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La sécurité civile dans les Etats de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC)

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Academic year: 2021

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La sécurité civile dans les Etats de la Communauté

Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale

(CEMAC)

Patrice Emmanuel Ngolle Iii

To cite this version:

(2)

Délivré par l’Université de Montpellier

Préparée au sein de l’école doctorale

Droit et Science politique

Et de l’unité de recherche : CREAM

Spécialité : Droit public (EA 2038)

Présentée par Patrice-Emmanuel NGOLLE III

Soutenue le 15 décembre 2015 devant le jury composé de

M. Dominique MAILLARD DESGREES DU LOU, Président / Rapporteur Professeur, Université Paris-Descartes (Paris 5)

M. Ahmed MAHIOU Rapporteur Directeur de Recherche émérite, CNRS

M. Samuel-Jacques PRISO ESSAWE

Maître de conférences, Université d’Avignon et

des Pays du Vaucluse Membre

M. François-Xavier FORT Directeur de thèse Maître de conférences, Université de Montpellier

La sécurité civile dans les Etats de la

Communauté Economique et Monétaire de

(3)

1

THESE

pour obtenir le grade de

DOCTEUR

Délivré par L’UNIVERSITE DE MONTPELLIER

Ecole doctorale de Droit et Science politique

Unité de recherche CREAM

Spécialité : Droit public Présentée par

Emmanuel Patrice NGOLLE III

Titre :

LA SECURITE CIVILE DANS LES ETATS DE LA COMMUNAUTE

ECONOMIQUE ET MONETAIRE DE L’AFRIQUE CENTRALE

(C.E.M.A.C.)

Soutenue le 15 décembre 2015

JURY :

M. Dominique MAILLARD DESGREES du LOU, Professeur,

Université de Paris Descartes (Paris 5) ………. ……Président / Rapporteur M. Ahmed MAHIOU, Directeur de Recherches Emérite, C.N.R.S, ………Rapporteur M. Samuel-Jacques PRISO ESSAWE, Maître de Conférences,

Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse ……… Membre M. François - Xavier FORT, Maître de Conférences,

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(5)
(6)

4

REMERCIEMENTS

Comment remercier tous ceux qui ont bien voulu contribuer à la réalisation de ce travail ? Je voudrais remercier en première instance monsieur François - Xavier Fort, qui a porté ce projet à bout de bras. Je ne laisserai pas l’opportunité de retourner contre lui ses propres armes pacifiques en lui disant merci pour les trésors d’humanité combative et modestie constructive qu’il offre à ceux qui ont la chance de le côtoyer et de travailler avec lui.

Je voudrais à présent remercier tous ceux qui m’ont accompagné à aller jusqu’au bout de cette entreprise exaltante.

Je pense en particulier au Professeur Luc Sindjoun, au Professeur Jean-Claude Tcheuwa, au Professeur James Mouangue Kobila, au Dr Jacques Biakan, au Dr Henri Zanga Nkollo et au colonel Floribert Njako, qui ont amicalement accepté relire le tapuscrit.

Leurs observations ont contribué à améliorer la qualité du produit final.

Je ne serais pas complet si je n’adressais pas un grand signe de reconnaissance à Madame Catherine Désirée Ngolle III, mon épouse, et à mes enfants Lionel Raynald et Boris Gérald Ngolle III, qui m’ont toujours donné l’amour qui ensoleille mon existence.

(7)

5

SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE

PREMIERE PARTIE

LA DOMINANTE DU MODELE CLASSIQUE DANS LE DROIT DE LA SECURITE CIVILE DES ETATS DE LA C.E.M.A.C

Titre I – LE CARACTERE CLASSIQUE DU CADRE JURIDIQUE D’ANTICIPATION DES RISQUES DANS LE DROIT DE LA SECURITE CIVILE DES ETATS DE LA C.E.M.A.C

CHAPITRE I – LE CARACTERE CLASSIQUE DE L’ORGANISATION DE LA PREVENTION DANS LE DROIT DE LA SECURITE CIVILE DES ETATS DE LA C.E.M.A.C

Section I- Les structures et les ressources de prévention des risques et des crises dans le droit de la sécurité civile des Etats de la C.E.M.A.C

Paragraphe I - La diversité des structures de prévention Paragraphe II- La diversité des ressources de prévention Section II- Le partage de compétences

Paragraphe I - La détermination des compétences de l’Etat

Paragraphe II- La compétence des collectivités territoriales décentralisées

CHAPITRE II- LE CARACTERE CLASSIQUE DES NORMES DE PREVENTION DES RISQUES

Section I- La prévention des risques majeurs

Paragraphe I - La prévention des risques majeurs d’origine non humaine

Paragraphe II- La prévention des risques et des crises majeurs d’origine humaine

Section II – Les dispositifs de renforcement de la prévention Paragraphe I- Les différentes hypothèses de renforcement de la prévention

Paragraphe II – L’apport de la précaution

(8)

6 CHAPITRE I – LE CLASSICISME DES NORMES DE GESTION OPERATIONNELLE

Section I – Les règles relatives à la planification opérationnelle Paragraphe I – Le dispositif d’organisation de secours Paragraphe II – La gestion opérationnelle

Section II - L’élargissement des missions de prévention au niveau sous régional et international

Paragraphe I – La coopération préventive dans le cadre des risques et des catastrophes d’origine non humaine Paragraphe II - La coopération préventive dans le cadre des catastrophes d’origine humaine

CHAPITRE II – LE CLASSICISME DES NORMES DE GESTION POST- OPERATIONNELLE

Section I – L’accompagnement du retour à la normale Paragraphe I – L’assistance aux populations

Paragraphe II – La démarche du retour d’expérience Section II – Le dédommagement des victimes de catastrophes

Paragraphe I – L’application des règles de la responsabilité en droit interne

Paragraphe II – La réparation des dommages dans le cadre de la responsabilité internationale de l’Etat

DEUXIEME PARTIE

LES LINEAMENTS D’UNE THEORIE EMERGENTE DANS LE DROIT DE LA SECURITE CIVILE DES ETATS DE LA C.E.M.A.C.

TITRE I- L’ECHO D’UNE THEORIE EMERGENTE DANS LE DROIT DE LA SECURITE CIVILE DES ETATS DE LA C.E.M.A.C

CHAPITRE 1er- LA VULNERABILITE, UNE INSTILLATION PARADIGMATIQUE DANS LE DROIT DE LA SECURITE CIVILE DES ETATS DE LA C.E.M.A.C.

Section I- L’énoncé de la notion de vulnérabilité dans le droit de la sécurité civile des Etats de la C.E.M.A.C.

Paragraphe I- Le cadre d’analyse des vulnérabilités internes

(9)

7 Section II- Les extensions attendues du concept de vulnérabilité dans le droit de la sécurité civile des Etats de la C.E.M.A.C.

Paragraphe I- Mettre les enjeux au centre des politiques publiques de sécurité civile des Etats de la C.E.M.A.C. Paragraphe II- Construire les politiques de risques authentiques autour de la notion de vulnérabilité

CHAPITRE II- LES INSTILLATIONS PARADIGMATIQUES DU CONCEPT DE RESILIENCE DANS LE DROIT DE LA SECURITE CIVILE DES ETATS DE LA C.E.M.A.C.

Section I- La nécessité du concept de résilience dans le droit de la sécurité civile des Etats de la C.E.M.A.C.

Paragraphe I- La signification du concept de résilience Paragraphe II- Les bases conceptuelles théoriques de l’évaluation de la résilience

Section II- Les avancées du concept de résilience dans le droit de la sécurité civile des Etats de la C.E.M.A.C.

Paragraphe I- Les influences du concept de résilience dans le droit de la sécurité civile des Etats de la C.E.M.A.C.

