• Aucun résultat trouvé

MARKETING ET DEVELOPPEMENT DURABLE

Section 2. LE MARKETING DU DEVELOPPEMENT DURABLE

2. LES APPORTS DU DEVELOPPEMENT DURABLE A L’ENTREPRISE

2.1. L’éco-efficacité

En 1987, dans le rapport Our Common Future, l’ONU a introduit un concept tout aussi nouveau que le développement durable et cette fois directement destiné aux entreprises. C’est le concept d’éco-efficacité : « on doit encourager les industries et les procédés industriels qui

sont plus efficaces en termes d’utilisation des ressources, qui génèrent moins de pollutions et de déchets, qui dépendent des sources renouvelables d’énergie plutôt que l’énergie dérivée des combustibles fossiles, qui minimisent leurs impacts nuisibles sur la santé humaine et celle de l’environnement »1. Cette définition s’adresse principalement aux industriels et les incite à la réduction de l’utilisation des énergies, minimiser les impacts néfastes à l’environnement et propose d’utiliser des énergies renouvelables.

Le schéma suivant présente les trois axes de l’éco-efficacité, selon lesquels on peut obtenir un certain niveau d’éco-efficacité en générant moins de pollution, en utilisant des sources renouvelables et en minimisant les impacts nuisibles sur la santé humaine et sur l’environnement :

       1

73 a. Les trois axes de l’éco-efficacité

- Générer moins de pollution : Au départ, la gestion des déchets se limitait à la prévention

ou à la réduction de la production ou de la nocivité des déchets. Cela visait principalement la réduction des flux de déchets de production et la conception de produits non toxiques. Actuellement et depuis 1998, la gestion des déchets ne se limite plus au milieu industriel et

passe aussi aux déchets ménagés et va aussi vers l’incitation à la réutilisation des déchets et le recyclage afin d’aider la nature à résorber le plus de déchets produits par les activités de l’homme.

En France, par exemple, depuis le 1er juillet 20021, afin d’inciter au recyclage et à la réutilisation des déchets, les installations d’élimination par stockage ne sont autorisées à accueillir que les déchets ultimes2. Cette contrainte imposée par le code de l’environnement3 pose clairement le problème de l’innovation technologique. Le recours aux biomatériaux4 doit apporter un soutien très important dans le défi de la protection des ressources, d’optimisation du système de gestion des déchets et de création d’emplois notamment en milieu rural.

- Utiliser des sources renouvelables d’énergie plutôt que l’énergie dérivée des combustibles

fossiles. La production de l’électricité nécessite la combustion d’énergies fossiles comme le charbon, le pétrole et le gaz ce qui provoque un phénomène de changement climatique appelé communément l’effet de serre. Il devient donc primordial de se lancer dans une lutte contre le réchauffement climatique en réduisant la consommation des énergies fossiles et en les remplaçant par des énergies renouvelables. Quand on sait que le pétrole est, à lui seul, responsable de 50 %5 des émissions de CO2 et que les 50 % restante proviennent de la

       1

Code de l’environnement

2

Déchets ultimes : Déchets qui ne sont plus valorisables, ni par recyclage, ni par valorisation énergétique. A ce titre, ils sont réglementairement les seuls à pouvoir être stockés (enfouis) dans un Centre de Stockage des Déchets Ultimes (CSDU).

3

Selon le Code de l’Environnement (France), le déchet ultime est défini comme un déchet, résultant ou non du traitement d’un déchet, qui n’est plus susceptible d’être traité dans les conditions techniques et économiques du moment, notamment par extraction de la part valorisable ou par réduction de son caractère polluant ou dangereux.

4

Les biomatériaux sont des matériaux composés à majorité de matières premières d’origines agricole dont les produits générés au cours de la dégradation, de la combustion ou du recyclage ne provoquent pas de dommages à l’environnement. Ainsi, des produits ou sous-produits agricoles aussi variés que les céréales, les oléagineux, les protéagineux et les fibres peuvent être la synthèse de bio polymères (macromolécule constitué d’un enchaînement régulier d’atomes de carbone) pouvant être dégradé par des microorganismes), de bio plastiques (films agricoles, emballages), d’agro matériaux, de matériaux composites (Matériau présentant une très grande résistance, constitué de fibre (verre, bore, silice, graphite) maintenues par un liant (polyester, époxyde) exemple : Revêtement, structure, isolation) et de gélifiants (revêtement).

