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Paragraphe I- Les différentes hypothèses de renforcement de la prévention

B- L’organisation de la surveillance et de l’alerte

Afin de pallier des déficits en connaissances, et des difficultés de fournir des prévisions exactes et précises, les Etats de la C.E.M.A.C peuvent également faire

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Jean-Pierre BARALLE, « Participation et droit de l’urbanisme », Droit de l’environnement, Revue mensuelle d’actualité juridique n° 90, juillet/août 2001/6, p. 123.

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L’on pourrait préconiser à cet égard, une pratique qui a cours en France : le plan familial de mise en sûreté (P.F.M.S), qui est un outil élaboré et mis à la disposition des populations exposées à un risque naturel ou technologique, dont la finalité est d’anticiper la gestion d’un risque. L’élaboration des guide « je me protège en famille », qui indique des bonnes pratiques à adopter en cas de catastrophe, et enfin la conception des kits familiaux d’urgence sont entre autres exemples qui pourraient renforcer le dispositif de prévention des Etats de la C.E.M.A.C.

195 recours à la surveillance pour s’armer contre les risques. La surveillance est un «

processus continu et systématique de mesure, d’observation et de collecte des données associées, en vue de suivre le comportement d’un système, d’un processus ou d’une organisation »437. Son objectif consiste à anticiper un évènement, à évaluer une situation afin de pouvoir informer les autorités compétentes et les populations. Elle se décline en un double objectif d’anticipation de risque et d’alerte des populations pour limiter les effets des crises sur les personnes, les biens et l’environnement.

1. La surveillance.

Toute la procédure de surveillance est basée sur le principe d’anticipation en vue de mettre en place des mesures de surveillance préventive ou réactive. La surveillance préventive recherche à anticiper les évènements, évaluer la situation et transmettre les informations aux autorités chargées de la sécurité civile. Elle s’applique généralement aux risques connus qui font l’objet d’une surveillance permanente et régulière. Tel est le cas des risques de volcan, des mouvements de terrain et de certaines zones inondables. Au Cameroun, des observations sismique et volcanologique de surveillance ont été installées dans les lacs Nyos et Monoun avec l’aide des partenaires nationaux et internationaux.

Sur le lac Nyos, des colonnes de dégazage sont installées ainsi qu’un système d’alerte émettant un signal sonore pour prévenir et mettre en garde les populations en cas d’échappement de gaz. Pour préparer les populations à faire efficacement face à de tels phénomènes, des exercices de simulation ont été menés dans cette localité. Il en va de même des mesures de renforcement des structures du barrage de ce lac pour prévenir toute rupture possible et limiter les risques d’érosion. Ces mécanismes de surveillance - suivis- ont le mérite d’alerter les autorités en cas de dépassement des seuils prédéfinis438.

437

Alain DESROCHES / Alain LEROY / Jean-François QUARANTA / Frédérique VALLEE,

Dictionnaire d’analyse et de gestion des risques, op. cit. , note n° 15, p. 423.

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A l’échelle internationale et dans les pays développés, des réseaux de surveillance se multiplient. Grâce au progrès de la science et de la technologie, il devient possible d’identifier des signes précurseurs de certaines menaces par la surveillance météorologique qui permet d’anticiper la survenue des inondations, des tempêtes ou des ouragans. Généralement, la surveillance se base sur

196 . Cette responsabilité incombe prioritairement à l’Etat, mais les collectivités territoriales décentralisées y jouent un rôle non négligeable.

Garant de la sécurité des personnes, des biens et de l’environnement, l’Etat veille à la mise en œuvre des mesures d’information et d’alerte des populations en cas de catastrophes. Les textes législatifs et règlementaires des Etats de la C.E.M.A.C. le consacrent expressément. Ainsi, en cas de danger important menaçant la sécurité des personnes et des biens, il incombe à l’Etat de mettre en place des mécanismes de surveillance adéquats.

Au Cameroun par exemple, l’Observatoire National des Risques, créé auprès du Ministère chargé de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation a justement une mission de surveillance par la collecte, la gestion et la diffusion des informations sur les risques naturels, technologiques, industriels et anthropiques.

Les missions de surveillance de cet Observatoire consistent concrètement à mettre en place à l’échelle nationale, un dispositif d’observation de site et autres installations à risques assorti d’un système fiable de collecte et de transmission de données et des informations sur les risques ; créer une banque de données sur les risques et les aléas, assorties des mesures préventives appropriées, selon chaque type de risque concerné ; et publier un bulletin conjoncturel des risques et la mise en œuvre de toute autre action de sensibilisation et d’information préventive sur les risques.

La surveillance des risques inconnus, très délicate, est par contre, en l’état actuel des dispositifs de sécurité civile des Etats de la C.E.M.A.C, difficile à mettre en œuvre. André Dauphiné qui a relevé cette délicatesse soulignait qu’ « il s’agit dans

ce cas de détecter et d’anticiper la surveillance des nouveaux risques »439. Or poursuivait-il « ce type de surveillance est rarement mis en place car il est difficile de

détecter un risque qui n’est pas connu »440.

des instruments scientifiques, complétés par la surveillance humaine qui consiste en des visites

régulières et périodiques du site ou de l’objet à risque. Dans le domaine des risques naturels connus, l’action de surveillance est le plus souvent focalisée sur la surveillance de la source du danger.

