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MARKETING ET DEVELOPPEMENT DURABLE

Section 2. LE MARKETING DU DEVELOPPEMENT DURABLE

3. DU MARKETING AU MARKETING RESPONSABLE

3.3. Le marketing responsable

Depuis le début de notre thèse nous tentons d’expliquer l’ampleur de l’introduction d’une politique de développement durable au sein de l’entreprise, et nous avons vu que cela nécessite obligatoirement l’acceptation puis la réalisation d’une démarche de conduite au changement avec tout ce qu’elle engendre comme difficultés et résistances. Cela dit, une opération d’une telle envergure n’épargne pas le marketing, et ce dernier se voit obligé d’améliorer ses pratiques car l’environnement dans lequel il a tellement prospéré devient de plus en plus hostile aux méthodes classiques de développement des entreprises.

Selon Elisabeth Laville et Rémi Devaux, "le marketing n’est pas fini mais il faut le réinventer" autour de nouveaux « P » lié au développement durable1 : les Personnes, la

Planète, les Profits, la prise en compte des intérêts des Parties prenantes et une démarche de Progrès.

‐ Les personnes (People) : Il s’agit de mettre l’Homme au centre des préoccupations que ça soit dans un sens de RSE ou encore dans le sens où c’est le maillon sur lequel toute l’évolution de l’humanité est bâtis ;

‐ La planète (Planet) : C’est la source de toutes formes d’énergie ; conscient un peu trop tard de sa fragilité, l’Homme tente de sauver ce qu’il en reste et le développement durable la met elle aussi au centre des préoccupations ;

‐ Le profit (Profit) : C’est l’objectif de toute entreprise. Dans une optique de développement durable, le marketing ne doit pas inciter à consommer moins mais plutôt consommer mieux. Donc le bénéfice reste toujours aussi important ;

‐ Le progrès (Progress) : C’est le changement perpétuel en R&D tout en respectant de plus en plus les préceptes dictés par la politique du développement durable ;

‐ Les Parties Prenantes : Nous les avons définit dans notre premier chapitre, cependant, en plus de les considérer comme des éléments externes, le Marketing les positionne comme une entité qui devrait permettre à l’entreprise d’assurer une synergie durable.

En prenant en compte ces éléments, le marketing devient un marketing responsable qui englobe un sous-ensemble de pratiques (Laville et Devaux, 2008):

       1

88 - Le « marketing éthique » se charge de préserver le respect déontologique des pratiques de l’entreprise en évitant au maximum les débordements de la stratégie marketing, par exemple le bannissement totale des allégations trompeuses.

- Le « marketing vert » recherche à mettre en avant des produits ayant une valeur ajoutée sociale ou/et environnementale sur leurs marchés.

- Le « marketing social » vise enfin à utiliser les moyens du marketing pour promouvoir des comportements responsables et réduire le coût environnemental ou social de la consommation.

a. Le marketing éthique

Le marketing éthique réduit le rôle du marketing et ne considère que son coté communicationnel, il tente de réguler la communication des entreprises de sorte à ce qu’elle soit décente, loyale et véridique comme le stipule le code d’éthique de la Chambre de Commerce Internationale. Cet organisme exige que la publicité soit conçue avec « un juste sens de la responsabilité sociale et professionnelle »1. La publicité doit donc être crédible et basée sur des éléments réels et vérifiables ; des organismes comme le Bureau de Vérification de la Publicité en France ou Advertising Standards Authority (ASA) en Grande Bretagne existent pour s’assurer que les publicités des entreprises respectent les codes de bonne conduite publicitaire. Le marketing éthique, propose, en fait, au consommateur de transformer son acte d’achat en une action engagée pour une cause2. Par exemple : l’opération "1litre = 10 Litres" de la marque Volvic". En 2006, Volvic s’est engagée à financer la construction de puits au Niger de façon que 10L d’eau potable puissent y être puisés à chaque fois qu’un consommateur achète 1L de son eau minérale. Volvic a connu une progression spectaculaire des ventes et a financé la construction et l’entretien de 16 puits pendant 10 ans dans le cadre d’un partenariat entre la marque et l’UNICEF. Le marketing éthique a permis de satisfaire les besoins des villageois du Niger, en faisant contribuer les consommateurs, qui ont dû accepter un prix plus cher que celui d’une marque concurrente, par exemple. Volvic quand à elle a vu ses ventes progresser et son image de marque durablement associée à une valeur forte.

Pour encadrer leurs pratiques marketing, certaines entreprises sont amenées à énoncer des codes de conduite internes et à mettre en places des procédures pour les respecter.       

1

Voir www.codescentre.com contenant des informations sur les organismes d’autodiscipline publicitaire

2

Gindre B., 2007, Le marketing éthique : une définition, un exemple, 04 janvier, [En ligne] http://ethikenblog.blogspot.com/2007/01/premier-post.html (consulté en mars 2011)

89 Dernièrement, PepsiCo annonçait les nouvelles mesures de sa politique mondiale visant à supprimer à long terme ses boissons les plus sucrées des écoles1.

