de sa vision du monde. » (p.59)

Nous pensons concrètement que les représentations des étudiants à propos de leurs formations

et stages découlent davantage d‟une construction mentale empreinte de leurs vécus mais aussi

des valeurs sociales et des savoirs de sens commun » partagés. C‟est pourquoi, nous préférons

dans ce cas, utiliser le terme de représentations ou conceptions partagées.

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2.1.2. Le rôle et l’importance des stages professionnels dans la formation

supérieure

À l‟heure où le taux de chômage élevé des moins de 25 ans suscite de manière récurrente des

débats autour de l‟insertion professionnelle des jeunes, celle-ci devient alors un enjeu sociétal

et, l‟une des préoccupations affichée

53

de l‟enseignement supérieur.

2.1.2.1. Evolution de la place des stages à l‟université

Au niveau institutionnel, la loi du 12 novembre 1968 d‟orientation de l‟enseignement

supérieur (article 21) fut la première à mentionner des stages « d‟orientation à l‟usage des

étudiants nouvellement inscrits lorsqu‟elles [les universités] estiment utile de vérifier leurs

aptitudes aux études qu‟ils entreprennent. »

54

. La loi n°71-557 du 12 juillet 1971, dans une

formulation restant limitative, précise (article 9) que « ces stages sont obligatoires pour tous

les étudiants au bénéfice desquels ils sont prévus. À l‟issue de ces stages, il peut être

recommandé aux étudiants de choisir soit dans la même université, soit dans une autre

université si des conventions ont été passées à cet effet, d‟autres études ou cycle

d‟enseignement plus court adapté à une activité professionnelle. »

55

. Il faut noter que le stage,

ici, peut devenir un facteur de réorientation de l‟étudiant. La loi n°84-52 du 26 janvier 1984

sur l‟enseignement supérieur affirme la volonté du renforcement des liens entre l‟université

les milieux professionnels, en précisant dans son article 5 que « les enseignements supérieurs

sont organisés en liaison avec les milieux professionnels »

56

. Cette volonté sera renforcée par

la loi n°2007-1199 du 10 août 2007

57

, relative aux libertés et responsabilités des universités,

qui conduit à la création des bureaux d‟aide à l‟insertion professionnelle (BAIP). Dans

certaines universités, dont l‟université des Antilles, ce bureau centralise la gestion des stages

professionnels et gère le « portefeuille » des entreprises offrant des stages aux étudiants. La

loi n°2014-788 du 10 juillet 2014

58

, tendant au développement, à l‟encadrement des stages et

à l‟amélioration du statut des stagiaires, modifie le code l‟éducation en association plus

étroitement les stages aux diplômes.

53

Depuis le premier trimestre 2009, la direction générale de l‟enseignement supérieur (DGES) devient la direction générale de l‟enseignement supérieur et l‟insertion professionnelle (DGESIP), ce qui témoigne de cet affichage.

54

Voir : www.cereq.fr/content/download/1352/19352/file/relief24_p143.pdf, consulté le 19 février 2015. 55 Voir : www.cereq.fr/content/download/1352/19352/file/relief24_p143.pdf, consulté le 19 février 2015. 56

Voir : www.cereq.fr/content/download/1352/19352/file/relief24_p143.pdf, consulté le 19 février 2015. 57 Voir : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000824315&categorieLien=id, consulté le 10 février 2015.

58 Voir : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000029223331&categorieLien=id, consulté le 13 février 2015.

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Ainsi, d‟après l‟article L-124-1du code l‟éducation :

« Les périodes de formation en milieu professionnel et les stages correspondent à des périodes temporaires de mise en situation en milieu professionnel au cours desquelles l‟élève ou l‟étudiant acquiert des compétences professionnelles et met en œuvre les acquis de sa formation en vue

d‟obtenir un diplôme ou une certification et de favoriser son insertion professionnelle.»59

Nous voyons se renforcer dans cette dernière définition, l‟affirmation du lien entre le stage

professionnel et l‟insertion professionnelle. Mais comment expliquer la place importante

accordée aux stages dans les formations et dans les débats autour des difficultés d‟insertion.

2.1.2.2. Les apports des stages professionnels

Nous nous intéresserons au rôle et à l‟importance des stages professionnels dans

l‟enseignement supérieur pour les étudiants en formation initiale. D‟un côté, les stages sont

présentés comme outil permettant d‟acquérir des compétences venant compléter les savoirs

acquis en formation initiale. D‟un autre côté, ils sont parfois vus comme un moyen permettant

aux employeurs de disposer d‟une main-d‟œuvre gratuite ou bon marché.