Paragraphe II- La nécessité d’une prise en compte plus complète du concept

TITRE II - LA CONSTRUCTION D’UN DROIT SOUS REGIONAL DE SECURITE CIVILE

CHAPITRE I – L’IDENTIFICATION DES AXES DE PROGRES DE LA CONSTRUCTION D’UN DROIT SOUS REGIONAL DE SECURITE CIVILE

Section I- La préconisation des axes stratégiques visant à la construction d’un droit sous régional de sécurité civile

Paragraphe I- Les stratégies générales concourant à la mise en place d’un droit sous régional de sécurité civile des Etats de la C.E.M.A.C.

Paragraphe II- Les stratégies opérationnelles : la promotion d’une « approche proactive » des risques comme conséquence de l’obligation de prévention

Section II- La préconisation des principes communautaires nécessaires favorisant la mise en place d’un droit sous régional de sécurité civile

(10)

8 Paragraphe II - La préconisation du principe de subsidiarité au sein des Etats de la C.E.M.A.C.

CHAPITRE II- LE RENFORCEMENT DU CADRE DE CONSTRUCTION D’UN DROIT SOUS REGIONAL DE SECURITE CIVILE

Section I- La difficile identification d’un cadre de construction d’un droit sous régional de sécurité civile

Paragraphe I – La portée limitée de la construction d’un droit sous régional de sécurité civile au sein de la C.E.E.A.C.

Paragraphe II – L’absence d’initiative dans le cadre de la C.E.M.A.C

Section II- Le dépassement de l’alternative C.E.E.A.C.- C.E.M.A.C.

Paragraphe I- Les aménagements institutionnels nouveaux

Paragraphe II - L’élaboration conséquente de nouvelles normes

(11)

9

PRINCIPALES

ABREVIATIONS

A.C.P-C.E.E : Afrique Caraïbe Pacifique-Communauté Economique Européenne A.I.E.A : Agence Internationale de l’Energie Atomique ;

B.A.D : Banque Africaine de Développement ;

C.C.N.U.C.C : Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques ;

C.C.O : Comité de Coordination Opérationnel ;

C.C.P.N.U.Q.S.A.C : Comité Consultatif Permanent des Nations Unies sur les Questions de Sécurité en Afrique Centrale

C.E.D.H : Commission Européenne des Droits de l’Homme C.E.A : Communauté Economique Africaine ;

C.E.E.A.C : Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale ; C.E.M.A.C : Communauté Economique et Monétaire d’Afrique Centrale ; C.G.T.C : Code Général des Collectivités Territoriales ;

C.I.L.S.S : Comité Inter-Etats de Lutte contre la Sècheresse ;

C.I.I.S.E : Commission Internationale de l’Intervention et de la Souveraineté des Etats ;

C.N.S.P : Corps National des Sapeurs-Pompiers ;

C.N.U.C.E.D : Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement ;

C.N.V.A : Computer Network Vulnerability Assessment Program ; C.O.P.A.X : Conseil de Paix et de Sécurité en Afrique Centrale C.O.T.E.S.T : United Kingdom Counter Terrorism Strategy ;

C.R.E.A.M : Centre de Recherches et d’Etudes Administratives de Montpellier D.A.P : Direction des Affaires Politiques ;

(12)

10 D.P.C : Direction de la Protection Civile ;

E.C.O.S.O.C : Conseil Economique et Social des Nations Unies (Economic and Social Council)

E.I.E : Etude d’Impact Environnemental ; F.C.R : Fonds de Concours pour Risques ;

G.I.E.C : Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution Climatique ; I.C.P.E : Installation Classée pour la Protection de l’Environnement ;

I.G.A.D.D : Office Intergouvernemental pour la Lutte contre la Sècheresse et le Développement;

I.S.D.R : International Strategy for Disaster Reduction I.S.O : Organisation Internationale de Normalisation ;

M.I.N.A.T.D : Ministère de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation ; N.E.P.A.D : Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique ;

O.I.P.C : Organisation Internationale de Protection Civile ; O.I.S.R : Organisation d’Intégration Sous Régionale ; O.M.S : Organisation Mondiale de la Santé ;

O.N.G : Organisation Non Gouvernementale ; O.N.R : Observatoire National des Risques ;

O.N.U/S.I.P.C- Afrique : Bureau Afrique de la Stratégie des Nations Unies pour la Prévention des Catastrophes ;

O.R.S.E.C : Organisation de Réponse de Sécurité Civile ; O.U.A : Organisation de l’Unité Africaine ;

(13)

11 P.D.U : Plan Directeur d’Urbanisme ;

P.E.R : Plans d’Exposition aux Risques ; P.L.U : Plans Locaux d’Urbanisme ;

P.N.P.R.R.C : Plate-Forme Nationale pour la Prévention et la Réduction des Risques de Catastrophes ;

P.N.U.D : Programme des Nations Unies pour le Développement ; P.N.U.E : Programme des Nations Unies pour l’Environnement P.O.I : Plan d’Organisation Interne ;

P.O.S : Plan d’Occupation des Sols ; P.P.I : Plan Particulier d’Intervention ;

P.P.R.T : Plan de Prévention des Risques Technologiques ; P.S : Plan de Secteur ;

P.S.S : Plan de Secours Spécialisé ;

P.S.M.V : Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur ;

P.S.R.A.R.R.C : Projet de Stratégie Régionale Africaine pour la Réduction des risques de Catastrophes ;

P.S.U : Plan Sommaire d’Urbanisme ; R.C.A : République Centrafricaine ;

R.C.A : Réunion de Coordination Administrative ; R.E.X : Retour d’Expérience ;

R.J.P.I.C : Revue Juridique et Politique Indépendance et Coopération R.R.C : Réduction des Risque et Catastrophes ;

S.C.O.T : Schéma de Cohérence Territoriale ;

S.D.A.U : Schéma Directeur d’Aménagement Urbain ;

(14)

12 U.A : Union Africaine ;

U.D.E.A.C : Union Douanière et Economique d’Afrique Centrale ; U.I.C : Unité Technique de Contrôle ;

(15)

13

INTRODUCTION

GENERALE

« [N]ous sommes aujourd’hui confrontés à l’exigence d’une nouvelle mutation, encore bien plus décisive. Il ne faut certes rien oublier de ce qui fut engagé il y a quarante ans. Mais le tableau général des risques, le contexte global dans lequel il s’inscrit, requièrent un renouvellement essentiel de paradigme. Des nouvelles réalités sont à maîtriser, qui appellent de nouvelles visions fondamentales, de nouvelles interrogations scientifiques, de nouvelles dynamiques opérationnelles ».

Patrick LAGADEC, « Le droit des catastrophes entre consolidation et réinvention »,

in : Actes du Colloque du Centre Européen de recherche sur le risque, le droit des

accidents collectifs et des catastrophes (CERDACC), sur Les sciences juridiques à

(16)

14 La sécurité des personnes et des biens constitue aujourd’hui un défi majeur pour la société internationale, autant que pour chaque pays. Il n’est pas exagéré d’affirmer que les catastrophes rythment notre quotidien. La liste des catastrophes meurtrières s’allonge tous les ans. Les victimes se comptent par millions1. Aux peurs anciennes, s’ajoutent des peurs nouvelles, comme semble le souligner François-Xavier Albouy :

« La croissance exponentielle de la population mondiale, le développement prodigieux des techniques, des industries, du rendement des terres agricoles nous inquiètent et nous laissent penser que des conséquences irréversibles sur l’environnement seront le legs empoisonné que fera notre époque aux générations futures »2.