5

74 consommation des combustibles solides et du gaz naturel, on devient conscient qu’il faut, à tout prix, passer à d’autres sources d’énergies dites durables1.

- Minimiser les impacts nuisibles sur la santé humaine et sur celle de l’environnement :

Le monde entier est conscient des rapports entre l’environnement et la santé, il suffit d’un air légèrement pollué pour qu’on se rende compte, chez les personnes les plus sensibles, des réactions anormales comme des allergies, il y a même qui sont allergiques à des éléments naturels comme le pollen, alors qu’avons-nous à dire à propos des réactions face à des éléments toxiques ou polluants ? La prise de conscience de l’importance de la protection de l’environnement a dû attendre l’ère du nucléaire et des catastrophes écologiques planétaires (couches d’ozone) pour devenir une des priorités mondiales.

Les entreprises les plus volontaristes ne prennent pas ces éléments à la légère et comptent bien tirer profit des avantages d’une stratégie d’éco-efficacité.

b. L’éco-efficacité, vue par les entreprises

Le WBCSD défini l’éco-efficacité beaucoup plus simplement comme étant « la capacité à fournir des biens et des services à des prix compétitifs qui satisfont les besoins humains et améliorent la qualité de la vie tout en réduisant progressivement les impacts écologiques et la consommation des ressources tout au long de leur cycle de vie »2.

Stephan Schmidheiny, auteur du livre Changeons de cap et fondateur de WBCSD définit l’éco-efficacité comme « l’application du développement durable pour le monde des affaires » (Moutamalle L., 2004, p. 103).

L’entreprise devient, alors, éco-efficace si elle arrive à satisfaire ses clients de la manière la plus optimale en leur offrant des produits (recyclables par exemple) dont le processus de fabrication a été moins polluant, plus respectueux de l’environnement et qui a consommé moins de ressources naturelles.

Entek International Ltd. est une entreprise qui fabrique des matières qui entrent dans la fabrication de séparateurs de piles en polyéthylène microporeux. Située en Oregon et au Royaume Uni, elle a acquis, au coût de 250 000§, une machine qui lui permet de réduire ses déchets en plastiques et de les réutiliser dans son processus de production. Suite à cela, elle économise plus de 100 000§ par mois, plus d’un million par an, grâce à la réduction des coûts       

1

Les énergies solaires, géothermiques, hydrauliques et éoliennes.

2

75 liés à l’enfouissement des déchets, aux salaires des employés et à l’acquisition des matières premières.

Un autre exemple illustre un partenariat gagnant entre BASF et Farnell1. Établie en 1961, Farnell est un leader dans le secteur des emballages souples personnalisés depuis des décennies. L’entreprise se spécialise dans les pellicules, les sacs, les feuilles et les étiquettes autocollantes en polyéthylène et en copolyester. Depuis de nombreuses années, l’équipe Farnell établit des pratiques qui démontrent son sens de responsabilité en matière environnementale. À titre d’exemple, les employés de Farnell séparent les déchets recyclables des non-recyclables à leur bureau depuis le début des années 1980 – bien avant que le recyclage ne devienne un courant dominant. Cette façon de faire est bien ancrée dans la culture de l’entreprise.

