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Les constituants des « villes intelligentes »

5. Une approche centrée sur l’habitant-usager

5.2. Le recours à la participation des habitants

L’étude « Mapping Smart Cities in the EU » réalisée par la « Directorate Generale for Internal Policies. Policy Department A : Economic and Scientific Policy » insistait sur l’importance du citoyen dans les démarches de « Villes Intelligentes » :

« (…) the role of citizens should not be forgotten. In general, citizens can be important stakeholders and should, where possible, be involved strategically in development and execution phases. Examples include the (re)use of Smart Cities as platforms for innovation, the role of citizens as co-producers of services (open data), and the potential for Smart City participation to enable and encourage citizens to play a more active part as active contributors to the future of the city »113.

Ce sont des « acteurs discrets » parce que, avec le développement des usages sociaux des technologies numériques, ce sont en effet de plus en plus des acteurs. Ils ne pèsent dans les choix publics que lorsqu’ils parviennent à se coaliser en nombre suffisant, mais leur rôle d’acteur ne saurait leur être dénié dans un projet portant sur les « villes intelligentes », au risque de se couper des mouvements sociaux contemporains.

112 Alain d’Iribarne, « Pour une approche socioculturelle des autoroutes de l’information », In Alain His,

Multimédia et communication à visage humain, Vers une maîtrise sociale des autoroutes de l’information, Matériaux pour un débat, Fondation Charles Léopold Mayer, Transversales Sciences & Culture, Coll. Dossier pour un débat, n°56, Paris, 1996.

113 Directorate Generale for Internal Policies. Policy Department A : Economic and Scientific Policy, Mapping

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« In some cases, citizens have also acted as funders or co-financers of cooperative activities in the development and operation of city services. Citizens, consumers and users can thus be useful conduits and advocates for the dissemination of Smart City projects. »114

Il existe d’ores et déjà de nombreux cas de « villes intelligentes » qui se réclament d’une focalisation sur l’habitant ou le citoyen. Cette focalisation se traduit généralement par une volonté de prise en compte des attentes ou des besoins de la population. L’exemple de la ville coréenne d’Anyang est de ce point de vue tout à fait exemplaire, ne serait-ce que parce que, débutant en 2003, il est l’un des premiers115 et des plus clairs sur cet objectif :

« Anyang’s smart city initiative began with the bus information system to enhance citizen’s convenience at first, and has been expanding its domain into intelligent transport system (ITS), crime prevention system and disaster prevention system in an integrated manner in the past 12 years »116.

Ces villes sont celles qui ont choisi, dans la formulation de leur projet, de mettre davantage l’accent sur le social plutôt que sur la technique. C’est notamment de Medellín (Colombie) :

« … Medellín has implemented a series of strategies that have made it a smart city (…) there is no single methodological framework for implementation, all of the initiatives share one characteristic: they are aimed at serving the citizens, and they have created mechanisms to communicate and interact with them to promote the continuous improvement of smart services ».

Ce type de démarche se trouve bien souvent complétée par des dispositifs susceptibles d’assurer l’interface avec les citoyens, dans le souci affiché d’une « participation citoyenne » au grand projet dessiné par la municipalité. Parmi les dispositifs les plus courants dans ce type de logique, on trouve ceux qui permettent l’ouverture des données publiques et qui affichent une volonté dite de « Gouvernement ouvert », on peut aussi y trouver des dispositifs de types « laboratoire des usages », qui consistent à tester des applications auprès d’échantillons de la population locale.

L’étude européenne mentionnée plus haut identifiait également quelques pistes intéressantes : « Moreover, by ensuring that the interests of civil society are incorporated into the design and business model of the initiative, and by participating in the incorporation of ‘consultation by design’ elements, such initiatives are likely to prove more acceptable to citizens in other cities under a replication, Smart City Services or ecosystem seeding model »117.