Mettant en exergue la fragilité humaine, Yves Dupont fait remarquer que « la peur, pour ne pas dire l’effroi que nous sommes de plus en plus nombreux à éprouver lorsque nous nous laissons aller à imaginer les catastrophes dont sont potentiellement porteuses les inventions les plus récentes des technosciences, n’est en rien le produit d’une imagination pathologique qui serait propre aux ’’bio-catastrophistes’’, [elle] pourrait bien finir par engendrer l’obsolescence de l’homme »3.

Il n’est de semaine qui ne soit marquée par des récits apocalyptiques ou par des activités telluriques intenses4. Cette menace réelle, du fait de son impact dévastateur sur la sécurité humaine et le développement, a également mobilisé, plus que toute autre menace à la sécurité des nations, tous les acteurs de la société internationale (Etats, Organisations Internationales, organisations d’intégration régionale, organisations non gouvernementales et d’autres acteurs de la société civile).

1

D’après la Stratégie Internationale de Prévention des Catastrophes (ci – après : « S.I.P.C »), en 2012, 310 catastrophes ont coûté la vie à plus de 9 300 personnes et affecté 106 millions d’autres.

in : Le bilan économique des catastrophes naturelles en 2012, www.notre-planete : environnement,

développement durable et science de la terre. Consulté 07-07-2013.

2

François-Xavier ALBOUY, Le temps des catastrophes, Paris, éd. Descartes et Cie, 2002, pp. 172, spéc. p. 12.

3

Yves DUPONT (dir.), Dictionnaire des risques, Paris, Armand Colin, 2e éd. , 2007, pp. 533, p. XXII.

4

François-Xavier ALBOUY, ibid (note n° 2), p. 12. L’auteur fait remarquer que « [d]ans toutes

(17)

15 Aujourd’hui, cette généralisation de la menace se trouve plus que jamais prouvée, tant le constat est établi que, dans le monde interdépendant de ce siècle, aucun pays ne peut prétendre en être à l’abri. Et, lorsque la catastrophe survient et provoque de larges et profondes turbulences, qu’elle soit d’origine naturelle ou humaine, les effets, virtuellement identiques, quel que soit le continent, sont aggravés en Afrique en raison de la précarité de l’habitat et des faiblesses des moyens de prévention et d’intervention. Le constat de Patrick Lagadec est sans appel :

« [l]a coupe peut paraitre sévère. On est en effet tenté de s’arrêter aux lourds tributs payés aux catastrophes naturelles : 4,6 millions de morts et 233 millions de victimes dans le monde entre 1900 et 1976 – soit une moyenne annuelle de 60 000 tués et de 3 millions de blessés et de sans - abris -, 95 % des victimes étant dénombrées en pays du Tiers Monde »5.

Ce constat est d’actualité en Afrique, et particulièrement dans les Etats de la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (ci-après : « C.E.M.A.C. ») encore vulnérables et très peu armés pour affronter les crises. Rhoda Peace Tumusiime, membre de la commission de l’Union Africaine (ci-après : « U.A. ») notait précisément qu’en moyenne, presque deux catastrophes de proportions significatives sont enregistrées chaque semaine dans la région de l’Afrique depuis l’an 2000. Quelques-unes seulement font les titres de l’actualité mondiale alors qu’elles contribuent toutes à la réduction de la capacité des africains à survivre et à prospérer.6

I -

CONTEXTE

DE

L’ETUDE

L’Afrique est l’un des continents où le nombre de catastrophes a significativement augmenté au cours de la dernière décennie. Il ressort du rapport

5

Voir Patrick LAGADEC, La civilisation du risque. Catastrophes technologiques et

responsabilité sociale, Paris, Seuil, 1981, pp. 240. , spéc. p.17.

6

(18)

16 mondial sur les catastrophes de 2001, que 573 245 personnes sont décédées du fait des catastrophes survenues en Afrique au cours de la décennie 1981-1990. Selon des auteurs,

« [l]’ampleur des catastrophes naturelles dans les pays du Sud est accentuée par l’importance des pertes humaines. Les pays les moins développés ont enregistré depuis trente ans (1979-2008) 91, 5 % des décès […] alors qu’on y recense 70 % des témoignages des évènements dommageables »7.

Les effets de ces catastrophes, qu’elles soient d’origine naturelle ou technologique, ainsi que les pertes économiques et sociales qui en résultent sont de plus en plus fréquents et constituent une menace importante pour le développement durable 8 de ce continent.

Dans la zone C.E.M.A.C., les politiques de prévention et de gestion des catastrophes ainsi que les mécanismes de réduction des risques de crises perceptibles à divers niveaux d’avancement ont une efficacité limitée. Les obstacles à une gestion efficace des risques sont encore très nombreux, ils sont semblables à ceux qui s’opposent au développement. C’est notamment l’insuffisante connaissance des aléas et des risques aussi bien par les autorités que par les populations, le statut du foncier, les contraintes financières et souvent le problème de gouvernance de l’Etat. L’urgence et la nécessité d’une approche stratégique de renforcement et d’amélioration de leur efficacité et de leur efficience s’est traduite par la mise en place d’une politique de Réduction des Risques de Catastrophe (ci-après : « R.R.C. »).

7

Frédéric LEONE / Nancy MESCHINET DE RICHEMOND / Freddy VINET, Aléas naturels et

gestion des risques, Paris, P.U.F, 2010, pp. 284. , spéc. p. 181.

8

L’expression renvoie selon Jean Salmon, à « un mode de développement qui vise à

satisfaire les besoins de développement des générations présentes sans compromettre les capacités des générations futures à répondre aux leurs ». [Voir de cet auteur, Dictionnaire de droit international

public (dir.), Bruxelles, Bruylant / AUF, 2001, pp. 1198, spéc. p. 336.] Le développement est

« durable » s’il est conçu de telle sorte qu’il puisse assurer la pérennité pour le bénéfice des générations futures. Il s’agit donc d’un développement soucieux de la protection de l’environnement, donc du « capital nature » que l’on doit préserver afin que les générations futures puissent, elles aussi, bénéficier du droit au développement. Bien que moins fréquemment utilisée, les spécialistes du droit de l’environnement utilisent souvent pour les mêmes fins l’expression de « développement

(19)

17 Afin d’examiner les questions relatives aux catastrophes dans tous leurs aspects, l’Union Africaine, le Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique après : « N.E.P.A.D. »), la Banque Africaine de Développement (ci-après : « B.A.D. ») et le Bureau Afrique de la Stratégie Internationale des Nations Unies pour la Prévention des Catastrophes (ci-après : « O.N.U./S.I.P.C.-Afrique ») constituent le cadre approprié de directives et d’orientations stratégiques aux fins d’intégrer la prévention des catastrophes dans le processus et dans les programmes de développement durable.

Dans cette perspective, la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale9 (ci-après : « C.E.E.A.C. ») met progressivement en œuvre une stratégie de Réduction des Risques de Catastrophe au niveau de la sous-région de l’Afrique centrale, qui répond aux recommandations formulées par les instances internationales et Africaines.

C’est dans ce contexte que seront successivement évoquées, la vulnérabilité des Etats de la C.E.M.A.C. face aux risques et aux catastrophes, l’insouciance et l’impréparation des Etats de cette zone, enfin, les contraintes de politiques gouvernementales qui en découlent.

- La vulnérabilité des Etats de la zone C.E.M.A.C

La vulnérabilité10 des Etats de la zone C.E.M.A.C. est appréhendée à travers la typologie classique qui distingue les risques d’origine naturelle des risques d’origine technologique.