Depuis le début des années 1990, Farnell travaille avec divers fournisseurs afin de trouver des solutions écologiques de qualité pour ses clients. Cependant, les premières entreprises qui mettent au point des technologies écologiques sont en avance sur leur temps, elles ne peuvent tirer profit des vigoureux marchés d’aujourd’hui, indispensables pour financer le développement des produits. Être en avance sur son temps présente des risques et peut même entraîner la fin précoce de bien des projets, « Il y a un prix à payer quand on est leader, » souligne David Stanfield, directeur marketing chez Farnell. « Il n’y a pas de réponse facile et les clients mettent du temps à changer. Nous avons constaté que BASF est ce genre de leader, ce qui rend notre partenariat d’autant plus positif. »

Lorsque BASF commence à mettre au point des polymères biodégradables, ses chercheurs savent que pour avoir du succès, le produit doit être pratique pour les fabricants et attrayant pour les clients, tout en ayant la résistance et la souplesse du plastique conventionnel. BASF a finalement créé le plastique biodégradable Ecoflex. Farnell a eu une solution qu’elle peut offrir à ses clients qui recherchent une alternative écologique. Homologué comme étant 100 % biodégradable et compostable par le Biodegradable Products Institute en Amérique du Nord, par la norme européenne EN 13432 et par la norme japonaise GreenPla, Ecoflex s’avère un développement très apprécié en matière de conditionnement des aliments, en plus de trouver des débouchés dans plusieurs applications industrielles et agricoles.

La plupart des entreprises qui s’engagent dans la mise en œuvre d’une politique d’éco-efficacité cherchent à se différencier et prendre de l’avance sur les concurrents et les       

1

76 changements en termes de réglementation. En effet, en évoluant de la sorte, elles assurent un avantage concurrentiel, la durabilité de leur produit ainsi qu’une profitabilité à long terme. Ces résultats sont le fruit d’une étude intitulée "le rôle de l’éco-efficacité : problèmes et possibilités au XXIe siècle à l’échelle mondiale"1 réalisée sur une vingtaine d’entreprises

multinationales. Cependant, la plupart de ces sociétés voudraient voir des encouragements concrets de la part des gouvernements vis-à-vis de leurs initiatives volontaristes.

Nous ouvrons là, une parenthèse pour revoir le rôle des gouvernements, en effet, ces derniers sont présents lorsqu’il s’agit de sanctionner les entreprises qui ne respectent pas la réglementation mais aucun encouragement n’existe lorsque des entreprises prennent des initiatives, cela mène à dire que les gouvernements n’encouragent pas les solutions créatives

des problèmes. Ainsi, des auteurs présentent un autre concept appelé « concept de

précaution », il s’agit d’une vision stratégique qui pousse les entreprises à s’engager.

Une analyse intéressante du concept de précaution a été faite par madame Elkington. Françoise de Bry, chercheuse en économie et coauteur de l’Entreprise et l’éthique : « Nous voyons apparaître une troisième vague d’entreprises », déclare-t-elle, « les entreprises qui s’engagent désormais suivent une sorte de principe de précaution ; elles veulent éviter une crise majeure dans les prochaines années. »2

Fermons cette parenthèse consacrée au principe de précaution et revenons à l’éco-efficacité ; dés qu’une entreprise s’y met, il est clair qu’elle se focalise déjà à emprunter le chemin de la durabilité, elle se base essentiellement sur le génie humain et les idées innovantes qui permettent son optimisation, mais comme chaque concept, l’éco-efficacité révèle des limites. - L’éco-efficacité nécessite des systèmes d’évaluation sophistiqués pour permettre aux dirigeants de cerner son impact réel sur l’entreprise et son environnement, chose qui n’est pas évidente à avoir pour comprendre et vérifier la direction que prend l’entreprise.

- L’éco-efficacité ne prend pas en charge les effets de cumul des utilisations, même si on arrive à créer des produits éco-efficaces, la multiplication de leur utilisation donnera toujours les mêmes externalités. Aucun progrès n’est tangible, si par exemple nous possédons deux voitures deux fois plus éco-efficace, car le résultat sera le même qu’une seule voiture classique.

       1

Five Winds International (FWI), 2000, Le rôle de l’éco-efficacité: Problèmes et possibilités au 21e siècle à l’échelle mondiale – Partie 1 : aperçu et analyse, 214 pages.

2

77

L’éco-efficacité avance bien lorsque le génie humain développe de nouvelles solutions, l’innovation devient alors un atout stratégique majeur dans la concrétisation d’une démarche de développement durable.