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CHAPITRE 2 Cadre conceptuel

2.2 Du paradigme constructiviste à la coélaboration de connaissances

2.2.3 Le partage de la responsabilité cognitive

2.2.3.1 L’étayage de l'enseignant

L’étayage ou l’échafaudage est une façon de soutenir activement l’apprentissage des élèves. Le terme « scaffolding » fut utilisé pour la première fois par Wood, Bruner et Ross (1976) pour décrire l’interaction entre un maître et un élève ou un novice dans un processus de résolution de problème. Selon Bruner (1987), l’étayage est « l’ensemble des interactions de soutien et de guidage mises en œuvre par un adulte ou un autre tuteur pour aider l’enfant [l’élève] à résoudre seul un problème qu’il ne savait pas résoudre au préalable » (Bruner, 1987, cité dans Crahay, 1999, p. 328-329). La démarche d’étayage comporte six fonctions d’interaction : enrôlement, réduction des degrés de liberté, maintien de l’orientation,

signalisation des caractéristiques déterminantes, contrôle de la frustration, démonstration et modélisation10. Ce processus permet de guider l’élève, ou l’ensemble de la classe, dans la réalisation d’une tâche complexe qu’il ne serait pas capable de faire seul. L’étayage est un processus qui s’intègre bien dans le design d’un environnement d’apprentissage tourné vers la communauté d’apprenants.

Le processus d’étayage est d’autant plus pertinent dans un contexte où les TIC soutiennent l’apprentissage, car l’usage de celles-ci doit être déterminé par des buts d’apprentissage précis et être constamment alimenté et réorienté. Selon Pea (2004), deux dimensions importantes composent l’étayage de l’apprentissage : la dimension sociale et la dimension technologique. L’une de ces deux dimensions sera plus ou moins dominante selon les modèles et leur conceptualisation. La dimension sociale désigne les besoins de l’apprenant et les ressources à lui fournir pour qu’il puisse accomplir la tâche qu’il ne pourrait accomplir seul. La dimension technologique concerne davantage l’élaboration d’artéfacts de la part des apprenants (Simon, 1969). Le KF, comme support de l’écrit, collige, voire encourage l’élaboration collective d’artéfacts. Néanmoins, l’utilisation du KF ne se fait pas

10 Ces six fonctions sont les suivantes :

1) L’enrôlement : engager l’intérêt et l’adhésion des élèves envers les exigences de la tâche. Cette première fonction réfère aux notions de motivation et d’engagement. C’est à cette première étape que l’élève évalue la valeur de la tâche et ses chances de la réussir. C’est aussi lors de cette première tâche que l’enseignant sera amené à négocier les paramètres de l’activité avec ses élèves.

2) La réduction des degrés de liberté : procédures par lesquelles l’enseignant simplifie la tâche par réduction du nombre des actes requis pour atteindre la solution, pour résoudre le problème. Cette étape consiste à signifier à l’élève ou au groupe classe les étapes qu’il aura à réaliser et les intentions pédagogiques qui motivent nos choix d’outils ou encore la démarche qu’on leur propose.

3) Le maintien de l’orientation : éviter que l’élève s’écarte du but de la tâche ou de l’activité. Le travail aux tables et le rappel des consignes en classe font partie des stratégies pouvant être utilisées pour maintenir l’orientation des élèves et éviter qu’ils s’éloignent des buts d’apprentissages et de réalisation de l’activité. 4) La signalisation des caractéristiques déterminantes : indiquer ou souligner par divers moyens les caractéristiques de la tâche qui sont pertinentes pour son exécution, sa réalisation. Ceci implique de signaler aux élèves les activités ou les éléments du problème les plus déterminants afin d’arriver à la solution.

5) Le contrôle de la frustration : Éviter que les erreurs commises pas les élèves ne se transforment en sentiment d’échec ou encore en résignation face à la tâche. Motivation et réorientation sont des éléments importants de cette fonction. Il importe d’être en mesure d’amener l’élève à construire sur les constats qu’il tire de ses échecs.