D‟après Farvaque (2009), le stage en entreprise constitue une période de formation

professionnelle reconnue par les socioprofessionnels. En 1996, Forner, Dosnon, Gonnin-Balo

et Lebeaume (cités par Farvaque, 2009) affirment que la qualité du stage professionnel

impacte, d‟une façon générale, la qualité de la formation reçue. Le stage apparaît ainsi

comme étant une condition importante de l‟efficacité de la formation. De manière

complémentaire, Giret et Issehnane (2012) mettent avant le rôle de transition du système

éducatif vers le marché du travail que jouent les stages professionnels. Ainsi, en suivant

Barbusse, Glaymann et Grima (2007), les stages constituent un processus de socialisation des

jeunes qui facilitent la maturation des étudiants.

Les stages professionnels constituent un terrain de confrontation entre les savoirs transmis par

l‟organisme de formation et l‟entreprise d‟accueil. Ainsi Escourrou (2008) pose la question de

l‟adéquation du stage tel qu‟il est pratiqué dans l‟enseignement supérieur en formation initiale

et le marché du travail. Elle démontre l‟importance du stage qu‟elle traduit comme étant un

lien privilégié entre la formation initiale et l‟emploi des étudiants. Les enquêtes qu‟elle

59

Voir :

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexteArticle.do?idArticle=JORFARTI000029223332&cidTexte=LEGITE XT000029229102&categorieLien=id, consulté 17 janvier 2018.

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conduit auprès des étudiants, lui ont permis de retenir trois fonctions essentielles du stage :

c‟est un complément de la formation, un outil de professionnalisation et il favorise une

meilleure connaissance de soi. En partant des représentations sociales de l‟étudiant quant au

stage professionnel, l‟auteure fait apparaître le stage professionnel comme étant une source

supplémentaire d‟apprentissage et de connaissances en situation, c‟est-à-dire non abordées en

cours. Ainsi, le stage permet de compléter, de préciser ce que l‟étudiant a vu en cours,

constituant ainsi une sorte de fil conducteur, une sorte de lien – bien que vécu comme une

injonction (il faut faire le stage pour valider la formation et le diplôme donc je le fais) – qui

amène une forme de contextualisation des connaissances. C‟est le lieu où la connaissance

devient porteuse de sens pour l‟étudiant. Ce temps de la formation est une sorte un processus

de professionnalisation, décrit par Wittorski (2005) comme processus social. Être en stage ce

n‟est pas simplement un « état », ce n‟est pas quelque chose de figé, de linéaire.

Premièrement, il y a le temps de recherche où les outils de professionnalisation (Curriculum

Vitae, lettre de motivation etc.) sont testés de façon directe : les étudiants sont dans une

démarche de recherche similaire à celle de la recherche d‟un emploi. Ainsi l‟étudiant doit

« aller sur le terrain » pour trouver une structure qui lui donne l‟opportunité de travailler pour

apprendre et développer des compétences professionnelles. Deuxièmement, chaque étudiant

d‟une promotion s‟inscrit dans cette démarche. Le stage est donc à la fois un outil de

professionnalisation et un outil d‟individualisation des parcours de formation. Dans cette

même optique, Antille, Malacorda et Mottier Lopez (2016) affirment que l‟individualisation

des évaluations des stages professionnels favorise la motivation des stagiaires et leur

compréhension des tâches réalisées.

Le stage sert d‟appui pour la construction du projet professionnel : en étant confronté au

terrain de stage, l‟étudiant stagiaire, acquiert de l‟expérience facilitant sa première insertion

professionnelle. Expérience impactant d‟une part sur son orientation, et d‟autre part, lui

permettant de faire le point sur lui-même, ses atouts, ses aptitudes, ses compétences, ses

forces et faiblesses, ses motivations, les stages professionnels « contribuent à façonner les

attitudes et les attentes des futurs diplômés face au monde du travail en leur donnant des

repères. Ils jouent également un rôle dans l‟insertion professionnelle ultérieure »

(Guillot-Soulez et Landireux-Kartochian, 2008). Cette étude portant sur les avantages du recours aux

périodes de formation en milieu professionnel (pour les élèves du secondaire) et aux stages

professionnels (pour les étudiants), montre leur influence sur les représentations, les décisions

futures et l‟insertion professionnelle des jeunes concernés.

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Le stage professionnel permettrait de donner à l‟étudiant des « repères » et cette immersion

aurait deux conséquences. La première, c‟est qu‟elle modifie à la fois le comportement et les

perspectives professionnelles du diplômé. Au Québec, il a été observé une évolution des

aspirations et désirs professionnels des stagiaires suivant un parcours en entreprise

d‟insertion

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, au fil du temps (Alberio et Tremblay, 2013). La deuxième, c‟est qu‟elle impacte

son insertion professionnelle. D‟après Guillot-Soulez et Landireux-Kartochian (2008) cela est

d‟autant plus vrai concernant les stages réalisés en cours d‟études que ceux réalisés en fin

d‟études, alors considérés par les étudiants comme forme d‟embauche préalable.

