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Construction méthodologique : l’étude des systèmes interconnectés

5. La transcription des données recueillies

6.2. La nécessité de construire des échelles d’analyse

6.2.1. Construire une vue synoptique

6.2.1.2. Le deuxième niveau du synopsis : dimension leçon

Pour les raisons que nous avons évoquées plus haut, il nous a paru nécessaire de garder une présentation de données qui suive et respecte la chronologie réelle du cycle. Ceci signifie changer de grain de description, tout en compartimentant la vue synoptique selon l’ordre d’apparition des leçons. Cela veut dire, et si l’on se réfère à Schneuwly et al. (2006), que la séquentialité n’est pas dans notre cas réalisée selon le point de vue de « l’objet enseigné » ou de la création d’un « environnement en rupture avec le précédent » (p. 183). Les considérations en lien avec les contenus qui sont traités et les dispositifs de travail sont bien présents, mais intégrés dans la colonne qui décrit les situations effectives. Cela demande, alors, une signalisation suffisamment claire afin de rendre visibles les éléments saillants, ceux qui méritaient sûrement une description et une analyse plus approfondie.

Soulignons donc que c’est à travers la « segmentation de l’enregistrement vidéo » (Zaid &

Huchette, 2006, p. 268) que nous mettons en évidence différentes unités d’analyse. Par leçon, nous entendons la période de temps se situant entre l’arrivée des élèves dans la salle d’éducation physique et le départ de ces derniers vers les vestiaires. La leçon ne se conforme donc pas à la notion de « période scolaire » qui régit l’organigramme scolaire149.

A l’intérieur de cette unité temps, nous identifions les phases de la leçon », qui correspondent aux différents moments programmés et/ou mis en place par l’enseignant (par exemple, à la fin des séances, un temps est toujours alloué au rangement du matériel et aux consignes concernant la sortie de la salle). Cette distinction nous permet de visualiser le temps et le contenu correspondant aux aspects « organisationnels » et les moments davantage en lien avec l’objet d’étude du cycle.

Pour construire le synopsis de chaque leçon, nous nous sommes basé sur les consignes données par l’enseignant. Ce qui a permis d’obtenir un tableau de 4 colonnes (tableau 3).

- La colonne de gauche rend compte des repères temporels des différentes phases de la tâche (ex. dans le tableau : la durée de « l’intermède », de 6’23 à 6’45).

- Dans la deuxième colonne, que nous nommons « Tâches proposées », sont notés les termes que les enseignants ont utilisés pour désigner les tâches. Entre parenthèses nous indiquons leur durée. Parfois nous proposons un schéma du dispositif de l’aménagement matériel et/ou de l’organisation sociale de la tâche (dans le tableau 3, voir la minute 7’25).

- La colonne centrale du tableau, appelée « Description », restitue sous forme d’un récit synthétique ce qui s’est passé à tel ou tel moment de la leçon, des éléments de l’intrigue (au sens de Sensevy & Mercier, 2007).

- Enfin, la dernière colonne du tableau met en évidence le thème et/ou les contenus d’enseignement en jeu durant la tâche et permet d’identifier la référence à la pratique sociale censée organiser le cycle et les visées didactiques des enseignants.

149 Une « période » équivaut à 45 minutes horloge.

Revenons à la colonne centrale du tableau (Description) qui condense les différents moments des situations d’apprentissage. C’est à partir de ces informations que nous conduisons l’étude, dont nous verrons ci-après qu’elle est structurée en une analyse panoramique (macro et méso-didactique) et une analyse micro-didactique. Nous décrivons ci-dessous la manière dont nous avons élaboré les récits synthétiques.

L’évolution de la tâche organise le récit synthétique

La notion de tâche a été associée de manière prioritaire, en tout cas dans un premier temps, aux travaux de recherche et d’intervention développés dans le domaine de la psychologie du travail. Des différentes définitions (ex. : Hackman, 1969 ; Leplat & Pailhous, 1978 ; Parlebas, 1981) nous retenons, pour notre recherche, qu’il s’agit de la prescription faite à l’élève ou aux élèves de réaliser quelque chose en respectant certaines contraintes.

Première leçon du cycle: Maître spécialiste

Les élèves montrent à l’E le cri d’équipe préparé.

Présentation du chercheur et du thème des prochaines séances :

« des jeux qui préparent au basket ». Org. Sociale : Groupe classe 1’11

L’E dit pourquoi il est nécessaire de s’échauffer les doigts avant de faire des jeux avec un ballon. Elle décrit et montre les gestes à faire, les élèves répètent. Organisation sociale : Travail individuel en groupe-classe enfants de prendre un ballon de basket par personne.

Elle dit que l’exercice fait partie de l’échauffement mais qu’il

« n’est pas en relation avec le basket, sauf le ballon. »

L’E explique comment il faut dribbler : avec une main à la fois, à côté du corps, la tête vers le haut.

Tâche assignée : L’enseignante demande à se déplacer en dribblant et, au son du sifflet, s’arrêter et lancer/rattraper le ballon ; au son du tambourin, s’arrêter et dribbler sur place

« main gauche-main droite » ; au son de la cloche, tourner le ballon « autour de soi » (sans qu’il tombe).