114 Ibidem.

115 Il faudrait sur ce point évoquer l’exemple très significatif et encore bien plus précoce de quelques expériences

européennes de la fin de la décennie 1990, comme Parthenay en France notamment, mais, à l’époque, il s’agissait de « villes numériques » et non pas de « villes intelligentes ». Cf sur ce point Emmanuel Eveno et Alain d’Iribarne ; Aux fondations des « villes numériques ». Heurs et malheurs du modèle parthenaisien ; Actes du Colloque International Villes et Territoires Numériques, Cnrs, Paris, les 6 et 7 février 2012, pp. 34-46. https://emmanueleveno.files.wordpress.com/2016/04/aux-fondations-des-villes-numc3a9riques.pdf

116 Sang Keon Lee, Heeseo Rain Kwon, HeeAh Cho, Jongbok Kim, Donju Lee, Anyang, Republic of Korea,

International Case Studies of Smart Cities, IDB (InterAmerica Development Bank), June 2016.

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En France, ces choix se retrouvent pour partie dans les cas de Toulouse, Nantes ou Rennes avec chacune leur « Cantine numérique », « bâtiment totem » de leur French Tech… Ces Cantines sont en effet à la fois des lieux qui se veulent des « foyers » de l’écosystème des acteurs locaux de la French Tech, ce sont aussi des dispositifs d’accueil pour les start-uppers du numérique, les « travailleurs nomades », les usagers du numérique… Autour de ces structures s’agrègent souvent des associations qui interviennent auprès de la population, par exemple pour former les usagers ou les futurs usagers…

A Nantes, « le numérique se veut accélérateur du dialogue citoyen », notamment à partir de « la plateforme citoyenne de quartier, nantesco.fr (…), pensée comme un véritable outil de citoyenneté augmentée qui permettra d’accélérer le dialogue entre les habitants et la collectivité en dehors des instances en plénière et de concilier contraintes personnelles et volonté d’engagement des habitants »118.

A Besançon, « La ville collaborative et intelligente, c’est d’abord celle qui favoriser l’accès de tous aux technologies numériques. C’est ainsi qu’est développé un « quartier d’excellence numérique », qui se concrétise par les "Fabriques du Dix". Il s’agit d’un centre d’affaire implanté dans un quartier défavorisé à proximité d’une zone prioritaire et à proximité d’une zone d’activité économique en pleine expansion, un "fablab" public, auquel sont associés deux organismes de formation (une école de l’entrepreneuriat et une école de développement web) »119.

Pour la Métropole Européenne de Lille, l’usager-citoyen est au cœur de la conception des actions en faisant de lui un acteur du devenir de son territoire par la libération des initiatives et la mise en œuvre de pratiques plus collaboratives selon une logique d’écosystème innovant et apprenant. Cette méthodologie expérimentale du co-design s’appuie sur le laboratoire de design des services publics, sur des outils numériques de démocratie et d’innovation ouverte. Par cette approche, il s’agit de mobiliser et de fédérer le plus grand nombre autour d’une vision partagée de l’identité et du futur du territoire métropolitain.

La MEL se pose comme stimulateur de réflexion sur les grands enjeux des nouvelles technologies dans la vie citoyenne de la Cité en organisant le Grand Barouf Numérique, un des premiers événements en Europe de design fiction de politiques publiques relatives au numérique. En 2018, l’événement participatif et prospectif a été conçu comme une “session parlementaire” de deux jours, où les participants deviennent des “députés” réunis en commissions, auditions et séances de question au gouvernement (fictif !). Startupers, citoyens, militants, représentants de grandes entreprises, fonctionnaires, designers... C’est avant tout un lieu de rencontres improbables, où les mondes qui s’ignorent trop souvent peuvent enfin se parler face à face, pour construire, ensemble, les contours numériques de notre société. Concomitamment à l’organisation de l’événement en mars, la MEL réunit en amont et en aval de l’événement une communauté d’innovation sur le territoire de l’Eurométropole. A l’œuvre toute l’année, réunissant des acteurs de l’innovation de tous horizons, proposant des ateliers sur des thématiques à fort enjeux, des voyages d’études, la communauté d’innovation est un formidable réseau de compétences sur l’innovation publique, sociale et numérique.

118 France Urbaine, Les Villes intelligente : expériences françaises. Les savoir-faire français à l’international, Nantes,

la métropole des possibles, 2016, p. 25.

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