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Section 1 : Une démarche qualitative exploratoire pour l’étude des opportunités

1.4. La validité d’une recherche qualitative interprétative

Dans une méthodologie de recherche quantitative, il existe des critères statistiques définis qui permettent de défendre la qualité des résultats d’une recherche. Les résultats d’une méthodologie qualitative ont par contre été toujours entachés d’un certain scepticisme à cause du manque de critères objectifs standards (Pratt, 2008). Plusieurs auteurs en méthodologie ont proposé des approches permettant de donner une certaine rigueur à l’analyse qualitative. Ils ont surtout rappelé le danger qui consiste à vouloir transférer des critères issus des recherches quantitatives déductives aux analyses qualitatives interprétatives. Avenier et Thomas (2012) par exemple, avancent que la validité externe qui consiste à s’assurer du transfert de la connaissance produite à toute une population (principe de généralisation) ne concerne pas la recherche qualitative. Le chercheur qualitatif doit donc se focaliser sur la cohérence interne de sa recherche, c’est-à-dire la validité interne.

La validité interne assure la cohérence totale de la recherche. Elle assure sa légitimité (Hlady-Rispal et Jouison-Laffitte, 2014). En l’absence de critères standardisés, l’exigence est de rendre explicite le pouvoir explicatif du modèle développé par la recherche. La rigueur et la fiabilité interne vont concerner la phase de constitution et d’analyse du matériau empirique (Avenier et Thomas, 2012). Il faut montrer le chemin cognitif qui permet d’arriver au résultat. Le lecteur extérieur à la recherche doit pouvoir suivre le processus, de la mise en perspective de la question de recherche à l’inférence des résultats. Selon la mise en perspective de la question de recherche, une démarche qualitative pertinente est celle qui sait créer une open

Ensuite, il faut rendre explicite l’accès aux données et leur traitement (Cunliffe et Alcadipani, 2016). La pertinence d’une recherche qualitative se basant sur l’intelligence créative du chercheur, ce dernier doit donner à voir sur la démarche méthodologique suivie jusqu’à la formulation des conjectures les plus plausibles. Une bonne recherche qualitative dépend de la bonne articulation de la méthodologie (Pratt, 2008). La nature de la question, la méthodologie de recherche choisie et la visée de la recherche doivent être cohérentes avec le cadre épistémologique choisi par le chercheur (Avenier et Thomas, 2012). Un autre point de validité est le mix entre le terrain et la théorie produite. La recherche qualitative interprétative ancrant son potentiel dans l’expérience des sujets, elle doit montrer l’entrelacement entre les données terrain et l’interprétation du chercheur (Pratt, 2008; Gioia, Corley et Hamilton, 2013). Les verbatim doivent être intelligemment insérés dans le corps du texte pour montrer au lecteur les sources de l’inférence. Gioia, Corley et Hamilton (2013) et Van Maanen (1979) montrent comment la recherche peut lier les expériences des sujets aux interprétations théoriques produites. Le cheminement, 1) catégories de premier ordre 2) catégories de second ordre 3) catégories agrégées, permet de montrer la validité du raisonnement qualitative. Cope (2011) à travers sa méthode de l’analyse interprétative phénoménologique, montre l’apport de cette structuration de la démarche lorsqu’une recherche veut tirer profit de l’expérience des sujets. Selon Avenier et Thomas (2015), une étude qualitative interprétative rigoureuse est celle qui conduit à la connaissance la plus proche des expériences des acteurs en situation. La validation des résultats par les sujets concernés est donc un point de validation important. Rispal et Jouison-Laffitte (2015) qualifient cette confrontation de validité interprétative. L’itération dans le raisonnement est elle-même une preuve de validité de l’analyse puisqu’elle entraîne des mises à l’épreuve successives de l’interprétation émergente (Avenier et Thomas, 2012). Les données nouvellement collectées sont utilisées pour valider les premiers essais de compréhension offrant ainsi une flexibilité dans la construction de la connaissance (Corbin et Strauss, 1990; Thorpe, 2014).

Avenier et Thomas (2012) parlent de la validité transgressive comme source de rigueur d’une analyse qualitative interprétative. Il s’agit d’un questionnement propre du chercheur sur ses hypothèses et son cadre théorique en confrontant ses résultats à des explications alternatives au phénomène étudié. C’est la triangulation théorique selon Hlady- Rispal et Jouison-Laffitte (2014) où la collecte de données doit être aussi orientée de manière à ce que les hypothèses rivales puissent être rejetées (Dumez, 2011). La triangulation peut être aussi relative aux données, c’est-à-dire que le chercheur peut se permettre d’utiliser d’autres sources de données pour valider les interprétations qu’il produit (Dumez, 2012). Notre

logique de raisonnement étant abductive, il faut rajouter qu’elle exige aussi des points de vérification qui sont : la simplicité de l’hypothèse et l’ouverture en termes de recherches futures (Dumez, 2012).

De façon externe, la recherche qualitative doit faire une contribution à un débat théorique existant (Pratt, 2008), tout en veillant à ce que sa connaissance soit acceptée par les membres de la communauté à laquelle elle s’adresse. Le chercheur doit ainsi faire évaluer ses contributions par les institutions de critiques collectives qui sont les revues et les conférences scientifiques (Avenier et Thomas, 2012). Elles sont les mieux placées pour valider la pertinence d’une connaissance clé dans un domaine.

En conclusion, l’absence de standards sur la qualité d’une recherche qualitative a fait éclore une multitude d’approches de validation de la connaissance. Nous reprenons la démarche proposée par Pratt (2008) qui propose une sorte de check list sur laquelle la recherche qualitative doit fournir des arguments afin d’améliorer sa validité. Nous y rajoutons le rôle des institutions de critiques collectives. Le tableau 9 reprend les points de validité sur lesquels nous argumentons dans notre recherche. C’est ainsi que l’histoire qui émerge de notre recherche qualitative va acquérir sa légitimité.

Tableau 9: Points de validité de notre étude (inspiré de Pratt, 2008 : p.503) Détails

1- Pourquoi cette étude ? Pourquoi la démarche qualitative est la plus adaptée et quelle est la visée ?

2- Pourquoi étudier ce contexte ? Quelle est la nature de ce contexte et quelles sont les raisons de ce choix ? Quelle est sa plus-value pour la connaissance ?

3- Qu’est-ce que j’étudie et pourquoi ? Quels participants ? quelle stratégie d’échantillonnage ? triangulation des sources ?

4- Comment s’est déroulée l’étude ? Quelle technique d’analyse des données ? Comment passe-t-on des données brutes aux

interprétations théoriques ? Quelle

transparence dans la restitution ?

5- Validation externe Quelles institutions de critiques collectives ?

Les points 1 et 2 présentés dans le tableau 9 sont déjà abordés dans les chapitres précédents. Nous avons montré le gap théorique ou le open theoretical frame (Pratt, 2008). La

pertinence de l’acteur a été démontrée et nous approfondissons la spécificité de ce terrain dans la section suivante.

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