En ce qui concerne la première catégorie des risques, le cadre physique des Etats de la C.E.M.A.C les y expose naturellement. L’on désignera par risque naturel,

9

La C.E.E.A.C. est une communauté économique sous régionale qui comprend outre les six Etats de la C.E.M.A.C. , la République Démocratique du Congo, l’Angola, le Burundi ainsi que Sao-Tomé et Principe.

10

Selon Michel DOBRE, la notion de vulnérabilité désigne « toute forme de fragilité, matérielle

ou morale, individuelle ou collective. Aujourd’hui, le concept de vulnérabilité permet de qualifier un état de fragilité des sociétés face aux risques technologiques majeurs et à des changements socio-économiques qui s’accélèrent ».

Plus fondamentalement, l’auteur définit cette notion « comme l’état qui se caractérise par

(20)

18 le risque que ressent, perçoit et subit un groupe social ou un individu soumis à l’action possible d’un processus physique, ou d’un aléa. L’aléa fait partie intégrante du risque ; au premier rang des « aléas hydrométéorologiques »11 se placent les inondations, notamment dans la vallée de Batavéa au Gabon, à Bangui en République Centrafricaine (ci-après : « R.C.A. »), et dans plusieurs régions du Cameroun.12Les sécheresses récurrentes, en particulier en République Centrafricaine13, les marges semi-arides au Tchad et dans la partie septentrionale du Cameroun. Au nombre des aléas hydrométéorologiques, l’on signalera également les orages, les glissements de terrains et les feux de brousse, qui sont prédominants et font un grand nombre de victimes. Ces aléas climatiques et hydrologiques, pour reprendre les termes de Rhoda Peace Tumusiime, « plus particulièrement la

sécheresse, les inondations, les cyclones et les glissements de terrains dominent le profil des catastrophes de la région de l’Afrique, affectant en moyenne 12,5 millions de personnes par année »14.

D’autres aléas, ou « évènements imprévisibles » 15 de moindre fréquence mais non négligeables y ont cours. Il s’agit entre autres :

- de volcans inactifs qui peuvent à tout moment se mettre en éruption16 ;

11

L’aléa hydrométéorologique est un « processus ou phénomènes de nature atmosphérique,

hydrologique ou océanographique susceptibles de provoquer des pertes en vies humaines, des blessures ou autre impact sur la santé, des dégâts matériels, la perte des moyens de subsistance et de services, des perturbations sociales et économiques ou une dégradation environnementale ». Voir

Terminologie pour la Prévention des risques de catastrophe, Publication de I.S.D.R. , 2009, p. 7, http://www.unisdr.org/files/7817UNISDRTerminoloyFrench.pdf : Consultée le 23 juin 2011.

12

Il s’agit notamment de Yaoundé, de Douala, dans les régions du Nord, à l’Est et à l’extrême Nord du Cameroun.

13

Dans ce pays, l’ « on parle beaucoup de la désertification du Sahel, de l’avancée du désert

vers le sud, de la diminution des pluies, auxquelles serait liée la désertification. » Voir Pierre

SAULNIER, Le Centrafrique. Entre mythe et réalité, Paris, L’Harmattan, 2010, pp. 236. , p. 25.

14

Rhoda Peace TUMUSIIME, op. cit. , note n° 6.

15

Voir Alain DESROCHES / Alain LEROY / Jean-François QUARANTA / Frédérique VALLEE,

Dictionnaire d’analyse et de gestion des risques, Paris, Lavoisier, 2006, pp. 479, spéc. p. 50. Au sens

de la Terminologie pour la Réduction des risques et catastrophes, le terme « aléa » désigne « un

phénomène dangereux, une substance, activité humaine ou condition pouvant causer des pertes de vies humaines, des blessures ou d’autres effets sur la santé, des dommages aux biens, des pertes des moyens de subsistance et des services, des perturbations socio-économiques, ou des dommages à l’environnement ». Voir Terminologie pour la Prévention des risques de catastrophe, Publication de

I.S.D.R, op. cit. , note n° 11.

16

(21)

19 - de zones de basses terres généralement très peuplées, entourées de montagnes et/ou de cours d’eau, exposées aux risques d’inondations dans des pays où la pluviométrie atteint parfois des pointes de 11 000 mm dans certaines localités;

- de plusieurs lacs de cratères dont certains ont déjà émis des gaz toxiques, causé des pertes en vies humaines et de graves répercussions sociales17 ; - de l’invasion d’insectes nuisibles ;

A cette première catégorie de risques naturels, viennent s’ajouter les risques technologiques, favorisés par la présence :

- d’usines polluantes (usines chimiques) ;

- de dépôts pétroliers et de nombreuses stations d’essence dont la prolifération dans les centres urbains constitue une véritable menace en cas d’incendie ou d’explosion ;

- de nombreuses retenues d’eau (barrages) à des fins hydroélectriques et agricoles, dont la rupture peut causer des dégâts colossaux ;

- de centrales à gaz, centrales thermiques et pipelines.

Enfin, deux autres aléas apparemment inoffensifs exposent davantage ces Etats aux catastrophes de tous ordres. Il s’agit, premièrement, de l’urbanisation galopante et non maîtrisée et, deuxièmement, des changements climatiques. Dans la plupart de ces Etats, les difficultés pour gérer les risques sont nombreuses. Ces risques menacent les villes, mais les campagnes n’en sont pas épargnées. Cet espace sous régional fait également face, à des degrés divers, au risque d’épidémie et de certaines maladies émergentes et parfois aussi, à des risques géopolitiques.

- L’insouciance et l’impréparation des populations de la zone C.E.M.A.C

La vulnérabilité des Etats de la zone C.E.M.A.C est aggravée par plusieurs facteurs. Au premier rang de ceux-ci, l’ignorance, par la grande majorité des

17

(22)

20 populations, des questions de sécurité civile. Cette ignorance est accentuée par l’absence d’entrainement collectif des populations aux risques. Le second facteur aggravant la vulnérabilité des Etats de cette zone est l’insouciance résultant d’un pourcentage d’illettrisme assez élevé des populations (16 % au Cameroun), de la pauvreté, particulièrement dans les zones rurales, de l’incivisme des populations face à l’exigence du respect des normes d’urbanisme18. L’on mentionnera enfin, le développement technologique dans un contexte de surpopulation anarchique ; Patrick Lagadec en donne une parfaite illustration :

« Les pays pauvres sont déjà les plus touchés par les calamités naturelles ; mais voici que s’ajoutent pour eux les risques d’origine technologique et de grande échelle […] La concentration de populations propre à ces pays rend plus grave encore la menace qui les guette ; le contexte dans lequel y seront transférées nos technologies à hauts risques pourra accroître encore les menaces liées à l’utilisation de ces nouveaux outils »19.

La gestion de l’information et la communication en situation de crise, pourtant cruciales dans de tels processus, n’ont pas encore d’impact sur les populations exposées. Il ressort du Projet de Stratégie Régionale Africaine pour la Réduction des Risques de Catastrophe (ci-après : « P.S.R.A.R.R.C. ») que

« la plus grande lacune en matière de réduction des risques de catastrophe en Afrique est la faiblesse de la gestion des connaissances […] On n’accorde pas une attention suffisante et adéquate à la gestion de l’information et à la communication, ainsi qu’à la formation et à la recherche. Par conséquent, de grandes faiblesses sont observées au niveau des connaissances sur les risques de catastrophe […] Des progrès ont certes été réalisés dans l’application de l’information, de la communication et de la technologie spéciale à la gestion des catastrophes et de l’environnement en Afrique, mais la dimension humaine de la communication a suscité relativement peu d’intérêt »20.

18

Construction dans des zones interdites, tel qu’autour de dépôts pétroliers, sous des fils électriques de haute tension et dans des zones marécageuses.