6) La démonstration ou la modélisation : l’exécution d’une compétence en présence de l’élève, ou encore une modélisation (un modèle) de réalisation et de l’achèvement de la tâche. Durant cette étape il importe d’expliciter notre démarche aux élèves afin qu’ils soient en mesure de la répéter ou encore de repérer les éléments posant problème dans la leur. Nous pouvons également utiliser l’activité modèle, réalisée par un élève, afin de montrer la démarche souhaitable ou attendue afin de résoudre la situation problème.

seule, une pédagogie axée sur la communauté d’apprenants et la coélaboration de connaissances est requise sans quoi l’élaboration d’un discours collectif et d’artéfacts conceptuels pourrait être fort difficile. Dans le contexte de l’ÉÉR, les enseignants sont préparés à jouer un rôle très important, autant sur le plan social que sur le plan technologique, car ils doivent accompagner notamment par l’étayage les élèves afin qu’ils puissent résoudre des problèmes qu’ils ne pourraient résoudre seuls.

2.2.3.2 L’étayage par les pairs (peer scaffolding)

L’étayage par les pairs est un concept étroitement lié à celui de la communauté d’apprenants (Brown, 1994, 1997) et de la zone proximale de développement (Vygotsky, 1978). En effet, l’étayage, qu’il soit entre un enseignant ou entre un élève plus expérimenté et un pair, doit se produire lorsque qu’un apprenant ne peut arriver à effectuer une tâche seul (Pea, 2004). Vygotsky (1978) précise que les différents niveaux d’expertise des apprenants permettent à chacun de passer du rôle de l’aidant à celui d’aidé, selon les questions et thèmes abordés lors de la coélaboration de connaissances. Cette perspective n’est pas sans rappeler l’enseignement réciproque (Palinscar & Brown, 1984) de la communauté d’apprenants qui s’inscrit également dans la lignée des travaux de Vygotsky sur la zone proximale de développement. Piaget (1928) présente aussi un point intéressant sur l’interaction entre les apprenants. En effet, pour lui, il n’est pas essentiel que les pairs aient des niveaux d’expertise plus « élevés » afin que se produise l’étayage par les pairs. Le fait que les apprenants échangent, discutent et négocient selon leurs différentes perspectives peut créer un conflit cognitif, qui peut lui-même mener à une nouvelle construction de connaissances (Doise & Mugny, 1984). Pour Lai et Law (2006), lorsque le niveau d’expertise entre les pairs diffère, l’interaction entre élèves peut permettre à l’élève « moins » expert de bénéficier de l’expertise de ses pairs. Les élèves « plus » experts peuvent, quant à eux, bénéficier de l’ensemble des connaissances de la communauté afin d’approfondir leurs connaissances. De plus, la communauté d’apprenants donne à l'élève un réseau social, avec lequel il peut interagir, se remettre en question, négocier des concepts dans le cadre d'une activité d'apprentissage, d'un projet. L'étayage par les pairs, c'est-à-dire le fait pour deux élèves ou plus de travailler ensemble afin de se construire une représentation commune d'un même concept, serait ainsi bénéfique aussi bien pour le pair

aidant que pour l'élève aidé. En effet, les rétroactions, les commentaires et les différentes perspectives des pairs permettraient à l’élève de raffiner son propos, surtout lors de l’écriture en collaboration. La sélection d’idées prometteuses en vue de faire progresser le discours collectif peut aussi être perçue comme une rétroaction, un étayage par les pairs. En effet, en donnant des exemples d’idées sélectionnées par ses pairs, l’élève peut être plus à même de proposer de nouvelles idées ayant de la valeur pour l’avancement du discours collectif. Le processus d’écriture collective permettrait aux idées de se transformer, de s’améliorer. Par conséquent, nous incluons l’étayage par les pairs en tant que composante importante de la coélaboration de connaissances (Scardamalia, 2002).

2.3 Le design d’un environnement d’apprentissage utilisant le KF