439

André DAUPHINE / Damienne PROVITOLO, Risques et catastrophes Observer,

spatialiser, comprendre, gérer, Paris, Armand Colin, 2013, pp. 411, spéc. p. 309.

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197 En dépit de la complexité de la matière, les collectivités locales doivent apporter leur concours à l’action de surveillance. Elles peuvent mettre en place leur propre dispositif de surveillance des phénomènes locaux. Il n’en saurait être autrement, car le risque concerne d’abord les pouvoirs locaux et les politiques locales. Même lorsqu’il présente des conséquences nationales, il est toujours fondamentalement local. Il parait donc légitime que les populations soient les premières considérées et que la gestion des risques puisse relever pour une grande part des instances locales.

La décentralisation en cours dans ces Etats, devrait faire des maires des véritables pivots locaux de la prévention des risques et des crises de proximité d’une part, et des vecteurs de production et de diffusion de l’information préventive d’autre part. Bénéficiant de l’appui des autres services publics de l’Etat et de l’encadrement des autorités administratives, les maires devraient pouvoir jouer un rôle important tant dans le processus de surveillance que dans le déclenchement de l’alerte.

2. L’alerte.

Contrairement à l’alarme qui est un dispositif destiné à prévenir les autorités contre un danger, l’alerte, selon le Petit Robert, est un « signal préventif d’un danger

et appelant à prendre toutes les mesures de sécurité utiles ». La doctrine distingue

deux situations d’alerte :

« L’alerte préventive, qui s’inscrit dans le moyen ou le long terme et qui permet d’informer quelques jours ou heures à l’avance les autorités et les populations de l’arrivée d’une menace et l’alerte de l’urgence, qui elle s’inscrit dans le court terme, voire l’immédiat et est rapidement relayée par une alarme. […] L’action d’alerter se décompose donc en trois phases : l’information, qui permet d’annoncer le danger, le déclenchement de l’alerte, et la phase d’alarme »441.

Dans ce sens, l’autorité normative du Congo la qualifie comme « une invite à

prendre des mesures pour faire face à la situation survenue »442. Elle vise à tenir

441

André DAUPHINE / Damienne PROVITOLO, Risques et catastrophes Observer,

spatialiser, comprendre, gérer, supra, note n° 439, p. 311.

442

Article 2 du Décret [Congolais] n°2001-249 du 26 mai 2001 portant organisation de secours en cas de catastrophes naturelles ou d’accidents majeurs.

198 informées les populations de l’imminence d’une menace mettant en jeu leur sécurité, et permet de prendre à l’instant des mesures de protection et de précaution nécessaires.

En cas de menace grave, d’accident majeur ou de catastrophe, l’information régulière des populations doit être recherchée par tous les moyens de communication possibles.

Les dispositifs d’alerte et de diffusion des consignes de sécurité ne sont pas suffisamment réglementés dans les Etats de la C.E.M.A.C443.

Cette absence de règlementation est souvent à l’origine de nombreux tâtonnements et de grands retards observés dans le déclenchement des secours, aggravée par le déficit criard des moyens de communication et l’accès difficile de certaines zones. La catastrophe du lac Nyos survenue en août 1986 dans une petite localité Camerounaise en est l’un des exemples les plus illustratifs.

En effet, au cours de la nuit du 20 au 21 août, le petit village de Nyos, situé dans la région du Nord - ouest du Cameroun, jusque-là très peu connu, s’est révélé au peuple camerounais et à la communauté internationale suite à une émanation de gaz toxique faisant plus de mille deux cent morts et de nombreux dégâts matériels dont la disparition d’un important cheptel bovin.

Le dispositif d’alerte lors de cette catastrophe a révélé toutes ses limites. Il n’est pas excessif de conclure à l’inexistence d’un tel dispositif, au regard de la description des faits par Olivier Leenhardt444. Les enseignements tirés lors d’une

443

Le texte Congolais par exemple précise tout simplement que « l’alarme est donnée sans

délais par le témoin de l’accident ou du sinistre au poste de police ou de gendarmerie le plus proche du lieu du sinistre. Le préposé des postes et des télécommunications, en contact avec le témoin qui sollicite les secours est tenu de le mettre immédiatement en liaison avec les autorités de police ou la gendarmerie; l’appel du témoin est précédé de la mention ‘’avis de sinistre’’. Dès réception du message du témoin, le personnel de police ou de gendarmerie alerte à son tour les autorités administratives ». (Articles 12 à 14 du décret du 26 mai 2001 portant organisation de secours en cas

de catastrophes naturelles ou d’accidents majeurs.)

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Il note précisément que : « Remarquons d’abord que la lune était pleine le 19 août. Si l’on

pense que les phases de la lune ont de l’importance dans le déclenchement des catastrophes, nous voici deux jours après la pleine lune. […] Enfin, A. ZOGNING a établi que le vent n’était que de 5 à 6 m/s.NGUH-MBI Emmanuel Apala, chef du Centre de santé de Subum passa à Wum la nuit du 21 au 22 août. Pour reprendre son poste à 8 heures du matin, il partit de Wum à 5 heures sur sa moto. […] A l’approche du plateau de Cha, (probablement vers 7 heures) une odeur l’alerta : sa moto s’étant arrêtée, il crut que son moteur brulait. Ayant chaud, il enleva son écharpe. Il atteignit à pied le plateau