19

Patrick LAGADEC, « Le Risque technologique majeur », Collection Futurisbles, Pergamon, 1979, p. 13.

20

(23)

21 Le Président de la République du Cameroun, Monsieur Paul Biya, attirait en ces termes l’attention des populations lors d’une de ses communications après les inondations de septembre 2012 survenues à l’extrême nord du Cameroun : « il

conviendrait de renforcer, à tous les niveaux et de manière régulière, l’information météorologique, afin de permettre aux populations de disposer des renseignements utiles sur les variations climatiques »21.

- Les contraintes de politique gouvernementale

Dans les Etats de la C.E.M.A.C, tout comme dans la plupart des pays en développement, les politiques de réduction des risques de catastrophe font face à plusieurs contraintes. D’abord, la déficience institutionnelle, caractérisée par le lien lâche entre l’existence des règles et leur application ou efficacité. En d’autres termes, l’existence des règles ne signifie pas que celles-ci sont appliquées ou efficaces. A cette déficience institutionnelle, s’ajoute la défaillance des pouvoirs publics et le contexte généralement morose des économies nationales de ces Etats.

Quatre types de contraintes de politique publique peuvent être identifiés. Ils sont d’ordre technique, socio-économique, institutionnels et enfin culturels.

La sécurité civile, est une politique publique guidée par l’Etat, et une activité administrative dont les fondements juridiques et les canevas institutionnels ont été déterminés par les pouvoirs publics. Les gouvernements des Etats membres de la C.E.M.A.C ont à cet égard initié des stratégies vigoureuses marquées, au plan institutionnel, par la mise en place progressive de structures de protection civile et, au plan normatif, par l’édiction de faisceaux de normes matérialisées par la publication de plusieurs textes législatifs et réglementaires qui organisent la protection des personnes, des biens et de l’environnement22.

21

Cameroon tribune n° 10183 / 6384 du vendredi 21 septembre 2012.

22

(24)

22 Des efforts ont donc été produits par les parlements et les gouvernements, en vue de l’élaboration de cadres institutionnels et normatifs fiables de réduction des risques de catastrophe. Mais, la réalité est que cette réduction des risques n’est pas encore suffisamment institutionnalisée en Afrique, particulièrement dans la sous-région de l’Afrique centrale, pertinente pour cette étude.

Les solutions techniques mises en œuvre, qui visent à contrôler l’aléa souvent par des ouvrages de génie civil (digues, barrages, murs de déviation des coulées de lave), certes indispensables, ne freinent malheureusement pas la vulnérabilité des populations exposées et assurent une protection insuffisante contre l’endommagement qui progresse avec les enjeux.

Par ailleurs, comme il est clairement établi que la protection des personnes et des biens est un devoir pour les Etats, les gouvernants ont la responsabilité de renforcer les capacités des populations à prévenir les catastrophes ou à les gérer de manière à limiter leur impact. Mais, du fait des contraintes socio - économiques parfois très fortes, les populations demeurent extrêmement vulnérables aux risques de catastrophe en Afrique. Les solutions sociales, dont l’objectif est d’améliorer les capacités de réponse en mettant davantage en avant les causes de la vulnérabilité sociale, ne permettent pas de résoudre le problème. La sensibilisation, qui en est l’un des volets, semble être encore une panacée. En témoigne l’observation de Jean - Claude Thouret sur l’évaluation et la prévention des risques naturels dans les villes d’Amérique latine, tout aussi pertinente pour les Etats de la C.E.M.A.C :

« Les campagnes de sensibilisation, menées sans étude rétrospective, négligent le fait que l’intérêt formel des autorités civiles pour ces campagnes […] est d’abord motivé par un souci de légitimité institutionnelle. Chez les politiques, des préoccupations plus urgentes sont dictées par les contraintes économiques et financières des Etats et surtout par le contexte déprimé de toutes les économies […] »23.

Plus encore dans ces Etats, les autorités publiques montrent peu d’intérêt, qui masque en fait une incapacité, à s’approprier des conclusions des études sur les

23

Jean-Claude THOURET, « Evaluation, prévention et gestion des risques naturels dans les

villes d’Amérique latine », in : Yvette VEYRET (dir.), Les risques, Paris, éd. SEDES / VUEF, 2003, pp.

(25)

23 risques de catastrophe. Ces attitudes expliqueraient les facteurs structurels limitants tels que l’insuffisance de financement des impératifs de sécurité civile, le contrôle déficient, et les objectifs publics parfois ambigus et contradictoires.

De manière générale, l’état d’avancement du cadre institutionnel des Etats de la C.E.M.A.C est à plusieurs vitesses et varie d’un pays à un autre. Certains Etats ont de l’avance, le Cameroun et le Gabon notamment, où l’expérience des catastrophes ont mené à l’émergence des programmes de prévention des risques ainsi qu’à la mise en place des systèmes de gestion et de planification des catastrophes. D’autres, caractérisés par une politique de gestion encore insuffisante, doivent encore comprendre les enjeux de la sécurité civile. L’on peut ranger dans ce groupe le Congo et le Tchad. Les systèmes de prévention et de gestion des risques existent, mais la catastrophe comme celle de Mpila, survenue le 4 mars 2012 au Congo a démontré la fragilité des mécanismes d’intervention et l’incapacité des autorités de ce pays à y faire face. Dans le dernier cas, celui du groupe le plus vulnérable, l’on observe une insuffisance de capacités requises pour la conception de tels cadres. La R.C.A en fait partie ; en dépit des conflits politiques récurrents dans ce pays, un comité national de réflexion en vue de la mise en place de cadres institutionnels de prévention et de réduction des risques a été créé par le Premier ministre en juillet 2012.

De plus, bien que prévues dans les plans de prévention des risques, les structures nationales de réduction des risques souffrent d’un appui financier adéquat. Cette insuffisance de financement est due aux choix effectués par les décideurs, choix qui ne traduisent pas des priorités lisibles dans le domaine de la sécurité civile. L’absence de mécanismes dévolus au financement en matière de catastrophe, et l’introduction des sociétés de micro finance et des assurances dans le traitement des risques collectifs tardent à s’illustrer comme des préoccupations de premier plan.

(26)

24 Changements Climatiques, recommande en amont « la création d’un fonds pour la

réduction des risques de catastrophes »24.

II -

L’OBJET

DE

LA

RECHERCHE

Le sujet qui est au cœur de la présente réflexion est la sécurité civile dans les Etats de la C.E.M.A.C.

L’espace géographique sur lequel s’étend cette organisation d’intégration néo-fonctionnaliste couvre six Etats : le Cameroun, la République Centrafricaine, le Congo, le Gabon, la Guinée équatoriale et le Tchad. Les cinq premiers pays ont connu une administration française sous la forme coloniale25. La Guinée Equatoriale quant à elle a été une colonie espagnole jusqu’à son indépendance. Le traité instituant la C.E.M.A.C.26, successeur de l’Union douanière et économique de l’Afrique centrale (ci-après : « U.D.E.A.C »), vise à donner une impulsion nouvelle et décisive au processus d’intégration en Afrique Centrale par une harmonisation accrue des politiques et des législations de ces Etats27.

En préliminaire, l’on notera tout d’abord que la construction économique et les exigences de progrès social vont nécessairement guider les bases de l’Afrique post indépendance, et constituer l’un des volets prioritaires de cette sous-région. Au lendemain des indépendances, les Etats prennent conscience du fait que leur avenir est lié par une organisation dont le socle est la solidarité et la mutualisation des ressources et des efforts. La dominante majeure est donc l’économie, vecteur de progrès.

24

Stratégie Régionale Afrique Centrale pour la Réduction des Risques la Gestion des Catastrophes et l’Adaptation aux Changements Climatiques, Juin 2012, pp. 22. , p. 20.