L’enseignante vérifie la bonne compréhension des consignes relation d’un des sons avec le geste à faire (reprise des consignes initiales) (22’’) Organisation sociale : Groupe-classe

Clôture : L’E arrête la tâche et, avant de demander aux élèves de ranger leur ballon, elle fait un bilan de ce qui vient d’être fait

7’25 qu’ils vont jouer à trois jeux (trois terrains sont délimités dans la salle). Après chaque match, chaque équipe va changer de jeu (mêmes adversaires). est marqué quand, en se faisant des passes (pas de dribble ou de marcher) on donne le ballon à un partenaire qui est sur un tapis, et cela avant qu’un adversaire se place dessus. Tableau 3 : Extrait de la condensation des données de la 2ème leçon de la Dyade 1 (synopsis de leçon)

Si les conditions de réalisation de la tâche sont le résultat d’une co-construction maître-élèves, nous gardons cependant la formulation « tâche assignée »150 (cf. tableau 3, tâche « Les trois sons »). En effet, nous partons de l’idée que la gestion de l’avancement du temps didactique est principalement l’affaire de l’enseignant (Chevallard, 1985) et qu’il revient à ce dernier d’assumer la responsabilité de clore le moment des consignes initiales et de demander aux élèves de se confronter au dispositif de travail conçu. En ce qui concerne la description et la compréhension de l’action in situ, nous reprenons à notre compte la position de Schubaueur-Leoni et al. (2007) pour lesquelles l’étude de la mésogenèse est première.

Chaque tâche peut être ainsi décomposée en différentes « phases », chacune se rapportant à des intentions et des actions spécifiques et pouvant être circonscrites dans le temps et dans l’espace. Pour le repérage des signaux de début et de fin de la tâche, nous avons retenu les productions verbales de l’enseignant (ex. : « bien, maintenant, deuxième tâche ») mais aussi les signaux sonores conventionnellement construits avec les élèves (ex. : plusieurs coups de sifflet signifient que le match est fini et que les élèves doivent se regrouper au centre du terrain).

Les phases de la tâche

Voyons maintenant les quatre phases de la tâche telles que nous les avons décrites.

(i) La phase « consignes et discussion initiales » : Ce moment correspond à la mise en place du milieu d’étude initial. C’est-à-dire, la mise en évidence verbalement et/ou gestuellement par un ou des acteurs (enseignant, élève(s)) des conditions qui seront retenues pour la réalisation de la tâche. Ces conditions peuvent être accompagnées d’échanges portant sur des dimensions très diverses. Par exemple, la tentative de la part de l’enseignant de donner du sens à ce qui sera réalisé, la mise en relation de la tâche avec ce qui a été déjà réalisé en classe ou avec les leçons à venir. Lors de la co-définition de la tâche, il est possible d’identifier des éléments en lien avec : le but de la tâche (ce qui est à faire), les critères de réalisation (règles à respecter, gestes qui doivent être faits, etc.), l’aménagement matériel et social (ex. : travail en sous-groupe, un ballon de basketball pour deux élèves…), les critères de réussite (gagne l’équipe qui a fait plus de points…) et le signal d’achèvement (à quel moment la tâche est

150 La notion de tâche prescrite telle que nous la mobilisons a des similitudes avec le terme « dispositif didactique » proposé par Schneuwly et al. (2005). Pour ces auteurs, il désigne « le déploiement d’outil d’enseignement (support matériel, consignes et modes de travail) visant à montrer et à traiter les différentes dimensions de [l’objet enseigné] » (p.85).

finie). Ces éléments sont à considérer comme faisant partie des processus liés à la mésogenèse.

(ii) La phase « activité motrice orientée » (AMO) : Cette phase débute lorsque l’enseignant signifie aux élèves qu’ils doivent ou peuvent commencer à se confronter à la tâche telle qu’elle a été co-définie. Dans notre tableau 3 ci-dessus (voir la ligne 4’51 à 6’22), nous décrivons les éléments saillants de l’activité des élèves ainsi que les interventions de l’enseignant réalisées en cours d’action.

(iii) La phase « intermède » : Ce terme désigne l’arrêt par l’enseignant de l’AMO et le début du moment de prise de parole. Celui-ci correspond souvent à l’action de régulation didactique (ex. : mise en évidence d’un trait pertinent), mais aussi la gestion du groupe classe (discipline, gestion des conflits). Cette « coupure » nous semble révélatrice du fonctionnement de la discipline EP. Elle marque l’alternance et l’interdépendance de l’activité de résolution de la tâche, fondamentalement motrice, et des moments de mise à distance en position méta, dans lesquels l’action de l’enseignant s’avère présente pour guider la réflexion des élèves ou pour introduire de nouveaux repères dans la mésogenèse.

(iiii) La phase « clôture » : Elle correspond à la discussion qui suit la dernière phase d’AMO de la tâche. Elle précède ainsi le début d’une autre tâche ou la fin de la leçon. Comme nous le verrons plus loin (description et analyse des situations in situ), la « clôture » peut être menée sous forme d’une discussion. Mais il arrive, par exemple, que l’enseignant arrête l’activité que les élèves sont en train de réaliser (phase AMO) et dit aux élèves : « stop, exercice suivant ».

S’il y a une certaine linéarité dans la succession de ces phases, la deuxième et la troisième peuvent cependant apparaître à de nombreuses reprises. C’est le cas, par exemple, lorsqu’à la fin de l’intermède, l’enseignant propose une deuxième phase d’AMO, suivie après par un autre « intermède » et ainsi de suite.

Après cet exposé de la manière dont chaque leçon est décrite, nous présentons ci-après le troisième étage de construction de la vue synoptique.

6.2.1.3. Les repères temporels du cycle et des tâches selon les « moments de

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