De même, le fabricant de barres chocolatées Masterfoods (Mars, Snikers, Twix, etc.) a annoncé en février 2007 vouloir arrêter de faire en Europe des publicités ciblant les enfants de moins de 12 ans2.

b. Le marketing vert

On peut considérer un produit comme "vert" s’il a une valeur ajoutée écologique ou sociale (produit issu du commerce équitable, respectueux des droits fondamentaux des travailleurs loin des sweatshop (atelier de la sueur), fabriqué localement3, sans OGM4, etc.). Mettre sur le marché ces produits et d’en faire la promotion constitue l’objet même du Marketing vert. Cela permet donc à l’entreprise d’utiliser un positionnement écologique (ou social) de sa marque ou de son produit dans le but d’augmenter ses ventes ou d’améliorer son image auprès de ses parties prenantes.

Cependant, la valeur ajoutée « Verte » qu’apportent ces produits pose la problématique d’identification, on peut ainsi se demander sur les critères qui nous permettent de présenter un tel ou tel produit comme étant un produit vert. La réponse est qu’il n’existe pas de critères précis, mais un produit est présenté comme vert, durable, responsable ou comme un éco-produit lorsqu’il met en valeur des améliorations à une ou plusieurs étapes de leur cycle de vie ; et ce, qu’il s’agit d’achats responsables, de processus de production propres, d’impacts diminués lors de l’utilisation, d’un emballage minimisé, de la possibilité prévue de réutiliser ou de recycler le produit, des systèmes de récupération en fin de vie, etc.

Le rôle du Marketing dans ce cas, s’inscrit dans une logique d’entreprises volontaristes et donc innovantes, plus le produit est eco-innovant plus l’entreprise cherche à se différencier en apportant des produits à fort potentiel écologique. Dans ce cas, le marketing a pour objectif la       

1

Partenariat et moralité : la loi du plus marketing, [En ligne] http://www.obobs.net/article-partenariat-et-moralite-la-loi-du-plus-marketing-48295451.html consulté 28 décembre 2011

2

Pour plus d’informations sur le rapport publicité et obésité le lecteur pourra lire l’article de Godmé D., 2006, Publicité alimentaire destinée aux enfants et obésité infantile : Quelle éthique pour les marketers ?, HEC Genève et Université de Genève. [En ligne]

http://ovsm.unige.ch/assets/files/MCEI/Godme2006.pdf (consulté 28 décembre 2011).

3

Dans les deux sens : absorber le chômage local et minimiser les émissions de GES dûs à la distribution (importation)

4

90 mise en place et l’accompagnement d’un nouveau mode de consommation, le transformant en un véritable représentant de l’engagement de l’entreprise.

Exemple : des entreprises se sont alliées à des ONG pour faire vivre la différence de la marque et mener des campagnes pédagogiques sur les enjeux sociaux et environnementaux sous-jacents à leur activité :

- Contre l’utilisation d’hormones de croissance bovine pour Ben & Jerry’s et Stonyfield Farm ;

- Contre les tests sur les animaux, pour les produits bios et le commerce équitable pour The Body Shop.

c. Le marketing social

Il s’agit là d’un marketing qui vise les actions des individus et qui les oriente vers un comportement responsable.

Comme nous l’avons dit précédemment, même si une entreprise fait l’effort de créer un produit vert, il est possible que les effets voulus pour l’environnement ne soient pas atteints à cause du comportement des utilisateurs. Si on produit une voiture verte (qui émet 20 % moins de CO2) mais qu’on achète deux fois plus de voitures, cela veut dire qu’on produit toujours plus de CO21. Le rôle du marketing social est d’inculquer aux utilisateurs un nouveau mode de vie, il les inciterait, par exemple, à avoir une seule voiture "verte" et l’utiliser raisonnablement, et ce en prenant les transports en commun pour les trajets qui le permettent, il pourrait même les inciter à faire de la marche. Dans un autre contexte, il inciterai les hommes à ne plus faire couler l’eau inutilement pendant le rasage2. La réussite de la politique de développement durable en entreprise reste donc otage de son aptitude à faire changer les comportements de ses clients.

Cependant ces nouvelles approches du marketing restent le plus souvent cloisonnées dans l’aspect communicationnel du marketing et limite beaucoup les pratiques marketing, qui doivent désormais être plus proches des stratégies innovantes liées à l’intelligence économique et ses applications dans les politiques de développement durable. Nous allons       

1

Voir le paradoxe de Jevons évoqué dans le premier chapitre.

2

D’après les dirigeants de la marque orange et bleue, le produit « rasoir » en soi ne représenterait que 25% du poids environnemental (production, utilisation des matières premières, transport, distribution). Les 75% restants concernent sa phase d’utilisation et notamment la consommation d’eau et de mousse à raser : on utiliserait en moyenne 2 litres d’eau à chaque rasage. Source : Environnement, le rasoir ne rase pas gratis, 2011, [En ligne] http://www.consoglobe.com/environnement-rasoir-rase-gratis-1929-cg (consulté le 28 Décembre).

91 présenter dans ce qui suit une autre approche qui introduit le marketing dans le développement durable comme une pratique transversale qui accompagne les produits depuis son étape de R&D.