25

A l’exception du Cameroun, colonie allemande dès 1884, et placé en 1916 sous un double mandat français et britannique par la Société des Nations, puis sous tutelle de ces mêmes puissances par l’ONU.

26

Traité de N'Djamena du 16 mars 1994 instituant la C.E.M.A.C, mise en place lors du sommet de Malabo du 25 juin 1999. Le Traité fondateur de la C.E.M.A.C. et son Additif du 5 juillet 1996 relatif au système institutionnel et juridique de la Communauté a été remplacé par le Traité révisé adopté le 30 janvier 2009 à Libreville.

27

Voir James MOUANGUE KOBILA / Léopold DONFACK SOKENG, « La C.E.M.A.C : à la recherche d'une nouvelle dynamique de l'intégration en Afrique centrale », Annuaire Africain de Droit

(27)

25 La seconde spécificité de cette sous-région est la sécurité et la paix. L’Afrique centrale, est en effet l’une des sous-régions les plus marquées par les conflits armés. Le génocide rwandais de 1994, la guerre civile en République Démocratique du Congo, celle du Congo Brazzaville de 1997, ou encore les instabilités endémiques et les crises récurrentes en République Centrafricaine et au Tchad en sont des illustrations.

Dans un tel contexte, la problématique de la sécurité des personnes et des biens demeure prégnante. La question de la définition du terme de « sécurité civile » s’impose aussitôt comme postulat indispensable pour établir les contours du sujet traité.

Par son intitulé en effet, le sujet qui intéresse ici met en évidence la notion de sécurité civile.

Selon Le Robert, la « sécurité » apparaît d’emblée comme un état d’esprit confiant et tranquille d’une personne qui se croit à l’abri du danger28; elle résulte d’une protection préventive et d’une défense appropriée. La sécurité est alors une

« situation de celui qui est protégé des risques et par extension [une] action visant à protéger contre les risques »29.

Le terme « civile » renvoie à ce « qui concerne les citoyens en tant que

particulier »30. Il s’oppose naturellement à celui de « militaire » et « qualifie l’état de

celui qui n’a pas une profession particulière »31.

Eu égard à ce qui précède, l’expression « sécurité civile » renvoie à l’ensemble des moyens mis en œuvre par un Etat pour protéger ses citoyens, en

28

Le Petit Robert, Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Paris, Le Robert, 2015, pp. 2837. , spéc. 2339.

29

Rémi ROUQUETTE, Dictionnaire du droit administratif, Paris, Le Moniteur, 2002, pp. 891, spéc. p. 739. Th. BALZACQ a souligné la difficulté de définir le terme de sécurité qui, selon lui, comporte de nombreux risques. En effet, « cette difficulté s’explique tout d’abord par le fait que le

concept dispose d’une très grande plasticité sémantique et peut s’appliquer à tous les domaines de la vie sociale. Elle est ensuite liée au constat que la notion est toujours susceptible d’être connotée idéologiquement. Il faut donc prendre en compte le caractère ambivalent du terme, qui explique que les discussions sur la nature et surtout son opérationnalité sont sans fin ». Voir de cet auteur :

« Qu’est-ce que la sécurité nationale ? », La revue internationale et stratégique, n° 52, hiver 2003-2004, pp. 36-37.

30

Rémi ROUQUETTE, idem. , p. 139.

31

(28)

26 temps de paix comme en temps de guerre. Le Vocabulaire juridique appréhende la notion de « sécurité civile » de manière particulièrement large. Il renvoie à la

« prévention des risques de toute nature, et [ à la ] protection des personnes, des biens et de l’environnement contre les accidents , les sinistres et les catastrophes ; désigne à la fois l’objectif de sauvegarde de la société et l’organisation de celle-ci par la préparation et la mise en œuvre des moyens d’intervention et de secours dans le cadre des plans d’organisation »32.

Le souci de protéger les populations a historiquement généré des notions distinctes qui appellent des précisions. Plusieurs concepts ont à cet égard, simultanément ou successivement, fait du chemin au point où un auteur a pu stigmatiser « le désordre des concepts »33. Plus précisément, il sera utile d’en faire une distinction avec les termes voisins tels que la défense passive, la protection civile et la défense civile. La délimitation de ces notions est parfois assez floue « du

fait des finalités et des moyens comparables de ces […] modes d’intervention publique, mais aussi en raison de la rareté de leurs définitions »34. Toutefois, ces éclairages seront balisés autour de la définition que le droit français consacre à la sécurité civile. Pour ce faire l’on remontera le cours de l’histoire :

i - La défense passive est tirée de l’expérience de la première guerre mondiale35. Elle évoque la nécessité de poursuivre une production industrielle en temps de guerre, « avec pour objectif d’organiser la protection de la population et de

préserver les capacités de production industrielle du pays contre les effets de bombardements aériens »36. De ce point de vue, le concept de « défense passive »,

32

Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 9e éd. , 2011, pp. 1095. , p. 943.

33

Vincent DYE, La sécurité civile en France, Paris, PUF, Coll. « Que- sais-je ? », n° 1682, 1995, pp. 127, spéc. p. 23.

34

Michel LAGARDE, « Commentaire de la loi n°87-565 du 22 juillet 1987 relative à l’organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l’incendie et à la prévention des risques majeurs ». Actualité Législative Dalloz, 1988, 4e Cahier, pp. 19-37, spéc. p. 20.

35

En droit français, les fondements juridiques de la défense passive remontent à la loi du 8 avril 1935 portant organisation des mesures de sauvegarde de la population civile, ainsi que de la loi du 11 juillet 1938 relative à l’organisation de la nation pour les temps de guerre.

36

(29)

27 s’oppose à celui de « défense active ». Le terme de « défense passive », renvoie donc à la protection des populations en cas de guerre37.

ii - La substitution du qualificatif de protection civile à celui de défense passive en France, a accompagné le transfert de cette responsabilité au ministère de l’Intérieur. Il traduit l’extension au temps de paix de la notion de protection des populations, réservée jusqu’alors au temps de guerre.

iii - La défense civile a fait l’objet d’une définition législative au Cameroun. L’Ordonnance du 7 janvier 1959 portant organisation générale de la défense civile la présente comme visant non seulement à protéger les populations, mais aussi à les impliquer dans l’effort global de défense contre un éventuel agresseur. La définition du législateur français semble plus complète ; l’article 17 du texte de janvier 1959 dispose en effet que la défense civile est composée de

« l’ensemble des mesures préparées, mises en œuvre ou coordonnées par l’autorité civile, ayant pour objet d’assurer l’ordre public, de protéger les installations et les ressources d’intérêt générales, de permettre la sauvegarde des populations et d’affermir la volonté de défense de la nation »38.

« Proche de la sécurité civile »39, la « protection civile » s’entend de l’

« ensemble des moyens matériels et des règles visant à protéger la population

contre les risques d’accidents autres que résultant de la guerre et à assurer les secours »40.

37

Ce terme référait pour l’essentiel à la prise des mesures de protection en cas de bombardement telles que la mise en place des réseaux de surveillance et d’alerte, la construction d’abris souterrains et le recensement des lieux d’abris ainsi que les mesures d’information et de sensibilisation des populations.

38

Voir Ordonnance [Française] n° 59-147 du 7 janvier 1959 portant organisation générale de la défense.

39

Rémi ROUQUETTE, op. cit. , note n° 29, p. 642.