L‟apport des stages pour l‟insertion professionnelle en matière d‟insertion professionnelle,

bien que difficile à mesurer, fait l‟objet de nombreuses études. Celle de Nair et Ghosh (2006)

démontre que les titulaires d‟un MBA, parce qu‟ils disposent d‟une expérience

professionnelle plus riche en raison de sa durée, obtiennent des emplois dans les entreprises

les plus prisées par les étudiants. Giret et Issehnane (2012) apportent une confirmation en

montrant, à partir de l‟enquête Génération 2004 du Céreq, comment certaines caractéristiques

des stages pouvaient impacter l‟insertion professionnelle des jeunes. D‟une part, ces auteurs

montrent que les situations professionnelles rencontrées durant les stages sont très

hétérogènes. D‟autre part, ils ont retenu deux indicateurs pour en mesurer les effets :le mode

d‟accès à l‟emploi et le salaire. Par exemple, les étudiants du niveau Master, réalisent des

stages gratifiants et formateurs. Ces stages leur permettent d‟augmenter « la probabilité de

trouver un premier emploi dans l‟entreprise au sein de laquelle le stage a été effectué ». Du

côté de l‟effet du stage sur le salaire, leur analyse a montré que « certains types de stages

[plusieurs mois] peuvent être considérés comme une réelle expérience professionnelle et

procurent un avantage qui n‟est pas uniquement temporaire sur le marché du travail ». Cette

hétérogénéité des situations professionnelles est en liaison avec le niveau et la spécialité de

formation suivie.

Nous voyons ici apparaître une autre vision du stage professionnel comme porteur de risques

d‟inégalités dans l‟accès au marché du travail. Compte-tenu des spécificités de situations

pouvant être rencontrées, certains étudiants en bénéficieraient plus que d‟autres. Ceci nous

conduit à aborder les limites du stage professionnel.

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2.1.2.3. Les limites des stages professionnels

Le stage professionnel est parfois présenté comme un moyen pour l‟employeur de disposer à

bas coûts de personnes qualifiées. Pour les élèves et les étudiants, la gratification précisée par

la convention de stage dépend de la typologie du stage (organisme de formation, niveau du

diplôme, durée de stage) mais reste le plus souvent très faible, la valeur horaire minimale

étant fixée à 3,75 euros au 1

er

janvier 2018. Pour les étudiants, inscrire sur leur Curriculum

Vitae le nom de la structure d‟accueil permet de justifier d‟un temps d‟expérience

professionnelle utile dans la recherche d‟un premier emploi. C‟est pourquoi on assiste durant

ces dernières décennies à une course aux stages, apparaissant comme passeports vers

l‟intégration à l‟emploi. En satisfaisant cette demande sociale, les entreprises peuvent être

tentées de recruter des stagiaires employés non pas principalement pour être formés et

développer des compétences mais pour mettre au service de l‟entreprise les savoirs acquis en

formation initiale à bas coût. Giret et Issehnane (2012) notent qu‟il existe des stages abusifs,

offrant donc aux employeurs une nouvelle voie de recrutement se substituant aux embauches

avec l‟ensemble des protections juridiques que procure le contrat de travail. Par ailleurs, les

étudiants sont alors souvent peu encadrés et n‟ont que peu de relations avec les salariés de

l‟entreprise, conditions que ces auteurs mettent à l‟efficacité du stage sur le plan de

l‟acquisition de compétences professionnelles. En s‟appuyant des entretiens réalisés par

Glayman et Grima (2001), ces auteurs affirment que les stages abusifs en étant inefficaces,

« peuvent avoir pour les jeunes un rôle déstructurant en ruinant le lien de confiance à

l‟entreprise en début de trajectoire professionnelle ».

C‟est pour corriger ces effets négatifs que la loi n°2014-788 précitée se donnait notamment

comme objectifs de protéger le stagiaire au sein de l‟entreprise (en reprenant à son profit une

partie des dispositions du code du travail), d‟insérer obligatoirement les stages au sein d‟un

cursus conduisant à un diplôme ou une certification et de plafonner le nombre de stagiaire en

relation avec le nombre de salariés.

En définitive, le stage peut avoir un rôle dans la construction de l‟identité professionnelle de

l‟étudiant tant en positif qu‟en négatif. C‟est parce que « la période de transition entre le

monde étudiant et le monde du travail est un moment charnière » (Paré et Le Maistre, 2006)

que nous plaçons les stages professionnels, qui constituent un temps fort de la formation au

BTS, au centre de nos interrogations dans le chapitre 4 consacré à une enquête sur les

étudiants de deux promotions de BTS.

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