40

Idem. L’on notera par ailleurs que le terme de « protection » renvoie à l’idée de sauvegarde et de défense et vient du latin « protegere », qui signifie couvrir en avant, autrement dit, mettre à l’abri des dangers éventuels. La protection est selon Gérard CORNU (voir de cet auteur : Association Henri CAPITAN, Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 2011, p. 815.) un ensemble de « précaution qui, […]

(30)

28 Si la proximité des deux notions semble à première vue évidente, le terme de « sécurité civile » n’est pas un synonyme exact du terme «protection civile ». La sécurité civile est une fonction régalienne de l’Etat, tandis que la protection civile désignait avant tout, en France notamment, à la fois cette mission de secours et une association de secouristes (qui possèdent des logos relativement similaires), et dont les mesures de protection civile désignent, avant toute distribution de secours, l’ensemble du dispositif visant à assurer la protection des populations. Mais à l’analyse, les deux notions s’avèrent très voisines. Ce qui peut rendre possible l’utilisation de l’un ou l’autre terme, aussi bien dans la désignation de certains organismes, que dans le vocabulaire courant.

Dans l’analyse de la notion de sécurité civile, Vincent Dye fournit deux raisons à cette mutation sémantique. La première s’inscrit dans le cadre de la recherche permanente de la modernisation des administrations publiques, qui se traduit généralement par le changement d’appellation de ces dernières.

La seconde raison explicative de la substitution de la notion de sécurité civile à celle de protection civile est d’ordre démocratique. Elle renvoie à l’aspiration croissante et légitime des populations à une sécurité renforcée. Mais en réalité, cette hétérogénéité conceptuelle est d’autant plus liée à la diversité des acteurs impliqués dans le domaine de la sécurité civile qu’il pourrait résulter de cette situation une difficulté à appréhender la nature exacte de la sécurité civile et de ses acteurs.

C’est dans cette perspective que, dans le contexte français, la « sécurité » a remplacé la « protection », « la Direction de la Sécurité Civile étant substituée au

service National de la Protection Civile pour afficher la volonté des pouvoirs publics de moderniser le dispositif national »41. La Loi Française du 22 juillet 1987 relative à l’organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l’incendie et à la prévention des risques majeurs, améliore quelque peu la situation en formulant la première définition légale de la sécurité civile. Selon l’article 1er de cette Loi, « la

sécurité civile a pour objet la prévention des risques de toute nature ainsi que la

défendre. Il a pour synonyme protection. Défendre un individu, c’est lui apporter un soutien ou une protection, c’est la résistance à une agression ou à l’adversité.

41

(31)

29

protection de personnes, des biens et de l’environnement contre les accidents, les sinistres et les catastrophes »42. Elle se décompose ainsi en une double mission de prévention et de protection, la seconde étant celle qui, jusqu’à l’intervention de cette loi, était la plus communément admise. L’on parlait alors de « protection » et non pas de « sécurité» civile.

Cette définition de la sécurité civile permet d’apporter des éclairages par rapport au concept de défense civile. Si l’objet et les moyens des deux activités sont semblables, l’on a pu en revanche affirmer que « les missions de la sécurité civile

s’exerçaient principalement au niveau local, alors que la défense civile ressortait de la compétence de l’Etat en raison d’une menace extérieure »43. Pour Michel Lagarde, il s’avère plus conforme à la réalité de considérer que

« les deux notions se recoupent, voir se confondent, qu’en cas de conflit, ‘’ la défense civile devient alors la sécurité civile de crise ‘’ et qu’en définitive la sécurité civile est l’une des composantes essentielles de la défense civile »44.

L’élargissement du champ d’action de la sécurité civile au-delà des personnes et des biens, notamment à l’environnement, témoigne à l’évidence de la volonté de prendre en compte cette préoccupation, devenue majeure dans les politiques publiques. Le législateur français mentionne en effet la protection de l’environnement « contre les accidents, les sinistres et les catastrophes » à côté de la protection des personnes et des biens.

Cette énumération législative n’est pas elle-même sans conséquence, car elle introduit dans le droit positif d’autres notions rattachables à la compréhension de la sécurité civile : il s’agit des termes accident45, sinistre46, risque majeur et surtout catastrophe.

42

L’on soulignera que cet article 1er de la loi de 1987 caractérise la sécurité civile par des termes plutôt statiques (prévention, protection), alors que son essence est l’action, la réponse dynamique et organisée à des événements et à des dysfonctionnements. De même, l’idée de crise n’apparaît pas dans la Loi française de 1987, alors pourtant que c’est sans doute leur aptitude à gérer les situations de cette nature qui qualifie le mieux aujourd’hui les services intervenant dans ces domaines. Voir Vincent DYE, supra, p. 29.

43

Michel LAGARDE, op. cit. , note n° 34. , p. 21.

44

Idem, p. 21.

45

L’accident « est un évènement redouté, soudain, involontaire et imprévu dont les

(32)

30 L’accident renvoie à une intervention courante, les trois autres termes réfèrent quant à eux, à un nombre élevé de victimes et requièrent des moyens exceptionnels. Alors que le risque majeur se définit comme « un risque dont la gravité est celle d’un

accident majeur [et] provoque une situation de crise à laquelle les institutions ne sont pas toujours préparées »47, la catastrophe, selon les Nations Unies, « n’a pas de

définition juridique généralement acceptée en droit international »48. L’on pourrait s’en tenir à la définition de la Convention de Tempéré de 1998. Selon les dispositions de l’article 1, paragraphe 6, la catastrophe est

« une grande perturbation du fonctionnement de la société causant une menace réelle et généralisée à la vie ou à la santé humaines, aux biens ou à l’environnement, que la cause soit un accident, un phénomène naturel ou une activité humaine et qu’il s’agisse d’un évènement soudain ou du résultat de processus complexes se déroulant sur une longue période »49.

Mais l’insertion de l’environnement comme objet de la sécurité civile ne pourrait- elle pas, à terme nuire à la compréhension générale de la sécurité civile ? En tenant compte des préoccupations environnementales, la sécurité civile ne risque-t-elle pas de se diluer dans un champ de compétences quasiment illimité de nos jours, et rendre davantage complexe et délicate les missions des services et des hommes chargés de la mise en œuvre des normes et principes posés par le législateur ?

Les menaces terroristes ajoutent un élément essentiel dans la prévention des risques. Les services de secours peuvent en effet être amenés à intervenir sur les conséquences d’actes terroristes. Ce sont ces évolutions du champ matériel couvert

l’environnement ou la destruction partielle ou totale du système ». Alain DESROCHES / Alain LEROY

/ Jean-François QUARANTA / Frédérique VALLEE, Dictionnaire d’analyse et de gestion des risques,

op. cit. , note n° 15, p.39.

46

Le sinistre « est la survenance d’un risque causant des atteintes importantes à la vie

humaine et/ou à l’environnement et/ou des dégâts matériels importants, » idem, p. 413.

47

Idem, p. 384.

48

Voir, Nations Unies, Assemblée générale, A/CN.4/598. Commission du droit international, soixantième session, Genève, 5 mai- 6 juin et 7 juillet- 8 août 2008, pp. 23. , spéc. p. 17.

49

Convention de Tempéré sur la mise à disposition de ressources de télécommunications pour l’atténuation des effets des catastrophes et pour les opérations de secours en cas de catastrophe de 1998, art. 1, par. 6. Voir également l’Accord de l’A.S.E.A.N sur la gestion des catastrophes et les interventions d’urgence (non entré en vigueur) qui dispose qu’une catastrophe

(33)

31 par le besoin de sécurité qui a conduit le législateur à moderniser la sécurité civile française. En son article 1er, la Loi Française du 13 août 2004 relative à la modernisation de la sécurité civile, présente la sécurité civile comme ayant pour objet

« la prévention des risques de toute nature, l’information et l’alerte des populations ainsi que la protection des personnes, des biens et de l’environnement contre les accidents, les sinistres et les catastrophes par la préparation et la mise en œuvre de mesures et de moyens appropriés relevant de l’Etat, des collectivités territoriales et des autres personnes publiques ou privées ».

Plus précise et novatrice, cette loi a le mérite et l’avantage de placer la protection des populations parmi les missions essentielles des pouvoirs publics et consacre par la même occasion, la diversité des acteurs50 en la matière comme une caractéristique de la sécurité civile. Alors que les grands services publics sont de

facto rattachés à une administration particulière, la sécurité civile, qui relève

incontestablement du service public, ne peut ressortir, aux termes de cette loi, d’un seul département ministériel. Cette diversité s’impose, pensait- on, pour mieux faire face à la pluralité des risques pesant sur la population des sociétés modernes.

Il ressort en revanche - également- de ce texte de 2004 que la sécurité civile est l’affaire de tous. Tout citoyen doit y concourir ou y concourt par son comportement. Une véritable culture de la préparation au risque et à la menace doit être développée. Ce texte définit des orientations qu’il faut imprimer à la conduite de la mission de protection et de secours pour qu’elle réponde aux crises nouvelles et aux attentes de la population, à savoir « la préparation et la mise en œuvre de

mesures et de moyens appropriés », au-delà des dispositions normatives destinées à

améliorer le fonctionnement des services et la situation de leurs personnels.

Deux constatations supplémentaires s’imposent à ce stade. D’une part, cette nouvelle définition volontariste, traduit l’impératif de mobiliser les énergies et les moyens pour obtenir des progrès mesurables dans l’action face aux conséquences des risques de défense et de sécurité civile. D’autre part, elle impose une

50

(34)

32

coordination dépassant les frontières habituelles des services, de leurs attributions et

de leurs prérogatives, pour mieux les faire travailler ensemble.

Toutefois, malgré ces clarifications conceptuelles, la notion n’en demeure pas moins polysémique. Il n’est pas aisé de lui conférer une définition spécifique. Elle demeure ambiguë et générique, et, suscite en dernière analyse, plus de question que de réponses. Jean Viret et Jean-Luc Queyla, relèvent que certaines ambiguïtés demeurent, relativement à la spécificité de la notion de sécurité civile car :

« On a pu croire […] que les trois notions de sécurité civile, de sécurité intérieure et de défense civile étaient complémentaires les unes les autres et pouvaient ainsi être schématisées : à la sécurité intérieure, la protection contre les atteintes aux personnes et aux biens ; à la sécurité civile, la protection contre les sinistres ou catastrophes ; à la défense civile, la protection contre les menaces de tous ordres pouvant peser sur le pays et sa population »51.

Jean Viret et Jean-Luc Queyla en viennent à s’interroger sur le point de savoir si « la défense civile doit […] laisser la place aux notions actuelles de sécurité

intérieure et de sécurité civile »52, ce qui tend à faire rentrer le domaine de « la

protection contre les menaces de tous ordres pouvant peser sur le pays et sa population », qui correspondait à la défense civile, dans le champ de la sécurité

intérieure. Or, comment distinguer la sécurité intérieure de la sécurité civile ?

Le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale53 n’a malheureusement pas levé les incertitudes conceptuelles entourant la notion de sécurité civile. S’il est évident que la notion de sécurité nationale englobe celles de sécurité intérieure et de

51

Jean VIRET / Jean- Luc QUEYLA, op. cit. (note n° 36), p. 118. Michelle LAGARDE a eu à noter sur la différence entre défense civile et sécurité civile « qu’il est certain que les objectifs des

deux activités sont identiques, et leurs moyens souvent confondus, même si l’on a pu affirmer que les missions de la sécurité civile s’exerçaient principalement au niveau local, alors que la défense civile ressortait de la compétence de l’Etat en raison d’une menace extérieure. Il est dès lors plus conforme à la réalité de considérer que, plus que jamais à notre époque, les deux notions se recoupent, voire se confondent, qu’en cas de conflit, la défense civile devient alors la sécurité civile de crise, et qu’en définitive la sécurité civile est l’une des composantes essentielles de la défense civile ». Voir de cet

auteur : Commentaire de la loi n° 87- 565 du 22 juillet 1987 relative à l’organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l’incendie et à la prévention des risques majeurs, Actualité Législative Dalloz, 1988, 4e Cahier, p. 21.

52

Jean VIRET / Jean- Luc QUEYLA, Ibid., p. 119.

53

Défense et sécurité nationale Le livre blanc, Paris, Odile Jacob, La documentation française,

(35)

33 sécurité civile54, le doute persiste par contre sur la place de la sécurité civile par rapport à la sécurité intérieure55.

Dans le cadre de cette étude, le terme consacré sera celui de « sécurité

civile » parce qu’en définitive, il confère une vision pragmatique consistant en une

analyse concrète de la réalité des objectifs du dispositif de sécurité civile applicables aux Etats de la C.E.M.A.C. Le Jeune Pierrick conforte cette position ; il souligne en effet que

« par des mesures de prévention, par des dispositions de protection, par la coordination sur le terrain, ce qui est recherché, ce n’est pas seulement la prévention, ni la protection, ni encore la défense, mais un ensemble qui regroupe la finalité de chacune de ces politiques, à savoir la sécurité civile »56.

Le contenu de la notion de sécurité civile n’en continue pas moins d’évoluer. Le décloisonnement des fonctions civiles et militaires ne devrait pas pour autant aboutir à de confusions. Plus encore, l’effort de définition de la notion voisine de « sécurité nationale » ne saurait se limiter au seul Livre blanc de 200857. Les glissements progressifs de cette notion témoignent tout simplement du souci d’adapter le dispositif de la protection des populations à tous les types de menaces et de faire en sorte que la cohésion de la société soit en toute circonstance assurée. C’est donc sur ces fondamentaux que le raisonnement sera construit. Sous ce

54

Il est rappelé dans le Livre blanc qu’ « au titre de la sécurité nationale, la politique intérieure

et la politique de sécurité civile doivent assurer de façon permanente la protection des populations ». Ibid., p. 62.

55

Jean VIRET / Jean- Luc QUEYLA font observer que « l’ambiguïté vient de ce que, au-delà

de la mention des deux notions, sécurité intérieure et sécurité civile sont tantôt présentées comme constitutif d’une même ‘’ politique ‘’ […] tantôt d’un même ‘’dispositif’’ ». Voir de ces auteurs La sécurité civile en France : organisation et missions, supra.

56

Le Jeune PIERRICK, « Défense, protection et sécurité civile », Revue internationale de Protection Civile, n° 4, décembre 1999.

57

Frédéric COSTE notait que « la sécurité dans le sens international du terme, n’était qu’un

sous-produit de la défense […] Dans ce cadre, la sécurité intérieure était considérée comme l’affaire exclusive des Etats à laquelle chacun d’eux consacrait un système propre hérité de son histoire. Le choix a donc été fait de faire évoluer la signification de la sécurité. De ‘’la sécurité intérieure’’, ‘’limitée et intravertie’’, ‘’résultat de la tranquillité extérieure et domestique et d’une stabilité fruit de l’acceptation de valeurs communes’’, nous sommes passés à une conception ‘’pus globale et forcément extravertie. […] Dans cette perspective, une nation élabore et met en application tous les moyens qui garantiront son existence, son bien-être et sa prospérité. L’utilisation des forces armées n’est alors qu’un des moyens, parmi bien d’autres, d’une telle stratégie ». Voir de cet auteur, « Défense globale, sécurité intérieure, sécurité nationale : quelle distinction ? Quelles articulations ? », in : Etat et sécurité, Cahiers français n° 360, janvier-février 2011, La documentation Française, [pp.

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